V. DE NOËL I
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EPIPHANIE VI

PREMIER SERMON POUR LA VEILLE DE NOËL. Sur ces paroles du martyrologe : Jésus-Christ, fils de Dieu, naît à Bethléem de Juda (*).

1. Il a retenti une parole de bonheur sur notre terre, un mot d'allégresse et de salut dans la tente des pécheurs; une bonne parole de consolation, un mot plein de bonheur, digne d'être accueilli par tous. Montagnes tressaillez, éclatez en cantiques de louange, arbres des forêts applaudissez tous au Seigneur : il arrive. Cieux prêtez l'oreille, terre écoutez avec attention; que toute créature, mais que l'homme surtout soit transporté d'admiration, éclate en louanges; «Jésus-Christ, le Fils de Dieu, naît à Bethléem de Juda. » Quel homme au cœur de pierre ne sentira point son âme se fondre à ces mots? Quelle plus douce nouvelle pouvait-on nous annoncer? De quelles plus grandes délices pouvions-nous être inondés? A-t-on jamais rien entendu de pareil, et le monde a-t-il jamais rien appris de semblable ? « Jésus-Christ, le Fils de Dieu, naît à Bethléem de Juda. » Quelques mots à peine pour rendre l'abaissement du Verbe, mais de quelles célestes douceurs ils sont remplis ! On voudrait pouvoir exprimer plus longuement cet océan de. douceurs comparables au miel, mais les expressions font défaut : telle est la grâce de ce peu de mots, que vouloir .y ajouter un seul iota serait en diminuer à l'instant le charme. « Jésus-Christ, le Fils de Dieu, naît à Bethléem de Juda. » O naissance d'une inviolable sainteté! honorable aux yeux du monde entier, aimable à tout homme par la grandeur du bienfait qu'elle lui apporte, incompréhensible aux anges même, à cause de son excellence et de sa nouveauté. sans exemple, car on n'en vit point de semblable avant elle, et on n'en verra pas une seconde après elle. O enfantement qui seul ne connut point la douleur, qui seul n'a point connu la honte et seul est

(*) Ces mots se lisent dans le martyrologe d'Usuard, dont toutes, ou presque toutes les églises de France, et même celle de Rome, faisaient usage à cette époque.

demeuré pur de toute corruption! qui seul a fermé, au lieu de l'ouvrir, le sanctuaire d'un sein virginal! O naissance qui surpasse la nature par sa merveilleuse excellence et qui la sauve par sa vertu mystérieuse! O mes frères, qui est-ce qui pourra raconter cette naissance? Un ange est le messager qui l'annonce, la vertu du Très-Haut la couvre de son ombre, et le Saint-Esprit est survenu pour la consommer. Une vierge croit, par la foi une vierge conçoit, une vierge enfante et demeure toujours vierge : n'y a-t-il point là de quoi s'étonner ? Le Fils du Très-Haut, un Dieu engendré de Dieu avant tous les siècles vient au monde ; le Verbe naît enfant; qui pourrait ne point être frappé d'admiration?

2. Mais cette naissance n'est point oiseuse, ni cette grâce de la majesté divine, inutile. « Jésus-Christ, le Fils de Dieu, naît à Bethléem de Juda. » O vous qui êtes couchés dans la poussière, réveillez-vous et louez Dieu. Voici le Seigneur qui vient avec le salut, il vient plein d'onction, il vient environné de gloire. Car Jésus ne peut venir sans le salut, ni le Christ sans onction, ni le Fils de Dieu sans gloire, puisqu'il est lui-même le salut, l'onction et la gloire, selon qu'il est écrit : « Un fils sage est la gloire de son père (Prov. X, 1). » O heureuse l’âme qui, après avoir goûté au fruit du salut, se sent attirée et court dans l'odeur de son parfum, elle verra sa gloire, la gloire du Fils unique du Père. Respirez, ô vous qui êtes perdus, car Jésus est venu sauver ce qui avait péri. Malades, revenez à la santé, le Christ est venu mettre le baume de sa miséricorde sur les plaies de vos cœurs. Tressaillez de joie et de bonheur, vous tous qui aspirez à de grandes destinées; le Fils même de Dieu est descendu à vous pour faire de vous des cohéritiers de son royaume. Oui, Seigneur, je vous en conjure, guérissez-moi et je serai guéri; sauvez-moi et je serai sauvé; glorifiez-moi et je serai vraiment dans la gloire. Oui, que mon âme bénisse le Seigneur et que tout ce qui est en moi loue son saint nom (Psalm. CII, 1), quand il se sera offert en victime pour mes iniquités, qu'il aura cicatrisé toutes mes plaies et qu'il aura comblé tous mes veaux de bonheur. Voilà, mes très-chers frères, les trois avantages que je trouve dans la naissance de Jésus-Christ, Fils de Dieu. Pourquoi l'appelons-nous Jésus, si ce n'est parce que « c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés (Matth. I, 21)? » Pourquoi a-t-il voulu que nous lui donnions, nous, le nom de Christ, sinon parce que « son huile fera éclater notre joug (Is. X, 27) ? » Pourquoi enfin le Fils de Dieu s'est-il fait homme, si ce n'est pour faire l'homme enfant de Dieu? Or, qui est-ce qui a jamais résisté à sa volonté? Quand Jésus nous justifie, qui est celui qui nous condamnera? Si c'est le Christ qui nous guérit, quel est celui qui pourra nous faire des blessures? Enfin si c'est le Fils même de Dieu qui nous élève, où est celui qui pourra nous abaisser?

3. C'est la naissance de Jésus : que celui donc que les péchés condamnaient au fond de sa conscience, à la damnation éternelle, se réjouisse; car la charité de Jésus dépasse de beaucoup le nombre et l'étendue de nos crimes. C'est la naissance de Jésus : réjouissez-vous, qui que vous soyez, vous que des vices anciens accablent, car, avec l'onction du Christ, il n'est pas de maladie de l'âme qui puisse durer, quelque invétérée qu'elle soit. C'est la naissance du Fils de Dieu; que ceux qui aspirent à de grandes destinées soient dans l'allégresse, car un grand distributeur de titres, de grandeurs, nous est né. Mes frères, celui qui vient de naître est l'héritier du Père; faisons-lui bon accueil, et son héritage est à nous; car celui qui nous a donné son propre Fils pourra-t-il bien ne nous point donner tout avec lui (Rom. III, 12) ? Point de doute, point d'hésitation, notre garant est bien sûr. Le Verbe de Dieu s'est fait chair et il a habité parmi nous (Joan. I, 14). Le Fils unique de Dieu a voulu avoir des frères en grand nombre pour être leur aîné ; et il s'est fait homme, fils et frère de l'homme, pour que la faiblesse et la fragilité de l'homme ne soient retenues par rien. Si vous hésitez à croire que cela soit possible, ouvrez les yeux et vous croirez.

4. Jésus-Christ naît à Bethléem de Juda. Quelle faveur pour cette cité! Ce n'est point à Jérusalem, la ville des rois de Juda, mais à Bethléem, la moindre de toutes les villes de Juda. O Bethléem, tu es bien petite, mais le Seigneur t'a bien grandie maintenant! Oui, celui qui, de grand qu'il est, a voulu naître petit dans tes murs, t'a comblée de gloire. Réjouis-toi donc, ô Bethléem, et que l'Alléluia de fête retentisse dans tes carrefours aujourd'hui. Quelle cité au monde, en apprenant cette nouvelle, ne t'enviera point cette précieuse étable, et la gloire de ta crèche? Déjà ton nom est célèbre dans toute la terre; toutes les nations te proclament bienheureuse. On dit de toi des choses glorieuses, ô cité de Dieu (Psal. LXXXVI, 2). Partout on chante ces paroles : Un homme est né dans cette ville, et le Très-Haut lui-même l'a fondée (Psal. rxgxvi, 5). Oui, partout on dit, partout on répète : « Jésus-Christ, le Fils de Dieu, est né à Bethléem de Juda. » Il ne faut pas regarder comme inutile ce mot même, de Juda; car il nous fait souvenir de la promesse faite aux patriarches - « Le sceptre ne sortira point de Juda, ni le prince de la postérité, jusqu'à ce que celui qui doit être envoyé et qui sera l'attente des nations, soit venu (Gen. LXIX, 10). » En effet, le salut doit venir des Juifs et, de chez eux, se répandre au bout du monde. « Juda, dit le Patriarche, tes frères te loueront, et ta main fera peser le joug sur tes ennemis (Ibid. VIII), » et le reste, qui ne s'est jamais accompli en Juda, mais qui l'est sous nos yeux, un Jésus-Christ. C'est lui, en effet, qui est ce Lion de la tribu de Juda, dont il a été dit : « Juda est un jeune lion; tu t'es levé, mon fils, pour saisir ta proie (Gen. XLIX, 9). Ce grand ravisseur, « qui se charge des dépouilles de la Samarie, avant même de savoir nommer son père et sa mère (Isa. VIII, 4), » n'est autre que le Christ, car c'est lui qui, en s'élevant en l'air, a emmené avec lui, comme en triomphe, une grande multitude de captifs; ou plutôt non, il ne nous a rien ravi. tout au contraire, il a comblé les hommes de ses dons. Ces mots « Bethléem de Juda, » me rappellent donc à l'esprit ces prophéties et plusieurs autres semblables qui se sont accomplies en Jésus-Christ à qui elles se rapportaient; aussi n'y a-t-il pas à rechercher pour nous s'il peut venir quelque chose de bon de Bethléem.

5. Mais pour ce qui nous concerne, nous voyons par là comment veut être reçu par nous celui qui a voulu naître à Bethléem. Le roi de gloire pouvait sans doute penser qu'il lui convenait de rechercher des palais magnifiques, où il fût reçu avec gloire; mais ce n'est pas pour cela qu'il était descendu de son. trône royal : « Il a la longueur des jours dans sa main droite, et dans sa gauche il a les richesses et la gloire (Prov. III, 17). » Il possédait toutes ces choses en abondance dans les cieux, mais parmi elles il ne trouvait point la pauvreté, tandis que sur la terre cette richesse était partout en abondance, mais les hommes en ignoraient le prix. Voilà pourquoi le Fils de Dieu, qui l'aime, descendit du ciel et la choisit en partage, afin de nous la faire apprécier par l'estime qu'il en fait lui-même. O! Sion, parez votre lit nuptial, mais parez-le d'humilité et de pauvreté; car il se complaît dans ses langes, et, selon le témoignage même de Marie, voilà les soieries dont il veut être enveloppé. Immolez donc à votre Dieu les abominations des Egyptiens.

6. Remarquez donc bien que le Christ naît à Bethléem, de Juda, et efforcez-vous de devenir une autre Bethléem, de Juda, si vous voulez qu'il vous fasse la grâce de le recevoir aussi en vous. Or, Bethléem signifie la maison du pain, et Juda, la confession. Pour vous donc, si vous nourrissez votre âme du pain de la parole divine; si, tout indignes que vous soyez, vous recevez avec toute la foi et la piété dont vous êtes capables ce pain qui est descendu du ciel et donne la vie au monde, je veux dire le corps du Seigneur Jésus, en sorte que cette nouvelle chair de résurrection répare et fortifie la vieille outre de votre corps , en resserre le tissu et la rende capable de supporter le vin nouveau dont elle est remplie; si enfin vous vivez de la foi et ne gémissez point pour avoir oublié de manger votre pain, vous êtes une autre Bethléem, et il ne vous manque plus que la confession pour être tout à fait digne de recevoir le Sauveur. Que la Judée soit donc votre sanctification. Revêtez-vous de la confession et de la beauté, qui sont le plus beau vêtement que le Christ recherche avant tout dans ses ministres. D'ailleurs l'Apôtre vous les recommande l'une et l'autre en deux mots, quand il dit : « On croit de cœur pour obtenir la justice, et on confesse de bouche pour obtenir le salut (Rom. X, 10). » Or, la justice dans le cœur, c'est du pain dans la main; car la justice est un pain selon ces paroles : « Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu'ils seront rassasiés (Matth. V, 6).» Que votre cœur possède donc la justice, mais cette justice qui vient de la foi, car il n'y a que celle-là qui soit en honneur auprès de Dieu. Mais en même temps que votre bouche la confesse pour obtenir le salut, après cela vous pouvez en toute sécurité recevoir celui qui naît à Bethléem de Juda, c'est-à-dire Jésus-Christ, le Fils de Dieu.

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