SERMON CLX
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SERMON CLX. SE GLORIFIER DE JÉSUS-CHRIST (1).

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ANALYSE. — Il est des hommes qui se glorifient de leurs propres mérites. Ils ne comprennent rien à la religion, car elle veut que nous nous glorifions seulement de Jésus-Christ. En effet, premièrement, il n'y a rien en lui dont nous puissions rougir, puisqu'il possède toutes les perfections divines. Secondement, s'il a subi les humiliations et les outrages de la croix, c'était pour notre salut, et nous avons besoin, pour arriver à la gloire éternelle, d'épuiser nous-mêmes la coupe des ignominies. Gardons-nous donc de rougir de la croix ; sachons nous en glorifier ; c'est pour cela que nous la portons gravée sur notre front. Evitons aussi de nous glorifier de nos mérites, et ne soyons fiers enfin que de la croix de Jésus-Christ.

 

1. L'Apôtre vient de nous rappeler que celui qui se glorifie doit se glorifier du Seigneur ; et en nous adressant au Seigneur lui-même nous avons dit à notre tour : « Délivrez-moi et sauvez-moi dans votre justice (2) ». Ainsi se glorifier du Seigneur, c'est se glorifier, non pas de son propre mérite, mais de la justice du Seigneur même.

Cette justice semble ignorée de ceux qui se glorifient de la leur, et ce désordre s'est révélé principalement dans la personne des Juifs qui rejettent le Nouveau Testament et qui conservent le vieil homme. C'est en vain, c'est sans profit aucun qu'ils ont lu et chanté dans leurs livres: « Sauvez-moi par votre justice; car méconnaissant la justice de Dieu et voulant établir la leur, ils ne sont point soumis à la divine justice ». Que nul donc, fût-il juste, ne se glorifie de sa justice; car on pourrait lui dire : « Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu (3) ? » Et si on se glorifie, « qu'on se glorifie du Seigneur ». Est-il rien de plus sûr que de se glorifier de Celui dont personne absolument ne peut rougir ? En effet, si tu mets ta gloire dans un homme, tu peux rencontrer en lui quelque motif, des motifs même nombreux de confusion pour toi. Or dès que tu ne dois te glorifier d'aucun homme, tu dois t’abstenir aussi de te glorifier de toi-même, attendu que tu n'es pas autre chose qu'un homme. Que dis-je? il n'y a rien de plus insensé, rien de plus détestable que de te glorifier ainsi en toi-même. Mets ta gloire dans un homme juste et sage, celui-ci ne la met pas pour cela en lui-même; au lieu qu'en la mettant en toi tu n'es ai sage ni juste; et s'il est interdit de la mettre même dans un homme sage, comment

 

1. I Cor. I, 31. — 2. Ps. LXX, 2. — 3. I Cor. IV, 7.

 

la placer dans un insensé? Or, on est sûrement insensé dès qu'on la place en soi; ce seul acte suffit pour le prouver. Ah ! si l'on se glorifie, qu'on se glorifie dans le Seigneur ; rien n'est plus sûr, rien n'est moins exposé, et si tu le peux, tu as à quoi t'attacher, tu n'auras jamais à rougir. Quel défaut peut-on signaler dans cet objet sacré de tes préférences? Aussi l'homme illustre qui s'écriait : « Sauvez-moi », non pas avec ma justice, « mais avec la vôtre », venait de dire : « Seigneur, j'ai mis en vous ma confiance; à jamais je ne serai confondu (1) ».

2. Aussi d'où est venu l'égarement des Juifs et quel est le désordre qui les a éloignés des grâces de l'Evangile? N'est-ce pas uniquement celui que je viens de rappeler, et l'Apôtre ne l'a-t-il pas dit formellement ? « Je leur rends, dit-il, ce témoignage, qu'ils ont du zèle pour Dieu, mais non pas selon la science ». Voilà tout à la fois un éloge et un blâme. De quoi les blâme-t-on? De ce que tout en ayant du zèle pour Dieu, ils ne règlent pas ce zèle sur la science. Ensuite, comme si nous consultions l'Apôtre, comme si nous lui disions : Que signifie ce zèle qui ne se règle pas sur la science? Quelle est la science que n'ont pas ces hommes zélés pour Dieu ? Veux-tu le savoir ? semble-t-il reprendre, remarque ce qui suit : « C'est qu'ignorant la justice de Dieu et cherchant à établir la leur, ils ne sont pas dépendants de la justice de Dieu (2)». C'est pourquoi, si tu as du zèle pour Dieu, si tu veux le régler sur la science et entrer dans l'alliance nouvelle dont les Juifs n'ont pu faire partie, parce que leur zèle n'était pas conforme à la science, reconnais la justice de Dieu, et garde-toi, si tu es quelque

 

1. Ps. LXX, 1. — 2. Rom. X, 2, 3.

 

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peu juste, de te l'attribuer; non, si ta vie est sage, si tu observes les divins commandements, ne te l'attribue pas : ce serait chercher à établir ta propre justice. Reconnais à qui tu dois et de qui tu tiens tout ce que tu possèdes. Tu n'as rien effectivement que tu ne l'aies reçu:; or, « si tu l'as reçu, pourquoi te glorifier comme si tu ne l'avais pas reçu (1) ? » Te glorifier de cette manière, c'est te glorifier de toi ; mais celui qui se glorifie ne doit-il pas se glorifier du Seigneur ? » Conserve le bienfait, mais n'oublie pas le Bienfaiteur. Lorsque le Seigneur promettait d'envoyer son Esprit, il disait : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront de son sein (2) ». D'où viennent en toi ces fleuves? Rappelle-toi ton ancienne aridité ; car si tu n'avais été desséché, tu n'aurais pas eu soif, et n'ayant pas soif tu n'aurais pas bu. Que veux-je dire par ces mots : n'ayant pas soif, tu n'aurais pas bu ? Je veux dire que tu n'aurais pas cru en Jésus-Christ, si tu ne t'étais senti dans le besoin. Aussi . avant de dire : « Des fleuves d'eau vive couleront de son sein », il a dit : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne et qu'il boive ». Pour avoir ces fleuves d'eau vive, il faut boire ; pour boire, il faut avoir soif. Tu avais donc soif : pourquoi vouloir alors te glorifier comme si ces fleuves venaient de toi ? Oui, « que celui qui se glorifie, se glorifie du Seigneur ».

3. « Pour moi, mes frères, poursuit l'Apôtre, « lorsque je suis venu vers vous, je ne suis point venu vous annoncer le mystère de Dieu avec la sublimité du discours et de la sagesse». il ajoute. « Ai-je prétendu parmi vous savoir autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié (3)?» Mais ne savoir que cela, c'était ne rien ignorer. Quel trésor de science que Jésus-Christ crucifié ! L'Apôtre l'a mis devant les yeux des enfants comme un trésor enveloppé. Ces deux mots: « Jésus-Christ crucifié », que ne renferment-ils pas ? Ailleurs encore, comme il craignait que plusieurs ne se laissassent détourner du Christ par l'appât trompeur de la philosophie et d'une vaine science, il leur promit qu'ils auraient dans le Christ le trésor infini de la science et de la sagesse divine. « Prenez garde, dit-il, que personne ne vous séduise par la philosophie, par des raisonnements vains et trompeurs, « selon les principes d'une science mondaine, et non selon le Christ, en qui sont cachés tous les trésors de la science et de la sagesse (1) ». Le Christ crucifié comprend ainsi tous les trésors de la sagesse et de la science. Ah ! prenez garde, dit saint Paul, de vous laisser séduire par le nom menteur de science. Approchez-vous plutôt du trésor caché, enveloppé, et demandez qu'il vous soit découvert.

Philosophe égaré de ce monde, ce que tu cherches n'est rien ; c'est Celui que tu ne cherches pas qui est quelque chose. A quoi te sert d'avoir cette soif dévorante, puisque tu marches dédaigneusement sur la fontaine ? Tu méprises l'humilité, mais c'est que tu n'en comprends pas la majesté. « Si on l'avait connu, jamais on n'aurait crucifié le Seigneur de gloire (2) ». Oui, « Jésus-Christ crucifié ; je n'ai prétendu savoir parmi vous que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié » ; que son humilité, dont se moquent les orgueilleux, mais pour attirer sur eux cette sentence : « Vous avez châtié les superbes; maudits ceux qui s'écartent de votre loi (3) ». Or, quelle est cette loi de Dieu, sinon de croire en lui et de nous aimer les uns les autres ?En lui, c'est-à-dire en qui ?En Jésus-Christ crucifié. Ah ! écoutons avec sagesse ce que refuse d'écouter l'orgueil. Le commandement imposé par Dieu est de croire, en qui? au Christ crucifié; oui, ce qu'il nous commande, c'est de croire au Christ crucifié, c'est bien cela sans doute. Mais cet orgueilleux lève la tête, il se gonfle la poitrine, il s'enfle la bouche et se moque insolemment du Christ crucifié. « Maudits ceux qui s'écartent de vos préceptes ! » Pourquoi se moquent-ils, sinon parce qu'en face d'une grossière enveloppe, ils ne voient pas le trésor qu'elle enferme ? On voit la chair, on voit l'homme, on voit la croix, on voit la mort; et on rit de tout cela. Arrête, ne passe pas, retiens tes insultes et tes mépris ; attends, fouille ; n'y a-t-il pas à l'intérieur de quoi te charmer ? Et si tu y trouvais ce que l'oeil n'a point vu, ce que l'oreille n'a point entendu, ce qui n'est point monté dans le coeur de l'homme (4) ? » L'oeil voit le corps; mais il y a au dedans ce que l'oeil ne voit pas. L'oreille entend la voix ; mais il y a dans la voix ce que n'entend pas l'oreille. Dans le coeur monte, comme une

 

1. Colos. II, 8, 3. — 2. I Cor. II, 8. — 3. Ps. CXIII, 21. — 4. I Cor. II, 9.

 

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pensée terrestre, le souvenir d'un homme mort attaché à la croix; mais il y a en lui ce qui ne monte pas dans le cœur de l'homme. Il ne s'élève dans notre coeur que des idées ordinaires. « Dans le coeur de Moïse, dit l'Ecriture, monta la pensée de visiter ses frères (1) » ; c'était une pensée humaine. Et lorsque les disciples étaient indécis sur la personne même du Seigneur, lorsqu'ils se disaient, en le voyant ressuscité si vite: c'est lui, ce n'est pas lui ; c'est son corps, c'est un fantôme, il les reprit en ces termes: « Pourquoi ces pensées montent-elles dans votre coeur (2)? »

4. Cherchons donc, si nous le pouvons, non pas ce qui pourrait monter dans notre coeur, mais où notre coeur doit mériter de s'élever. Il méritera d'être glorifié avec Jésus-Christ dans son royaume, s'il a appris à se glorifier avec lui sur sa croix. Aussi, bien plus heureux que ceux qui voient où il faut monter, sans savoir par où, et qui aiment le pays de la grandeur, sans savoir le chemin de l'humilité, l'Apôtre sachant tout à la fois et le terme et la route, s'écrie avec un accent profondément convaincu. « A Dieu ne plaise que je me glorifie, sinon dans la croix de Jésus-Christ Notre-Seigneur !» Il aurait pu dire: Sinon dans la sagesse de Jésus-Christ Notre-Seigneur, et il aurait dit vrai; sinon dans sa majesté, il aurait dit vrai encore; sinon dans sa puissance, il aurait dit également vrai. Il dit plutôt : « Dans la croix ». Ce qui fait rougir le philosophe du siècle, est pour l'Apôtre un trésor ; il ne dédaigne point l'enveloppe grossière, et il découvre l'or caché. « A Dieu ne plaise que je me a glorifie,sinon dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ ! » De quel heureux fardeau vous vous chargez, ô Apôtre, il renferme tout ce que vous ambitionnez, vous avez même montré ce qu'il contient de riche. Mais de quel secours vous est-il ? Par lui, répond-il, le monde a m'est crucifié, et je le suis au monde (3)? » Comment en effet le monde vous serait-il crucifié, si pour vous ne l'avait été d'abord l'Auteur même du monde ? Ainsi que celui qui a se glorifie, se glorifie dans le Seigneur ». Dans quel Seigneur? Dans le Christ crucifié. Il y a en lui de l'humilité, mais aussi la majesté même; de la faiblesse, mais aussi la puissance; la mort, mais aussi la vie. Pour parvenir à ce qui te flatte, ne méprise point ce qui t'effraie.

 

1. Exod. II, 11. — 2. Luc, XXIV, 38. — 3. Galat. VI, 14.

 

5. Tu as remarqué dans l'Evangile les fils de Zébédée. Ils voulaient de la grandeur, ils demandaient que l'un d'eux siégeât à la droite et l'autre à la gauche du Père de la grande famille. On ne peut le dissimuler, ils ambitionnaient là une haute élévation. Mais ils n'avaient pas souci du moyen d'y parvenir; le Christ donc les rappelle de la fin qu'ils voulaient atteindre au moyen qu'ils devaient employer. Aussi que répond-il à leur demande? « Pouvez-vous, leur dit-il, boire le calice que je boirai moi-même (1) ? » Quel calice, sinon celui de l'humilité, celui de la passion , sinon celui qu'il allait boire, quand personnifiant en lui notre faiblesse il disait à son Père : « S'il est possible, mon Père, que ce calice se détourne de moi a? » C'est donc de ce calice que reproduisant encore les sentiments de ces disciples qui refusaient de le boire, cherchant la grandeur et ne s'inquiétant pas de l'humilité qui y mène, il leur disait : « Pouvez-vous boire le calice que je boirai moi-même? » Vous voulez le Christ sur son trône; rapprochez-vous d'abord du Christ sur la croix. Vous voulez siéger et être honorés avec le Christ; apprenez d'abord à dire : « A Dieu ne plaise que je me glorifie, sinon dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ (2) »

Telle est la doctrine chrétienne; elle nous ordonne, elle nous recommande l'humilité, elle nous dit de ne nous glorifier que dans la croix de Jésus-Christ Notre-Seigneur. Il n'est pas difficile de te glorifier de la sagesse du Christ; ce qui est grand, c'est de te glorifier de sa croix, c'est que l'homme pieux s'honore de ce qu'outrage l'impie, c'est que le chrétien se fasse gloire de ce que dédaigne le superbe. Ne rougis donc pas de la croix du Christ; aussi pour te préserver de cette honte, as-tu reçu au front ce signe sacré, et pour ne pas avoir peur des propos étrangers, pense à ton front.

6. Le signe de l'Ancien Testament était la circoncision , imprimée secrètement sur la chair; le signe du Nouveau est la croix, marquée ouvertement sur le front. C'est qu'alors les mystères étaient cachés, tandis qu'ils sont à découvert aujourd'hui; il y avait alors un voile, la face est aujourd'hui dévoilée. Car, est-il dit, « tant qu'ils lisent Moïse, ils ont un voile posé sur le coeur (3)». Pourquoi ce voile ? Parce qu'ils ne sont pas allés jusqu'au Christ.

 

1. Matt. XX, 22. — 2. Ib. XXVI, 39. — 3. II Cor, III, 15, 16, 18.

 

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« Lors en effet que tu te seras converti au Christ, le voile sera enlevé » ; tu portais la circoncision secrètement, tu porteras la croix sur le front. — Pour nous, continue l'Apôtre, « contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, nous nous transformons en sa ressemblance , nous élevant de clarté en clarté, comme par l'Esprit du Seigneur (1) ». Ah ! ne t'attribue pas cette transformation, ne la regarde point comme ton oeuvre ; autrement, méconnaissant la justice de Dieu et voulant établir la tienne, tu ne serais pas soumis à cette divine justice. Passe au Christ, ô toi qui t'honores d'être circoncis. Ne mets-tu pas ta gloire dans ce que tu rougirais de montrer? Sans doute, la circoncision est un signe, un signe véridique et commandé par Dieu mais c'est un signe de ce qui est caché; car le Nouveau Testament était voilé dans l'Ancien, comme l'Ancien se révèle dans le Nouveau. Hâte-toi donc de mettre à découvert ce signe caché et de placer sur ton front ce qui est voilé sous tes vêtements. Ignore-t-on que le Christ était figuré par là? Aussi on employait le couteau de pierre ; et le Christ était la Pierre (2). Aussi la circoncision se faisait le huitième jour; et le huitième jour est consacré au Seigneur à cause de sa résurrection. Aussi l'Apôtre en quittant ces ombres pour s'attacher au Christ et rejeter le voile antique, sait-il de quoi il a à se glorifier. « A Dieu ne plaise que je me glorifie, dit-il, sinon dans la croix de Jésus-Christ Notre-Seigneur ! » Et que venait-il d'enseigner? « Que ceux qui se font circoncire ne gardent pas la loi, mais veulent que vous vous fassiez circoncire pour se glorifier en votre chair (3) ». Et vous, que voulez-vous, ô grand Apôtre ? — Que tu arbores le signe sacré sur ton front. « A Dieu ne plaise que je me glorifie, sinon dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ ! » Je sais maintenant ce que j'ignorais; la nouvelle alliance est faite, et voilà mis au grand jour ce qui était dans les ténèbres. La lumière s'est levée sur ceux qui étaient assis à l'ombre de la mort (4) ; ils voient ce qu'ils ne voyaient pas; ce qui était secret est maintenant à découvert. La Pierre fondamentale est descendue parmi nous, tous elle nous a circoncis spirituellement, et sur le front des fidèles rachetés elle a gravé le symbole de l'humilité.

 

1. II Cor. III, 15, 16, 18. — 2. I Cor. X, 4. — 3. Gal. VI, 14, 13. — 4. Isaïe, IX, 2.

 

7. Maintenant donc glorifions-nous de la croix du Christ, et n'ayons pas honte des abaissements du Très-Haut. Jusques à quand dureront cette distinction des aliments et cette circoncision de la chair? Voilà des hommes qui font un Dieu de leur ventre et qui mettent leur gloire dans l'ignominie (1). Qu'ils croient enfin, puisqu'ils le voient accompli, ce qui leur était annoncé d'avance. Ah ! si nous avons appelé son avènement, ne soyons point ingrats envers le Sauveur, puisqu'il est arrivé: « Cependant comment les Juifs sont-ils devenus, relativement à la grâce nouvelle, des bannis, des étrangers, des transfuges? C'est que leur zèle pour Dieu n'est pas conforme à la science ». A quelle science ? C'est qu'ils méconnaissent la justice de Dieu et cherchent à établir la leur » ; c'est que ne voyant Dieu que dans ses commandements, ils s'estiment capables de les accomplir par leurs propres forces et s'éloignent ainsi du secours divin qui leur est pourtant nécessaire. « Car le Christ est la fin de la loi », il en est le perfectionnement, « en ce sens qu'il communique la justice à qui croit en lui (2) ». En effet quand on croit en lui, comme il justifie l'impie », l'impie et non le saint, l'impie qu'il rend saint, « la foi est imputée à justice. « Si Abraham lui-même doit sa justification à ses oeuvres », comme s'il en était l'auteur et l'auteur par lui-même ou le premier principe, « il a de quoi se glorifier, mais non devant Dieu (3) ». Cependant celui qui se glorifie doit se glorifier en Dieu », et pouvoir dire avec assurance : « Dans votre justice délivrez-moi et sauvez-moi ». C'est le Seigneur effectivement qui délivre et qui sauve, non pas ceux qui s'attribuent ce qu'ils ont reçu, mais ceux qui espèrent en lui.

« Il y a sagesse à savoir même de qui on a reçu le bienfait (4) ». Qui parle ainsi? Un homme qui a prié Dieu pour obtenir de lui la tempérance. Mais peut-on, sans quelque tempérance, accomplir, je ne dis pas toute justice, mais un devoir quelconque de justice, puisque c'est le plaisir qui porte au péché, sans quoi on ne pécherait pas? La justice, hélas l'a moins d'attraits, peut-être même n'en offre-t-elle pas du tout, au moins n'en éprouve-t-on pas pour, elle autant qu'il conviendrait. Pourquoi cette espèce de dégoût? Ne vient-il pas

 

1. Philip. III, 19. — 2. Rom. X, 2-4. — 3. Ib. IV, 5, 2. — 4. Sag. VIII, 21.

 

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de la langueur de l'âme? N'est-ce pas le pain qui fait horreur, quand on court au poison? Et comment, je vous le demande, sortir de cette langueur? Est-ce par nous-mêmes que nous en sommes capables ? Tous, hélas ! nous avons pu nous blesser, mais qui de nous peut guérir cette blessure volontaire? Voilà bien l'image de nos péchés : qui n'en commet quand il veut? Mais chacun ne saurait en fermer la plaie comme il l'entend. Ah ! que nos coeurs deviennent donc pieux, fidèlement chrétiens et sensibles à la grâce. Reconnaissons notre Médecin: jamais le malade ne se guérit lui-même.

 

 

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