XVII DÉCEMBRE. COMMENCEMENT DES
GRANDES ANTIENNES.
L'Eglise ouvre aujourd'hui la série
septénaire des jours qui précèdent la Vigile de Noël, et qui sont célèbres dans
la Liturgie sous le nom de Féries majeures. L'Office ordinaire de
l'Avent prend plus de solennité ; les Antiennes des Psaumes, à Laudes et aux
Heures du jour, sont propres au temps et ont un rapport direct avec le grand
Avènement. Tous les jours, à Vêpres, on chante une Antienne solennelle qui est
un cri vers le Messie, et dans laquelle on lui donne chaque jour quelqu'un des
titres qui lui sont attribués dans
l'Ecriture.
Le nombre de ces Antiennes, qu'on
appelle vulgairement les O de l'Avent, parce qu'elles commencent toutes par
celte exclamation, est de sept dans l'Eglise romaine, une pour chacune des sept
Féries majeures, et elles s'adressent toutes à Jésus-Christ. D'autres
Eglises, au moyen âge, en ajoutèrent deux autres : une à la Sainte Vierge, O
Virgo Virginum ! et une à l'Ange Gabriel, O Gabriel ! ou encore à saint Thomas, dont la fête tombe dans le cours
des Fériés majeures. Cette dernière commence ainsi : O Thomas Didyme (1)
!
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Il y eut même des Eglises qui portèrent jusqu'à douze le
nombre des grandes Antiennes, en ajoutant aux neuf dont nous venons de parler,
trois autres, savoir : une au Christ, O Rex pacifice! une seconde à la
Sainte Vierge, O mundi Domina! et enfin une dernière en manière d'apostrophe à Jérusalem, O
Hierusalem !
L'instant choisi pour faire
entendre ce sublime appel à la charité du Fils de Dieu, est l'heure des Vêpres,
parce que c'est sur le Soir du monde, vergente
mundi vespere, que le
Messie est venu. On les chante à Magnificat, pour marquer que le Sauveur que
nous attendons nous viendra par Marie. On les chante deux fois, avant et après
le Cantique, comme dans les fêtes Doubles, en signe de plus grande solennité ;
et même l'usage antique de plusieurs Eglises était de les chanter trois fois,
savoir : avant le Cantique lui-même, avant Gloria Patri, et après Sicut erat. Enfin, ces admirables Antiennes,
qui contiennent toute la moelle de la Liturgie de l'Avent, sont ornées d'un
chant plein de gravité et de mélodie ; et les diverses Eglises ont retenu l'usage
de les accompagner d'une pompe toute particulière, dont les démonstrations
toujours expressives varient suivant les lieux. Entrons dans l'esprit de
l'Eglise et recueillons-nous, afin de nous unir, dans toute la plénitude de
notre cœur, à la sainte Eglise, lorsqu'elle fait entendre à son Epoux ces
dernières et tendres invitations, auxquelles il se rend enfin.
PREMIÈRE ANTIENNE.
O Sapientia,
quae ex ore Altissimi prodiisti, attingens a fine usque ad finem
fortiter, suaviterque disponens omnia : veni ad docendum nos viam prudentiae.
|
O Sagesse, qui êtes
sortie de la bouche du Très-Haut , qui
atteignez d'une extrémité à l'autre, et disposez toutes choses avec force et
douceur : venez nous apprendre les voies de la prudence.
|
O Sagesse incréée qui bientôt
allez vous rendre visible au monde, qu'il apparaît bien en ce moment que vous
disposez toutes choses ! Voici que, par votre divine permission, vient d'émaner
un Edit de l'empereur Auguste pour opérer le dénombrement de l'univers. Chacun
des citoyens de l'Empire doit se faire enregistrer dans sa ville d'origine. Le
prince croit dans son orgueil avoir ébranlé à son profit l'espèce humaine tout
entière. Les hommes s'agitent par millions sur le globe, et traversent en tous
sens l'immense monde romain; ils pensent obéir à un homme, et c'est à Dieu
qu'ils obéissent. Toute cette grande agitation n'a qu'un but : c'est d'amener à
Bethléhem un homme et une femme qui ont leur humble
demeure dans Nazareth de Galilée ; afin que cette femme inconnue des hommes et
chérie du ciel, étant arrivée au terme du neuvième mois depuis la conception de
son fils, enfante à Bethléhem ce fils dont le
Prophète a dit : « Sa sortie est dès les jours de l'éternité ; ô Bethléhem ! tu n'es pas pas la moindre entre les mille cités de Jacob ; car il
sortira aussi de toi. » O Sagesse divine ! que
vous êtes forte, pour arriver ainsi à vos fins d'une manière invincible
quoique cachée aux hommes ! que vous êtes douce, pour
ne faire néanmoins aucune violence à leur liberté! mais
aussi, que vous êtes paternelle dans votre prévoyance pour nos besoins ! Vous
choisissez Bethléhem pour y naître, parce que Bethléhem signifie la Maison du Pain. Vous nous montrez par
là que
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vous voulez être notre Pain,
notre nourriture, notre aliment de vie. Nourris d'un Dieu, nous ne mourrons
plus désormais. O Sagesse du Père, Pain vivant descendu du ciel, venez bientôt
en nous, afin que nous approchions de vous, et que nous soyons
illuminés de votre éclat ; et donnez-nous cette prudence qui conduit au
salut.
PRIERE POUR LE TEMPS DE L’AVENT.
(Bréviaire Mozarabe, IVe Dimanche de l’Avent, Oraison.)
O Christ, Fils de Dieu, né
d'une Vierge en ce monde, vous qui ébranlez les royaumes par la terreur de
votre Nativité, et contraignez les rois à l'admiration : donnez-nous votre
crainte qui est le commencement de la sagesse ; afin que nous y puissions
fructifier et vous présenter en hommage un fruit de paix. Vous qui, pour
appeler les nations, êtes arrivé avec la rapidité d'un fleuve, venant naître
sur la terre pour la conversion des pécheurs, montrez-nous le don de votre
grâce, afin que toute frayeur étant bannie, nous vous suivions toujours dans le
chaste amour d'une intime charité. Amen.