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DES LIVRES ET DE SA  MORT

 

Rien ne comblerait davantage mes yeux que de savoir que les ouvrages sortis de ma plume sont destinés à être oubliés et rejetés de tout le monde, et même que leur sort est de périr complètement (2). La principale raison qui me déterminé à penser 

1 Il serait déplacé de rechercher ici quel est ce péché contre le Saint-Esprit au sujet duquel on a tellement discuté et qui paraît purement intellectuel. Voir une dissertation du bénédictin allemand Martin Gerberl. imprimée en 1767 : De peccato in Spiritum sanctum in hac et in altera vita irremissibili

2 Les vœux du grand réformateur ont été loin de s'accomplir; les nombreux écrits de Luther ne cessent de se réimprimer en Allemagne, son Catéchisme et sa traduction de la Bible y sont sans cesse reproduits sous toutes les formes; en ce moment (décembre 1843) il vient de paraître le tome Ier du commentaire latin sur l'Epître aux Galates (Erlangen, curavit Dr. J. C. Irmischer), et le 33e volume d'une réimpression allemande des œuvres (Sammtliche werke), in-8°, publiée également à Erlangen, sous la direction du même éditeur. Un chanoine de Ratisbonne, Westermayer, vient de donner un écrit sur Luther et le célibat catholique ; Bretschneider a fait paraître le tome XI, in-4° de son Corpus Reformatorum ; il est consacré à Mélanchton ; E. von Brunnow a terminé trois volumes sur Ulrich de Hutten : Baum et Herzog ont choisi, l'un Théodore de Béze et l'autre Calvin pour sujets de leurs recherches ; enfin trois nouvelles Vies de Luther, sorties de la plume de Genthe (Leipzig, in-8°), de Mathesius (Stuttgart, in-8°), de Meuzer (Dresde, in-8°), sont venues s’ajouter à des biographies déjà innombrables. Tant d'écrits enfantés dans l'espace de quelques mois démontrent combien l’étude des premiers moments de la réforme continue de préoccuper les esprits de l'autre côté du Rhin. Nous ne parlons pas des nombreux romans historiques dont Luther est le héros : il vient d'en paraître un tout récemment à Grimma, en 3 vol. in-12. En français, M. Barginet en avait donné un autre (1831, 2 vol. in-8°). 

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ainsi, c’est que je crois quelles suites fâcheuses résultent depuis longtemps de la trop grande multiplicité des livres. On a entassé, sans discernement, de grandes bibliothèques, et d'abord il s'en est suivi une honteuse perte d'un trésor bien précieux, le temps; ensuite l'étude des saintes Ecritures a été abandonnée, et de plus, ce qu'on ne peut énoncer sans répandre des larmes, la connaissance pure et sincère de la parole divine a été presque entièrement anéantie, et la Bible, qui devrait être jour et nuit dans les mains de tous les fidèles, gisait complètement oubliée et couverte de poussière. Lorsque j'entrepris de traduire la Bible en allemand, c'était dans l'espoir et la pensée qu'il s'ensuivrait la cessation de cette habitude d'écrire sans cesse des livres nouveaux. Je comptais aussi que l'étude et la méditation des livres saints feraient de rapides progrès parmi les personnes pieuses. Jamais nous ne pourrons égaler, dans nos écrits, les livres saints qui ont été inspires de Dieu. Il nous faut laissera la place d'honneur les prophètes et les apôtres, et nous tenir humblement à leurs pieds, afin d'écouter ce qu'ils disent et ce qu'ils enseignent. Je désire vivement que ceux qui voudront posséder mes livres et s'en servir durant l'époque orageuse où nous nous trouvons, n’y consacrent aucun instant qu'ils auraient employé à l'étude et à la lecture de l'Écriture sainte : voilà ce qui doit être leur occupation continuelle. 

L'an 1546, le 16 février, le docteur Luther, étant à Eisleben, dit : « Lorsque je retournerai à Wittemberg, je serai mis dans un cercueil et je donnerai aux vers un gros Luther à manger. » — Et c'est ce qui arriva, car deux jours après, il mourut à Eisleben (1) ; trois heures avant sa mort, il demanda une plume, de l’encre et du papier, et il écrivit ces mots: 

Pestis eram vivens, moriens ero mors tua, papa. 

1 La maladie à laquelle succomba Luther fut courte : ce fut une violente inflammation d'entrailles. Ses adversaires répandirent le bruit que le diable l'avait emporté. « Étant arrivé à Islebe, le dix-septième de février, ayant soupé, se retira en sa chambre avec sa moniale de telle heure que jamais n'en sortit vif. Aucuns disent qu’en se levant pour secourir nature, il tomba mort. » Taillepied, Vie de Luther, p. 15. 

FIN. 

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