PASSION JEUDI

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LE JEUDI DE LA SEMAINE DE LA PASSION.

 

A Rome, la Station est dans l'Eglise de saint Apollinaire, qui fut disciple de saint Pierre et ensuite  premier Evêque de Ravenne et Martyr.

 

COLLECTE.

 

FAITES, ô Dieu tout-puissant, que la nature humaine, qui a été blessée par son intempérance, soit rétablie en sa dignité par cette abstinence salutaire. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

EPÎTRE.

 

Lecture du Prophète Daniel. Chap. III.

 

En ces jours-là , Azarias pria le Seigneur et dit : Seigneur notre Dieu, nous vous en conjurons par la gloire de votre nom, ne nous abandonnez pas à jamais. Ne détruisez pas votre alliance, et ne retirez pas de nous votre miséricorde. Avez égard à Abraham votre bien-aimé, à Isaac votre serviteur, et à Israël votre saint, auxquels vous avez promis que vous multiplieriez leur race comme les étoiles du ciel, et comme le sable qui est sur le rivage de la mer. Car nous sommes réduits, Seigneur, à un plus petit nombre que toutes les autres nations ,  et  nous sommes aujourd'hui humilies  par toute la   terre, à cause de nos péchés. Et il n'y a plus maintenant parmi nous   ni prince , ni chef, ni prophète, ni   holocauste, ni sacrifice, ni oblation, ni encens,  ni lieu où nous puissions vous  offrir les   prémices,   afin  d'avoir part   à   votre miséricorde. Mais daignez nous recevoir à cause de notre cœur contrit et de notre esprit humilié. Que ce sacrifice offert devant vous aujourd'hui vous soit agréable comme un holocauste de béliers et de taureaux, comme l'offrande de mille agneaux gras : car ceux qui mettent en vous leur confiance ne seront point confondus. Et maintenant, c'est de tout notre  coeur que   nous allons   à vous, que nous vous craignons,  et   que   nous cherchons votre face.  Ne  nous repoussez pas ; mais agissez avec nous selon votre douceur et selon la grandeur de votre miséricorde. Délivrez-nous par les merveilles de votre  puissance, et donnez gloire   à votre   nom,   Seigneur.   Que tous ceux qui font souffrir des maux à vos serviteurs soient confondus; qu'ils soient confondus par votre toute-puissance ; que leur force soit brisée; et qu'ils sachent que vous êtes le Seigneur, le Dieu unique, plein de gloire par toute la terre, ô Seigneur notre Dieu!

 

C'est ainsi que Juda, captif en Babylone, épanchait ses vaux au Seigneur par la bouche d'Azarias. La désolation était au comble dans Sion, veuve de son peuple et de ses solennités ; ses fils, transplantés sur une rive étrangère, devaient successivement y mourir jusqu'à la soixante-dixième année de l'exil ; après quoi Dieu se souviendrait de ses exilés, et les ramènerait en Jérusalem par la main de Cyrus. Alors aurait lieu la construction du second temple qui devait voirie Messie. Quel crime avait donc commis Juda pour se voir soumis à une telle expiation? La fille de Sion s'était prostituée à l'idolâtrie; elle avait rompu le pacte sacré qui l'unissait au Seigneur comme à son époux. Toutefois son crime fut effacé par cette captivité d'un nombre limité d'années; et Juda, rétabli dans la terre de ses pères, ne retourna plus au culte des faux dieux. Il était pur d'idolâtrie lorsque le Fils de Dieu vint habiter au milieu de lui. Mais quarante ans ne s'étaient pas écoulés depuis l'ascension glorieuse de ce divin Rédempteur, que Juda reprenait de nouveau le chemin de l'exil; qu'il était, non plus emmené captif à Babylone, mais dispersé, après d'affreux massacres, dans toutes les nations qui sont sous le ciel. Voilà, non plus soixante-dix ans, mais dix-huit siècles qu'il est « sans prince, sans chef, sans prophète, sans holocauste, sans sacrifice et sans temple ». Le crime commis  par  Juda est  donc  plus grand encore que l'idolâtrie, puisque, après une si longue suite de malheurs et d'humiliations, Ja justice du Père n'est pas apaisée! C'est que le sang qui fut versé par le peuple juif sur le Calvaire en ces jours n'est pas seulement le sang d'un homme; c'est le sang d'un Dieu. Il faut que toute la terre Je sache et le comprenne, à la seule vue du châtiment des meurtriers. Cette immense expiation d'un crime infini doit se continuer jusqu'aux derniers jours du monde; alors seulement le Seigneur se souviendra d'Abraham, d'Isaac et de Jacob ; une grâce extraordinaire descendra sur Juda, et son retour consolera l'Eglise affligée de la défection d'un grand nombre de ses fils. Le spectacle d'un peuple entier imprégné de la malédiction dans toutes ses générations, pour avoir crucifié le Fils de Dieu, donne à réfléchir au chrétien. Il y apprend que la justice divine est terrible, et que le Père demande compte du sang de son Fils, jusqu'à la dernière goutte, à ceux qui l'ont versé. Hâtons-nous de laver dans ce sang précieux la tache de complicité que nous avons avec les Juifs; et, rompant les liens de l'iniquité, imitons, par une entière conversion, ceux d'entre eux que nous voyons de temps en temps se détacher de leur peuple et se rendre au divin Messie, dont les bras sont étendus sur la Croix pour recevoir tous ceux qui veulent revenir à lui.

 

EVANGILE.

 

La suite du saint Evangile selon saint Luc. Chap. VII.

 

En ce temps-là, un Pharisien pria Jésus de venir manger avec lui ; et étant entre dans la maison de ce Pharisien, il se mit à table. Et voilà qu'une femme de la ville, qui vivait dans  le péché, ayant su que Jésus était à table dans la maison du Pharisien, apporta  un vase  d'albâtre  plein d'une huile de parfum. Et  se  tenant derrière lui à ses pieds, elle commença  à les arroser île ses larmes, et les  essuyant avec ses cheveux, elle les baisait, et y  répandait le  parfum. Ce que voyant  le  Pharisien  qui avait invité Jésus, il se dit en lui-même: Si cet homme était un Prophète, il saurait qui est celle qui  le touche, et que c'est une pécheresse. Alors Jésus, prenant la  parole, lui dit : Simon, j'ai quelque  chose à te dire. Il répondit : Maître, dites. En créancier avait deux  débiteurs ; l'un lui devait cinq cents deniers, et l'autre cinquante.  Comme ils n'avaient pas de quoi lui rendre,  il  leur remit à tous deux leur  dette.  Lequel l'aimera le plus? Simon répondit:  J'estime que  c'est celui à qui il a remis davantage. Jésus lui dit : Tu as  bien jugé. Et, se tournant vers la femme, il dit à Simon : Vois-tu cette femme? Je suis entré dans ta maison,  et tu n'as pas versé d'eau sur mes pieds;  mais elle, elle les a arrosés de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. Tu ne m'as pas donné le baiser; mais elle, depuis qu'elle  est  entrée, n'a pas cessé de baiser mes pieds. Tu n'as pas verse de parfum sur ma tète ;  mais elle,  elle a  répandu  ses parfums sur mes pieds. C'est pourquoi je te dis : Beaucoup dépêchés lui sont remis, parce qu'elle a  beaucoup aimé ; mais celui à qui on remet moins, aime moins. Alors il  dit à cette femme : Tes péchés te sont remis. Et ceux qui étaient à table avec lui commencèrent à dire en eux-mêmes : Quel est celui-ci qui remet même les péchés. Et il dit à  la femme : Ta foi t'a  sauvée ; retire-toi en paix.

 

 

Aux idées sombres que suggère le spectacle de la réprobation du peuple déicide, l'Eglise se hâte de faire succéder les pensées consolantes que  doit produire dans  nos âmes l'histoire de la pécheresse de l'Evangile. Ce trait de la vie du Sauveur ne se rapporte pas au temps de la Passion ; mais les jours où nous sommes ne sont-ils pas les jours de la miséricorde; et ne convient-il pas d'y glorifier la mansuétude et la tendresse du cœur de notre Rédempteur qui s'apprête, en ces jours mêmes. à faire descendre le pardon sur un si grand nombre de pécheurs par toute  la terre ? D'ailleurs Madeleine n'est-elle pas la compagne inséparable de son cher Maure crucifié ? Bientôt nous la verrons au pied de la Croix ; étudions ce type d'amour, fidèle jusqu'à la mort ; et pour cela considérons son point de départ.

Madeleine avait mené une vie  coupable ; sept démons, nous dit ailleurs  le saint  Evangile, avaient fixe en elle leur demeure. Il a suffi à cette femme de voir et d'entendre le Sauveur; tout aussitôt la haine du pèche la saisit, le saint amour se révèle à son cœur ; elle n'a plus qu'un désir, celui de réparer sa vie passée. Elle a péché  avec éclat : il lui faut une rétractation éclatante de ses égarements; elle a vécu dans le luxe : désormais ses parfums sont tous pour son libérateur; de sa chevelure, dont elle était si fière, elle lui essuiera les pieds; son visage ne connaîtra plus les ris immodestes; ses yeux, qui  séduisaient les âmes, sont noyés dans les larmes. Parle mouvement de l'Esprit divin qui la possède, elle part pour revoir Jésus.  Il est chez le Pharisien, il est assis  à un festin, elle va donc se donner en spectacle; que lui importe? elle s'élance avec son vase  précieux, et dans un instant la voilà aux pieds du Sauveur. C'est là qu'elle s'établit, là qu'elle épanche son cœur et ses larmes. Qui pourrait décrire les sentiments qui se pressent dans son âme ? Jésus lui-même nous les fera connaître tout à  l'heure d'un seul mot.  Mais il est aisé de  voir à ses  pleurs combien elle est touchée, à l'emploi de ses parfums et de ses cheveux combien elle est reconnaissante, à sa prédilection pour les pieds de son Sauveur combien elle est humble.

Le Pharisien se scandalise. Par un mouvement de cet orgueil judaïque qui bientôt crucifiera le Messie, il prend de là occasion de douter de la mission de Jésus. « S'il était prophète, pense-t-il, il saurait quelle est cette femme. » Lui, s'il avait l'esprit de Dieu, il reconnaîtrait le Sauveur promis à cette condescendance envers la créature repentante. Avec sa réputation de vertu, qu'il est au-dessous de cette pauvre femme pécheresse ! Jésus prend la peine de le lui donner à  comprendre, en faisant de sa bouche divine le parallèle de Madeleine  et de Simon le Pharisien, et dans ce parallèle  l'avantage reste à Madeleine.  Quelle cause a donc ainsi  transformé la  pécheresse  de manière à lui  mériter non seulement le  pardon, mais  les éloges publics de Jésus ? Son  amour : « elle a aimé son Rédempteur, elle l'a aimé beaucoup » , et le pardon qu'elle a reçu est selon la mesure de cet amour. Il y  a peu d'heures, elle n'aimait que le monde et la vie sensuelle; le repentir a créé en elle un  être  nouveau; elle ne cherche  plus, elle ne voit plus, elle n'aime plus que Jésus. Désormais elle s'attache à ses pas, elle veut subvenir à ses besoins, elle  veut  surtout le voir et l'entendre; et, au moment  de  l'épreuve, quand les Apôtres auront fui, elle sera là au pied de  la Croix, pour recevoir le  dernier soupir de celui à qui son âme doit la vie. Quel sujet d'espérance  pour le pécheur! Jésus  vient de le dire : « Celui à qui l'on remet plus, est celui-là même qui aime plus. » Pécheurs, songez à vos péchés; mais songez surtout à accroître votre amour. Qu'il soit en proportion de la grâce du pardon que vous allez recevoir, et « vos péchés vous seront remis ».

 

 

Humiliate capita vestra Deo.

Humiliez vos têtes devant Dieu.

 

 

ORAISON.

 

Soyez, Seigneur, favorable à votre peuple, afin que, rejetant tout ce qui vous déplaît, il mette ses délices dans l'accomplissement de vos commandements. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

Nous terminerons cette journée par cette Hymne touchante du Bréviaire Mozarabe.

 

HYMNE.

 

Verbe du Père, qui avez daigne paraître dans la chair, Agneau de Dieu, oui ôtez les pèches du monde, nous venons vers vous humblement, pour nous désaltérer dans le sang de votre auguste Passion.

 

Montrez-nous les stigmates de vos blessures sacrées; faites briller le signe glorieux de votre Croix ; que par la force inépuisable qui réside en lui, le salut soit accordé aux croyants.

 

Le roseau, les clous, les crachats, le breuvage de myrrhe, la couronne d'épine, les fouets, la lance, sont, ô Christ, les instruments de votre supplice ; à cause d'eux, daignez aujourd'hui pardonner nos crimes.

 

Que le sang de vos blessures sacrées arrose et lave nos cœurs, qu'il enlevé le poison de notre malice ; que notre vie présente soit exempte de pèche: que la vie future nous soit une bienheureuse récompense.

 

Quand le jour de la résurrection se lèvera, quand les splendeurs de l'éternel royaume viendront illuminer ce monde, faites-nous suivre, à travers les airs, cette route qui nous conduira vers les heureux habitants du céleste séjour.

 

Honneur soit au Dieu éternel ! gloire au seul Père, au Fils unique et à l'Esprit-Saint! Trinité qui vit et règne dans les siècles des siècles. Amen.

 

 

Rendons notre hommage à la sainte Croix, en lui offrant ces strophes ces strophes que lui consacre l’Eglise Grecque.

 

 

(Feria IV. Mediae Septimae.)

 

Le bois avec lequel Elisée retira du Jourdain le fer de la hache fut la figure de la Croix, par laquelle, ô Christ, vous avez retiré de l'abîme de leurs vanités les nations qui, aujourd'hui, chantent avec transport : « Vous êtes béni, Dieu de nos pères ! »

Les cieux s'unissent à la terre dans une commune allégresse , pour adorer votre Croix ; car c'est vous-même qui avez réuni les Anges et les hommes qui chantent ensemble : « Seigneur notre Dieu, soyez béni ! »

 

Adorant la Croix du Seigneur, et glorifiant notre libérateur qui y fut attaché, présentons notre hommage selon les trois bois dont elle fut formée : une tendre compassion pour le cyprès odorant, la foi pour le cèdre, et pour le pin une charité sincère.

 

Vous avez étendu, ô Christ, vos mains sur le bois; là vous avez détruit le péché de l'homme, qui n'avait pas su retenir sa convoitise. La lance vous a blessé; mais vous l'avez retournée contre l'ennemi. En goûtant le fiel,vous avez anéanti le mal dont la douceur est trompeuse; vous avez été abreuvé de vinaigre, vous qui êtes les délices de tous.

 

J'étais mort par l'arbre du péché, j'étais livré au trépas par une nourriture qui m'avait flatté; rendez-moi la vie, Seigneur ; relevez-moi, faites-moi adorer vos souffrances et participer à votre divine résurrection ; rendez-moi le cohéritier de ceux qui vous aiment.

 

O Croix, signe d'allégresse, armure invincible, honneur des Apôtres, force des Pontifes, rends la vigueur à mon âme languissante ; fais que je t'adore, que je célèbre tes louanges, que je m'écrie : «Créatures du Seigneur, louez le Seigneur, et exaltez-le dans les siècles. »

 

 

 

 

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