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LE MARDI DE LA TROISIÈME SEMAINE DE CARÊME.
La Station est dans l'Eglise de
sainte Pudentienne, petite-fille du sénateur Pudens. Cette vierge illustra Rome chrétienne au II° siècle
par sa piété, sa charité et son zèle à ensevelir les corps des Martyrs. Son
église est bâtie sur l'emplacement de la maison qu'elle habitait avec son pèréet sa sœur sainte Praxède,
maison qui avait été, sous son aïeul, honorée de la présence de saint Pierre.
COLLECTE.
Exaudi nos, omnipotens
et misericors Deus ; et continentiae
salutaris propitius nobis dona concede. Per Christum Dominum nostrum. Amen.
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Exaucez-nous, Dieu tout-puissant et miséricordieux, et
daignez nous accorder le don d'une abstinence si salutaire à nos âmes. Par
Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.
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LEÇON.
Lectio libri
Regum. IV, Cap. IV.
In diebus illis
: Mulier quædam clamabat ad Elisœum Prophetam, dicens: Servus tuus vir meus
mortuus est ; et tu nosti quia servus tuus fuit timens Dominum : et ecce
creditor venit ut tollat duos filios meos ad serviendum sibi.
Cui dixit Elisaeus : Quid vis ut faciam tibi ? Die mihi, quid habes in
domo tua ? At illa respondit : Non habeo ancilla tua quidquam in domo mea,
nisi parum olei, quo ungar. Cui ait : Vade, pete mutuo ab omnibus vicinis
tuis vasa vacua non pauca. Et ingredere, et claude ostium tuum, cum
intrinsecus fueris tu et filii tui : et mitte inde in omnia vasa haec : et
cum plena fuerint, tolles. Ivit itaque mulier, et clausit ostium super se, et
super filios suos : illi offerebant vasa, et illa infundebat. Cumque plena fuissent vasa,
dixit ad filium suum : Affer mihi adhuc
vas. Et ille respondit :
Non habeo. Stetitque oleum. Venit autem illa, et indicavit homini Dei. Et ille : Vade inquit, vende oleum, et redde creditori tuo : tu autem et filii tui vivite de reliquo.
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Lecture du livre des Rois, IV, Chap. IV.
En ces jours-là, une femme s'adressa avec des cris au
prophète Elisée, et lui dit : Mon mari, votre serviteur, est mort ; et vous
savez que votre serviteur était craignant Dieu, et maintenant son créancier
vient pour prendre mes deux fils, et en faire ses esclaves. Elisée lui dit :
Que voulez-vous que je vous fasse ? Dites-moi, qu'avez-vous dans votre
maison? Elle répondit : Votre servante n'a plus dans sa maison qu'un peu
d'huile pour s'en oindre. Il lui dit : Allez, empruntez de tous vos voisins
des vases vides ; puis entrez, fermez votre porte, et quand vous serez au
dedans, vous et vos fils, versez de cette huile dans tous ces vases ; et
quand ils seront pleins, vous les ôterez. Cette femme alla donc et ferma la
porte sur elle et sur ses fils ; ceux-ci lui présentaient les vases, et elle
versait dedans. Lorsque les vases furent pleins, elle dit à son fils :
Apporte-moi encore un vase. Et il répondit : Je n'en ai plus. Et l'huile
s'arrêta. Elle vint donc et rendit compte à l'homme de Dieu. Et il lui dit :
Allez, vendez cette huile, et payez votre créancier : et vivez de ce qui
reste, vous et vos fils.
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Le mystère de cette lecture est
facile à saisir. Le créancier de l'homme est Satan, à qui nos péchés ont donné
sur nous d'immenses droits. Le seul moyen de nous acquitter est l'huile,
c'est-à-dire la miséricorde, dont l'huile est le symbole par sa douceur. «
Heureux ceux qui sont miséricordieux : car ils obtiendront eux-mêmes
miséricorde (1) » En ces jours de salut, préparons donc
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notre réconciliation par notre
empressement à soulager nos frères, joignant l'aumône au jeûne, et pratiquant
les œuvres de miséricorde. Par ce moyen, nous déchirons le cœur de Dieu ; et
nous remettant lui-même notre dette, il enlèvera à Satan le titre qu'il
s'apprêtait à faire valoir contre nous. Profitons de l'exemple de cette femme
de l'Ecriture: c'est loin des regards des hommes qu'elle remplit ses vases de
l'huile mystérieuse; fermons aussi notre porte pour faire le bien ; et « que
notre main gauche ignore ce qu'aura fait notre main droite (1) ». Observons
encore ceci : l'huile ne s'arrête que lorsqu'il n'y a plus de vases à remplir.
Ainsi notre miséricorde envers le prochain doit être proportionnée à nos moyens
d'action. Dieu les connaît, et il ne veut pas que nous restions en deçà de ce
que nous pouvons faire. Soyons donc larges en ce saint temps, et prenons la
résolution de l'être toujours. Quand les ressources matérielles nous
manqueront, soyons encore miséricordieux par nos désirs, par nos instances
auprès des hommes, par nos prières auprès de Dieu.
ÉVANGILE.
Sequentia
sancti Evangelii secundum Matthaeum. Cap. XVIII.
In illo tempore
: Dixit Jesus discipulis
suis : Si peccaverit in te frater tuus, vade, et corripe eum inter te et ipsum solum. Si te audierit, lucratus cris fratrem tuum. Si autem te non audierit, adhibe tecum adhuc unum vel duos, ut in ore duorum vel trium
testium stet omne verbum. Quod si non audierit eos, die Ecclesiae. Si autem Ecclesiam non audierit, sit tibi sicut
ethnicus et publicanus. Amen
dico vobis : quaecumque
alligaveritis super terram,
erunt ligata et in cælo; et quaecumque solveritis super terram, erunt soluta et in cœlo. Iterum dico vobis, quia si duo ex vobis consenserint super terram, de
omni re quameumque petierint, fietillisa Patre meo, qui in coelis est. Ubi
enim sunt duo vel tres congregati in nomine meo, ibi sum in medio corum. Tunc accedens Petrus ad eum, dixit : Domine, quoties peccabit in me frater
meus, et dimittam ei ? Usque septies? Dicit illi Jesus
: Non dico tibi usque septies ; sed usque septuagies septies.
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La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap.
XVIII.
En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Si votre frère
a péché contre vous, allez et le reprenez seul entre vous et lui. S'il vous
écoute, vous aurez gagné votre frère. Mais s'il ne vous écoute pas, prenez
encore avec vous une ou deux personnes, afin que tout soit avéré par la
parole de deux ou trois témoins. Que s'il ne les écoute pas, dites-le à
l'Eglise ; et s'il n'écoute pas l'Eglise, qu'il vous soit comme un païen et
un publicain. En vérité, je vous le
dis, tout ce que vous aurez lié sur la terre, sera lié aussi dans le ciel :
et tout ce que vous aurez délié sur la terre, sera aussi délié dans le ciel.
Je vous le dis encore, si deux d'entre vous se réunissent sur la terre, quoi
que ce soit qu'ils demandent, ils l'obtiendront de mon Père qui est dans les
cieux : car là où deux ou trois sont réunis en mon nom, j'y suis au milieu d'eux.
Pierre alors, s'approchant de lui. lui dit : Seigneur, combien de fois mon
frère péchant contre moi, le lui remettrai-je? Jusqu'à sept fois? Jésus lui
dit : Je ne te dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à septante fois sept
fois.
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La miséricorde que le Seigneur
veut voir en nous ne consiste pas seulement à répandre l'aumône corporelle et
spirituelle dans le sein des malheureux; elle embrasse encore le pardon et
l'oubli des injures. C'est ici que Dieu nous attend pour éprouver la sincérité
de notre conversion. « La mesure dont vous aurez usé envers les autres, dit-il,
sera celle dont on usera envers vous (1). »
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Si nous pardonnons du fond du cœur à nos ennemis, le Père
céleste nous pardonnera sans restriction à nous-mêmes. En ces jours de
réconciliation, efforçons-nous de gagner nos frères, comme dit le
Seigneur; et pour cela, pardonnons, quand bien même il le faudrait faire septante
fois sept fois. Nos rixes d'un jour sur le chemin de l'éternité ne doivent
pas nous faire manquer le terme du voyage. Remettons donc les torts et les
injures, et imitons la conduite de Dieu lui-même à notre égard.
Remarquons encore dans notre
Evangile ces paroles qui sont le fondement de notre espérance, et qui doivent
retentir jusqu'au fond de nos cœurs reconnaissants : Tout ce que vous aurez
délié sur la terre sera délié dans le ciel. Quel nombre immense de pécheurs
vont faire l'expérience de cette heureuse promesse !
Ils confesseront leurs péchés, ils offriront à Dieu l'hommage d'un cœur contrit
et humilié ; et au moment où le prêtre les déliera sur la terre, la main de
Dieu au ciel les dégagera des liens qui les tenaient enchaînés pour les
supplices éternels.
Enfin, n'oublions pas non plus
cette autre parole qui est liée à la précédente : Si quelqu'un n'écoute pas l’Eglise,
qu'il vous soit comme un païen et un publicain. Qu'est-ce donc que cette
Eglise dont il est parlé ici? Des hommes auxquels Jésus-Christ a dit : Qui
vous écoute m'écoute ; qui vous méprise me méprise ; des hommes par la
bouche desquels la vérité, qui seule peut sauver, arrive à l'oreille du
Chrétien ; des hommes qui seuls sur la terre peuvent réconcilier le pécheur
avec Dieu, lui fermer l'enfer et lui ouvrir le ciel. Devons-nous donc nous
étonner après cela que le Sauveur, qui les a voulus pour ses intermédiaires
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entre lui et les hommes, menace de
regarder comme un païen, comme un homme sans baptême, celui qui ne reconnaît
pas leur autorité? En dehors de leur enseignement, point de vérité révélée ; en
dehors des Sacrements qu'ils administrent, point de salut; en dehors de la
soumission aux lois spirituelles qu'ils imposent, point d'espérance en
Jésus-Christ.
Humiliate capita
vestra Deo.
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Humiliez vos têtes devant Dieu.
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ORAISON.
Tua nos,
Domine, protectione defende : et ab omni semper iniquitate custodi. Per
Christum Dominum nostrum. Amen.
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Défendez-nous, Seigneur, par votre protection, et
gardez-nous sans cesse de toute iniquité. Par Jésus-Christ notre Seigneur.
Amen.
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Demandons à la Liturgie grecque quelques accents de pénitence,pour les offrira Dieu aujourd'hui. Elle nous présente cette
Hymne de saint André de Crète :
(In V Feria V Hebdomadae.)
Audivit
Propheta adventum tuum, Domine, et timuit : quod esses nasciturus ex Virgine
et mundo exhibendus ; dixitque : Audivi auditum tuum et timui. Sit
gloria, Domine, tuæ potentiæ.
Ne despexeris
tua opera, ac tuum figmentum, juste judex, neglexeris : quiinquam peccavi
solus, tu o clemens, qua homo supra hominem omnem, potestatem tamen
dimittendi peccata, qua es Dominas universorum, habes.
Prope est
finis, o anima, prope est, nec es sollicita ? non te preparas ? tempus urget,
exsurge : prope est judex in januis : velut somnium, velut flos, vita
decurrit ; ut quid vero frustra conturbamur ?
Resipisce, o
anima mea : actus quos es operata, recogita, eosque ob oculos statue, atque
ab oculis lacrymarum stillas funde. Die palam Christo actiones tuas et
cogitationes, et justificare.
Non fuerit in
vita peccatum, actiove, aut malitia, quam ego, Salvator, intellectu et
cogitatione atque proposito non peccaverim, affectu, mentis judicio, et
actione, ut nemo unquam gravius peccaverit.
Inde etiam
damnationis incurri reatum ; inde, miser ego, conscientia propria judice, qua
nihil mundus violentius habet, causa cecidi : tu judex et redemptor,
cognitorque meus, parce et libera, salvumque
fac servum tuum.
Tempus vitae
meae exiguum est, laboribusque et molestia plenum : verum pœnitentem suscipe,
et revoca agnoscentem. Ne
fiam alieni possessio et esca : tu ipse Salvator, mei miserere.
Jam grandiloquum
ago, et corde temere audacem. Ne me condemnes cum Pharisœo : imo Publicani, qui solus misericors sis, humilitatem concede : tu me, juste judex, huic adcense.
Ipse mihi
factus sum idolum, vitiis corrumpens animam : verum pœnitentem suscipe, et revoca agnoscentem. Ne
efficiar alieno in possessionem et escam : tu ipse Salvator, mei miserere.
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Le Prophète ayant appris votre futur avènement, Seigneur :
que vous deviez naître d'une Vierge et vous montrer au monde, fut saisi de
crainte, et il dit : J'ai entendu le bruit de votre arrivée, et je me suis
effrayé. Gloire soit à votre puissance, Seigneur !
Juste Juge, ne méprisez pas l'ouvrage de vos mains ; ne
dédaignez pas votre œuvre. Quoique j'aie moi seul péché, vous, ô Dieu
clément, supérieur à tous les hommes dans votre humanité, vous avez encore le
pouvoir de remettre les péchés, étant le Seigneur de tous.
La fin s'approche, ô mon âme ! elle est tout près, et tu
ne t'inquiètes pas ? tu ne te prépares pas r Le temps presse, lève-toi : le
juge est a la porte. La vie passe comme un songe, se flétrit comme une fleur
: pourquoi donc nos vaines agitations ?
Rentre en toi-même, ô mon âme ! repasse tes œuvres,
remets-les devant tes veux, verse d'abondantes larmes. Raconte au Christ tes
actions et tes pensées, et deviens juste.
O Sauveur ! il n'est point dans la vie de l'homme de
péchés, d'actions mauvaises que je n'aie commises, dans la pensée du moins et
dans l'intention ; personne n'a été plus coupable que moi dans l'affection au
mal, dans les jugements de l'esprit et dans les œuvres.
C'est pourquoi j'ai encouru la damnation ; c'est pourquoi,
malheureux, je suis tombé avec justice, et ma conscience est pour moi un juge
plus terrible que tout ce que renferme le monde. O juge ! ô rédempteur ! tu
me connais ; pardonne, délivre et sauve ton serviteur.
Le temps de ma vie est court, plein de fatigues et
d'ennuis ; reçois en moi un vrai pénitent ; rappelle près de toi celui qui te
reconnaît. Que je ne sois point la possession et la proie de l'étranger ; tu
es mon Sauveur, aie pitié de moi.
Je suis encore trop parleur, trop audacieux dans la
témérité de mon cœur ; ne me condamne pas avec le Pharisien, toi qui seul es
miséricordieux ; donne-moi l'humilité du Publicain. Juste juge, place-moi
avec lui.
J'ai été ma propre idole ; j'ai corrompu mon âme par le
péché ; reçois en moi un vrai pénitent ; rappelle près de toi celui qui te
reconnaît; que je ne sois point la possession et la proie de l'étranger : tu
es encore mon Sauveur, aie pitié de moi.
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