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La voix de Catherine de Sienne / 2006 / 4 - N ° 140 / déc. 2006/ janv. 2007
Sommaire ; In memoriam André Knockaert, sj 2 ;
Edito 3 ; « Qui suis-je? », par André
Knockaert 4 ; Noël : le Pont de la grâce 6 ;
Catherine vue par Raymond de Capoue 8 ;
Catherine vue par Thérèse d'Avila 11 ;
Une œuvre de Pat Benincasa 14 ; Agenda 16
Association internationale Catherine de Sienne, reconnue par
Décret du Cons. Pont, pour les Laïcs, le 15 août 1992
www.caterinati.org Bulletin du groupe
Liège-Bruxelles Ed. resp. Chantal van der Plancke, La voix de Catherine de S.
rue de Rome 34, Bte 19, B 1060 Bruxelles. Belgique. Tél. Fax 00 32 2 539 07 45 -
c.vd.plancke@skynet.be Abon.
Belgique 8€ CPP 000-1300647-71 Etrang. 10 C IBAN BE49 0001 3006 4771-BIC
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« Entre dans la joie de ton Maître »
Le P. André Knockaert, sj, est entré dans la paix du Christ le 5 octobre 2006,
après une vie toute donnée au Seigneur et à son Eglise, en Belgique, au Nord et
au Sud, en passant par l'Afrique (R.D.Congo).
Bibliste, il avait une belle ouverture à la culture (Lévi-Strauss, de
Saussure, ... Chagall, Rembrandt), et un très grand amour de F Ecriture (Les
Psaumes et Saint Paul) qu'il transmettait dans ses cours. Et surtout une
profonde théologie de la grâce qui a marqué ses étudiants ainsi que la rédaction
du Livre de la Foi des évêques de Belgique dont il fut la cheville
ouvrière sur le plan de la rédaction.
Pour les Caterinati du groupe Liège-Bruxelles, il prit la relève du P. Draime,
op, en 1989, comme conseiller théologique. Son amour de Catherine de Sienne n'en
fut que plus contagieux, comme en témoignent le petit livre Prier 15 jours
avec Catherine de Sienne (Paris, Nouvelle Cité, 3e édit. traduit en 10
langues), ses remarquables contributions au bulletin et ses conférences.
Il fut surtout un priant avec un cœur
d'enfant. Nul doute qu'il soit heureux
dans les bras du Père et qu'il y intercède
pour nous et pour le monde.
Sa dernière prière, dont il a encore pu chanter le début :
« Âme du Christ, sanctifie-moi,
Corps du Christ, sauve-moi (...)
Dans tes blessures, cache-moi,
Ne permets pas que je sois séparé de toi (...)
A ma mort, appelle-moi,
Ordonne-moi de venir à Toi
pour qu 'avec tes Saints je Te loue,
dans les siècles des siècles... »
Né à Koksijde, cinquième enfant d'une famille de six, après ses études au
collège épiscopal de Veurne/Furnes, il est entré au noviciat de
Drongen/Tronchiennes en pleine guerre (1942-44). Il a commencé sa philosophie à
Godinne, puis une régence à Aalst/Alost (1946-48), ensuite philosophie et
théologie à Leuven/Louvain (1949-57). Il est ordonné prêtre le 10 août 1956, à
Leuven/Louvain, par Mgr S .Tigga. Il est alors envoyé au Congo (Mayidi) de 1957
à 1966, avec une année à l'Institut Biblique de Jérusalem (1960-61) et un
troisième an (1961-62). A Eegenhoven, il a préparé un doctorat à l'Université de
Strasbourg (1966-71). Ensuite vice-supérieur des étudiants d'Afrique Centrale (Smoldersplein,
Leuven), il est professeur d'Ecriture Sainte, à l'IET et au Centre Lumen Vitae
(Bruxelles). Directeur du Centre Lumen Vitae pour trois mandats de trois ans
(1977-86), il a alors travaillé à Mechelen /Malines (1986-94) comme
collaborateur et théologien du Cardinal Danneels, en charge du « Livre de la Foi
» et de la revue diocésaine « Pastoralia ». C'est en 1994 que sa santé le ramène
à la Maison-Saint-Ignace (Bruxelles), et en 2004 à la Communauté Saint-Claude La
Colombière, où il s'est éteint dans la paix.
Merci de le recommander au Seigneur dans vos prières
2
Editorial
14 décembre 2006
Chers amis,
Nous voici à la charnière de l'an 2006-2007. C'est l'occasion de rendre grâce
et d'espérer.
Pour 2006, nous retiendrons deux événements.
Pour les Caterinati du groupe Liège-Bruxelles, c'est le « départ » du
Père André, sj, (voir p. 2), dont nous espérons hériter « du manteau »,
comme Elisée et ses disciples sur le bord du Jourdain. André savait nous parler
de la bonté de Dieu, comme s'il avait enfilé à la fois du manteau d'Ignace et de
celui de Catherine, ce qui allégeait singulièrement son âme ! Vous lirez son
portrait intérieur - qui est aussi le nôtre, tant il est profond - dans les
pages suivantes. Que tout cela nous remplisse d'action de grâce.
Sur le plan de l'Eglise et du monde, cette année a marqué le 20e
anniversaire de la Rencontre des religions à Assise, suscitée de manière
prophétique par Jean-Paul II. Cela nous est devenu si familier que bien des
rencontres similaires se déroulent à petite échelle dans nos quartiers, lors
d'un événement heureux ou malheureux. La mémorable rencontre œcuménique de
Benoît XVI avec le patriarche Bartholomeos Ier à la Saint-André et la visite du
pape à la Mosquée bleue d'Istanbul sont d'humbles gestes d'une grande portée,
pareils à des grains de sénevé. En outre, la vocation de pont entre l'Orient et
l'Occident, entre les religions et les cultures, confiée à la Turquie, appelle
notre prière. Les défis sont énormes, mais n'oublions pas qu'en tout cela, la
grâce nous a précédés. « L'esprit d'Assise », c'est avant tout l'Esprit qui fait
les artisans de paix et les saints. Nous sommes à bonne école.
Pour 2007, nous retiendrons l'élargissement de
l'Europe et l'avenir de l'Afrique.
Nous voici au 5e élargissement de l'Europe - « Elargis l'espace de
ta tente » (Is. 54,2) -, défi difficile à surmonter sur le plan des
structures et surtout sur celui du vouloir vivre ensemble, au moment où
l'europessimisme ronge certains à l'Ouest et où le populisme s'attaque aux
élites à l'Est. Mais l'Europe des deux blocs n'a plus de sens, à moins de
revenir à Staline. Il s'agit de construire une cohésion européenne solide et
généreuse, capable d'exercer une influence forte pour donner à la mondialisation
un visage humain : nos 'racines chrétiennes' sont devant nous ! Bienvenue aux
nouveaux pays. A Bruxelles, nous avons vécu une magnifique semaine de réveil
chrétien, dans la série des congrès d'évangélisation des capitales d'Europe. Le
prochain exercice sera à l'Est, en Hongrie (Budapest 2007). Et le 3e
Rassemblement œcuménique européen, après ceux de Bâle (1989) et de Graz (1997),
se tiendra en Roumanie (Sibiu, sept. 2007). Que de semences d'Evangile à
confier à la terre et aux jardiniers de l'Europe : Benoît, Cyrille, Catherine et
compagnie...
Quant à l'Afrique - à ses joies et à ses peines - et en particulier
aux pays auxquels nous sommes affectivement liés par notre histoire et/ou par
nos correspondants, nous prions Catherine d'éclairer les pouvoirs politiques au
sud et au nord de la planète et de soutenir nos humbles efforts de solidarité.
« Paix aux hommes qu'il aime » (Le 2,14). Et Joyeux Noël !
Chantal van der Plancke
Merci à ceux et celles qui ont déjà versé spontanément leur
cotisation pour 2007 et qui y ont été de leur générosité. Prix inchangé (8 €).
Moins ou plus selon vos possibilités. Le plus lourd à soutenir ce sont les
tarifs postaux pour l'Europe (1,20 €) et les autres continents (1,30 €). Le
bulletin est diffusé à 380 ex. dont certains sont envoyés gratuitement à
l'étranger. Pas de chèque s.v.p. Un billet sous enveloppe (ça arrive !) ou
utilisez le compte international : code IBAN et code BIC sur la couverture.
D'année en année, la Providence n'a jamais fait défaut !
3
« Qui suis-je ? »
Le Père André KNOCKAERT sj
24 janvier 1923 - 5 octobre 2006
Cette question que Catherine posa au Père lorsqu'elle avait environ 17 ans,
André l'a souvent méditée. Voici sa réponse dans la foi. (1)
« Tiens-toi au ciel et n'aie pas peur de l'amour et de la joie des trois
personnes » (2). Qui ose le dire ? Qui ose le faire ?
Dieu m'a séduit au jour de ma jeunesse
Partons du concret de ma rencontre avec la parole de Dieu. Rencontre d'un ordre
contingent. La vie m'a appris que d'autres ne l'ont pas faite. D'autres ont
depuis longtemps tourné le dos à la parole que leur jeunesse n'a qu'effleurée,
et qui ne les a pas accompagnés dans leur vie d'adulte. Pour moi, ma conscience
atteste que la parole de Dieu est en moi depuis toujours.
Qu'elle y soit depuis toujours ne signifie pas que je la tienne de
moi-même. Si elle y est depuis toujours, c'est bien parce qu'elle m'a été
transmise par les autres, par ma mère, par ma famille, par ma paroisse, par mon
école. Avant que je ne l'eusse comprise, je croyais. La foi ainsi reçue et
nullement inventée, je me propose de la repenser, pour moi-même bien sûr, mais
aussi pour en parler et pour en témoigner afin d'offrir à d'autres ce que
d'autres m'ont donné.
Dieu m'a séduit au jour de ma jeunesse, et c'est ma mère qui l'a aidé, ma
mère, et en elle, l'Eglise. (...) Je sais que j'ai rencontré le doute aussi,
peut-être tôt, peut-être aussitôt que la foi ; pourtant aujourd'hui encore, Dieu
me séduit. Pourquoi ? Il est plus fort que moi (...), plus fort que le doute,
parce qu'il m'a séduit par sa bonté. (...)
Le mystère de ma personne
Concevoir la vie comme une vocation est ce qui caractérise fondamentalement
la vision chrétienne sur
la vie et sur le monde. Se savoir interpellé et pas uniquement se sentir perdu
comme une énigme dans
un monde muet, est une marque de ce qui sépare le chrétien de son contemporain
agnostique
moderne. Les deux paroles de Jésus : Me 10,18 « Nul n'est bon que Dieu seul
», et Mt 23, 9
« N'appelez personne sur terre votre 'Père ' : car vous n 'en avez qu'un seul
» sont à retenir. Qu'est en effet la paternité humaine ?
Les parents veulent un enfant s'ils le veulent, mais ce vouloir est purement
réceptivité, pur accueil par rapport à celui qui va naître. Ce ne sont pas mes
parents qui m'ont voulu avant que je sois, car je
n'étais pas encore ; ce ne sont pas mes parents qui ont véritablement fait de
moi « celui que je suis »,
ils ont voulu un enfant et c'était moi ! Voilà bien tout le mystère de ma
personne.
1 A. Knockaert « Dieu
circule parmi nous », dans Nouvelle Revue Théologique, n° 124, 2002. pp.
389-402. Extraits pp. 389, 392...395. Intertitres de la rédaction.
2 NDLR : Cette parole, qui habitait André (et qui l'habite
pour toujours !), est sa réaction spontanée à une citation de Saint Silouane: «
Tiens ton esprit en enfer et ne désespère pas ». réponse que le saint du Mont
Athos entendit dans son cœur, lorsqu'il supplia Dieu de lui apprendre
l'humilité.
4
Ce nom d'amour qui m'a fait celui que je suis
Celui que je suis, qui peut bien le dire ? Même moi je ne puis faire autre
chose que de m'identifier, c'est-à-dire m'orienter vers ma personne, mais mon
vrai nom m'échappe parce que j'ignore le secret profond de mon identité. Celui
que je suis, je le suis d'abord pour Dieu, parce que je le suis par Dieu. Lui,
Dieu, tient le nom qui m'a fait naître, ce nom d'amour qui m'a fait celui que je
suis. Ici se joue radicalement la différence d'accent entre celui qui se veut «
fils du hasard » et le chrétien qui se sait « fils de Dieu par création ». Ce
n'est pas par hasard que je suis celui que je suis (....) mais (...) parce que
Dieu m'a appelé par mon nom avant que je ne fusse (...)
On peut cerner ma personne en me localisant dans la société par ma parenté, fils
d'un tel, fils d'une telle, né tel jour, habitant telle localité, telle rue,
telle maison, mesurant autant, etc., etc., mais le nom qu'on me donne n'est
jamais propre au point de me nommer en moi-même : il dit toujours celui que je
suis pour les autres et « ce que je suis » à défaut de pouvoir dire parfaitement
« celui que je suis ». S'il en est ainsi, l'homme est bien plus fils de Dieu par
adoption que fils de l'homme par naissance. Les parents chrétiens attendent leur
enfant de Dieu, reçoivent leur enfant en don de Dieu. La personne humaine n'est
pas la résultante de l'interaction hasardeuse de données « mondaines » ; tout
cela peut expliquer ce que je suis, mais celui que je suis, c'est bien Dieu qui
le dit dans son acte de vocation à l'être. Celui que je suis est toujours
irréductible à ce que je suis.
Ainsi le Fils de Dieu, assumant notre condition humaine, vrai homme parmi les
hommes, est-il resté « celui qu'il est » de toute éternité pour le Père ; parce
que tout homme qu'il soit, c'est ainsi que le Père le dit du nom qui était le
sien avant la création du monde. (...)
Dieu qui s'occupe amoureusement de l'homme
Revenant maintenant à l'acte par lequel Dieu nous adresse la parole en Jésus,
nous voyons comment
ce geste a son origine dans la création même de l'homme. Dieu a toujours été
Dieu qui s'occupe
amoureusement de l'homme. C'est pourquoi ce commerce entre Dieu et l'homme a une
histoire et la
réponse humaine à cette histoire prend forme de foi en Dieu. Dieu me dit « fils
» en me donnant son
« Fils » comme frère, c'est-à-dire en me laissant participer avec son Fils à une
même condition
humaine.
Que je puisse croire, c'est-à-dire que je puisse m'abandonner à cette vocation
par le Père, suppose que je sois vraiment fils. Or cette vérité de la parole que
le Père m'adresse en son Verbe est l'Esprit du Père et du Fils en moi. Croire,
n'est donc pas extérieur au don que Dieu fait de lui-même dans la parole qu'il
m'adresse ; mais la foi naît de la séduction que le Père exerce sur son enfant
par l'Esprit qu'il a donné. (...)
La foi n'est rien d'autre que cette séduction, cet attrait qui fait que nous
nous tournons vers Dieu qui nous parle, pour l'écouter. Pour le chrétien, le
geste divin de nous adresser la parole fait foi. Pour le croyant, la présence de
Dieu, qui est proximité du Père, est une présence béatifiante. (...)
Il est donc important d'arracher la foi à la froideur du discours persuasif et
de la restituer à l'amour dont elle est l'ébauche et la naissance. Ici nous
reprenons : « nul n'est bon que Dieu seul ». Lui seul est bon, sans faille ni
défaillance (...). Or Dieu ne meurt pas (...).
La vérité de Dieu est la vérité de ma foi. Je sais que je vais mourir et que je
serai couché en terre, sous terre, mais en mourant, je dirai à Dieu : « Père,
c'est l'heure de ta vérité ». D'où le chrétien tient-il cet espoir ? Du Verbe de
Dieu, mort et ressuscité.
André Knockaert, sj
« La créature aime son Créateur selon qu'elle se voit aimée de lui.
Ainsi toute la froideur de notre cœur vient uniquement
de ce que nous ne voyons pas combien nous sommes aimés de Dieu ».
Lettre CC XXXVIII (230) de Catherine
à Ristoro Canigiani, avocat de Florence très attaché à elle.
5
« Je vous a donné mon Fils comme un pont »
L'amour et la grâce par delà l'orgueil et ses dégâts
« Sachez, mes enfants, que le chemin a été rompu par le péché et la
désobéissance d'Adam et qu'ainsi personne ne pouvait parvenir à sa fin, ce qui
était opposé à ma Vérité, qui avait créé l'homme à mon image et ressemblance
pour qu'il eût la vie éternelle et me possédât, moi qui suis la souveraine et
éternelle Bonté. La faute avait enfanté les ronces et les épines de la
tribulation, et un fleuve dont les eaux sont furieuses. C'est pourquoi je vous
ai donné mon Fils comme un pont, afin que vous puissiez passer ce fleuve sans
vous noyer.
Oui, ouvrez l'œil de l'intelligence, et voyez que ce pont vient du ciel à la
terre ; car, de la terre, on ne pouvait le faire assez grand pour passer le
fleuve et pour vous sauver.
Aussi mon Fils a uni les hauteurs du ciel,
c'est-à-dire sa nature divine,
à la terre de votre humanité.
Il faut passer par ce pont,
en cherchant la gloire de mon nom
dans le salut des âmes
en souffrant la peine et la fatigue,
en suivant les traces
du doux et tendre Verbe.
Je vous ai envoyés travailler
à la vigne de la sainte Eglise par ce que
je veux faire miséricorde au monde ;
mais craignez de passer sous le pont,
car ce n'est pas là le chemin de la vérité. »
Lettre de Catherine à Raymond de Capoue où elle lui parle de ses entretiens avec
Dieu Lettre CXXXVI (90) éd. Téqui, vol I, p. 243-244.
4
'Kilalo'
Le pont', en tetela, Congo (RDC)
« Vois quelle est l'ignorance et
l'aveuglement de l'homme qui,
alors qu'on lui a bâti une route,
s'acharne à passer dans l'eau.
La voie du pont est si délicieuse
pour ceux qui la suivent
que toute amertume devient douceur
et tout grand poids devient léger...
La joie ressentie
par celui qui suit cette voie,
nulle langue n'est capable de la dire,
nulle oreille de l'entendre,
nul œil de la voir...
Il est donc fou
celui qui dédaigne un si grand bien
en passant par la voie d'en dessous,
où il avance au milieu de mille fatigues,
sans aucune consolation
et sans aucun bien... »
Catherine de Sienne
Dialogue, 28.
R. Lotombo lewe we Kristo, we kele weeci wakiso
We kele okodi w'ototo wakiso
Enda vompembo kete nyoikakiso
Lawo kewe kilalo lomboka ka loseno
Kilalo kaso oca lo loseno la ponjo (2x)
R Louange à toi Christ, tu es notre protecteur
Tu es notre cordon ombilical
S'il se coupe, c'est notre mort
Aussi es-tu le pont sur la route de la vie
Notre pont vers la vie éternelle
1. Nde akatote ate : «r dimi kele mboka »
Ndoko lakoma le Mbapa endaka heci ma lende
Yeso kele kilalo ndo mboka
Olonga lokaa lakote : « lalanga nyama he oshidi » (2x)
1. Il nous a dit : « C'est moi le chemin »
Nul n'arrive chez le Père sans passer par lui
Jésus est le pont et le chemin
Ecoute le pangolin qui te dt :
« Qui désire de la viande, voici la trace »
2. Ndjaka ashi akela a mpedu, we hete a wato hete losale
Ndoko lakoma a weedi endaka kilalo keema
Yeso kele kilalo ndo mboka
Endakayenyi afumba wateho loshi ahookodi (2x)
2. Lorsque le courant d'une rivière est trop rapide
On ne sait ni ramer ni nager
S'il n'y a pas de pont, nul n'atteint l'autre rive
Jésus est le pont et le chemin
Où as-tu vu les fourmis passer une rivière sans liane ?
3. Le pont ouvre la route, le pont rapproche les villages
Nul ne se promène jour et nuit sans se rendre compte
De l'importance du pont
Jésus est le pont et le chemin
Ne sois pas comme l'étranger qui ne connaît
le chemin vers la bananeraie
4. Le pont nous ouvre le chemin, le pont rapproche les gens
On ne peut habiter à côté d'une rivière et ignorer
Ce que procure ce pont
Jésus est le pont et le chemin
Si le piège est fort, c'est par le levier
Par l'Abbé Ambroise Mutshembe Luhembe
Secr. de la Corn. Episcopale pour l'Apostolat des Laïcs (RDC)
Musiques et paroles (tetela) en K7 (002) et CD
7
Le récit de la vie de Catherine par Raymond de Capoue
Comment la Bible « passe » dans les Vies de saints et comment celles-ci
actualisent l'Ecriture.
Dans un ouvrage intitulé Le Moyen Age et la Bible\ le médiéviste belge Marc van
Uytfanghe étudie les rapports entre l'Ecriture sainte et les Vies de saints.
L'hagiographie (du grec hagios, saint, et graphein, écrire) signifie
littéralement « écriture sainte ». Les Vies de saints, comprises dans ce sens,
étaient destinées à divers usages. Les clercs et les moines en écoutaient la
lecture durant l'office liturgique, les repas ou les travaux en atelier. Plus
largement, les chrétiens en entendait des extraits à côté des lectures de la
Parole de Dieu, notamment lors de la fête d'un saint. Le rayonnement de certains
centres de pèlerinage reposait aussi sur la communication des gestes du saint :
de manière orale, par la prédication et la narration, ou de manière visuelle par
les représentations picturales et la statuaire.
Depuis l'Ancien Testament, une seule histoire du salut
Si l'hagiographie a parfois concurrencé la Bible, elle se présente
implicitement comme une continuation de l'Ecriture sainte. Le peuple honorait
ses saints bibliques et ses saints post-bibliques, dont la vie constituait une
exégèse pratique, locale et actualisée de l'Ecriture.
L'hagiographie médiévale était donc branchée sur la Bible et celle-ci était
transposée sur les vies de
saints. Plus les auteurs l'avaient méditée, plus l'Ecriture sainte venait tout
naturellement sous leur
plume.
La genèse des récits de vie ressemble à celle de certains textes de l'Ecriture :
des faits réels sont peu à peu amplifiés par la tradition orale, puis
progressivement stylisés.
Cette stylisation biblique peut parfois commencer avec le saint lui-même qui a
orienté sa vie selon des modèles bibliques à imiter. Les Vies de saints du haut
Moyen Age s'inspirent davantage des figures de l'Ancien Testament en raison des
convergences entre les deux époques : théocratie, aristocratie,
moeurs barbares... A partir du XIIIe siècle, l'hagiographie franciscaine se
tourne davantage vers le
Nouveau Testament, du fait de saint François lui-même qui voulut imiter le
Christ et suivre l'Evangile à la lettre.
Tout comme la mission du Christ avait été préfigurée par plusieurs figures de
l'Ancien Testament, un
saint peut illustrer la foi de plusieurs prototypes de l'Ecriture. De siècle en
siècle, c'est la même force qui les anime.
« C'est ce que confirme une biographie de la fin du Moyen Age, celle de
sainte Catherine de Sienne (1347-1380) par Raymond de Capoue (vers 1330-1399).
Selon cet auteur, qui était depuis 1380 maître général de l'ordre des
Dominicains, les vertus, les miracles et l'esprit prophétique de Catherine
permettent de la comparer successivement
1 Le Moyen Age et
la Bible (s. dir. de P. Riche & G. Lobrichon), Paris, Beauchesne, 1984, pp.
448-487.
8
à la Vierge Marie (modèle de l'humilité et de la pureté)
à Jean-Baptiste (ascèse et pauvreté),
à Marie-Madeleine (contrition et pauvreté),
à saint Jean l'Evangéliste (vérité et sainteté).
Le catalogue typologique continue avec :
Pierre (symbole de la foi),
Etienne (espérance),
Paul (charité),
Job (patience),
Noé (longanimité),
Abraham (obéissance),
Moïse (mansuétude),
Elie (zèle),
Elisée (miracles).
Suivent encore :
Jacob pour la contemplation,
Joseph pour la prédiction de l'avenir,
Daniel pour la révélation des mystères,
et David pour la louange ininterrompue du Très-Haut.
Après cette longue énumération, Raymond de Capoue parle du modèle par
excellence, à savoir le Christ lui-même. Tout saint, en effet, se doit d'être,
chacun à sa manière, un 'autre Christ. Toutefois les hagiographes médiévaux
hésitent à formuler de manière trop explicite, je dirais trop 'brutale', une
assimilation pure et simple entre un saint et cet être absolument unique que
représente pour eux le Fils de Dieu. Ils la suggèrent généralement de manière
plus prudente, et d'abord, comme le fait précisément le biographe de Catherine
de Sienne en termes d'imitation. Cette imitation du Christ constitue la clé même
de la 'théologie de l'hagiographie'...» (2).
Le saint, un 'autre Christ', mais à son école
Les allusions typologiques aux personnages de l'Ancien Testament dans la vie
de Catherine sont
naturelles, dans la mesure où, au Moyen Age, le biographe et ses lecteurs
avaient une vive conscience
que tout Israël revit dans l'Eglise et donc dans les membres de cette Eglise.
Le fil rouge de toute la pensée biblique est « l'accomplissement » ou la
réalisation d'une Parole de Dieu antérieure. La manière d'écrire le Nouveau
Testament est également orientée dans ce sens.
L'hagiographie se situe dans ce même courant spirituel.
La vie du saint commence par une initiative de Dieu à laquelle le saint répond
en modelant sa vie sur le comportement du Christ.
Par ailleurs l'Eglise a toujours pris soin de distinguer les écrits bibliques et
les autres. Les biographes à leur tour manifestent soigneusement combien le
saint est désireux de comprendre l'Ecriture et donc de se mettre à son école,
par la prière et le recueillement. Catherine demande toujours au Père de
l'instruire sur telle ou telle Parole ou situation « pastorale ». En cela le
saint est encore un « modèle ».
Dieu parmi les hommes
L'esprit évangélique, et particulièrement les Béatitudes, est actualisé par
toutes les formes de renoncement et de charité : les « œuvres de miséricorde »
(Mt 25, 35-40), le pardon des offenses, le don de ses biens... Ces attitudes
sont inspirées par la recherche de Dieu, l'imitation du Christ, et par la
reconnaissance du Christ dans les plus petits « qui sont ses frères ».
Le récit de saint Martin partageant son manteau trouve un écho dans celui de
Catherine donnant sa tunique sans manches à un pauvre qui trouvait cela
insuffisant, « Catherine se serait volontiers
2 Ibidem, pp. 456457.
9
débarrassée de sa propre tunique, mais elle craignait le scandale que cela
causerait. Voyant toutefois la joie spontanée avec laquelle la sainte se
tourmentait pour lui, l'homme n'insista plus et partit. La nuit suivante,
pendant qu'elle priait, le Christ lui apparut avec la physionomie du pauvre
dénudé tenant dans la main la tunique à manches que Catherine lui avait
finalement trouvée, mais ornée cette fois-ci de perles et de pierres précieuses.
Sans le savoir, elle avait donc vêtu son 'Epoux céleste'. Qu'elle veuille
actualiser l'Evangile, Catherine le montrait encore en soignant des malades
pestilentiels ou abandonnés par crainte de contagion (Mt, 10 8-11), à l'exemple
de François qui, « se
surpassant lui-même », donna un baiser au lépreux.
Servir « sur la terre comme au ciel »
La scène du lavement des pieds (Jn 13,13-15), la béatitude qui y est liée - «
Heureux êtes-vous si vous le faites » - et les autres invitations au service,
s'illustrent dans la manière dont la jeune Benincasa accomplit les taches
domestiques : « L'inspiration de l'Esprit Saint fit imaginera Catherine un autre
moyen de vaincre toutes les injures et tous les mépris. Elle me l'a révélé -
écrit Raymond de Capoue (3) - alors que je lui demandais
comment elle avait pu rester allègre au milieu de tant d'avanies. Elle avait
imaginé, me disait-elle, que son père lui représentait le Sauveur Notre Seigneur
Jésus-Christ, sa mère, la très glorieuse Marie, Mère de Jésus, ses frères et
autres familiers, les saints Apôtres et les disciples. Cette imagination lui
permettait de les servir avec tant de joie et tant de soin que tous étaient dans
l'admiration. Elle trouvait dans cette pensée un autre avantage, celui d'avoir
toujours présent à l'esprit pendant son travail l'Epoux qu'elle se figurait
servir. Ainsi, tout en étant à la cuisine, elle habitait au Saint des Saints,
tout en servant à table, elle nourrissait son âme de la présence du Sauveur. »
Cette divine inspiration qui fait vivre la servante de Dieu « dans le Saint des
Saints » (!) alors qu'elle s'active au milieu des casseroles se retrouve aussi
dans la vie de Thérèse d'Avila.
On peut comprendre que les Vies de saints étaient parfois plus attractives que
la Bible. Il y avait donc bien une concurrence entre les deux. Mais cela tient
au genre propre de l'hagiographie médiévale : à cette admirable manière
catéchétique de commenter la Bible par la Vie et d'éclairer la Vie par la Bible.
Bref de faire sentir que « l'histoire sainte » est toujours en marche. En outre,
il y a quelque chose de rassurant dans le fait de voir que Dieu continue à
s'occuper de nous, en suscitant des serviteurs que sa grâce a élus pour rayonner
de son Fils dans une actualité plus proche de nous.
Chantal van der Plancke
3 Vie de Sainte Catherine
de Sienne, Paris, Téqui, 2000, pp. 4748.
10
QUAND THÉRÈSE D'AVILA RENVOIE A CATHERINE DE SIENNE
1. S'attacher à l'humanité du Christ
Dans la Liturgie des heures
Le 15 octobre, en la fête de Ste Thérèse d'Avila, l'Eglise nous propose dans
la liturgie des heures' un
texte1 de la Carmélite qui renvoie à l'expérience de Catherine de Sienne.
J'ai eu la curiosité d'aller à la source...
Ce texte est tiré du Chapitre XXII de l'Autobiographie où Thérèse «
déclare combien c'est un chemin
sûr pour les contemplatifs de ne point élever leur esprit à des choses sublimes,
si le Seigneur lui-même
ne l'élève. Elle montre comment l'humanité du Christ doit être la voie de la
plus haute contemplation.
Elle rapporte une illusion où elle a été quelque temps. Ce chapitre est très
utile. » (2)
Il est effectivement très utile à l'heure où, dans certains milieux, on pratique
avec des débutants
l'envolée spirituelle pas toujours contrôlée... (et l'atterrissage non plus !).
Lisons
« Ne cherchez point d'autre chemin, alors même que vous seriez au sommet
de la contemplation. En le suivant, on marche en sécurité. Ce maître qui est
nôtre est pour nous source de tous les biens. C'est lui qui vous enseignera.
Considérez sa vie : elle est le plus parfait des modèles. Que pouvons-nous
désirer de plus que d'avoir près de nous un ami si dévoué, qui ne nous
délaissera pas à l'heure de l'épreuve et de la tribulation, comme le font ceux
du monde ? Heureux qui l'aime véritablement et le garde toujours près de soi !
Considérons le glorieux saint Paul : il semble qu'il ne cessait jamais de
prononcer le nom de Jésus, tant il le possédait au plus intime de son cœur.
Depuis le jour où j'ai eu la connaissance de cette vérité, j'ai étudié avec soin
la conduite de certains saints, grands contemplatifs ; et ils ne suivaient pas
une autre voie. Saint François nous en donne la preuve par ses stigmates et
saint Antoine de Padoue par son amour pour l'Enfant Jésus. Saint Bernard mettait
ses délices dans la Sainte Humanité, comme aussi sainte Catherine de Sienne
(...)
1 Liturgie des
heures, Paris, Cerf-DDB-Mame, 1980, Vol 4, pp.1072-1073.
2 Thérèse d'Avila, Œuvres complètes, Seuil, 1973, pp.
219-232. Trad. du P. Grégoire de St Joseph, OCD. p. 219.
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Sans doute ce doit être bon de rejeter tout ce qui est corporel, puisque
des personnes si spirituelles l'affirment ; mais dans ce cas il faut, ce me
semble, que l'âme soit très avancée... » (3)
Une interpellation qui travers le temps
L'interpellation viserait, d'après le traducteur, le père dominicain Garcia
de Toledo. « Nous devons marcher, poursuit-elle, en toute liberté dans ce
chemin de l'oraison et nous remettre entre les mains de Dieu. Si Sa Majesté veut
nous élever au rang des princes de sa cour et de ses plus intimes favoris,
allons-y simplement ; sinon, servons-la dans les offices les plus humbles, et
comme je l'ai dit quelque fois, n'allons pas de nous-mêmes nous asseoir à la
meilleure place (...) A quoi bon vouloir se diriger soi-même quand on a remis
toute sa volonté entre les mains de Dieu ?(...) Si quelqu'un a une mauvaise
voix, il n'arrivera pas, malgré tous ses efforts, à la rendre plus belle. Mais
si le Seigneur daigne lui en donner une belle, il n'a pas besoin de s'égosiller
auparavant. Ne cessons donc jamais de demander à Dieu des grâces ; mais avec un
plein abandon et une entière confiance en sa libéralité. Puisque l'on nous
permet de nous tenir aux pieds du Christ, veillons à ne point nous en retirer.
Demeurons-y comme nous pourrons... »
Je terminerai donc cet excursus en empruntant les mots mêmes de Catherine
avec lesquels elle achevait rituellement ses lettres : « Je ne vous en dis
pas davantage. Demeurez dans la sainte et douce dilection de Dieu. Doux Jésus.
Jésus amour ». (4)
2. Quand les calomnies vont bon train
De tous temps
L'art de calomnier, de fantasmer sur le dos d'un autre, s'apprend dès
l'enfance. Le drame, c'est que les calomnies se renforcent en se colportant.
Elles finissent par tenir lieu de réalité. L'actualité (procès, incitation au
racisme, au terrorisme...) défraie la chronique. Mais le phénomène n'est pas
neuf. Dans l'Ecriture et dans l'Eglise, la calomnie est souvent une arme de
défense contre ceux dont le zèle nous dérange. C'est une forme de résistance
égocentrée. Une tactique du faible dont l'homme et Dieu font les frais. Une
épreuve que l'Homme-Dieu assuma. Il n'est pas venu nous en libérer. Mais il nous
append à rester libres au sein de l'épreuve.
Au Carmel de Séville
En 1578, Thérèse d'Avila a 63 ans. Elle est confinée par le chapitre général
de son ordre. Son Livre de la Vie - son « âme » - a été confisqué par le
tribunal de l'Inquisition. Le monastère de l'Incarnation est excommunié pour
l'avoir élue. Jean de la Croix est en prison à Tolède et son carme préféré,
Jérôme Gratien, a été déposé et risque la peine de mort. (5)
A Séville, le conflit entre les Carmes Chaussés et les Déchaussés bat son plein.
Un procès criminel est tramé contre Thérèse. On met à la place de Mère Béatrice,
la prieure déposée, Mère Isabelle de Saint Jérôme, une jeune professe
déséquilibrée. On
3 Ibid. pp. 224-225.
4 Lettre de Catherine au prêtre Jean, de Pise. Cfr Lettres, Ed
Téqui, Paris, 1976, pp. 628, etc.
5 Tomas Alvarès, « Sainte Catherine de Sienne et sainte
Thérèse d'Avila, dans La Vie Spirituelle, 718, mars 1996, pp. 5-19.
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séquestre les lettres de la fondatrice, on fait venir l'Inquisition et on
fait courir des calomnies sur la moralité de la Sainte, pour la salir. Le
dossier est envoyé au nonce à Madrid. Thérèse, ne pouvant voyager confie à un
chartreux de Séville une lettre pour cette communauté : un message de paix et de
réconciliation. Deux années passent. Dans la communauté où la situation s'est
éclaircie, deux religieuses entrées dans le cercle vicieux de la calomnie
risquent d'être expulsées par leurs consoeurs. Thérèse plaide auprès de la jeune
prieure pour «qu'on ne leur montre pas le moindre ressentiment » et « que toutes
leur manifestent une affection fraternelle ».
« Rappelez-vous, écrit-elle, l'exemple de sainte Catherine de Sienne et sa
charité à l'égard de cette personne qui l'avait accusée d'être une mauvaise
femme et craignons, mes sœurs, que si Dieu venait à retirer de nous sa main, de
combien de fautes ne serions-nous pas capables ? » (6)
Retenons au passage la remarque de Thérèse sur la grâce prévenante de Dieu :
seul son amour nous
arme véritablement contre ce penchant si humain... de la calomnie !
Parmi les « Mantellate » de Sienne
Il y avait à l'hôpital de La Scala « un certain nombre de malades qu'un ange
lui-même n'aurait pu contenter (...) Catherine restait toujours avec eux douce
et active pendant qu'ils maugréaient ou l'apostrophaient avec véhémence ou
encore se plaignaient qu'elle les négligeât et fût incapable autant que sotte.
Elle n'était, disaient-ils, qu'une hypocrite qui se donnait des airs de sainte!
De vieilles courtisanes et des filles de joie depuis longtemps privées de la vie
qu'elles menaient jadis, trouvaient une triste consolation à rendre le travail
de Catherine aussi difficile que possible. L'atmosphère de chasteté qui
enveloppait Catherine les effrayait, non moins que son intimité avec Dieu
qu'elles n'avaient cessé d'offenser. Elles détestaient de tout leur cœur cette
femme dont le secours pourtant leur était indispensable. » (7)
Dans l'un des plus petits hôpitaux de Sienne s'était réfugiée une malade
répugnante. Catherine demanda l'autorisation de la soigner, mais cette Cesca ne
cessa de la traiter avec sarcasme. Lorsque Catherine s'était attardée à prier à
l'église, la vieille la provoquait en insinuant qu'elle ne cherchait en réalité
que la compagnie des moines. Catherine se tourmentait pour l'âme de Cesca. Mona
Lapa s'inquiétait pour la santé de sa fille et l'empêchait de fréquenter cette
lépreuse. Mais Catherine ne pouvait abandonner Cesca à cette heure, ce qui
équivalait à abandonner son Dieu. Elle cherchait à s'unir au Christ incompris,
vexé, humilié.
A l'hôpital de la Miséricorde, une riche veuve avait donné tous ses biens. Elle
était pieuse et le diable lui chuchotait son admiration. Mais voici qu'à Sienne
le bruit courait que Catherine était une sainte. Une sainte ? Cette jeunette qui
ne faisait que vagabonder et qui avait des relations si intimes avec quantité de
jeunes filles et de jeunes gens ! Or Palmerina était une Mantellata...
Une autre 'consoeur', Andréa, malade et aigrie, lui en fit voir également de
toutes les couleu(v)res. Mais Catherine ne voyait que la beauté des âmes que
Dieu avait créées, beauté qu'il voulait à tout prix restaurer. Chantai van der
Plancke
6 Lettre 294. Aux
Mères Isabelle de Saint-Jérôme et Marie de Saint-Joseph, à Séville, in Thérèse
d'Avila, Oeuvres complètes, Paris, Cerf, 1995, vol 2, pp. 1950-1957.
7 Sigrid Undset Catherine de Sienne, Paris, Stock,
1952, pp. 82-83.
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Ste Thérèse d'Avila et Ste Catherine de Sienne
« Que rien ne te trouble, ne crains pas, tout passe, Dieu ne change pas.
La patience surmonte tout. Qui a Dieu ne manque de rien. Dieu seul suffit. »
Thérèse d'Avila
« L'âme qui croît dans la connaissance d'elle-même, croît aussi dans la
connaissance de Dieu, car elle voit sa grande bonté envers elle ; c 'est dans le
doux miroir de la bonté de Dieu qu 'elle voit sa propre dignité : ce ne sont pas
ses mérites à elle, mais Sa création qui l'ont faite à l'image de Dieu. »
Catherine de Sienne
http://www.patbenincasa-art.com/teresa_catherine.htm
Peinture à l'huile sur portes
d'une ancienne armoire,
œuvre de
© Pat Benincasa 2003-05
0,78 m x 0,43 m
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Merci à Ann Hamilton de nous avoir envoyé d'Angleterre, une carte postale
représentant M Thérèse d'Avila et Catherine de Sienne (ainsi que le palais
d'Avignon et R. de Capoue ?). Nous avons eu la curiosité de visiter le site
indiqué et d'entrer en correspondance avec l'artiste, à St-Paul (Minnesota, USA)
: elle réalise aussi des sculptures, des vitraux et autres pièces d'art sacré.
Pat Benincasa
Qui êtes-vous ?
Je m'appelle Pat Benincasa et je suis de la première génération italienne en
Amérique. Mon père et ma mère sont nés en Italie, mais sont arrivés aux
Etats-Unis lorsqu'ils étaient enfants.
Lorsque j'étais toute petite, ma tante Thérèse me dit : « Patti, nous avons
une sainte dans la famille, Catherine Benincasa de Sienne ». J'ai toujours
eu une passion pour les saints, mais cette information suscita durant toute ma
vie le désir de lire toutes les œuvres de Catherine : ses Lettres, ses
Prières et bien sûr son Dialogue. mais je sais que je l'aime comme si
elle était de la famille.
A propos de cette carte postale
En 2003, je réalisai cette peinture à l'huile sur les portes d'une vieille
armoire. Cette œuvre est dans mon studio. Aussitôt que je l'eus terminée, j'en
fis une carte postale, sur fond noir. C'est celle que vous avez dû recevoir.
En 2005, je revins sur cette œuvre, y ajoutai plein de détails et en fis deux
étonnants posters. Un grand, de 48 x 33 cm, et un petit de 27 x 21cm. (1)
Avez-vous réalisé d'autres œuvres sur Catherine ?
Oui ! Je viens de terminer une commande pour l'église de Philadelphie. On
l'appelle l'église « St Katherine of Siena », avec un 'K' pour marquer le lien
avec Ste Katherine Drexel, qui était de cette région. 2 J'ai réalisé deux
panneaux, peints à l'huile, sur les portes d'une ancienne armoire, représentant
Ste Katherine Drexel et Ste (K)atherine de Sienne. Comme Katherine Drexel vécut
au 20e siècle, on a publié beaucoup de documents photographiques, d'articles de
journaux et de vidéos qui me permettaient de me la représenter. Mais pour
Catherine Benincasa, à ma connaissance, il n'existe aucune œuvre authentique qui
permette de se la représenter. Je voulais qu'elle ressemble à une Benincasa.
Alors, je me suis dit : « Pourquoi n'irai-je pas chercher un visage de femme
dans ma famille ? » J'observai les photos de mes tantes et cousines. Lorsque
j'eus terminé le visage de Catherine, elle ressemblait à une de mes cousines.
patbenincasa@netzero.net
1 Toutes mes œuvres sont
sur mon site www.patbenincasa-art.com
, avec des commentaires. Cliquez 'Posters and Post Cards', vous y verrez le
poster.
2 NDLR. Née à Philadelphie en 1856, fille d'un riche banquier,
Katherine Drexel eut toujours le souci des plus démunis. A la demande de son
père spirituel, l'évêque John O'Connor, de Omaha, elle fonda une congrégation de
femmes vouées à l'éducation des enfants pauvres du pays, en particulier ceux
d'origine africaine : les Sœurs du St-Sacrement. Elle fonda ainsi de nombreuses
écoles et missions au sud et à l'ouest des Etats-Unis. Après une vie intense
d'administration, elle vécut en contemplative ses vingt dernières années - ce
qu'elle avait désiré dès son enfance - et mourut à 97 ans, en 1955. Elle fut
canonisée par Jean-Paul II le 1er octobre 2000.
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