PIERRE ET PAUL I
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GUERRIC
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NATIVITÉ V
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PURIFICATION I
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CARÊME I
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SAINT BENOIT III
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ANNONCIATION III
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ROGATIONS
ASCENSION
PENTECOTE I
PENTECOTE II
JEAN-BAPTISTE I
JEAN-BAPTISTE II
JEAN-BAPTISTE III
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PIERRE ET PAUL I
PIERRE ET PAUL II
CANTIQUE III
ASSOMPTION I
ASSOMPTION II
ASSOMPTION III
ASSOMPTION IV
NATIVITÉ DE MARIE I
NATIVITÉ DE MARIE II
TOUSSAINT
CANTIQUE

PREMIER SERMON POUR LA FÊTE DES SAINTS APOTRES PIERRE ET PAUL.

1. « Et j'ai répondu, » s'écrie Zacharie, « et j'ai dit à l'ange qui parlait en moi: que signifient ces deux oliviers placés à droite et à gauche du chandelier? Ce sont, répondit-il, les deux enfants de l'huile de la splendeur, qui assistent devant le dominateur de toute la terre (Zach. IV, 11). »Le Prophète avait compris ce que signifiaient ce chandelier d'or massif et les sept lumières qui brillaient dessus; nous-mêmes, nous ne pouvons avoir aucun doute à cet égard, puisque c'est par cette lumière que nous voyons la lumière. En faisant voir le reste, elle ne permet pas qu'on la méconnaisse, mais elle dit en se rendant témoignage : « Je sais la lumière du inonde (Joan. VIII, 12). » Ce personnage est lumière à raison de la divinité, chandelier à cause de l'humanité. Il est d'or massif, non pas seulement doré: parce que si l'or signifie la divinité, la sagesse on ta charité, Jésus-Christ est tout cela, non point par participation mais substantiellement. Pour nous, étant par nature de plomb ou plutôt d'argile, par la participation que nous avons avec lui en recevant de sa grâce, nous ne sommes pas or ou mélangé d'or, c'est tout au plus si nous sommes dorés. Les sept flammes qui brillent sur lui sont les sept esprits, les sept yeux du Seigneur qui parcourent la terre entière. Renseigné sur ce point, le Prophète demande quels sont ces deux oliviers, et il entend l'ange qui parlait en lui, répondre: « Ce sont les deux enfants de l'huile de la splendeur, qui assistent devant le dominateur de toute la terre. » Que chacun interprète ces paroles comme il le voudra ou le pourra, selon sa manière de voir. qu'on y voie soit Enoch et Elie qui vivent en secret dans le sein de Dieu; soit Moïse et Elie qui apparurent avec le Sauveur sur la montagne de la transfiguration: soit les deux ordres de ceux qui ont prêché, dans l'ancien et. dans le nouveau Testament, placés, ceux de « l'ancien, » à gauche, à cause des promesses temporelles qui y furent faites, ceux du « nouveau, » à droite à cause des assurances qu'il donne pour l'éternité. Pour moi, toute application qui ne s'écarte pas de la règle de la foi ou ne s'éloigne pas trop sensiblement du contexte de ce passage, je la reçois, je la vénère, je l'embrasse.

2. Sauf interprétation meilleure, je crois qu'on peut voir en ce lieu, saint Pierre et saint Paul; je trouverais même dépourvue de raison, toute autre explication qu'on voudrait en donner aujourd'hui, puisque l'Eglise, dans le monde entier, ne chante ou ne pratique rien autre chose que ce qui se rapporte à la louange de ceux qui furent ses Pères et ses docteurs. Bien qu'on puisse appliquer ces paroles à d'autres sujets, je crois que c'est à ces apôtres qu'elles conviennent surtout, soit parce qu'ils apparaissent au Prophète comme deux oliviers autour du candélabre, soit parce que l'ange les déclare les deux fils de l'huile de la splendeur. Et ces deux parties de phrase se commentent l'une par l'autre, l'explication de l'ange élucide la vision de Zacharie, en sorte qu'ils sont oliviers parce qu'ils sont fils de l'huile de la splendeur, et ils sont autour du candélabre parce qu'ils sont auprès du Seigneur. En effet, parce qu'ils furent régénérés par l'huile du Saint-Esprit, ils fleurissent encore aujourd'hui et donnent leurs fruits comme un olivier fertile, dans la maison du Seigneur; que la gentilité si longtemps stérile, et aux fruits amers, leur rende grâce parce qu'ils donnent à l'olivier sauvage qui a été greffé sur eux le suc de leur graisse et de leur douceur, et que sinon d'eux, du moins par eux, il arrive qu'elle donne à profusion, dans tout l'univers, des fruits si abondants et si précieux.

3. Pour vous, mes frères, qui n'avez qu'une même fortune et une même maison, ainsi qu'un cœur et qu'une âme, pour vous, donc, mes frères, vous devez vous réjouir plus spécialement en ces saints apôtres, parce que vous avez tiré de leur racine, non-seulement le suc de la foi, mais encore la forme de votre vie et l'exemplaire de votre profession. Si vous êtes les rejetons des oliviers, vous êtes, vous aussi, les fils de l'huile, les fils de l'oint, le Christ de Dieu, et on lui dira de vous, lorsque aujourd'hui vous vous approcherez de l'autel : «Vos fils sont comme les tiges de l'olivier, ils sont rangés autour de votre table (Psalm. LXXVII, 3). » O rejeton des nobles oliviers ! ô tige généreuse d'arbres si fertiles et si gras ! souviens-toi toujours, je t'en conjure, de la souche d'où tu es sorti, de la racine d'où tu as germé, que jamais la stérilité dans les œuvres, que jamais l'amertume dans tes mœurs ne te convainque d'avoir dégénéré, et, ce qu'à Dieu ne plaise, te fasse jeter au feu, à cause de ton inutilité. Prends garde à cette marque des temps malheureux, dont tu te souviens, et qui a été annoncée à l'avance : « Le champ de l'olivier mentira et les champs ne porteront pas de nourriture (Sabac. III, 17). » Tu as deux choses surtout à éviter, de ne pas devenir par la tiédeur comme un olivier qui laisse tomber ses fleurs, comme on le voit dans le Prophète, ne donnant pas les fleurs que tu promettais dans les commencement de ton noviciat; ou, si tu en produis, de ne point les perdre par orgueil, en sorte que Jérémie te dise : « Le Seigneur t'a appelée olivier gras, fertile et admirable de beauté (Jerem. XI, 16) ; » mais, hélas ! « au son de la plainte qui s'est fait entendre, une grande colère s'est enflammée contre lui, et tous ses rejetons ont été consumés. » Nous espérons de vous, mes très chers frères, des choses meilleures, bien que nous tenions ce langage. Nous avons la confiance que l'huile de la splendeur, ou plutôt la splendeur de l'huile, dont vous êtes les fils, comme l'étaient les apôtres nos pères, vous instruira sur toutes choses au moyen de son onction : non-seulement elle bannira la torpeur, parce qu'elle est huile, mais encore elle fera disparaître l'erreur, parce qu'elle est splendeur.

4. Je sais que par ces paroles, «de l'huile de la splendeur, » on peut entendre : Qui procède du Fils, lequel est splendeur, ou qui répand la lueur qui éclaire : mais je crois, que sans inconvénient on peut, par transposition, entendre par huile ce qui est splendeur et éclat. Le Saint-Esprit est l'un et l'autre par sa nature, onction spirituelle et splendeur invisible, il opère, par ses bienfaits, l'un et l'autre effet en nous. Il oint les sentiments parce qu'il est huile, il éclaire l'intelligence parce qu'il est splendeur ; ce n'est point d'un côté et d'un autre, mais de lui-même comme unique principe, qu'il est huile et lumière, parce qu'il est une pure nature. Il oint les sentiments parce qu'il est charité; il éclaire l'intelligence parce qu'il est vérité. Il oint les sentiments, lorsqu'il inspire la dévotion; il éclaire l'intelligence, quand il découvre les mystères ; lorsqu'il nous apprend la bonté et la simplicité des colombes, il oint les sentiments; lorsqu'il enseigne la science pour être prudents comme des serpents, il éclaire l'intelligence. Il illumine, pour que nous ayons en nous du sel : il oint, pour que nous possédions la paix entre nous. Vous vous montrerez donc pour nous le fils de l'huile de la splendeur, si vous faites voir que vous êtes suave, oint par la bienveillance, discret et mur par la sagesse, en sorte que votre suavité soit assaisonnée de vérité et votre charité réglée par l'équité. Je pense que le Saint-Esprit a symbolisé cette double vertu qu'il produit, ou ce double effet de ses dons, à raison duquel il a voulu être appelé splendeur, dans ce feu sous la forme duquel, tout invisible qu'il est, il apparut visiblement sur la tête des apôtres. Paraissant feu au regard, il fut, si je ne me trompe, huile pour les sentiments, en sorte qu'ils semblaient baptisés en lui dans une sorte de bain d'huile, en même temps que ce feu céleste se multipliait sur leur tête. Cependant, quel que fut corporellement en eux le sentiment de ce feu (peu importe eu effet ce que l'on veut, il s'agit de ce que l'on opère), il y a, à mon avis, plus de probabilité à dire, et plus de piété à croire, que ce même feu qui enflamma et éclaira les cœurs, rafraîchit les corps, en sorte que les esprits brûlaient par la charité, les membres se refroidissaient par la chasteté, et que c'est à chacun d'eux que s'appliquait cette parole de Jérémie : « Du haut des cieux il a envoyé un feu dans mes os (Thren. I, 13), » ou celle-ci du Psalmiste : « Ma chair a été changée à cause de l'huile (Psalm. CVIII, 24). » A moins que ce divin esprit n'ait voulu laisser quelque chose de la loi des membres révoltés contre la loi de l'esprit, afin que la vertu se perfectionnât dans l'infirmité.

5. Mais poursuivons notre pensée : «Ceux-ci, » dit le Prophète, « sont deux fils de l'huile de la splendeur, qui se tiennent devant le dominateur de toute la terre. » Vous trouverez la bonté dans l'huile, la science dans la splendeur, voyez la « discipline dans ce qu'il ajoute, qui se tiennent devant le Dominateur de toute la terre, » afin que vous connaissiez qu'ils ont été véritablement disciples de celui à qui nous chantons : « Apprenez-moi la bonté, la discipline et la science (Psalm. CXVIII, 66). » Voici la perfection de la discipline, soit pour le corps, soit pour l'esprit; c'est d'avoir le Seigneur toujours en notre présence, et de nous tenir toujours et en tous lieux devant la majesté éternelle qui nous regarde et nous juge, avec respect et tremble, ment, avec une foi vigilante et une dévotion constante. « De même que les yeux d'un serviteur, » s'écrie le Psalmiste, « sont fixés sur les yeux de ses maîtres, de même nos regards sont tournés vers le Seigneur, notre Dieu (Psalm. CXXII, 2), » observant avec une attention qui ne s'affaiblisse jamais ses signes, ce qu'il veut, ce qu'il ordonne afin de l'exécuter à l'instant dans notre dévotion. Ainsi, Moïse regardait l'invisible comme s'il l'apercevait, et jamais il ne pouvait oublier la crainte que lui inspirait le juge toujours présent. Ainsi faisaient aussi Élie et les autres prophètes qui disaient: « Vive le Seigneur, en la présence de qui je suis (IV Reg. III, 14).» De là ils reçurent la grâce et le nom de «Voyants,» parce qu'ils voyaient toujours par une foi non feinte, ils méritaient souvent de le voir par une image, mais par une image rendue sensible. Cette foi vigilante, sans feinte, sans dissimulation, est la même, à mon avis, que celle qui conduit très-facilement et en peu de temps à la perfection ; elle répand sur notre extérieur et dans notre intérieur la gravité de la discipline et la retenue de la modestie, et nous range toujours parmi ceux qui servent le Seigneur. Par cette vertu, les apôtres ont mérité d'être appelés les fils de l'huile ; en sorte que, comme ils ont assisté devant le Seigneur sur la terre, en contemplant par la foi, de même, maintenant, ils assistent devant lui dans les cieux en contemplant par la claire vision, et voient de leurs yeux, dans l'éclat de sa beauté, ce roi dont leur cœur méditait ici-bas la crainte. Par cette voie. mes frères, vous suivez les Pères de votre foi et les auteurs de votre ordre, afin que, provoqués par leurs exemples, et secourus de leurs suffrages, vous puissiez arriver au séjour où ils vous ont précédés, avec l'aide de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui vit et règne dans tous les siècles des siècles, Amen.

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