SERMON CXLIII
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SERMON CXLIII. JÉSUS RETOURNANT AU CIEL (1).

 

ANALYSE. — En expliquant le passage de l'Évangile où Notre-Seigneur représente comme utile au monde son retour au ciel, saint Augustin constate en quoi consiste l'utilité de ce retour. C'est que, dit-il, la foi est la vie du juste. Or en quittant le terre le Fils de Dieu exercée et développe la foi, et c'est ainsi que son absence même nous devient salutaire.

 

1. Le remède à toutes les blessures de l'âme, l'unique moyen donné aux hommes d'expier leurs péchés, c'est de croire au Christ : et nul absolument ne peut se purifier, soit du péché originel, contracté en Adam, en qui tous ont péché et sont devenus par nature enfants de colère (2), soit des péchés personnels, commis ensuite pour n'avoir pas réprimé, mais pour avoir suivi en esclave la concupiscence de la chair en s'abandonnant aux crimes et aux infamies; sans s'unir intimement au corps de ce Christ divin qui a été conçu sans aucun plaisir charnel, sans aucune délectation coupable, nourri sans péché dans le sein maternel, et exempt de toute faute et de toute parole artificieuse (3). Croire en lui, effectivement, c'est devenir enfants de Dieu; car on puise en Dieu une vie nouvelle en recevant la, grâce de l'adoption que communique la foi en Jésus-Christ notre Seigneur. Aussi, mes très-chers, c'est avec raison

 

1. Jean, XVI, 7-11. — 2. Ephès. II, 3. — 3. I Pierre, II, 22.

 

que ce même Sauveur et Seigneur ne parle ici que du péché dont le Saint-Esprit convainc le monde, et qui consiste à ne croire pas en lui. « Je vous dis la vérité, déclare-t-il, il vous est avantageux que je m'en aille, car si je ne m'en vais point, le Paraclet ne viendra pas à vous; mais si je m'en vais, je vous l'enverrai. Et lorsqu'il sera venu, il convaincra le monde en ce qui touche le péché, et la justice, et le jugement : le péché, parce qu'on n'a pas cru en moi; la justice, parce que je vais à mon Père et que vous ne me verrez plus; et le jugement, parce que le prince de ce monde est déjà jugé. »   .

2. Ainsi le seul péché dont il veut que soit convaincu le monde, c'est de n'avoir pas cru en lui. La foi en lui déliant tous les péchés, n'était-il pas juste de n'imputer d'autre péché que celui qui les mantient tous? Depuis cette même foi faisant puiser en Dieu une vie divine et rendant enfants de Dieu, « puisqu'il a donné à ceux (582) qui croient en lui de devenir les enfants du Seigneur (1); » croire au Fils de Dieu, c'est renoncer au péché dans la mesure de l'union contractée avec lui, et de la grâce d'adoption qui rend fils, héritiers de Dieu, et cohéritiers de Jésus-Christ. Aussi saint Jean dit-il : « Quiconque est né de Dieu ne pèche point (2); » et le péché reproché au monde est-il de ne pas croire en lui. C'est de ce même péché que le Sauveur disait encore: « Si je n'étais pas venu, ils n'auraient point de péché (3). »

N'avaient-ils pas, et en quantité innombrable, d'autres péchés? Mais c'est qu'à l'avènement du Sauveur ils commirent, pour maintenir tous leurs autres péchés, le péché de ne croire pas en lui; tandis que l'absence de ce péché dans ceux qui crurent, suffit pour effacer tous les autres. Aussi l'Apôtre Paul dit-il, et uniquement pour ce motif, que « tous ont péché et ont besoin de la gloire de Dieu (4); » que ceux qui croiront en lui ne seront pas confondus (5) ; ce qui est d'ailleurs exprimé dans ce passage d'un psaume : « Approchez de lui, et vous serez éclairés, et sur votre visage ne sera point de confusion (6). » Aussi bien, se glorifier en soi, c'est se condamner à la confusion, puisqu'on n'est point alors exempt de péchés, et l'on n'évitera la confusion qu'en se glorifiant dans le Seigneur, puisque « tous ont péché et ont besoin de se glorifier en Dieu. » C'est pour cela encore qu'en parlant de l'infidélité des Juifs le même Apôtre ne dit pas : Si quelques-uns d'entre eux ont péché, est-ce que leur péché rendra vaine la fidélité de Dieu Eh! comment aurait-il pu dire : Si quelques-uns d'entre eux ont péché, après avoir dit expressément : « Puisque tous ont péché? » Il dix, donc « Si quelques-uns d'entre eux n'ont pas cru, est-ce que leur infidélité rendra vaine la fidélité de Dieu (7)? » C'est parler de la manière la plus expresse du péché qui suffit pour empêcher la grâce de Dieu de remettre tous les autres; et c'est bien de ce même péché que le monde est convaincu par la descente de l'Esprit-Saint, parla diffusion de la grâce dans l'âme des fidèles, comme l'enseigne le Seigneur dans ces paroles : « En ce qui touche le péché, parce qu'on n'a pas cru en moi. »

3. Mais il n'y aurait ni grand mérite ni glorieux bonheur à croire, si le Seigneur se montrait toujours aux regards de l'homme avec son

 

1. Jean, I, 12. — 2. Jean III, 9. — 3. Jean, XV, 22. — 4. Rom. III, 23. — 5. Ibid. IX, 33. — 6.  Ps. XXXIII, 6. — 7. Rom. III, 3.

 

corps ressuscité. Aussi la grande grâce accordée par l'Esprit-Saint aux croyants, a été d'éteindre en eux les passions charnelles et de les embraser de désirs tout spirituels pour les faire soupirer vers le Christ, devenu invisible pour eux à l'oeil du corps. Voilà pourquoi le disciple qui avait juré de ne croire qu'autant qu'il aurait porté la main aux cicatrices du Sauveur, s'étant comme éveillé tout à coup après avoir touché son corps sacré, et s'étant écrié : « Mon Seigneur et mon Dieu! » Jésus lui répondit : « Tu crois pour m'avoir vu; heureux ceux qui n'ont pas vu et qui croient (1). » L'Esprit-Saint, l'Esprit consolateur rend donc heureux, lorsque voyant éloignée de nous cette nature de serviteur que le Christ a prise dans le sein de la Vierge, il élève le regard purifié de notre esprit vers cette nature divine elle-même qui a fait toujours de lui l'égal du Père, sans en excepter l'époque où il daigna se montrer aux hommes dans une chair mortelle. Aussi c'est sous l'impression de l'Esprit-Saint dont il était rempli que l'Apôtre disait : « Si nous avons connu le Christ selon la chair, maintenant nous ne le connaissons plus de la sorte (2). » C'est connaître en effet la chair même du Christ, non pas selon la chair mais selon l'esprit, que d'admettre la réalité vivante de sa résurrection, non point parce qu'on touche son corps avec curiosité, mais parce qu'on croit avec une pleine certitude. On ne dit pas alors dans son coeur : « Qui est monté au ciel ? c'est-à-dire pour en faire descendre le Christ; ni : Qui est descendu dans l'abîme ? c'est-à-dire pour rappeler le Christ d'entre les morts. » On dit au contraire : « Près de toi, dans ta bouche même est la Parole, » cette Parole est le Seigneur Jésus; « et si tu crois dans ton coeur que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, tu seras sauvé; « car on croit de coeur pour la justification et on confesse de bouche pour le salut (3). » C'est ainsi, mes frères, que s'exprime l'Apôtre et qu'il exhale la sainte ivresse qu'il doit à l'Esprit-Saint.

4. Il est donc bien vrai que si le Saint-Esprit ne nous en faisait la grâce, nous n'aurions pas ce bonheur de croire sans voir. Par conséquent n'est-ce pas avec raison qu'il a été dit: « Il vous est avantageux que je m'en aille; car si je ne m'en vais, le Consolateur ne viendra pas à vous, au lieu que je vous l'enverrai si je m'en vais. » Le Sauveur sans doute est toujours avec nous dans sa nature divine; si cependant

 

1. Jean, XX, 25-29. — 2. II Cor. V, 16. — 3. Rom. X, 6-10.

 

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il n'éloignait de nous son corps, toujours nous le verrions sensiblement et nous ne pourrions

croire en lui d'une manière purement spirituelle; cette foi néanmoins est nécessaire pour nous l'aire mériter de contempler avec un coeur pénétré de justice et comblé de bonheur, , le Verbe même de Dieu dans le sein de son Père, ce Verbe-Dieu par qui tout a été fait et qui s'est fait chair pour habiter parmi nous.

Mais si on croit de, coeur pour être justifié et non pas en touchant de la main, n'est-ce pas avec raison que notre justice est la condamnation de ce monde; qui ne veut croire que ce  qu'il voit ? Or, c'est pour nous communiquer cette justice de la foi qui sera la condamnation du monde incrédule, que le Seigneur disait : « A cause de la justice, car je vais à, mon Père et vous ne me verrez plus. » En d'autres termes Votre justice sera de croire en moi, votre Médiateur, en moi que vous saurez, avec une pleine certitude; être remonté vers mon Père après ma résurrection, quoique vous ne me voyiez point d'une manière sensible; et ainsi réconciliés par moi vous pourrez parvenir à voir Dieu spirituellement. Aussi une femme qui figurait l'Église étant tombée à ses pieds quand il fut ressuscité, Jésus lui dit : « Garde-toi de me toucher, puisque je ne suis point encore remonté vers mon Père (1). » Paroles mystérieuses dont le sens est celui-ci : Garde-toi d'avoir en moi une foi charnelle en l'appuyant sur le contact corporel; tu auras en moi une foi spirituelle lorsqu'après mon retour vers mon Père tu ne me toucheras plus que spirituellement. Heureux en effet ceux qui croient sans voir, et c'est en cela que consiste la justice de la foi. Or, comme le monde ne l'a pas et que nous l'avons, le juste vivant de la foi (2), nous servons à le condamner. Ainsi donc, soit pour exprimer qu'en ressuscitant avec Jésus-Christ et qu'en montant avec lui vers son Père nous perfectionnons en nous l'invisible justice; soit pour signifier que croyant sans voir; nous vivons de la foi, comme il est écrit du juste, le

 

1. Jean, XX, 17. — 2. Habac. XI, 4; Rom. I, 17.

 

Sauveur a dit : « A cause de la justice, car je vais à mon Père, et vous ne me verrez plus. »

5. Que le monde, pour s'excuser de ne pas croire au Christ, ne prétexte pas que le démon l'en empêche. Pour ceux qui croient en effet le prince du monde est banni (1), et il ne saurait plus agir dans les coeurs des hommes dont le Christ s'est rendu maître par la foi, comme il agit sur les fils de la défiance (2), qu'il pousse trop souvent à tenter et à tourmenter les justes. Car puisqu'il est banni du coeur, lui qui y régnait en tyran, il ne peut plus qu'attaquer par l'extérieur; et quoique le Seigneur se serve de ses persécutions mêmes pour avancer les humbles dans la justice (3); par le fait de son bannissement du coeur, il est jugé. Or ce jugement sert encore à la condamnation du monde. Comment en effet le monde qui refuse de croire au Christ serait-il autorisé à se plaindre du démon, puisque, depuis qu'il est jugé, c'est-à-dire banni et réduit, pour nous exercer à la vertu, à nous attaquer en dehors seulement, le démon est vaincu, non seulement par des hommes, mais par des femmes, par des enfants et de jeunes filles couvertes aussi de la gloire du martyre ? Et par qui ceux-ci l'ont-ils vaincu, sinon par Celui à qui ils ont donné leur foi; par celui qu'ils ont aimé sans le voir et dont l'empire en s'établissant dans leurs coeurs a renversé l'affreuse domination qui les tenait sous le joug ?

Comme tout cela est dû à la grâce, c'est-à-dire au Saint-Esprit, on comprend pourquoi c'est l'Esprit-Saint qui accuse le monde « à cause du péché, » puisque le monde ne croit pas au Christ; « à cause de la justice, » puisque ceux qui avaient bonne volonté ont cru en lui tout en ne le voyant pas, et espéré de parvenir aussi, par la vertu de sa résurrection, à une résurrection pleine; « à cause enfin du jugement, » attendu que si les mondains voulaient croire à leur tour, nul ne les empêcherait, « puisque le prince de ce monde est déjà jugé. »

 

1. Jean, XII, 31. — 2. Ephés.  II, 2. — 3. Ps. XXIV, 9.

 

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