Excommunication

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Déclaration Justification

 

DE L’EXCOMMUNICATION,
DE LA PAROLE DIVINE ET DE L'AUMONE.

 

Le ministère de la parole appelle à la cène tous les pieux fidèles repentants de leurs péchés et les fait entrer dans le sein de l'Eglise de Jésus-Christ ; de môme, il rejette et excommunie les impies endurcis et scandaleux, et il les abandonne au jugement de Dieu, d'après la sentence de Jésus-Christ. Car Jésus-Christ a établi qu'il fallait avertir trois fois les pécheurs dont les scandales publies offensent l'assemblée des fidèles, et s'ils ne s'amendent point, les fuir comme des païens et des publicains. A nous, auxquels le Seigneur notre Dieu a donné l'office de prêcher l'Evangile, d'administrer les sacrements, etc., il nous a été recommande d'excommunier de la parole de Dieu , de ne pas admettre au baptême et a la cène du Seigneur ceux qui persévère» raient, contre leur conscience, dans leurs péchés. C'est pourquoi le gouverneur H. Metzch a été excommunié à cause de son incontinence, et je ne veux point qu'il reçoive les sacrements dans nos églises, parce qu'il doit en être exclu jusqu'à ce qu'il se repente.

 

On parla d'un citoyen qui était un athée et qui avait hautement confessé devant le sénat que depuis quinze ans il n'avait point participé à la cène. — Le docteur Luther dit : « Nous l'avons assez condamné; après une double admonition, je le proclamerai publiquement excommunié, et qu'il ne faut le regarder que comme un chien; si quelqu'un veut alors avoir des rapports avec lui, qu'il le fasse à ses périls et risques. S'il meurt dans ses péchés, sans avoir fait une vraie pénitence, il doit être enseveli au cimetière comme une bête brute. »

 

Le 2 décembre 1536 , le docteur Luther parlait en gémissant de la privation où l'on serait à l'avenir de la parole de Dieu, et de

 

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l'extrême tribulation qui affligerait les hommes, telle qu'il ne s'en serait jamais vu de pareille depuis la création du monde. Et il dit que celle horrible calamité était déjà à nos portes, puisque nos adversaires s'efforcent de tourmenter les consciences et d'étouffer la parole de Dieu. Celte sainte parole est le plus précieux de tous les biens et elle dépasse tous les trésors du monde. Celui qui en est privé souffre une faim véritable et spirituelle. Plaise a Dieu que pareil malheur ne tombe pas sur nous! il vaudrait mieux que nous fussions tous égorgés par les Turcs. Ah! si j'étais un grand poète, comme je chanterais mélodieusement et magnifiquement les louanges de la parole divine, ainsi que le fit Moïse ( Deutérome, chap. XXXIII . Car sans la parole, il n'est rien.

 

Nous devons faire une grande différence entre la parole de Dieu et la parole d'un homme. La parole d'un homme est un léger son qui vole dans l'air et qui s'évanouit presque aussitôt ; mais la parole de Dieu est plus grande que le ciel et la terre, même que la mort et l'enfer, car elle est la puissance de Dieu et elle restera éternellement ; ainsi nous devons nous appliquer à étudier la parole de Dieu, et nous devons croire et savoir avec certitude que Dieu lui-même nous parle.

 

Le docteur Erasmus Albert, étant prêt à partir pour la Marche de Brandebourg, demanda au docteur Luther comment il fallait prêcher devant le prince : le docteur lui répondit : «Ce n'est pas aux princes , mais au peuple qui est grossier et simple que doivent s'adresser tes prédications. Si, dans les miennes, c'était Mélanchton et les autres docteurs que j'eusse en vue, je ne ferais rien qui vaille; je prêche tout simplement pour les ignorants, et cela est du goût de tous. Ce que je sais de latin, de grec et d'hébreu, je le réserve pour nos réunions de savants. Alors nous disons des choses si subtiles et si érudites, que Dieu lui-même en serait étonné. »

 

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Je veillerai et ferai de mon mieux, avec l'aide de Dieu , pour qu'après ma mort une Église sincère et de bonnes écoles soient laissées à nos descendants, afin qu'ils sachent comment ils doivent être instruit! et gouvernés chrétiennement et équitablement; mais la grande ingratitude des hommes, leur opiniâtreté et leur mépris de la parole de Dieu, me font craindre que la lumière ne se maintienne pas et n'éclaire pas longtemps.

Il ne peut arriver de plus grand malheur à un peuple chrétien que celui de voir la parole de Dieu lui être enlevée et être falsifiée de sorte qu'il ne l'a plus dans sa pureté et dans sa clarté. Dieu veuille que ni nous ni nos descendants ne soyons témoins d'une semblable calamité.

 

Lorsque la parole de Dieu nous est présentée dans sa pureté et sa clarté , nous devenons négligents, nous nous reposons dans une vaine sécurité, nous n'y faisons plus d'attention , nous pensons qu'il en sera toujours de même. Nous n'opposons pas la vigilance et la prière au diable qui est tout prêt à arracher de notre cœur la parole divine. Il en est de nous comme de voyageurs qui sont tranquilles et sans inquiétude tant qu'ils sont sur la bonne route, mais s'ils s'égarent dans des bois ou dans des chemins de traverse, ils se préoccupent alors du chemin qu'ils doivent suivre, c’est ainsi qu'auprès de la pure parole de Dieu , nous nous laissons aller a la sécurité; nous nous endormons, nous ne nous maintenons pas dans la grâce de Dieu et nous ne sommes pas en garde contre le démon. Mais ceux qui embrassent l'erreur sont fort occupés, et ils se donnent beaucoup de peine pour la répandre.

 

Quand Dieu veut punir un royaume ou un peuple, il en retire d'abord les bons et pieux prédicateurs. Il le prive aussi des gouverneurs et conseillers sages, honnêtes et équitables. Il en relire les bons soldats, expérimentés et probes, ainsi que tous les autres

 

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gens de bien. Alors le peuple se réjouit ; il se laisse aller au gré de ses volontés, il n'a plus de souci de la vérité et de la doctrine divine, il en vient même à la mépriser et il tombe dans l'aveuglement; il n'a plus ni crainte, ni honnêteté; il s'abandonne à toutes sortes de péchés honteux, d'où il s'ensuit une vie dissolue, sans frein et diabolique, comme celle, hélas! dont nous sommes témoins et que nous ne voyons que trop et qui ne peut longtemps durer. Je crains que la hache ne soit mise à la racine de l'arbre afin qu'il soit bientôt coupe. Que Dieu, dans sa miséricorde infinie, nous relire de ce monde, afin que nous n'assistions pas a de semblables calamités!

 

La rémunération que le monde donne maintenant à la doctrine de l'Evangile est la même que celle qu'il accorde à Jésus-Christ, la croix; c'est ce que nous devons attendre, et rien autre. Cette année est l'aune.' de l'ingratitude des hommes, mais celle qui va venir sera l'année de la colère de Dieu. Il faut que Dieu châtie, quoique ce soi! contre sa volonté et contre sa nature; c'est nous qui sommes la cause des châtiments qu'il répandra.

 

Le docteur Luther dit un autre jour : « Ah ! mon Dieu ! que le inonde est impie et ingrat, de mépriser et de persécuter ainsi sa grâce ineffable! Et nous-mêmes, qui nous vantons de l'Évangile et qui savons que c'est la parole de Dieu , qui la reconnaissons pour telle , nous avons aussi peu de respect et d'égard pour l'Évangile, ce grand et inestimable trésor, que nous en aurions pour un passage extrait de Virgile et de Térence. Je suis moins effrayé du pape et des tyrans que de noire ingratitude et de notre mépris pour la parole de Dieu ; voilà ce qui remettra le pape sur sa selle. Mais lorsque cela surviendra , j'espère que le jour du jugement suivra de près.»

 

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Nous devons mettre use grande différence entre la parole de Dieu et la parole de l’homme. La parole d'un homme est un petit son qui vole dans l'air et qui s'évanouit bientôt; mais la parole de Dieu est plus grande que le ciel et la terre; elle est même plus grande que la mort et l'enfer, car elle fait partie de la puissance de Dieu et elle dure éternellement; nous devons donc étudier avec, assiduité la parole de Dieu , et nous devons savoir et croire avec conviction que Dieu lui-même nous parle. C'est ce que. David a vu et ce qu'il a cru , car il a dit : Dieu a parlé dans sa sainteté, c'est pourquoi je me réjouis. Nous devons donc être dans l'allégresse ; mais cette joie et cette satisfaction se trouvent souvent mêlées en nous de beaucoup de peines et de douleurs, ainsi que David en donna également l'exemple, car il a souffert beaucoup de tribulations et d'épreuves au sujet du meurtre et de l'adultère qu'il avait commis. Il n'était certes pas à la noce lorsqu'il était maudit et poursuivi d'un endroit à l'autre, afin qu'il put rester et marcher dans la crainte de Dieu; aussi dit-il dans le psaume II : Sers le Seigneur avec crainte, et réjouis toi avec tremblement. Dieu nous donne toujours plus que nous ne demandons ; lorsque nous lui demandons avec ferveur un morceau de pain, il nous donne un arpent entier de terre. Lorsque ma femme était malade, je priai Dieu d'épargner sa vie: non-seulement il m'accorda ce que je demandais , mais encore il nous a donné une bonne ferme à Zolsdorf et il nous a l'ait la grâce d'une récolte abondante. A cette époque, ma femme me dit : «Seigneur, comment se fait-il que les papistes prient si souvent avec beaucoup de véhémence, tandis que nous apportons tant de froideur et d'insouciance dans nos prières?» Je lui répondis: «Le diable presse et excite continuellement ses esclaves, de sorte qu'ils sont diligents et qu'ils prennent beaucoup de peine dans leur fausse dévotion ; mais nous, vraiment, nous sommes inattentifs et froids comme de la glace. »

 

Le docteur Luther s'entretint un soir au sujet de cette sentence : « Donnez, et il vous sera donné », et il dit : « C'est une

 

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belle maxime, qui rend les hommes riches et pauvres; c'est celle qui maintient ma maison; je ne veux pas me vanter, mais je sais bien ce que je donne en une année. Si mon gracieux seigneur et maître (le prince électeur) donnait à un gentilhomme deux mille florins, cela suffirait à peine pour faire face , durant un an, aux frais de mou ménage, et je. n'ai que trois cents florins de rente annuelle; mais Dieu les bénit et fait qu'ils suffisent.»

 

Il y a en Autriche un monastère qui était autrefois très-riche et qui resta riche aussi longtemps qu'il fut charitable envers les pauvres; mais quand il cessa de donner, il tomba dans l'indigence, et il y est demeuré jusqu'à ce jour. Il advint, n'y a pas longtemps, qu'un pauvre vint à la porte de ce couvent et qu'il sollicita une aumône qui lui fut refusée ; il demanda pourquoi on refusait de le secourir pour l'amour de Dieu ; le portier du monastère lui répondit : « Nous sommes tombés dans l'indigence » ; et le mendiant lui répliqua : « Voici la cause de votre, pauvreté : vous avez eu jadis parmi vous deux frères, nommés Date (donnez) et Dabitur (il vous sera donné); vous avez expulsé l'un, l'autre s'en est allé clandestinement et de son plein gré. Le frère Date étant absent, le frère Dabitur a presque immédiatement disparu. » — « Mes amis, ajouta le docteur Luther , celui qui a l'intention de posséder quelque chose, doit aussi donner; une main libérale n'a jamais été vide ni pressée par le besoin. »

 

Un soir le docteur Luther se promenait avec le docteur Jonas et il donna l'aumône à quelques pauvres; le docteur donna aussi quelque chose et il dit : « Qui sait si Dieu me le rendra? » Luther lui répondit en souriant : «Vous parlez comme si Dieu ne vous avait pas déjà donné ce que vous venez de donner aux pauvres: il nous faut donner libéralement et de bon coeur. »

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