CHAPITRE VI

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SAMEDI IV
PROPRE DES SAINTS

CHAPITRE VI. PRATIQUE DE LA SAINTE COMMUNION AU TEMPS DU CAREME.

 

De toutes les œuvres par lesquelles le chrétien peut  sanctifier le Carême, la plus agréable à Dieu est l'assistance au divin Sacrifice, dans lequel est offerte la victime du Salut. Mais le pécheur devra-t-il, parce qu'il s'en reconnaît plus indigne que jamais, s'abstenir de participer à la chair vivifiante et purifiante du cette Victime universelle? Telle n'est pas l'intention du Rédempteur qui est descendu du ciel, non pour nous juger, mais pour nous sauver (1). Il sait combien est longue et austère la voie qui nous reste à parcourir jusqu'au jour où nous nous reposerons avec lui dans les joies de sa résurrection. Il a pitié de nous, il craint de nous voir défaillir dans la route (2) ; et, pour cela, il nous offre l'aliment divin qui donne aux âmes lumière et force, et qui les soutient dans le labeur. Nous sentons le besoin de nous purifier davantage; allons donc, d'un cœur humble et contrit, à Celui qui est venu pour rendre à nos âmes leur  beauté  première. Souvenons-nous, en tout temps, de cet avertissement solennel qu'il a daigné nous donner : Si vous ne mangez la chair du Fils de rhomme, vous n'aurez point la vie en vous (3).

 

1. Johan, III,  17. — 2. Matth. XV, 32.—3 Johan. VI, 54

 

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Si donc le péché ne règne plus en nous, si nous l'avons effacé par une vraie contrition et une confession sincère, rendues efficaces par l'absolution du prêtre, quelque grandes que nous apparaissent nos infidélités, ne nous éloignons pas du Pain de Vie (1) ; c'est pour nous que la table du Seigneur est dressée. Si nous sentons que les liens du péché nous captivent encore ; si, en nous considérant nous-mêmes au flambeau de la Vérité qui luit maintenant à nos yeux, nous découvrons dans nos âmes des taches que les préjugés mondains et une dangereuse mollesse nous avaient jusqu'ici empêché d'apercevoir, cherchons promptement la piscine du salut ; et quand nous aurons fait notre paix avec le Dieu des miséricordes, hâtons-nous de venir recevoir le gage de notre réconciliation.

Allons donc à la table sainte, en ces jours de la sainte Quarantaine, avec le sentiment profond de notre indignité. Plus d'une fois, peut-être, nous y sommes-nous présentés, dans le passé, avec une familiarité trop grande, faute de comprendre assez notre néant, notre misère et la souveraine sainteté de Celui qui s'unit ainsi à l'homme pécheur. Désormais, notre cœur se rendra plus de justice ; et. réunissant dans un même sentiment l'humilité et la confiance, il répétera avec une entière sincérité ces paroles que l'Eglise emprunte au Centenier de l'Evangile, et qu'elle nous invite à redire, au moment où elle nous donne le Pain de vie : Seigneur, je ne suis pas digne que vous entriez en moi. mais dites seulement une parole, et mon âme sera guérie !

 

Nous  formulerons  ici,  selon notre usage, les

 

1. Johan. VI, 35.

 

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Actes pour la préparation à la Communion dans ce saint temps, en faveur des personnes qui sentiraient le besoin d'être aidées en cette manière ; nous ajouterons, pour complément, les Actes de l'Action de grâces.

 

AVANT LA COMMUNION.

 

ACTE  DE  FOI.

 

La grâce insigne que vous m'avez accordée, ô mon Dieu, de me faire connaître les plaies de mon âme, m'a révélé toute la profondeur de mes maux. J'ai compris que je n'étais que ténèbres, et quel besoin j'avais de votre divine lumière. Mais si le flambeau de la foi a éclairé pour moi les tristes ombres de ma nature, il m'a fait voir aussi tout ce que votre amour pour une créature ingrate vous a fait entreprendre, dans le but de la relever et de la sauver. C'est pour moi que vous avez pris naissance dans une chair mortelle ; c'est pour moi que vous accomplissez en ce moment, dans le désert, un jeûne si rigoureux ; c'est pour moi que bientôt vous donnerez votre sang sur l'arbre de la croix : tels sont les prodiges de votre bonté que vous m'ordonnez de croire. Je les crois, ô mon Dieu, avec autant de soumission que de reconnaissance. Mais je crois aussi d'une foi non moins vive que dans peu a'instants, par le plus ineffable des mystères, vous allez venir vous unir à moi dans votre sacrement. Votre parole est formelle ; malgré le cri de mon indignité, je m'abaisse devant votre souveraine raison. Il n'y a rien de commun entre le Dieu de toute sainteté et ma misère coupable; cependant, vous dites que c'est vous-même qui venez à moi. Je tremble, mais je crois en vous, ô Vérité éternelle ! Je confesse que votre amour pour moi est infini, et que rien ne saurait l'arrêter, quand il a résolu de se communiquer à une humble et infidèle créature.

 

ACTE D'HUMILITÉ.

 

Lorsque naguère je vous contemplais, ô mon Dieu ! descendant des splendeurs de votre gloire au sein

 

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d'une fille des hommes, unissant à votre divine substance notre faible et mortelle nature, naissant enfin dans la crèche abandonnée d'une pauvre étable, de tels abaissements d'un Dieu, en même temps qu'ils touchaient mon cœur, me révélaient toute la profondeur de mon néant. Je sentais mieux quelle distance infinie sépare la créature de son Créateur, et je confessais avec bonheur ma bassesse, à la vue des miracles de votre amour. Aujourd'hui, ô mon Sauveur, ce n'est plus seulement la faiblesse de ma nature que je reconnais en moi; le néant n'est pas coupable de n'être que le néant; mais ce que je considère avec effroi, c'est le mal qui m'a si longtemps dominé, qui règne encore par ses suites, par les tendances qu'il m'a inspirées, par la faiblesse avec laquelle je le combats. Adam, après son péché, alla se cacher, comme pour fuir vos regards ; et vous m'appelez en ce moment, non pour prononcer contre moi une trop juste sentence, mais pour me donner la plus grande marque de votre amour, pour m'unira vous. Et vous êtes, ô mon Dieu, la sainteté même ! Je me rends à votre appel, car vous êtes mon maître, et nul ne saurait vous résister ; mais je m'humilie et m'anéantis devant votre majesté offensée, la suppliant de considérer que c'est par ses ordres seulement que j'ose approcher d'elle.

 

ACTE DE  CONTRITION.

 

Mais que me servirait de reconnaître, ô mon Sauveur, la grandeur et le nombre de mes fautes, si mon cœur n'était pas dans la résolution de s'en détacher pour jamais ? Vous voulez vous réconcilier avec votre ennemi, le presser contre votre cœur ; et il se contenterait de reconnaître l'honneur que vous lui faites, sans rompre avec la malheureuse cause qui lui fit encourir votre disgrâce et le mit en hostilité avec vous ! Il n'en peut être ainsi, ô mon Dieu 1 Je ne chercherai pas, comme mon premier père, à fuir inutilement l'œil de votre justice ; comme le Prodigue, je me lève et je vais vers mon Père ; comme Madeleine, j'ose entrer dans la salle du festin ; je me rends tout tremblant à l'invitation de votre amour. Mais mon cœur a renoncé sincèrement au péché ; je hais, je déteste cet ennemi de votre gloire et de mon bonheur.

 

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Désormais, je veux l'éviter et le poursuivre en moi sans ménagement. Je romps avec cette mollesse qui engourdissait ma volonté, avec cette indifférence calculée qui endormait ma conscience, avec ces habitudes dangereuses qui entraînaient mon âme loin de vous. Ne rejetez pas, ô mon Dieu, un cœur contrit et humilié.

 

ACTE D'AMOUR.

 

Tel est, ô mon Sauveur, votre amour pour nous en ce monde, que, selon votre consolante promesse, vous n'êtes pas venu pour juger, mais pour sauver. Je ne m'acquitterais donc pas avec vous, en ce moment, si je n'avais à vous offrir que cette crainte si salutaire qui m'a ramené à vous, que cette confusion si légitime qui porte le pécheur à trembler en votre présence. C'est dans votre amour que vous venez me visiter. Le sacrement qui va m'unir à vous est le sacrement de votre amour. Vous l'avez dit, ô Pasteur plein de tendresse : C'est celui à qui on a remis davantage qui aime le plus son bienfaiteur. Il faut donc que mon cœur ose vous aimer, qu'il vous aime avec plénitude, que le souvenir de ses infidélités accroisse de plus en plus en lui le besoin et le sentiment de votre amour. Aidez-le, ô mon Dieu, rassurez-le; chassez ses terreurs, et faites-vous sentir à lui. C'est parce qu'il vous a craint, qu'il s'est tourné vers vous ; s'il vous aime, il vous demeurera fidèle.

O Marie, refuge du pécheur, aidez mon cœur à aimer celui qui est votre fils et notre frère. Saints Anges, qui vivez éternellement de cet amour qui ne s'est jamais éteint en vous, souvenez-vous qu'il m'a créé, comme vous-mêmes, pour l'aimer. Saints et Saintes, par l'amour dont il vous enivre au ciel, daignez vous souvenir de moi, et préparer mon cœur à s'unir à lui.

 

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APRÈS LA COMMUNION.

 

ACTE D'ADORATION.

 

Vous êtes en moi, Majesté de mon Dieu ! Vous résidez en ce moment dans le cœur d'un pécheur : c'est là votre temple, votre trône, le lieu de votre repos. Que ferai-je pour vous adorer dignement, vous qui avez daigné descendre jusque dans l'abime de ma bassesse et de ma misère? Les Esprits bienheureux se voilent la face devant vous ; vos Saints déposent à vos pieds leurs couronnes immortelles; et moi, qui suis encore dans la condition de pécheur, puis-je m'anéantir assez devant vous, qui êtes infini en puissance, en sagesse, en bonté ? Cette âme, dans laquelle vous résidez en ce moment, osa se mesurer avec vous ; souvent elle eut l'audace de vous désobéir et d'enfreindre vos volontés ; et vous venez en elle, et vous y faites descendre toutes vos grandeurs ! Recevez, ô mon Dieu ! l'hommage qu'elle vous offre en cette heure où elle succombe sous le poids de l'insigne honneur que vous lui faites. Oui, mon Dieu, je vous adore, je vous reconnais pour le souverain Etre, pour l'auteur et Je conservateur de toutes choses, pour mon Maître absolu ; je confesse avec bonheur ma dépendance, et j'ose vous offrir mon humble service.

 

ACTE DE  REMERCIEMENT.

 

Vous êtes grand, ô mon Dieu ! mais vous êtes aussi plein de bonté envers votre humble créature. Votre présence en moi n'est pas seulement un trait de cette puissance qui se glorifie de la manière qu'elle veut; elle est un nouveau gage de votre amour pour moi. Vous venez vous unir à mon âme, la rassurer, la rémunérer, lui apporter tous les biens. Oh ! qui me donnera de sentir un tel bienfait, de vous en remercier dignement ? Je ne le puis faire, ô mon Dieu ! car, dans ma faiblesse, je suis incapable de mesurer toute l'étendue de votre amour, tout le besoin que j'avais de votre présence. Et si je viens à considérer les moyens qui sont à ma disposition pour reconnaître la faveur que vous me faites, je tombe accablé sous mon

 

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impuissance. Cependant vous voulez, ô mon Dieu, que ce cœur, tout faible qu'il est, vous rende grâces; vous prenez plaisir à recevoir l'hommage de^ sa ché-tive reconnaissance. Agréez-le donc; mon âme tout entière vous l'offre, en vous suppliant de lui révéler de plus en plus l'immensité de .vos dons, et de prendre pitié de son insuffisance.

 

ACTE d'AMOUR.

 

Mais je ne puis m'acquitter avec vous que par l'amour, ô mon souverain bien ! Vous m'avez aimé, vous m'aimez ; il faut que je vous aime. Vous m'avez supporté, vous m'avez pardonné, vous venez de me combler d'honneur et de richesse : l'amour vous a fait accomplir tous ces prodiges, et c'est mon amour que vous demandez en retour du vôtre. La reconnaissance ne suffit pas; vous voulez être aimé. Si je jette un regard sur le passé, ces longs jours qui s'ecoule-rent loin de vous dans la désobéissance se présentent à ma pensée, et il me semble que je devrais fuir vos bontés. Mais où irai-je, ô mon Dieu, que je ne vous y porte avec moi, maintenant que vous êtes établi au centre de mon âme? Je resterai donc; et, comme si jamais je ne vous eusse trahi, je réunirai toutes les forces de mon cœur, pour vous dire que je vous aime, que votre divine charité a rassuré mon âme, que cette âme est à vous, qu'elle vous préfère à tout, qu'elle met désormais toute sa joie, tout son bonheur, à vous complaire, à faire vos volontés.

 

ACTE D'OFFRANDE.

 

Je sais, ô mon Dieu, que ce que vous demandez de moi, ce n'est pas l'effusion passagère d'un cœur touché de vos bontés. Vous m avez aimé de toute éternité, vous m'avez gardé votre prédilection, alors même que  je ne vous servais p; s. Tant de  lumières que vous m'avez données sur l'état de mon âme, tant e protection contre votre propre justice, tant de miséricorde à me pardonner, tant d'amour a vous incliner vers moi en ce moment; toutes ces œuvres de votre droite n'avaient qu'un seul but : celui de m'at-tacher à vous, de m'amener à vivre enfin pour vous. Ce but, vous avez voulu  l'atteindre, en me donnant

 

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aujourd'hui le précieux gage de votre amour. Vous avez dit, en parlant de ce don ineffable : De même que je vis par mon Père, ainsi celui qui mange ma chair vivra par moi. Vous êtes désormais, ô Pain vivant descendu du ciel, le principe de ma vie : elle est donc à vous, plus que jamais. Je vous la donne; je vous dévoue mon âme, mon corps, mes facultés, mon existence tout entière. Dirigez-moi, réglez-moi : je m'abandonne à vous. Je suis aveugle, mais votre lumière me conduira ; je suis faible, mais votre force me soutiendra ; je suis inconstant, mais votre fermeté me maintiendra. Je me repose de tout sur votre miséricorde, qui ne manque jamais à ceux qui espèrent en vous.

O Marie ! gardez en moi le fruit de cette visite de votre divin fils. Anges de Dieu, montrez-vous jaloux de conserver intacte la demeure que votre Maître a daigné habiter. Saints et Saintes de Dieu, priez pour le pécheur auquel il a donné un tel gage de réconciliation.

 

 

 

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