La Toussaint devrait être une des plus grandes de fête de l’année, mais
habituellement, nous ressentons une sorte de retenue. L’environnement est
difficile, n’est-ce pas ? Nous faisons pour ainsi dire le compte de ceux que
nous avons connus, bon nombre de visages défilent dans notre mémoire. Les
arrière-grands- parents peut-être, les grands-parents qui ont dû nous apprendre
comment aller vers Jésus, puis les parents, ça fait plus mal. Parfois et
inévitablement des proches des contemporains, des enfants, c’est insupportable,
fête très délicate, ambigüe ? Pourtant elle ne l’est pas. Il y a en
perspective, le ciel et la sainteté, la vie avec Dieu. Rêvons-nous, s’agit-il
d’imagination qui travaille un peu trop ? Les saints, c’est loin, Jésus deux
mille ans déjà. Et notre foi ?
Si parfois des signes nous sont donnés, c’est que nous en avons besoin, nous
avons besoin d’encouragements. En avez-vous rencontrés de vivants, des saints
officiels ? Oui, Jean XXIII, le bienheureux Paul VI, Jean-Paul II, des
rencontres qui laissent une marque dans nos vies. Ce sont les saints officiels,
mais n’y en a-t-il pas d’autres ? L’Apocalypse nous a dit tout à l’heure, qu’au
dernier jour, ce serait une foule innombrable. « J'ai vu une foule immense, que
nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et
langues. », dit saint Jean. Voilà de quoi calmer les inquiétudes de ceux qui
pensent s’ennuyer au ciel, d’autant que le courant va passer avec tout le monde…
Et quel courant ? Je vous laisse donner vous-mêmes la réponse.
Pourquoi mentionner les béatitudes aujourd’hui? Parce qu’elles sont la clef
de notre participation au mystère du Christ. Elles figurent parmi les paroles
qui scandalisent le plus dans l’Evangile. Elles sont incompréhensibles. Les
critères du monde en feraient plutôt l’échelle des parfaits perdants, or c’est
tout le contraire.
Pour décrire dans le Royaume ceux qui les ont vécues, on imagine volontiers
un de ces tableaux de Fra Angelico où les saints ressemblent par leurs couleurs
et leurs vêtements aux fleurs de certains jardins bien cultivés, pourquoi pas
les pétales entourant le cœur d’or d’une marguerite, de la rose ou que sais-je
pour ceux sont « fleurs ». Chacun manifestera la manière dont il a vécu les
béatitudes, sa spécialité. Pourquoi ne pas utiliser non plus la comparaison de
la lumière de certaines rosaces dans les cathédrales.
Ecoutons le bienheureux
Paul VI le 10 juin 1969 au Parc de la Grange, à Genève. « Les saints, à
chaque point du temps et de l’espace où ils vivent, nous apportent comme un
rayon particulier, détaché de la sainteté infinie de Jésus. La vie de chacun
d’eux est pour l’époque où il vit comme une réalisation existentielle et
immédiate d’une des béatitudes du Sermon sur la Montagne. L’histoire de votre
grand Saint national est typique à cet égard. Saint Nicolas de Fluë a vécu pour
son époque la béatitude … de ceux dont le Sauveur a dit: Bienheureux les
pacifiques, car ils seront appelés enfants de Dieu. »
Vivre les béatitudes est donc fondamental, il le répétera mais à des
Africains en 1975. Ne sommes-nous pas tous appelés à le suivre, de toutes races,
peuples et langues ?
« Construisez sur le roc, c'est-à-dire, fondez résolument votre attitude sur
I'Evangile, sur la soif de justice, sur la paix, sur l'amour, en un mot sur les
béatitudes, dont la charte nous est donnée par saint Matthieu… A long terme,
seule cette fidélité à l’Evangile permettra de surmonter les difficultés, de
sauver vos âmes d'abord, de préparer l'Eglise de demain ».
Concélébration pour l’Année sainte 1975
Ceux qui entourent l’Agneau ont sauvé leurs âmes en lavant leur
vêtement dans son sang, ce sont les baptisés qui ont été bénéficiaires de la
miséricorde. « Nous ne pouvons entrer au Ciel que grâce au sang de l’Agneau,
grâce au sang du Christ, nous disait le pape François l’an passé. C’est
justement le sang du Christ qui nous a justifiés, qui nous a ouvert les portes
du Ciel. Et si aujourd’hui nous rappelons ces frères et sœurs qui nous ont
précédés dans la vie et qui sont au Ciel, c’est parce qu’ils ont été lavés dans
le sang de l’Agneau. Voilà notre espérance : l’espérance du sang du Christ ! Une
espérance qui ne déçoit pas. Si nous marchons dans la vie avec le Seigneur, Il
ne déçoit jamais ! »
Où nous conduit cette marche ? A la cité sainte aux douze portes où siège
l’Agneau et où Dieu sera tout en tous. Nous parviendrons au sommet de la
montagne des béatitudes, non pas seuls, mais ensemble en communauté humaine et
familiale, en communauté religieuse en Eglise. C’est le type d’escalade par
excellence qu’on ne peut entreprendre seuls. L’Eglise a reçu les moyens de nous
y faire parvenir avec les sacrements qui sont en quelque sorte équipement,
nourriture, médicament. Il y a aussi le sacrement du frère, l’Eglise est
communion.
Devrions-nous nous inquiéter ? Désirer le salut de toute son âme et de toute
sa force, désirer la vie éternelle est un signe de santé spirituelle. Dieu
s’inquiète de nous, certes, mais il ne nous considère pas comme de la matière
inerte ou de ces robots répétitifs qui font des merveilles en ne demeurant que
des prolongements de leur créateur. Il compte sur nous et sur notre liberté, sur
la capacité d’aimer dont il nous a dotés. N’est-ce pas cela qui nous fait
ressembler à Dieu ? Il veut plus que des collaborateurs et même des amis, il
veut des fils qui lui ressemblent et ressemblent à son Fils aîné. N’est-il pas
notre Père ? Devrions-nous nous inquiéter ? Quel est le contraire des
béatitudes ? Une échelle inverse du mal, mais bien plus encore, l’absence de
goût pour le bonheur et le ciel. Si cela nous prenait un jour, là, nous devrions
nous inquiéter plus que tout. Ce serait en quelque sorte l’électrocardiogramme
du bonheur qui nous lancerait un signal d’alerte . A quel service d’urgence
recourir ?
La prière, l’Ecriture, surtout les Evangiles de la Résurrection… et
Notre-Dame. Ce que disait
saint Jean-Paul II à la Toussaint 2000 , lui qui est presque le pape de la
Toussaint est valable aujourd’hui et toujours : La Très Sainte Vierge Marie,
vécut une communion unique avec le Verbe incarné, en se confiant sans réserve à
son dessein salvifique. C'est pourquoi il lui fut donné d'écouter, à l'avance
par rapport au "discours sur la montagne", la béatitude qui résume toutes les
autres: "Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été
dit de la part du Seigneur" (Lc 1, 45). Notre-Dame ravivez notre foi. Amen.
Début de la page
2 novembre 2014
Commémoration de tous les fidèles défunts
Lectures de la messe du jour
1ère lecture : La vie de tout homme est dans la main de Dieu (Sg 2,23;
3,1-6.9)
2ème lecture : Passer par la mort avec le Christ pour vivre avec lui (Rm 6, 3-9)
Evangile : Voici l'heure d'entrer dans la vie (Jn 5, 24-29)
Frères et Sœurs,
Vous vous interrogez certainement sur le fait qu’un
dimanche, l’Eglise fasse une exception aux usages liturgiques habituels qui
marquent une priorité absolue à la célébration du jour du Seigneur, jour de la
Résurrection. Habituellement, en effet, même la fête d’un saint qui n’a pas rang
de Solennité, cède le pas au dimanche. Il y aura encore une exception pour la
fête de la Dédicace de Saint Jean de Latran, la cathédrale du Pape, dimanche
prochain. La commémoration de tous les fidèles défunts n’est qu’une mémoire dite
obligatoire et le calendrier nous demande de la célébrer aujourd’hui. Nous
pouvons en conclure qu’il en va ainsi pour une raison importante : c’est la
prière pour les défunts.
Pourquoi prier pour eux ?
A l’arrière-plan nous avons l’enseignement de l’Eglise sur
le Purgatoire qui figure aux numéros 1030 à 1032 du catéchisme. Il est basé sur
deux passages de l’Ecriture, à savoir Matthieu 12,32 Et si quelqu’un dit une
parole contre le Fils de l’homme, cela lui sera pardonné ; mais si quelqu’un
parle contre l’Esprit Saint, cela ne lui sera pas pardonné, ni en ce monde-ci,
ni dans le monde à venir. Le péché contre l’Esprit-Saint est une résistance
fautive, entêtée et opiniâtre à la grâce, un refus absolu de la miséricorde. A
partir du moment où toute maîtrise nous échappe sur le cours des événements, le
bon sens minimal, nécessiterait un peu d’humilité, « Si je me suis trompé et si
j’ai mal agi, Seigneur, je te demande pardon ». Saint Grégoire le Grand,
s’appuyant sur saint Augustin en conclut que certaines fautes peuvent être
pardonnées « dans le siècle futur » (S. Grégoire le Grand, dial. 4, 39).
L’autre passage de l’Ecriture est la prière pour les morts
tombés au combat sous Judas Macchabée (12,46). Il mentionne explicitement la foi
en la résurrection, mais aussi qu’on avait trouvé des objets consacrés aux
idoles dans leurs vêtements et Judas fit accomplir pour eux un sacrifice
expiatoire.
Voilà pour ces fondements scripturaires. Si le Moyen-Age
nous a laissé un descriptif du Purgatoire dans sa divine comédie de l’image
qu’on s’en faisait à l’époque, nous avons avant tout des définitions aux
conciles de Florence et de Trente.
Il n’est je pense pas nécessaire d’approfondir en ce
dimanche, mais il est toute de même utile de rappeler que ce sont les moines de
Cluny et notamment saint Odilon 5ème Abbé de Cluny, qui furent à
l’origine de cette célébration liturgique. Saint Jean-Paul II a écrit une
magnifique lettre à Mgr Séguy évêque de Mâcon et Cluny pour le millénaire de
l’instauration de cette fête en 1998. Ce fut un des grands labeurs des moines du
moyen-âge que de prier pour les défunts depuis cette époque et avant déjà. Mais
l’institution de la fête avait concerné, si mes souvenirs sont bons, les moines
d’abord, qui ont un besoin particulier d’être bénéficiaires du pardon et de la
miséricorde.
La question qui court ensuite, est celle-ci : mais depuis
le concile Vatican II, tout cela c’est fini. C’est une erreur, même si l’accent
est mis avant tout sur l’espérance et la miséricorde.
A témoin le catéchisme et son numéro 1030 Ceux qui
meurent dans la grâce et l’amitié de Dieu, mais imparfaitement purifiés, bien
qu’assurés de leur salut éternel, souffrent après leur mort une purification,
afin d’obtenir la sainteté nécessaires pour entrer dans la joie du ciel.
Le magistère est clair sur ce sujet. Le bienheureux Paul VI
mentionne le purgatoire dans sa profession de foi : « Nous croyons que les âmes
de tous ceux qui meurent dans la grâce du Christ, soit qu'elles aient encore à
être purifiées au purgatoire, soit que dès l'instant où elles quittent leur
corps, Jésus les prenne au paradis comme il a fait pour le bon larron, sont le
peuple de Dieu dans l'au-delà de la mort, laquelle sera définitivement vaincue
le jour de la résurrection où ces âmes seront réunies à leur corps.» Pour saint
Jean-Paul II, il n’y a aucun doute selon ses lettres, catéchisme et catéchèse des
audiences générales, comme je vous l’ai mentionné. Benoît XVI n’est nullement en
reste. Son encyclique Spe Salvi, « dans l'espérance nous avons été sauvés », a
un long développement sur le purgatoire.
D’ailleurs y sommes-nous opposés personnellement ? La
manière la plus facile de pousser à une réaction est de prendre la température
de l’opinion sur les responsables officiels des guerres et des malheurs du 20ème
siècle et du nôtre, Hitler, Staline, Mao, et ceux du libéralisme qu’on ne
mentionne pas, sans compter les mafias et trafiquants de toutes sortes.
Voilà que
vacillent les positions les plus fermes. Même l’enfer vu du dehors ne paraît
plus insupportable et le concept bipolaire commun actuel se
brise : le Paradis ou
Dieu n’existe pas.
Benoît XVI avant d’aborder la question du purgatoire,
mentionne ce type de cas extrêmes.
Tous, de ceux qui sont parvenus au plus haut
degré de sainteté à ceux qui font craindre le pire,
tous auront à s’interroger
sur leur fidélité au Christ. Ceux qui passeront
par un temps de purification, ont la certitude bienheureuse
de leur salut, sous son regard d’amour
ils percevront qu’il
leur faut encore un peu de patience et de perfectionnement. Chez la plupart
des hommes – comme nous pouvons le penser – demeure présente au plus profond de
leur être une ultime ouverture intérieure pour la vérité, pour l'amour, pour
Dieu. Mais, dans les choix concrets de vie, elle est recouverte depuis toujours
de nouveaux compromis avec le mal. dit Benoît XVI. Ce sont à ces compromis
qu’il faut dire non définitivement et qu’il faut rejeter.
Il poursuit en argumentant d’après Saint Paul :
certaines choses édifiées peuvent brûler totalement; pour se sauver il faut
traverser soi-même le « feu » afin de devenir définitivement capable de Dieu et
de pouvoir prendre place à la table du banquet nuptial éternel. La prière de
l’Eglise est utile à ce moment-là. Mais n’est-il pas bon de rappeler combien
est peut-être plus important encore le recours préalable aux sacrements.
Rencontrer le Seigneur régulièrement dans l’Eucharistie et dans le sacrement de
réconciliation… le faisons-nous ? Désirons-nous le salut de toute notre âme ?
Lorsque nous nous sentons gravement atteint dans notre santé et même en danger,
n’est-il pas de première urgence de rencontrer le Seigneur dans ses sacrements :
Réconciliation, Onction des malades et Eucharistie. Il y a également ce qu’on
appelle l’indulgence plénière donnée au moment de la mort et qu’on peut obtenir
pour les autres. Nous avons cette possibilité par exemple en nous rendant sur
les tombes de nos défunts, et en priant pour eux, si nous sommes en état de
grâce. Tout cela, tous ces moyens c’est une main tendue de la part du Seigneur,
un aspect de la miséricorde.
Et Marie ? Près de la croix tu étais devenue la mère
des croyants. Dans cette foi, qui était aussi, dans l'obscurité du Samedi Saint,
certitude de l'espérance, tu es allée à la rencontre du matin de Pâques. La joie
de la résurrection a touché ton cœur… Tu demeures au milieu des disciples comme
leur Mère, comme Mère de l'espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère,
enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin
vers son règne! Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre
route! Amen.
Début de la page
+ PAX
23 novembre 2014
- Notre Seigneur Jésus Christ Roi de l'Univers
1ère lecture : Dieu, roi et berger d'Israël, jugera son peuple (Ez 34,
11-12.15-17)
Parole du Seigneur Dieu : Maintenant, j'irai moi-même à la recherche de mes
brebis, et je veillerai sur elles. Comme un berger veille sur les brebis de son
troupeau quand elles sont di...
Psaume : 22, 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6
R/ Le Seigneur est mon berger :
rien ne saurait me manquer.
Le Seigneur est mon berger : je ne manque de rien. Sur des prés d'herbe fraîche,
il me fait reposer. Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre ; il
me conduit par le juste chemin pour...
2ème lecture : La royauté universelle du Fils (1Co 15, 20-26.28)
Le Christ est ressuscité d'entre les morts, pour être parmi les morts le premier
ressuscité. Car, la mort étant venue par un homme, c'est par un homme aussi que
vient la ...
Evangile : La venue du Fils de l'homme, pasteur, roi et juge de l'univers (Mt
25, 31-46)
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Quand le Fils de l'homme viendra
dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de
gloire....
Frères et Sœurs,
La célébration du Christ Roi de l’Univers éveille des
sentiments mélangés. Vous le savez, cette fête avait été instituée par le pape
Pie XI en 1925 accompagnée de la
lettre encyclique « Quas Primas ». Il était conduit par une grande
inquiétude sur l’évolution de la société. Vous vous souvenez des grandes
lignes : Le laïcisme teigneux s’était bien installé dans l’hexagone, le
communisme avait pris les commandes en Russie, et une société industrielle
s’était instaurée entraînant déracinements culturels et une nouvelle pauvreté,
les idéologies nationalistes à racines radicalement non-chrétienne étaient en
état de mûrissement avancé. Quelle réaction possible sinon un retour à la
royauté sociale du Christ pour que puisse s’instaurer sa paix. « Il apparaît
ainsi clairement qu'il n'y a de paix du Christ que par le règne du Christ, et
que le moyen le plus efficace de travailler au rétablissement de la paix est de
restaurer le règne du Christ. », avait-il dans sa précédente encyclique (De la
paix du Christ dans le règne de Dieu). Le Christ-Roi devait être célébré le
dernier dimanche d’octobre précédent la Toussaint. Vous avez remarqué qu’à la
suite du Concile Vatican II, la fête a été déplacée au dernier jour de l’année
liturgique. L’accent était donc mis auparavant sur la reconnaissance nécessaire
et l’instauration de la royauté sociale du Christ. On pourrait concevoir cela
comme une sorte de restauration. Un commentaire résume l’évolution qui suivit :
« Alors qu’au départ cette fête est une protestation contre la perte du pouvoir
de l’Eglise sur la société, au risque de la présenter comme une force sociale
parmi d’autres, les changements d’ordre liturgique soulignent l’orientation
pascale de cette fête et le caractère eschatologique de la royauté du Christ.
Dans le Christ, c’est la création toute entière, dans son chemin historique, qui
est appelée à entrer dans le Royaume. » Il est cependant souligné que cela ne
signifie pas qu’il faille négliger de faire passer le Christ dans la vie
sociale. L’enseignement de la doctrine sociale de l’Eglise a une importance et
une force dont sont conscients ceux qui prennent la peine de s’y intéresser
autrement que par le bêtisier médiatique. Y renoncer pousserait à un
subjectivisme abusif dont les conséquences sont déjà trop visibles dans notre
société mue par l’ultralibéralisme et le relativisme. Dieu s’est incarné en
Jésus Christ pour transformer ce monde et lui donner en nous, la capacité de
voir son créateur. Il veut devenir tout en tous. Il a voulu devenir roi, mais
pas à la manière du monde.
Nous ne sommes plus guère habitués à l’idée d’un roi. Quant
à un prince-évêque… On a entendu récemment qu’un cardinal et archevêque au
Burkina Faso avait refusé de devenir président même de transition, en raison des
obligations du droit canonique et par bon sens. Dans nos esprits, ce mode de
gouvernement relève d’un exercice archaïque du pouvoir dont il reste encore
quelques reliques, il est vrai. Un roi personnifiait pour ainsi dire l’Etat et
l’autorité de celui-ci. Il était le chef incontesté de son armée, avait au temps
jadis un droit de vie et de mort sur ses sujets et les biens qui se trouvaient
sur son territoire lui appartenaient. Il était la source ultime du droit.
C’était une sorte de médiateur investi de pouvoirs au point qu’on le divinisait
ou le disait fils de Dieu. N’est-on pas allé jusqu’à parler de droit divin au
grand siècle. Il se devait d’inspirer une terreur sacrée, mais il était aussi le
défenseur de son peuple. Cependant ce n’était qu’à contre-cœur que Dieu avait
accédé au désir de son Peuple de lui donner un roi. David, pécheur, mais modèle
du roi selon le cœur de Dieu et deuxième roi d’Israël a commencé par être un
berger courageux avant de recevoir l’onction. Dans l’Ecriture elle faisait de
celui qui la recevait, quelqu’un d’à part, comme un prêtre.
Jésus a refusé le titre de roi selon la conception de son
époque parce que sa royauté n’est pas de ce monde. Il dira devant Pilate : « Tu
as raison, je suis roi, mais mon Royaume n’est pas de ce monde ». Il a voulu
prendre d’autres moyens que ceux d’un roi terrestre pour manifester sa qualité
de roi et remplir sa mission seul. « La
royauté du Christ, disait Benoît XVI, est une révélation et une mise
en œuvre de celle de Dieu le Père, qui gouverne toute chose avec amour et avec
justice. Le Père a confié au Fils la mission de donner la vie éternelle aux
hommes en les aimant jusqu'au sacrifice suprême, et en même temps, il lui a
conféré le pouvoir de les juger, puisqu'il s'est fait le Fils de l'homme, en
tout semblable à nous (cf. Jn 5, 21-22.26-27). » Il n’a envoyé personne
combattre à sa place et défaire son dernier ennemi, la mort. Les moyens qui lui
donnaient la capacité de montrer qui est Dieu en vérité sont en opposition à
ceux sur lesquels nous comptons, par leur apparente inefficacité : La croix,
l’humiliation, la souffrance. Ils n’auraient aucun sens s’ils ne révélaient
l’amour et la nature de Dieu, sa toute-puissance. Qui est Dieu ? Dieu est amour.
Il est un Dieu en trois personnes unies par un amour qui ne peut être comparé à
aucun autre et qui est source de vie. La résurrection de Jésus témoigne de la
toute-puissance de l’amour de Dieu.
A la fin des temps, s’opère un ultime et bien réel
discernement basé sur la charité. Comment pourras-tu dire que tu as aimé Dieu
que tu ne voyais pas, si tu n’as pas aimé ton prochain que tu voyais. Si
l’amour du prochain reste lettre morte aujourd’hui, si nous ne portons pas de
fruit, c’est que nous sommes morts dans notre cœur et avons besoin d’un cœur
nouveau et d’un esprit nouveau. Nous avons besoin que la joie de l’Evangile
nous soit annoncée à nouveau. Nous avons besoin d’apprendre à aimer é nouveau.
Nous ne sommes pas des esprits dans un corps, mais nous sommes pour ainsi
composés de matière et d’esprit. Aimer de manière humaine, cela ne peut que se
faire maintenant, comme Jésus, avec Lui et en Lui, avec son aide et sa grâce.
« Que son royaume, disait Jean-Paul II, soit toujours plus en nous. Donnons-lui
en échange l'amour auquel il nous a appelés - en Lui aimons toujours plus la
dignité de chaque homme ! »
La Royauté du Christ n’est pas une royauté dominatrice,
égoïste et fermée. Elle est souveraine, certes, mais parce que rien ne peut
éteindre l’amour de Dieu pour nous, sinon notre refus. « Le Christ est
ressuscité d'entre les morts, pour être parmi les morts le premier ressuscité…
Quand tout sera sous le pouvoir du Fils, il se mettra lui-même sous le pouvoir
du Père qui lui aura tout soumis, et ainsi, Dieu sera tout en tous. »
Aux côtés de Jésus, Roi de l'univers, nous contemplons
Marie, la Mère du Roi, que nous invoquons pour cette raison comme Reine du Ciel
et de la Terre. Puisse-t-Elle nous aider à faire de notre vie un cantique de
louange et de fidélité à Dieu, saint et miséricordieux. Amen.
Début de la page
+ PAX
1er Dimanche de l'Avent Année - B - 30
Novembre 2014
1ère lecture : « Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais ! » (Is 63,
16b-17.19b ; 64, 2b-7)
Psaume : 79 (80), 2ac.3bc, 15-16a, 18-19
2ème lecture : Nous attendons de voir se révéler notre Seigneur Jésus Christ (1
Co 1, 3-9)
Evangile : « Veillez, car vous ne savez pas quand vient le maître de la maison »
(Mc 13, 33-37)
Frères et Sœurs,
Le Seigneur dans l’Evangile d’aujourd’hui, a utilisé à
quatre reprises, le mot éveillé ou veiller « gregore » (et autres formes) en
grec. Vous aurez reconnu le prénom de Grégoire, cher aux moines.
C’est un signal fort, en ce premier dimanche de l’Avent,
que cette incitation à la veille. Le diacre et le prêtre dans la liturgie de
saint Jean Chrysostome demandent à l’assistance d’être attentifs aux lectures
avant de commencer à les lire « Soyons attentifs ». C’est à une attention
particulière que nous sommes invités à ce moment. Aujourd’hui, ça l’est, non
seulement parce que nous entendons pour la première fois dans la lecture
publique, les lectures selon la nouvelle traduction liturgique (peut-être
avez-vous détectés quelques différences), mais parce que le Seigneur vient vers
nous et nous demande une grande attention. Il la demande parce que se joue un
moment grave dans l’histoire humaine. Dieu vient à notre rencontre, Dieu vient
nous visiter. Vous vous souvenez que la liturgie de l’Avent se divise en deux
périodes, la première avant le 17 décembre nous invite à la vigilance, car nous
ne savons pas quand le Fils de l’homme reviendra à la fin des temps. Si nous
célébrerons sa naissance à Noël, nous devons aussi prier pour sa venue dans le
cœur des hommes maintenant et penser à son retour glorieux à la fin des temps.
Jésus peu avant sa passion nous a demandé de veiller, ce ne peut être
qu’important. Il le fera encore durant la nuit même qui la précède, reprochant à
ses Apôtres de ne pas avoir pu veiller une heure avec lui. Il dit à Pierre :
« Simon, tu dors ! Tu n’as pas eu la force de veiller seulement une heure ?
38Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation ; l’esprit est ardent, mais
la chair est faible. » Puis vient le temps marqué, celui du combat qu’il
mène presque seul, avec Jean et quelques femmes. Pour les autres disciples,
c’est le temps de dormir, il n’y a plus rien à faire jusqu’à l’accomplissement
de ce qui est juste selon Dieu.
Tout cela ne se serait-il passé qu’une seule fois dans le
temps autrefois ? Ne serions-nous plus l’argile que le Père façonne ? Ne
sommes-nous pas appelés à devenir tous l’ouvrage de sa main comme le dit le
prophète Isaïe ?
C’est le contraire dans le propos de saint Paul : Le
témoignage rendu au Christ s’est établi fermement parmi vous. Ainsi, aucun
don de grâce ne vous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre
Seigneur Jésus Christ. C’est lui qui vous fera tenir fermement jusqu’au
bout. Cela ne peut signifier qu’une chose : même s’il a remporté la
victoire la plus totale, la mission du Christ se poursuit en nous.
Le pape François a comparé l’Europe à une grand-mère à
Strasbourg. La mission du du Christ ne se réalise-t-elle pas par elles,
et par les grand-pères ? L’histoire nous fait souvent mal au cœur. En voyant le
pape François à Sainte-Sophie, dans l’ancienne Constantinople alors qu’il y
priait silencieusement et discrètement , regardant
vers la Vierge, cela n’a pu m’empêcher de ressentir la douleur de la disparition
de la foi là et dans le voisinage de ce grand pays. Mais chez nous ?
Quelle attitude prendre? Le pessimisme? Le Christ
n’est-il pas en train de préparer sa venue dans le cœur des hommes, de nos
enfants, de nos petits enfants ? Si internet et la connaissance librement et en
surabondance disponible enlevant presque toute peine
apparemment pour chercher et trouver ne suffisent pas,
n’est-ce pas parce qu’ils ont besoin de témoins vivants ?
Vous préparez à rencontrer le Christ peut-être demain, alors
dites leur que vous l'aimez et croyez en la résurrection.
Je vous ai cité tout à l’heure le nom de Grégoire, Grégoire
le Grand. Il vous dit certainement quelque chose. Quoi de plus approprié
come nom pour un évêque qui doit être le surveillant,
mais aussi le veilleur. Mgr Dagens, évêque émérite d’Angoulême, avait écrit sa
thèse en 1975, sur ce saint cher aux moines. Un des membres de son jury lui
avait demandé ce qu’il avait appris de ses recherches et de son œuvre. Il avait
répondu sans hésiter : "L’espérance chrétienne en
des temps d’épreuves." Il est vrai que celui qui est considéré aussi comme
le dernier pape de l’antiquité avait de quoi méditer. L’ancien monde s’en allait
à grande vitesse, comme de vieux murs qui croulent. Pour aider à la naissance du
nouveau monde, il avait envoyé des moines missionnaires en Grande-Bretagne et
avait aussi été à l’écoute de ce que lui disait le moine irlandais Colomban. Il
lui avait écrit en employant pour la première fois l’expression « totius
Europae - de toute l’Europe », en référence à la présence de l’Église sur le
continent.
Grégoire le veilleur appartenait aux plus anciennes
familles patriciennes de Rome dont il avait été le préfet. Il tournait son
regard non vers le passé en le regrettant, mais vers l’avenir. Il était veilleur
et éveilleur, attentif à cette nouvelle Europe qui naissait avec de nouveaux
peuples auxquels il fallait transmettre la foi. Vous me direz, mais quel rapport
avec nous ? Je suppose qu’avec un pape argentin et en descendant un peu en
ville, en voyant les nouvelles constructions qui s’élèvent, les changements dans
nos communautés… En regardant la manière dont vivent les plus jeunes
générations, ce qu’elles apprennent, en vous intéressant aux nouvelles
techniques qui vous explorent ou vous espionnent, vous
secondent beaucoup aussi, vous percevez quelque chose. Les changements
culturels et réels sont patents, même dans notre petit univers. On aime, ou on
aime moins, on s’interroge sur la qualité de la vie, une technicisation qui
déshumanise parfois. Mais voilà, nous ne pouvons en rester au comptage des
moineaux et des mésanges qui viennent visiter nos fenêtres, ou à déplacer notre
chaise un peu plus loin que l’ombre du dernier building venu.
Il y a naturellement une consolation et de l’aide qui nous
sont annoncés. Mgr Dagens parlait de saint Grégoire comme d’un grand témoin du
travail inlassable de Dieu au milieu des bouleversements de l’histoire. Cela
signifie que c’est lui qui agit, lui qui revient
toujours jusqu’au dernier jour, par son Esprit. Nous ne sommes pas seuls.
L’Église, disait hier le Pape François, est née de la
Pentecôte, reçoit en consigne le feu de l’Esprit Saint, qui ne remplit pas tant
la tête d’idées (qu’on enferme dans la consigne de la gare de ses bonnes
intentions), mais incendie le cœur ; elle est investie du vent de l’Esprit qui
ne transmet pas un pouvoir, mais habilite à un service d’amour, à un langage que
chacun est en mesure de comprendre. C’est à lui que nous avons à demander la
grâce de veiller lorsque c’est le temps de veiller, et de sortir lorsque c’est
le temps de Dieu. Il est là, toujours avec nous. Il nous réveille !
« Voici que la Vierge, image de l’Eglise est enceinte par
l’action de l’Esprit, elle enfantera un fils, et elle l’appellera du nom
d’Emmanuel ». Viens Seigneur Jésus, Amen !
Début de la page
Sainte Catherine de Sienne
; La
Bible de la Liturgie