PRÉCIEUX SANG

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LE Ier DIMANCHE DE JUILLET. LA FÊTE DU PRECIEUX SANG DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST.

 

Jean-Baptiste a montré l'Agneau, Pierre affermi son trône, Paul préparé l'Epouse: œuvre commune, dont l'unité fut la raison qui devait les rapprocher de si près tous trois sur le Cycle. L'alliance étant donc maintenant assurée, tous trois rentrent dans l'ombre ; et seule, sur les sommets où ils l'ont établie, l'Epouse apparaît, tenant en mains la coupe sacrée du festin des noces.

Tel est le secret de la fête de ce jour. Son lever au ciel de la sainte Liturgie, en la saison présente, est plein de mystère. Déjà, et plus solennellement, l'Eglise a révélé aux fils de la nouvelle Alliance le prix du Sang dont ils furent rachetés, sa vertu nourrissante et les honneurs de l'adoration qu'il mérite. Au grand Vendredi, la terre et les cieux contemplèrent tous les crimes noyés dans le fleuve de salut dont les digues éternelles s'étaient enfin rompues, sous l'effort combiné de la violence des hommes et de l'amour du divin Cœur. La fête du Très-Saint-Sacrement nous a vus prosternés devant les autels où se perpétue l'immolation du Calvaire, et l'effusion du Sang précieux devenu le breuvage des humbles et l'objet des hommages des puissants de ce monde. Voici que l'Eglise, cependant, convie de nouveau

 

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les chrétiens à célébrer les flots qui s'épanchent de la source sacrée : qu'est-ce à dire, sinon, en effet, que les solennités précédentes n'en ont point sans doute épuisé le mystère ? La pais faite par ce Sang dans les bas lieux comme sur les hauteurs ; le courant de ses ondes ramenant des abîmes les fils d'Adam purifiés, renouvelés, dans tout l'éclat d'une céleste parure; la table sainte dressée pour eux sur le rivage, et ce calice dont il est la liqueur enivrante  :  tous ces apprêts seraient sans but, toutes ces magnificences  demeureraient incomprises, si l'homme n'y voyait les avances d'un amour dont les prétentions entendent n'être dépassées par les prétentions d'aucun autre amour. Le Sang de Jésus doit être pour nous à cette heure le Sang du Testament, le gage de l'alliance que Dieu nous propose (1), la dot constituée par l'éternelle Sagesse appelant les hommes à cette union divine, dont l'Esprit de sainteté poursuit sans fin la consommation dans nos âmes. Et c'est pourquoi la présente fête,  fixée toujours à quelqu'un des Dimanches après la Pentecôte, n'interrompt point l'enseignement qu'ils ont mission de nous donner en ce sens, mais le confirme merveilleusement au contraire.

« Ayons donc confiance, ô mes Frères, nous dit l'Apôtre; et, par le Sang du Christ, entrons dans le Saint des Saints. Suivons la route nouvelle dont le secret est devenu nôtre, la route vivante qu'il nous a tracée au travers du voile, c'est-à-dire de sa chair. Approchons d'un cœur vrai, d'une foi pleine, purs en tout, maintenant ferme la profession de notre inébranlable espérance; car celui qui s'est engagé envers nous est fidèle. Excitons-nous

 

1. Ex. XXIV, 8 ; Heb. IX, 20.

 

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chacun d'exemple à l'accroissement de l'amour (1). Et que le Dieu de paix qui a ressuscité d'entre les morts notre Seigneur Jésus-Christ, le grand pasteur des brebis dans le Sang de l'Alliance éternelle, vous dispose à tout bien, pour accomplir sa volonté, pour que lui-même fasse en vous selon son bon plaisir par Jésus-Christ, à qui soit gloire dans les siècles des siècles (2) !  »

Nous ne devons pas omettre de rappeler ici que cette fête est le monument de l'une des plus éclatantes victoires de l'Eglise au dernier siècle. Pie IX avait été chassé de Rome, en 1848, par la Révolution triomphante; dans ces mêmes jours, l'année suivante, il voyait rétablir son pouvoir. Les 28, 29 et 3o juin, sous l'égide des Apôtres, la fille aînée de l'Eglise, fidèle à son glorieux passé, balayait les remparts de la Ville éternelle ; le 2 juillet, fête de Marie, s'achevait la  conquête. Bientôt un double décret notifiait à la Ville et au monde la reconnaissance du Pontife, et la manière dont il entendait perpétuer par la sainte Liturgie le souvenir de ces événements.  Le  10  août, de Gaëte même, lieu de son refuge pendant la tourmente, Pie IX, avant d'aller reprendre le gouvernement de ses Etats, s'adressait  au Chef invisible de l'Eglise et la lui confiait par l'établissement de la fête de ce jour,  lui rappelant  que, pour cette Eglise, il avait versé tout son Sang. Peu après, rentré dans sa capitale, il se tournait vers Marie, comme avaient fait en d'autres circonstances saint Pie V et Pie VII; le Vicaire de l'Homme-Dieu renvoyait à celle qui est le Secours des chrétiens l'honneur de la victoire remportée au jour de sa glorieuse Visitation, et statuait que la fête du 2

 

1. Heb. X, 19-24. — 2. Ibid. XIII, 20-21.

 

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juillet serait élevée du rite double-majeur à celui de seconde classe pour toutes les Eglises : prélude à la définition du dogme de la Conception immaculée, que l'immortel Pontife projetait dès lors, et qui devait achever l'écrasement de la tête du serpent.

 

A LA MESSE.

 

L'Eglise, que les Apôtres ont rassemblée de toutes les nations qui sont sous le ciel, s'avance vers l'autel de l'Epoux qui l'a rachetée de son Sang, et chante dans l'Introït son miséricordieux amour. C'est elle qui est désormais le royaume de Dieu, la dépositaire de la vérité.

 

INTROÏT.

 

Vous nous avez rachetés par votre Sang, ô Seigneur , de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, de toute nation, et vous avez fait de nous le royaume de notre Dieu.

 

Ps. Je chanterai à jamais les miséricordes du Seigneur; de génération en génération ma bouche annoncera votre vérité. Gloire au Père. Vous nous avez rachetés.

 

Gage de paix entre le ciel et la terre, objet des plus solennels hommages et centre lui-même de toute Liturgie, protection assurée contre les maux de la vie présente, le Sang de l'Homme-Dieu dépose dès maintenant dans les âmes et les corps de ceux qu'il a rachetés le germe des joies éternelles.

 

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L'Eglise demande, dans la Collecte, au Père qui nous a donné son Fils unique, que ce germe divin ne reste pas stérile en nous et arrive à son plein développement dans les cieux.

 

COLLECTE.

 

Dieu tout-puissant et éternel, qui avez fait de votre Fils unique le Rédempteur du monde, et avez voulu être apaisé par son Sang; nous vous en supplions, accordez-nous de célébrer de telle sorte en nos solennels hommages le prix do notre salut, et d'être si bien défendus en terre par sa vertu contre les maux de la vie présente, que nous puissions au ciel nous réjouir à jamais de son fruit. Par le même Jésus-Christ notre Seigneur.

 

On fait ici mémoire du Dimanche après la Pentecôte, qui cède à la fête du Précieux Sangles premiers honneurs de cette journée.

 

EPÎTRE.

 

Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Hébreux. Chap. IX.

 

Mes Frères, Jésus-Christ, le Pontife des biens futurs, étant venu à paraître, est entré une fois dans le Sanctuaire par un tabernacle plus grand et plus parfait, qui n'a point été fait de main d'homme, c'est-à-dire qui n'a point été formé par la voie commune et ordinaire. Il est entré, non avec le sang des boucs et des taureaux,  mais avec son propre Sang, nous ayant acquis une rédemption éternelle;  car  si le sang  des boucs et  des  taureaux,  et l'aspersion de l'eau mêlée avec la cendre d'une génisse, sanctifient ceux qui ont été souillés, et leur donnent une pureté  extérieure  et  charnelle : combien plus le Sang du Christ, qui par l'Esprit-Saint s'est offert lui-même à Dieu comme une victime sans tache,  purifiera-t-il notre conscience de ses œuvres mortes, pour nous rendre capables de servir le Dieu vivant ! Et c'est pourquoi  il est le médiateur du Testament nouveau, afin que, parla mort qu'il a subie pour racheter les prévarications commises sous le premier Testament, ceux qui y sont appelés reçoivent l'objet de la promesse, l’héritage éternel, en Jésus-Christ notre Seigneur.

 

L'Epître qu'on vient de lire est la confirmation de ce que nous avons dit du caractère de cette fête. C'est par son propre Sang que le Fils de Dieu est entré dans les cieux ; le Sang divin reste pour nous l'introducteur à l'Alliance éternelle. Ainsi l'ancienne Alliance, fondée sur l'observation des préceptes du Sinaï, avait-elle consacré dans le sang le peuple et la Loi, le tabernacle et les vases qu'il devait contenir ; mais tout cela n'était que figure. « Or, dit saint Ambroise, c'est à la vérité que nous devons tendre. Ici est l'ombre, ici l'image, là-haut la vérité. Dans la Loi c'était l'ombre, l'image se trouve dans  l'Evangile, la vérité

 

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au ciel. Jadis on sacrifiait un agneau ; maintenant c'est le Christ : mais ici sous les signes des Mystères, tandis qu'au ciel il est sans voiles. Là seulement donc est la pleine perfection à laquelle se doivent arrêter nos pensées, parce que toute perfection est dans la vérité sans image et sans ombre (1). » Là seulement sera le repos. Là, dès ce monde, aspirent les fils de Dieu : sans y atteindre pleinement, ils s'en rapprochent chaque jour; car là seulement se trouve la paix qui fait les saints.

« Seigneur Dieu, dit à son tour un autre grand Docteur, saint Augustin, donnez-nous cette paix, la paix du repos, la paix du septième jour, du sabbat sans couchant. Car, il est vrai, tout cet ordre de la nature et de la grâce est bien beau pour vos serviteurs, et bien bonnes sont les réalités qu'il recouvre ; mais ses images,  ses modes successifs, n'auront qu'un temps, et, leur évolution accomplie, il passera. Les. jours que vous avez remplis de vos créations se composent de matin et de soir, le septième excepté qui n'a pas de déclin, parce que vous l'avez sanctifié dans votre reposa jamais. Or ce repos, quel est-il, sinon celui que vous prenez en nous, quand nous-mêmes reposons en  vous dans la paix féconde qui couronne en nous la série de vos grâces ? Repos sacré, plus productif que tout labeur, les parfaits seuls vous connaissent, ceux-là qui ont laissé le travail divin accomplir en eux l'œuvre des six jours (2). »

C'est pourquoi, nous dit l'Apôtre, interprétant lui-même à l'aide des autres Ecritures le passage qui vient de lui être emprunté par la sainte Eglise, c'est pourquoi  aujourd'hui, si  vous entendez sa

 

1. Ambr. De Offic. I, 48. — 2. Aug. Confess. XIII, 35-37; de Genesi ad litt. IV, 13-17 ; et alibi passim.

 

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voix, n'endurcissez pas vos cœurs (1). Le Sang divin nous a rendus participants du Christ (2) : à nous de  ne pas  dissiper, comme un bien sans valeur, l'incorporation initiale qui nous unit au Chef divin ; mais livrons-nous, sans défiance ni réserve, à l'énergie de ce ferment précieux qui doit transformer en lui tout notre être. Craignons de manquer la promesse rappelée dans notre Epître, et qui est celle d'entrer dans le repos de Dieu, d'après saint Paul lui-même (3). Elle regarde tous les croyants, affirme-t-il (4), et ce divin sabbat est pour le peuple entier du Seigneur (5). Donc, pour y entrer, faisons diligence (6) ; n'imitons pas les Juifs que leur incrédulité exclut pour jamais de la terre promise (7).

Le Graduel nous ramène au grand témoignage de l'amour du Fils de Dieu, confié à l'Esprit-Saint avec le Sang et l'eau des Mystères ; témoignage qui se relie d'ici-bas à celui que rend dans les cieux la Trinité  souveraine. Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand, proclame le Verset. Qu'est-ce à dire, sinon encore une fois qu'il nous faut céder à ces invitations réitérées de l'amour ? Nul, pour s'y dérober, n'est recevable à arguer de son ignorance, ou d'un manque de vocation aux voies plus élevées que celles où se traînent nos tiédeurs. Ecoutonsl'Apôtre s'adressant à tous, dans cette même Epître aux Hébreux que l'Eglise nous fait lire en cette fête : « Oui, sans doute ; grandes et ineffables sont ces choses. Mais si vous êtes devenus peu capables de les comprendre, c'est par votre fait ; car, depuis le temps, vous devriez y être maîtres. Vous êtes

 

1. Heb. III, 7-8, ex Psalm. XCIV. — 2. Ibid. 14. — 3. Ibid. IV, 1. — 4. Ibid. 3. — 5. Ibid. 9. — 6. Ibid. 11. — 7. Ibid. II, IV.

 

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réduits au lait des enfants, quand votre âge réclame la nourriture solide des parfaits. Quant à nous, dans nos instructions, faisant trêve aux discours qui n'ont pour but que d'inoculer les premiers éléments du Christ, nous devons nous porter plus avant, sans revenir sans cesse à poser le fondement, qui consiste à se dégager des œuvres mortes et à ouvrir sur Dieu les yeux de la foi. N'avez-vous pas été illuminés ? n'avez-vous pas goûté le don céleste ? n'avez-vous pas été faits participants de l'Esprit-Saint ? Quelle pluie de grâces, à tous moments, sur la terre de vos âmes ! il est temps qu'elle rapporte en conséquence à Dieu qui la cultive. Assez tardé ; soyez de ceux qui par la patience et la foi hériteront des promesses, jetant votre espérance, comme une ancre assurée, au delà du voile, aux plus intimes profondeurs, où Jésus n'est entré devant nous que pour nous attirer à sa suite (1). »

 

GRADUEL.

 

Jésus-Christ est venu par l'eau et le Sang : non dans l'eau seule, mais dans l'eau et le Sang.

 

V/. Il y en a trois qui rendent témoignage au ciel: le Père, le Verbe, et l'Esprit-Saint; et ces trois sont une même chose. Et il y en a trois qui rendent témoignage sur la terre : l'Esprit, l'eau, et le Sang; et ces trois concourent au même but.

Alléluia, alléluia.

V/. Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand. Alléluia.

 

ÉVANGILE.

 

La suite du saint Evangile selon saint Jean. Chap. XIX.

 

En ce temps-là, Jésus ayant pris le vinaigre, dit : Tout est consommé. Et baissant la tête, il rendit l'esprit. Or ce jour-là étant celui de la Préparation, afin que les corps ne demeurassent pas en croix durant le Sabbat (car ce Sabbat était un jour très solennel), les Juifs prièrent Pilate qu'on leur rompit les jambes, et qu'on les enlevât. Il vint donc des soldats qui rompirent les jambes du premier, puis de l'autre qui avait été crucifié avec lui. Etant venus à Jésus, et le voyant déjà mort, ils ne lui rompirent point les jambes; mais un des soldats lui ouvrit le côté avec une lance, et aussitôt il en sortit du sang et de l'eau. Et celui qui le vit en rend témoignage, et son témoignage est vrai.

 

C'est au grand Vendredi que nous entendîmes pour la première fois ce passage du disciple bien-aimé. En deuil au pied de la Croix où venait d'expirer son Seigneur, l'Eglise n'avait point alors assez de lamentations et de larmes. Aujourd'hui elle tressaille d'autres sentiments, et le même récit qui attirait ses pleurs la fait déborder dans ses Antiennes en allégresse et chants de triomphe. Si nous voulons en connaître la cause, demandons-la aux interprètes autorisés qu'elle-même a voulu charger de nous donner sa pensée en ce jour. Ils nous apprendront que la nouvelle Eve célèbre aujourd'hui sa naissance du côté de l'Epoux endormi (1) ; qu'à dater du moment solennel où l'Adam nouveau permit à la lance du soldat d'ouvrir son Cœur, nous sommes devenus en vérité l'os de ses os et la chair de sa chair (2). Ne soyons plus étonnés si, dès lors, l'Eglise ne voit plus qu'amour et vie dans ce Sang qui s'épanche.

Et toi, ô âme, rebelle longtemps aux touches secrètes des grâces de choix, ne te désole point ; ne dis pas : « L'amour n'est plus pour moi ! » Si loin qu'ait pu t'égarer l'antique ennemi par ses ruses funestes, n'est-il pas vrai qu'il n'est point de détour, point d'abîme peut-être, hélas! ne t'aient suivie les ruisseaux partis de la source sacrée? Crois-tu donc que le long trajet qu'il t'a plu d'imposer à leur poursuite miséricordieuse, en ait épuisé la vertu ? Fais-en l'épreuve. Et tout d'abord, baigne-toi dans ces ondes purifiantes; puis, abreuve à longs traits au fleuve de vie cette pauvre âme fatiguée; enfin, t'armant de foi, remonte le cours du fleuve divin. Car s'il est sûr que, pour arriver jusqu'à toi, il ne s'est point séparé de son point de départ, il est également assuré que, ce faisant, tu retrouveras la source elle-même.

Crois bien, en effet, que c'est là tout le secret de l'Epouse ; que, d'où qu'elle vienne, elle ne procède

 

1. Aug. Homil. diei, ex Tract, CXX in JOHAN. — 2. Sermo IIi Nocturni.

 

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point autrement pour trouver la réponse à la demande posée au sacré Cantique : « Indiquez-moi, ô vous que chérit mon âme, le lieu de votre repos en ce Midi dont l'ardeur est si douce (1) ! » D'autant que, remontant ainsi le fleuve sacré, non seulement elle est sûre d'arriver au divin Cœur, mais encore elle renouvelle sans fin, dans ses flots, la beauté très pure qui fait d'elle pour l'Epoux un objet de complaisance et de gloire (2). Pour ce qui est de toi, recueille aujourd'hui précieusement le témoignage du disciple de l'amour; et félicitant Jésus, avec l'Eglise son Epouse et ta mère, de l'éclat de sa robe empourprée (3), aie bien soin aussi de conclure avec Jean : « Nous donc aimons Dieu, puisqu'il nous a aimés lui-même le premier (4). »

 

1. Cant. I, 6. — 2. Eph. V, 27. — 3. Quis est iste qui venit de Edom, tinctis vestibus de Bosra ? Iste formosus in stola sua. Prima Antiphona in Vesperis.— 4. I JOHAN. IV, 19.

 

L'Eglise, présentant les dons pour le Sacrifice, rappelle en ses chants que le calice offert par elle à la bénédiction des prêtres ses fils devient, par la vertu dès paroles sacrées, l'intarissable réservoir d'où s'épanche sur le monde le Sang du Seigneur.

 

OFFERTOIRE.

 

Le calice de bénédiction que nous bénissons, ne verse-t-il pas le Sang du Christ en nos veines? Et le pain rompu par nous ne nous unit-il pas au Corps du Seigneur?

 

La Secrète  implore le  plein effet de  la divine Alliance, dont le Sang du Seigneur Jésus est venu le moyen et le gage, depuis que son effusion, renouvelée sans fin aux saints Mystères, a fait cesser le cri de vengeance que celui d'Abel faisait monter de la terre au ciel.

 

SECRETE.

 

Puissions-nous, par ces divins Mystères, aller à Jésus, le médiateur de la nouvelle Alliance; que ce Sang à nouveau répandu sur vos autels, ô Seigneur des armées, parle mieux pour nous que celui d'Abel. Par le même Jésus-Christ.

 

 

On fait mémoire du Dimanche. Le Prêtre ensuite entonne la Préface triomphante de la Croix, sur laquelle s'est conclue dans le Sang divin l'union ineffable.

 

PRÉFACE.

 

Oui, c'est une chose digne et juste, équitable et salutaire, de vous rendre grâces en tout temps et en tous lieux, Seigneur saint. Père tout-puissant, Dieu éternel, qui avez attaché au bois de la Croix le salut du genre humain, afin que lavie nous fût rendue au moyen de ce qui nous avait donné la mort, et que celui qui, parle bois, avait triomphé, fût, par le bois, vaincu à son tour ; par Jésus-Christ notre Seigneur. C'est par lui que les Anges louent votre majesté, que les Dominations l'adorent, que les Puissances la révèrent en tremblant, que les Cieux et les Vertus des Cieux la célèbrent avec transport. Daignez permettre à nos voix de s'unir à leurs voix, afin que nous puissions dire dans une humble confession : Saint ! Saint ! Saint! etc.

 

L'Antienne de Communion chante le miséricordieux amour dont le Seigneur fit preuve à sa venue, ne se laissant pas détourner de ses projets divins par l'entassement de crimes qu'il devait dissoudre en son propre Sang, pour purifier l'Epouse. Grâce à l'adorable Mystère de la foi opérant dans le secret des cœurs, quand il reviendra visiblement, il ne restera plus de ce douloureux passé qu'un souvenir de triomphe.

 

COMMUNION.

 

Le Christ a été offert une fois pour détruire les péchés d'un grand nombre; il paraîtra de nouveau, mais cette fois sans le péché, pour sauver ceux qui l'attendent.

 

Abreuvés d'allégresse aux fontaines du Sauveur, qui sont ses plaies sacrées, obtenons que le Sang précieux qui rougit nos lèvres demeure, jusqu'en l'éternité, la source vive où nous puiserons la béatitude et la vie.

 

POSTCOMMUNION.

 

Admis, Seigneur, à la table sacrée, nous nous sommes abreuvés dans la joie aux fontaines du Sauveur ; nous vous en supplions : que son Sang soit pour nous  la source d'eau vive jaillissant jusque dans la vie éternelle.  Lui qui vit et règne avec vous.

 

On ajoute comme mémoire la Postcommunion du Dimanche, dont l'Evangile se dit aussi, après la bénédiction du Prêtre, en place de celui de saint Jean.

 

A VÊPRES.

 

Hier, ouvrant la fête, l'Eglise chantait : « Quel est celui-ci qui vient de Bosra en Êdom, avec sa robe richement teinte ? Il est beau dans ce vêtement ! — C'est moi, était-il répondu, dont la parole est toute de justice, moi qui viens défendre et sauver. » Celui qui parlait ainsi était vêtu d'une robe teinte de sang, et le nom qu'on lui donne, c'est le Verbe de Dieu. « Pourquoi donc, reprenait l'Eglise, votre robe est-elle rouge, et vos vêtements comme les habits de ceux qui foulent le vin dans le pressoir ? — J'ai été seul à fouler le vin, et nul d'entre les hommes ne m'a prêté aide. » Ainsi apparaissait, par la vertu du Sang divin, celui auquel le Psalmiste avait dit : « Levez-vous dans votre gloire et votre beauté, et marchez au triomphe (1) ! » Après l'Epoux, un autre dialogue nous montrait ce matin l'Epouse, puisant elle-même dans ce Sang précieux la surhumaine beauté qui convient au banquet des noces de l'Agneau. Caries Antiennes des Laudes mettaient en scène, ainsi qu'il suit, les membres de l'Eglise, spécialement

 

1. Psalm. XLIV.

 

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les Martyrs, en qui sa gloire rayonne davantage : « Ceux-ci que l’on voit revêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d'où sont-ils venus? — Ceux-là sont venus de la grande tribulation,et ont lavé leurs robes dans le Sang de l'Agneau, C'est pourquoi ils sont devant le trône de Dieu et le servent jour et nuit. Ils ont vaincu le dragon par le Sang de l'Agneau et la parole du Testament. — Bienheureux ceux qui lavent leurs robes dans le Sang de l'Agneau ! »

 

L'Eglise ce soir revient à son Seigneur, en reprenant aux secondes Vêpres les Antiennes des premières.

 

1. Ant. Quel est celui-ci qui vient de Bosra en Edom* avec sa robe richement teinte? Il est beau dans ce vêtement !

 

Psaume CIX Dixit  Dominus, page 43.

 

2. Ant. C'est moi dont la parole est toute de justice, moi qui viens défendre et sauver.

 

Psaume CX.  Confitebor tibi, Domine, page  44.

 

3. Ant. Il était vêtu d'une robe teinte de sang, et le nom qu'on lui donne, c'est le Verbe de Dieu.

 

Psaume CXI, Beatus vir, page 45.

 

4. Ant. Pourquoi donc votre robe est-elle rouge, et vos vêtements comme les habits de ceux qui foulent le vin dans le pressoir ?

 

Psaume CXII. Laudate pueri,page 46.

 

5. Ant. J'ai été seul à fouler le vin, et nul d'entre les hommes ne m'a prêté aide.

 

PSAUME CXLVII.

 

Jérusalem, chantez le Seigneur : Sion, chantez votre Dieu.

C'est lui qui fortifie les serrures de vos portes ; il bénit les fils nés en votre sein.

Il a placé la paix sur vos frontières ; il vous nourrit de la fleur du froment.

Il envoie son Verbe à la terre ; sa parole parcourt le monde avec rapidité.

Il donne la neige comme des flocons de laine ; il répand les frimas comme la poussière.

Il envoie le cristal de la glace semblable à un pain léger : qui pourrait résister devant le froid que son souffle répand ?

Mais bientôt il envoie son Verbe, et cette glace si dure se fond à sa chaleur : l'Esprit de Dieu souffle, et les eaux reprennent leur cours.

Il a donné son Verbe à Jacob, sa loi et ses jugements à Israël.

Il n'a point traité de la sorte toutes les nations, et ne leur a pas manifesté ses décrets.

Ant. J'ai été seul à fouler le vin, et nul d'entre les hommes ne m'a prêté aide.

 

 

CAPITULE. (Hebr.  IX.)

 

Mes Frères, Jésus-Christ, le Pontife des biens futurs, étant venu à paraître, est entré une fois dans le Sanctuaire par un tabernacle plus grand et plus parfait, qui n'a point été Fait de main d'homme, c'est-à-dire qui n'a point été formé par la voie commune et ordinaire. Il est entré, non avec le sang des boucs et des taureaux, mais avec son propre Sang, nous ayant acquis une rédemption éternelle.

 

HYMNE.

 

Que par les chemins résonnent des accents de tète; que la joie brille au front des habitants de la cité ; portant des torches enflammées, que s'avancent dans un ordre harmonieux enfants et vieillards.

 

Mourant sur la dure couche de l'arbre du salut, de plaies sans nombre le Christ a répandu son Sang; cette fête en garde le souvenir ; sachons au moins, en hommage, y mêler nos larmes.

 

L'ancien Adam, par son crime, avait perdu le genre humain; l'Adam nouveau, par son innocence et par son amour, a rendu la vie à tous.

 

Le Père souverain a entendu des cieux le cri puissant de son Fils expirant ; ce Sang l'apaise, et nous mérite grâce.

 

Quiconque lave sa robe en ce Sang, n'a plus aucune tache; l'éclat empourpré qu'il y puise le rend soudain semblable aux Anges et agréable au Roi.

 

Désormais qu'aucune inconstance ne nous fasse quitter la voie droite ; atteignons le terme suprême: lieu qui nous aide dans la course, récompensera noblement nos efforts.

 

Père très puissant, soyez-nous propice : achetés du Sang de votre Fils unique, créés à nouveau dans l'Esprit pacificateur, conduisez-nous jusqu'aux sommets des cieux.

Amen.

 

V/. Daignez donc secourir vos serviteurs,

R/. Que vous avez rachetés de votre précieux Sang.

 

Si cette fête doit passer comme toute fête ici-bas, son objet reste et fait le trésor du monde. Qu'elle soit pour chacun de nous, comme elle l'est pour l'Eglise, un monument des plus sublimes faveurs du ciel. Puisse chaque année, en ramenant son passage sur le Cycle, trouver en nos cœurs de nouveaux fruits d'amour éclos sous la rosée féconde du Précieux Sang

 

ANTIENNE de Magnificat.

 

Ce jour sera pour vous un monument; et vous le célébrerez de générations en générations par un culte éternel, comme une fête solennelle à la gloire du Seigneur.

 

ORAISON.

 

Dieu tout-puissant et éternel, qui avez fait de votre Fils unique le Rédempteur du monde, et avez voulu être apaisé par son Sang; nous vous en supplions, accordez-nous de célébrer de telle sorte en nos solennels hommages le prix de notre salut, et d'être si bien défendus en terre par sa vertu contre les maux de la vie présente, que nous puissions au ciel nous réjouir à jamais de son fruit. Parle même Jésus-Christ notre Seigneur.

 

On termine en faisant mémoire du Dimanche.

 

Nous donnerons ici l'Hymne des Matines de la fête, œuvre gracieuse de tendre piété.

 

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HYMNE

 

Le Créateur, dans sa juste colère, a sous les eaux vengeresses englouti l'univers coupable, Noé seul étant sauvé dans l'arche ; puis la merveilleuse violence de l'amour a lavé dans le Sang l'univers.

 

Imbibée d'une telle pluie de salut, l'heureuse terre, qui n'abondait qu'en épines, a produit des fleurs; et l'absinthe a pris le goût du nectar.

 

Soudain le serpent cruel a perdu son poison funeste, et des bêtes féroces est tombée la fureur : du doux Agneau blessé telle fut la victoire.

 

O de la science souveraine profondeur insondable ! O suavité jamais assez louée d'un cœur rempli d'amour ! L'esclave était digne de mort, le Roi subit la peine dans sa bonté.

 

Quand par des fautes nous provoquons la colère du Juge, alors mettons-nous sous l'abri de ce Sang toujours prêt à plaider pour nous : l'armée des maux suspendus sur nos têtes alors se dissipera.

 

Racheté par vous, plein de vos dons, que l'univers vous loue en sa reconnaissance, ô guide de l'éternel salut, divin auteur de la grâce, qui possédez avec le Père et l'Esprit les royaumes bienheureux.

Amen.

 

 

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