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CENT DIX-NEUVIÈME TRAITÉ.

SUR LES PAROLES SUIVANTES : « ET LES SOLDATS FIRENT AINSI », JUSQU'A CES AUTRES : « ET, AYANT INCLINÉ LA TÊTE, IL RENDIT L'ESPRIT ». (Chap. XIX, 24-30.)

 

LES DERNIERS MOMENTS DE JÉSUS.

 

Après le partage de ses vêtements, Jésus légua sa Mère à l'apôtre Jean, pour donner aux enfants un exemple de piété filiale, et Jean la reçut pour en prendre soin. Puis le Sauveur se plaignit de la soif, et on lui tendit, au bout d'un roseau, une éponge imbibée de fiel, de vinaigre et d'hysope. Le roseau était l'emblème de l'Ecriture; le fiel et le vinaigre, de la méchanceté des Juifs ; l'hysope, de l'humilité du Christ. A peine Jésus en eut-il goûté, qu'il mourut.

 

1. L'évangéliste Jean nous raconte ce qui se passa aux pieds de la croix du Sauveur, après que ses vêtements eurent été partagés, même par la voie du sort; voyons son récit : « Les soldats firent ainsi. Or, la Mère de Jésus et la soeur de sa Mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie-Madeleine, étaient debout près de sa croix. Jésus donc, voyant sa Mère et près d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : Femme, voilà ton fils. Après, il dit au disciple : Fils, voilà ta mère. Et depuis cette heure-là, le disciple la reçut chez lui ». Voilà bien l'heure dont Jésus parlait, quand, au moment de changer l'eau en vin, il disait à sa Mère : « Femme, qu'y a-t-il entre toi et moi ? mon heure n'est point encore venue (1) ». Il prédisait cette heure qui n'était pas encore venue, cette heure où, sur le point de mourir, il devait

 

1. Jean, II, 4.

 

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reconnaître celle qui lui avait donné la vie du corps. Alors il se préparait à faire une oeuvre divine; aussi semblait-il lie pas connaître la Mère, non de sa divinité, mais de son humanité, et la repoussait-il. Maintenant, il souffre dans son corps, et dans les sentiments d'une humaine affection, il recommande celle dans le sein de laquelle il s'est fait homme. Alors, il connaissait Marie en vertu de sa puissance, puisqu'il l'avait créée; maintenant, Celui que Marie a mis au monde est attaché à la croix.

2. Nous trouvons ici un sujet d'instruction. Le Sauveur fait lui-même ce qu'il nous enseigne; précepteur plein de bonté, il apprend à ses disciples, par son exemple, tout le soin que des enfants pieux doivent prendre des auteurs de leurs jours. Le bois auquel se trouvaient cloués ses membres mourants était comme une chaire où notre Maître se faisait entendre et nous donnait ses leçons. C'était à cette source de saine doctrine que l'apôtre Paul avait puisé, quand il disait : « Si quelqu'un n'a pas soin des siens, et surtout de ceux de sa maison, il a renoncé à la foi et il est pire qu'un infidèle (1) ». Y a-t-il des personnes plus proches les unes des autres que les parents ne le sont de leurs enfants, ou les enfants de leurs parents? Le maître à l'école de qui se forment les saints, nous donnait donc en lui-même l'exemple pour confirmer un de ses plus précieux commandements ; car s'il pourvoyait à l'avenir de Marie en lui donnant un autre fils qui tiendrait sa place, il n'agissait pas comme Dieu à l'égard d'une servante créée et gouvernée par lui, mais comme homme à l'égard d'une Mère qui lui avait donné le jour et qu'il laissait en cette vie. Pourquoi a-t-il agi de la sorte? Ce qui suit nous l'apprend; car, parlant de lui-même, l'Evangéliste ajoute : « Et, depuis ce moment, le disciple la reçut chez lui ». D'ordinaire, Jean ne se désigne pas autrement qu'en disant que Jésus l'aimait ; le Sauveur affectionnait tous ses disciples, mais il chérissait davantage encore celui-ci; il était même si familier avec lui qu'à la Cène il lui permit de s'appuyer sur sa poitrine (2) ; c'était sans doute pour l'aider à imprimer sur l'Evangile qu'il devait prêcher en son nom, le sceau de sa divine excellence.

3. Mais en quel chez lui Jean reçut-il la

 

1. I Tim. V, 8. — 2. 9 Jean, XIII, 23.

 

Mère du Sauveur? Il était certainement du nombre de ceux qui lui avaient dit : « Voilà que nous avons tout abandonné pour vous suivre », et, comme les autres, il avait entendu cette réponse : Quiconque aura abandonné tout cela à cause de moi, recevra le centuple en cette vie (1). Ce disciple avait donc reçu le centuple de ce qu'il avait quitté ; c'était assez pour y recevoir la Mère de Celui qui lui en avait fait don. Mais, au moment où le bienheureux Jean avait reçu ce centuple, il faisait partie d'une société où nul ne possédait rien en propre, et où toutes choses étaient mises en commun, suivant ce qui est écrit dans les Actes des Apôtres ; car les disciples de Jésus étaient comme n'ayant rien et possédant tout (2). Comment donc le disciple et le serviteur a-t-il reçu la Mère de son Maître et Seigneur chez lui, puisque personne parmi les Apôtres ne s'attribuait rien en propre? Nous lisons un peu plus loin dans le même livre : « Tous ceux qui possédaient des champs ou des maisons les vendaient et apportaient le prix de ce qui était vendu, et ils le déposaient aux pieds des Apôtres, et on le distribuait à chacun selon qu'il en avait besoin (3) ». Ces paroles signifient-elles qu'on le distribua à ce disciple d'après ses besoins, en lui tenant compte de la présence, chez lui, de la bienheureuse Marie, comme si elle était sa mère? Par conséquent, devons-nous entendre ces mots : « Et à partir de ce moment, le disciple la reçut chez lui », en ce sens qu'il devait prendre soin de tout ce qui serait nécessaire à Marie? Il la reçut donc chez lui, c'est-à-dire, non dans ses propriétés, puisqu'il n'en possédait aucune en propre, mais dans ses attributions ; car il devait en prendre soin, par suite de l'obligation qu'il avait personnellement acceptée.

4. L'Evangéliste ajoute : « Ensuite Jésus, sachant que tout était consommé, afin que l'Ecriture fût accomplie, dit : J'ai soif. Un vase plein de vinaigre était là. Et les soldats lui présentèrent à la bouche une éponge pleine de vinaigre, qu'ils avaient attachée à un bâton d'hysope. Lors donc que Jésus eut pris le vinaigre, il dit: Tout est consommé. Et ayant incliné la tête, il rendit l'esprit ». Qui est-ce qui agit comme il le veut, de la même manière que cet homme a souffert comme il l'a voulu? Mais cet homme était le

 

1. Matth. XIX, 27, 29. — 2. II Cor. VI, 10. — 3. Act. IV, 32-35.

 

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Médiateur entre Dieu et les hommes; c'est à lui que s'applique cette prédiction des livres saints : C'est un homme, et qui est-ce qui le reconnaîtra? En effet, les hommes qui servaient d'instruments pour le faire mourir n'apercevaient point sa divinité à travers le voile de son humanité. Comme homme, il se laissait voir, mais il ne se laissait point reconnaître comme Dieu. Celui qui endurait toutes ces souffrances, c'était l'homme qu'on voyait. Celui qui en réglait l'ordre et la nature, c'était ce Dieu qui se cachait. Il vit donc que tout ce qui devait avoir lieu avant qu'il prit le vinaigre et rendît l'esprit, était consommé; il voulut aussi accomplir ce qu'avait dit l'Ecriture : « Et dans ma soif, ils m'ont abreuvé de vinaigre (1) ». Il dit donc : « J'ai soif », ou, en d'autres termes : Vous m'avez donné ce vinaigre; c'est trop peu : donnez-moi ce que vous êtes. Les Juifs, en effet, étaient du véritable vinaigre; les Patriarches et les Prophètes étaient du vin. Mais eux avaient dégénéré; ils étaient remplis de l'iniquité de ce monde comme de la surabondance d'un vase qui déborde, et leur cœur, pareil à une éponge, recélait la duplicité méchante dans ses profonds et tortueux recoins. L'hysope à laquelle ils avaient attaché l'éponge pleine de vinaigre, est une plante de très-médiocre grandeur et qui purge le corps humain; elle est le parfait emblème de l'humilité du Christ; ils l'enveloppèrent avec l'éponge, et ils crurent avoir réussi à circonvenir Jésus. Voilà pourquoi le Psalmiste a dit « Arrosez-moi avec l'hysope, et je serai purifié (2) ». De fait, l'humilité du Christ nous purifie, car s'il ne s'était point humilié lui-même en se faisant obéissant jusqu'à la mort de la croix (3), son sang n'aurait certainement pas été répandu pour la rémission de nos péchés, c'est-à-dire pour notre purification.

5. Ne soyons point surpris de ce qu'on a pu approcher une éponge des lèvres d'un homme élevé sur la croix à une certaine hauteur au-dessus de terre ; Jean n'en a pas 

 

1. Ps. LXVIII, 22. — 2. Id. L, 8. — 3. Philipp. II, 8.

 

fait mention, mais les autres Evangélistes l'ont raconté : c'est à l'aide d'un roseau (1) qu'on a pu faire parvenir dans une éponge, jusqu'au sommet de la croix, un pareil breuvage. Ce roseau était l'emblème de l'Ecriture, qui se trouvait accomplie par ce fait. Comme tout ce que profère la langue porte le nom de langue grecque, de langue latine ou de toute autre, qui laisse échapper des sons qui ont un sens; de même, on peut donner le nom de roseau à toute écriture formée au moyen de roseau. Suivant la manière la plus ordinaire de s'exprimer, on appelle langue les sons pourvus de sens qu'émet la voix humaine; il n'est guère d'usage de désigner l'Ecriture parle nom de roseau: aussi cette façon de parler n'est-elle que l'indice plus certain d'un grand mystère. Un peuple impie se livrait à ces voies de fait; plein de miséricorde, le Christ les supportait. Celui qui agissait ne savait ce qu'il faisait; mais celui qui souffrait n'ignorait ni ce qui avait lieu, ni la cause pour laquelle ces événements se passaient: je dirai plus, il tirait le bien du mal que faisaient ses bourreaux.

6. « Lors donc que Jésus eut pris le vinaigre, il dit: Tout est consommé ». Quoi? ce que les Prophètes avaient annoncé si longtemps d'avance. Rien ne restait plus à accomplir avant sa mort; celui qui avait le pouvoir de quitter son âme et de la reprendre à nouveau (2), semblait attendre que tout ce qui devait avoir lieu s'accomplît: « ayant » donc  « incliné la tête, il rendit l'esprit ». Qui est-ce qui s'endort à son gré, comme Jésus est mort au moment qu'il a choisi ? Qui est-ce qui se dépouille d'un vêtement quand il le veut, comme Jésus s'est dépouillé de son corps à l'heure voulue par lui ? Qui est-ce qui s'en va selon son désir, comme Jésus est sorti de ce monde lorsqu'il y a consenti ? Et si, en mourant, il a manifesté une pareille puissance, combien nous devons craindre ou désirer les effets de celle qu'il déploiera en venant nous juger!

 

1. Matth. XXVIII, 48 ; Marc, XV, 36. — 2. Jean, X, 18.

 

 

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