LE XI SEPTEMBRE. QUATRIÈME JOUR DANS L'OCTAVE DE LA
NATIVITÉ.
DIMITTE me, jam enim ascendit
aurora ; laissez-moi, car déjà l'aurore monte
(1) :» c'est la parole qui mit fin, sur les bords du torrent, au duel de
l'Ange et du patriarche. Aurore bénie, qui triomphe
de Dieu ! Combien fut longue cette nuit durant laquelle l'humanité, que
figurait Jacob, avait lutté par ses supplications et ses pleurs (2) ! Depuis le
péché, l'Ange des justices fermait l'accès de la vraie terre des promesses ;
c'était lui que l'homme, pèlerin d'une patrie perdue, rencontrait partout se
dressant sur la route dans l'inexorable résistance de ses revendications.
Comment l'inflexible a-t-il fléchi ? Comment, si supérieur en son être
spirituel à notre nature boiteuse, parle-t-il le premier de cesser la lutte et
s'avoue-t-il vaincu ?
C'est que, pour l'Ange comme pour
Dieu, la force est dans la lumière. C'est que, restée jusqu'ici dans la nuit
profonde, la terre a soudain renvoyé aux cieux plus de splendeurs que n'en
déversent tous les Chérubins sur les Dominations, les Vertus, les Puissances,
les Principautés, près desquelles l'homme était si petit naguère. C'est enfin
que dans l'aube naissante, qui déjà le subjugue, l'Ange des justices prévoit le soleil
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même, le Soleil de justice qui se
levant du sein de l'humanité va répondre pour elle. L'homme n'est plus un paria
pour l'Ange; c'est Israël, le fort contre Dieu (1). Traiter avec lui
n'est plus déroger ; céder devant lui n'est point une humiliation : l’aurore
monte.
Soyez bénie, ô vous dont la
radieuse innocence relève jusqu'au trône de Dieu notre race proscrite. Alliés
des Anges, nos adversaires d'autrefois, nous ne serons plus qu'une armée dont
vous serez la Reine.
Aux honneurs rendus à la Reine du
monde, l'Eglise en ce jour associe deux frères que la mort pour le Christ éleva
sous Valérien de la condition servile aux premiers rangs de la noblesse des
cieux. Du cimetière de Saint-Hermès où ils furent
déposés sous des tissus d'or, Protus était depuis
plus de mille ans rentré triomphalement dans les murs de la Ville éternelle,
lorsque, en l'année 1845, la découverte des ossements calcinés d'Hyacinthe en
sa tombe primitive vint faire époque dans l'histoire des cimetières souterrains
et de l'archéologie chrétienne.
ORAISON.
Puisse, Seigneur, nous
exciter au bien la précieuse confession de vos bienheureux Martyrs Protus et Hyacinthe ; puisse leur pieuse intercession nous
couvrir toujours. Par Jésus-Christ.
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Le X° siècle et l'abbaye de
Saint-Gall nous donnent cette Séquence de facture antique pour chanter la
naissance de Marie.
SÉQUENCE.
Chantons la solennité de ce
jour
Qui vit paraître dans le monde la perle incomparable, la noble Marie
Sortie de souche royale,
illustre Mère de Dieu.
Les temps anciens avaient
prédit qu'elle germerait, petite branche, de la tige de Jessé,
Et qu'une fleur éclose de sa
racine mettrait fin aux crimes, aux perturbations de la terre.
Ses vieux aïeux, la bouche
pleine de prophéties, attestaient au nom du ciel sa venue future ; d'augustes
oracles à l'avance l'avaient chantée.
Toujours vierge, exemple
unique, elle devait enfanter un fils conçu spirituellement qui guérirait le mal
du monde.
C'est un nom glorieux que le
sien, issue de l'auguste lignée de David.
Elle est du sang de Salomon,
mais sa sagesse est plus grande.
Née d'une race de rois
fameux,
Elle est la très chaste mère d'un roi qui régnera
toujours,
Qui fut avant les temps et
les siècles.
Il avait uni les Anges et les
hommes dans une paix tranquille;
Implorons tous pour nous
l'aide
De celui par qui a pris fin
si terrible discorde.
Qu'elle nous obtienne ce
secours désiré la Mère dont l'allégresse de cette journée proclame la sainteté
;
Qu'elle nous rende propice à
jamais celui qui naquit d'elle,
Pour qu'il nous fasse remise
entière,
Pour que nous recevions de sa
clémence l'éternelle couronne.
O vous qui êtes maintenant la
souveraine des cieux, touchée par la prière de vos serviteurs, écoutez-les
d'une oreille bienveillante ;
Et couvrez-nous de votre
protection vigilante, en attendant de nous faire nous aussi monter au céleste
royaume.