MARGUERITE

Précédente Accueil Remonter Suivante

Accueil
Remonter
BLAISE
ANDRÉ CORSINI
JEANNE DE VALOIS
AGATHE
DOROTHÉE
ROMUALD
JEAN DE MATHA
CYRILLE
APOLLINE
SCHOLASTIQUE
VALENTIN
FAUSTIN
SIMÉON
CHAIRE ST PIERRE
PIERRE DAMIEN
MATHIAS
MARGUERITE
CASIMIR
PERPÉTUE FÉLICITÉ
THOMAS D'AQUIN
JEAN DE DIEU
FRANÇOISE ROMAINE
QUARANTE MARTYRS
GRÉGOIRE LE GRAND
SEPT PSAUMES
SEPT SERVITES

LE  XXVI FÉVRIER. SAINTE MARGUERITE DE CORTONE, PÉNITENTE.

 

Mêlées aux Vierges fidèles qui forment la cour de l'Epoux , les saintes Pénitentes brillent  sur  le  Cycle d'un  éclat  immortel. En elles resplendit la miséricorde  divine,  dont elles sont la glorieuse conquête. Epurées par les saintes expiations, parées de leurs larmes et de leurs soupirs, elles ont conquis l'amour de celui qui est la sainteté même, et qui a daigné prendre leur défense contre le Pharisien. A leur tête paraît Marie-Madeleine, à qui beaucoup a été pardonné, parce qu’elle a beaucoup aimé ; mais,  entre les sœurs de cette amante de Jésus, deux surtout attirent les complaisances du Ciel : Marie  Egyptienne que  le  Cycle  nous amènera  bientôt, et  Marguerite de Cortone qui vient dès aujourd'hui  nous apprendre que,  si le péché éloigne de Dieu, la pénitence peut non seulement désarmer sa colère, mais former entre le Seigneur et l'âme pécheresse ce  lien ineffable d'amour que l'Apôtre avait en vue,  lorsqu'il a dit cette belle parole : Où le péché avait abondé, la grâce a surabondé (1).

 

Etudions les vertus de l'illustre Pénitente du XIIIe siècle, dans les Leçons de l'Office que l'Eglise a consacré à sa mémoire.

 

1. Rom. V, 20.

 

383

 

Marguerite, appelée de Cortone du lieu de sa mort, naquit  à Alviano en Toscane. Les plaisirs du monde séduisirent les premières  années de sa jeunesse ; et on  la vit s'abandonner aux vanités  et aux désordres, dans la  ville de Montepulciano. Mais ayant un jour découvert  par  hasard le cadavre de  son amant assassiné par des ennemis, sous un tas de fagots qui recouvraient une fosse, et près duquel un chien l'avait conduite, tout d'un coup la main de  Dieu se fit sentir à elle. ; et la pécheresse, saisie d'un regret profond pour ses fautes, résolut de rompre  avec  sa vie  antérieure, et pleura amèrement. Elle revint donc à Alviano,  et ayant  coupé ses cheveux et renoncé à ses parures, elle se couvrit d'un vêtement de  couleur obscure,  et renonça  pour jamais aux  erreurs  de sa vie et aux attraits du monde. On la vit prosternée par terre, la corde au cou,  demander pardon dans les églises à tous ceux qu'elle avait scandalisés par sa conduite. Elle  partit ensuite pour Cortone ;  et là, sous la cendre et le cilice, elle se mit en  devoir d'apaiser la divine majesté qu'elle avait offensée : jusqu'à ce que, après trois ans d'exercice dans toutes les vertus, elle obtint l'habit du Tiers-Ordre des Frères Mineurs, sous la conduite desquels elle s'était placée. Les larmes du repentir lui devinrent familières, et la contrition de son âme s'épanchait en des sanglots si violents, qu'elle en était souvent comme suffoquée. Sa couche était la terre nue, son oreiller une pierre ou un morceau de bois. Ses nuits se passaient dans  la méditation des choses célestes ; l'ardeur de l'esprit qui en elle contraignait la chair, malgré sa faiblesse, à subir de si grands travaux, lui procura l'avantage de ne jamais plus éprouver un mauvais désir.

 

Le démon fit jouer contre elle ses embûches, et lui livra de  perfides assauts ; mais cette femme  forte sut découvrir  l'ennemi à son langage, et, toujours invincible, elle repoussa ses séductions à diverses reprises. Pour se prémunir contre le poison flatteur de la vaine gloire, que  le malin esprit cherchait à glisser en elle, on l'entendit constamment accuser sa vie passée par les rues et les places publiques, déclarant à haute voix qu'elle était digne de tous les supplices. La défense de son confesseur put seule la détourner du projet qu'elle avait conçu d'altérer les traits de son visage, qui avait pu autrefois exciter une passion impure ; et c'était pour elle un  regret de savoir que ses longues macérations n'avaient point anéanti sa beauté. De si nombreuses marques d'une rigoureuse pénitence épurèrent son âme de toutes les taches du péché ; et devenue maîtresse d'elle-même jusqu'à affranchir tous ses sens des moindres attraits de ce monde, elle devint digne de jouir souvent de la compagnie du Seigneur. La grâce qu'elle avait désirée ardemment, de participer aux douleurs du Christ et de la Vierge-Mère, lui fut accordée ; on la vit quelquefois, dans ces moments d'extase, privée de tout sentiment, comme si la vie l'eût abandonnée. On venait souvent à elle des contrées les plus éloignées, comme à une maîtresse de perfection. Dans la lumière céleste dont elle était inondée, elle découvrait les secrets des cœurs et les consciences des hommes ; elle apercevait, avec une vive douleur et beaucoup de larmes, des péchés dont Dieu était offensé dans les lieux éloignés d'elle. Enflammée d'amour pour Dieu et pour le prochain, elle opéra un fruit immense dans les âmes. Des malades vinrent lui demander la santé, des possédés leur délivrance ; elle obtint l'une et l'autre. Une mère en pleurs lui apporta son enfant mort ; elle le rendit à la vie. Ses prières continuelles eurent la vertu d'arrêter des guerres déclarées. Enfin, sa grande charité s'étendit sur les vivants et sur les morts.

 

Au milieu de tant d'actions saintes, elle ne relâcha rien de la rigueur avec laquelle elle avait coutume de traiter son corps. Rien ne put la  distraire de la contemplation  des  choses célestes ; et  elle parut  admirable dans les deux  vies, reproduisant parfaitement en elle les deux sœurs, Madeleine et Marthe. Ayant enfin demandé au Seigneur de la faire passer de cette vallée de larmes dans la patrie céleste, sa  prière  fut exaucée, et Dieu lui fit connaître le jour et l'heure de sa mort. Pleine de mérites et de travaux, comblée des dons du ciel, elle sentit les forces de son corps l'abandonner ; et pendant dix-sept jours, elle vécut sans autre aliment que ses entretiens avec Dieu. Après avoir reçu les très  saints  Sacrements de  l'Eglise, la joie étant peinte sur son visage et ses yeux levés au ciel, elle partit  avec  bonheur pour rejoindre l'Epoux, le huit des calendes de mars, en la cinquantième année de son âge, et la vingt-troisième de sa conversion, l'an du salut mil deux cent quatre-vingt-dix-sept.  Son corps,  conservé jusqu'à ce jour sans corruption, entier, souple, et répandant une odeur délicieuse, est  l'objet d'une grande dévotion, dans  l'Eglise des Frères  Mineurs, qui a pris le nom de sainte Marguerite. L'éclat des miracles a constamment environné ce saint corps : ce qui a porté les Pontifes Romains à encourager le culte de Marguerite par beaucoup de faveurs. Enfin, Benoît XIII a célébré avec pompe sa solennelle Canonisation, le jour de la Pentecôte, seize mai de l'an mil sept cent vingt-huit.

 

La joie du ciel fut grande, ô Marguerite, le jour où votre cœur, dépris de ses coupables illusions, se convertit à Dieu ; mais l'allégresse  des Anges fut plus vive encore le jour où, quittant ce corps mortel dont votre pénitence avait fait un sacrifice continuel, vous allâtes jouir  des embrassements de  l'Epoux.  Monument éternel de ses miséricordes, nous vous saluons, le cœur rempli d'espérance ; car nous aussi, nous sommes pécheurs, et nous voudrions comme vous éviter la justice que nous avons méritée, et obtenir le pardon que le Seigneur, dans sa bonté, a daigné vous accorder. Priez pour nous, ô Marguerite ! nous sommes vos frères dans la fragilité, dans les égarements ; obtenez que nous le soyons aussi dans la  pénitence. Pour  vous détacher des vains attraits du siècle, Dieu permit que le spectacle de la mort se révélât à vos yeux dans toute son horreur. Si des circonstances spéciales rendirent la vue du cadavre qui s'offrait à vos regards particulièrement éloquente pour vous, et vous firent mieux sentir  encore le danger que l'âme encourt en bravant la justice divine ; comment se fait-il que nous  demeurions insensibles aux coups que la mort ne cesse  de frapper autour de nous,  et qui nous révèlent à

 

388

 

toute heure l'incertitude de la vie , et l'approche pour nous du jugement qui décidera de notre sort éternel? Rompez notre assoupissement, ô sainte amante de notre Sauveur ! L'Eglise, en ces jours, marque nos fronts de la cendre expiatrice ; elle nous rappelle que nous ne sommes que poussière, et que bientôt nous rentrerons dans la poussière. Que cet avertissement serve à nous détacher du monde et de nous-mêmes ; qu'il incline notre cœur vers la pénitence, port assuré après tant de naufrages ; qu'il produise en nous le désir de rétablir pleinement nos relations avec un Dieu si tendre à l'égard de la pauvre âme qui, après l'avoir trahi, vient se jeter dans ses bras, et lui demande la grâce de l'aimer. Votre exemple, ô Marguerite, nous apprend que nous pouvons tout espérer. Obtenez-nous une place à vos pieds, et daignez étendre à nous cette charité maternelle qui consuma votre cœur sur la terre.

 

Précédente Accueil Remonter Suivante