CIRCONCISION I
Précédente ] Accueil ] Remonter ] Suivante ]

Accueil
Remonter
V. DE NOËL I
V. DE NOËL II
V. DE NOËL III
V. DE NOËL IV
V. DE NOËL V
V. DE NOËL VI
JOUR DE NOËL I
JOUR DE NOEL II
JOUR DE NOËL III
JOUR DE NOËL IV
JOUR DE NOËL V
S. INNOCENTS
CIRCONCISION I
CIRCONCISION II
CIRCONCISION III
ÉPIPHANIE I
ÉPIPHANIE II
ÉPIPHANIE III
ÉPIPHANIE IV
ÉPIPHANIE V
EPIPHANIE VI

PREMIER SERMON POUR LE JOUR DE LA CIRCONCISION DE NOTRE-SEIGNEUR. Sur ce passage de l'Evangile : « Le huitième jour auquel l'Enfant devait être circoncis étant arrivé, on lui donna le nom de Jésus (Luc. II, 21). »

1. Dans ce peu de mots nous avons entendu l'exposition d'un grand mystère de charité. Le passage qu'on vient de vous lire convient admirablement bien au Verbe amoindri que le Seigneur .a fait sur la terre. Il s'est amoindri quand il s'est fait chair; et, fait chair, il s'est amoindri encore en recevant la circoncision. Le Fils de Dieu s'est fait un peu moindre que les anges, quand il a pris la nature humaine; mais quand il a reçu le remède de la corruption des hommes, il est descendu bien davantage au dessous d'eux. Quel besoin aviez vous d'être circoncis, ô vous qui n'avez point commis le péché et qui êtes exempt de la servitude? Que vous ne l'ayez point commis c'est évident d'après votre âge; et que vous n'en ayez point contracté la souillure, c'est ce que rendait encore plus certain la divinité de votre père et la virginité de votre mère. Vous êtes le grand prêtre qui, selon la prophétie plutôt que selon le précepte de la loi, ne doit être souillé ni par son père ni par sa mère (Levit. XXI, 11). Vous avez un Père de toute éternité, mais ce père est Dieu, et le péché ne trouve point de place en lui. Vous avez une mère dans le temps, mais elle est vierge et la pureté n'a pu enfanter la corruption. Néanmoins l'Enfant est circoncis, l'Agneau sans tâche reçoit la circoncision, non parce qu'il en a besoin, mais parce qu'il veut la recevoir. Il n'y a point en lui vestige de blessure et cependant il se laisse poser les appareils des blessés. Ce n'est point ainsi qu'agissent les impies, non ce n'est point ainsi, la perversité et l'orgueil de l'homme ont d'autres allures. Il arrive quelquefois que nous faisons jactance de nos blessures, et que nous rougissons de l'appareil qui doit les guérir. Celui que personne ne peut convaincre de péché, reçoit, sans nécessité aucune, le remède du péché, mais un remède aussi humiliant que douloureux; il ne refuse point de souffrir le tranchant du couteau de pierre, quoiqu'il n'y ait qu'en lui que ce couteau ne puisse point trouver la rouille antique qu'il doit détacher. Mais nous au contraire, demeurant étrangers à tout sentiment de honte pour ce qu'il y a de honteux dans la faute, nous rougissons de faire pénitence, ce qui est le comble de la folie. Nous courons malheureusement au-devant du mal, et la honte nous retient plus malheureusement encore quand il faudra courir au remède. Celui qui n'a point fait le péché ne refuse pas d'être mis au rang des pécheurs, nous, au contraire, nous voulons être pécheurs et nous ne voulons point passer pour tels. Est-ce donc celui qui se porte bien qui a besoin du médecin, n'est-ce pas plutôt celui qui est malade? Que dis-je, n'est-ce point le malade, mais le médecin lui-même qui a besoin de remèdes? Quel est l'homme je ne dis pas d'une telle distinction, mais seulement d'une conscience aussi innocente qui se remettrait avec ce calme entre les mains de ceux qui doivent le circoncire ? Eh bien, le Christ paie avec patience la dette qu'il n'a point contractée, lui qui était venu pour purifier les autres, non pour être purifié lui-même du péché. Peut-être me direz-vous, pourquoi Jésus enfant ne recevrait-il point la circoncision ? Bien plus même pourquoi ne la recevrait-il pas avec autant d'humilité que de douceur? Pourquoi ne garderait-il point le silence en présence de ceux qui le circoncisent, lui qui se taira devant ceux qui le dépouilleront, et qui ne soufflera pas mot devant ceux qui le mettront en croix ? D'ailleurs il lui était bien facile de conserver sa chair intacte sous le couteau, puis«il a pu faire que le sein virginal de sa mère ne s'ouvrit point à sa naissance. Certainement il n'était point difficile à cet Enfant d'empêcher que sa chair ne fut circoncise, puisqu'il a pu si aisément la préserver de la corruption, même après sa mort.

2. « Le huitième jour auquel l'Enfant devait être circoncis étant donc arrivé, on lui donna le nom de Jésus. » Grand et admirable mystère! L'enfant est circoncis et reçoit le nom de Jésus. Que signifie ce rapprochement ? La circoncision semble plutôt faite en effet pour celui qui doit être sauvé que pour celui qui sauve, mais reconnaissez là le médiateur entre Dieu et les hommes. dès les premiers jours de sa vie, il rapproche les choses humaines des choses divines, celles d'en bas de celles d'en haut. Il naît d'une femme, mais d'une femme en qui le fruit de la fécondité ne fait point tomber la fleur de la virginité ; il est enveloppé de langes, mais ces langes sont l'objet de la vénération des anges mêmes : il est déposé dans une crèche, mais il est annoncé par une étoile qui brille dans les cieux. En même temps que la circoncision prouve qu'il s'est véritablement uni la nature humaine, le nom qu'il reçoit est un nom au dessus de tout autre nom, et dénote sa gloire et sa majesté. Il est circoncis comme véritable enfant d'Abraham, et il est appelé Jésus, comme vrai fils de Dieu. Mais mon Jésus ne reçoit pas, comme ceux qui furent nommés Jésus avant lui, un nom vain et vide de sens; ce grand nom n'est plus une ombre, il exprime la vérité. D'ailleurs l'Evangéliste nous apprend qu'il fut apporté du ciel, « c'était le nom, dit-il, que l'Ange lui avait donné avant qu'il fût conçu dans le sein de sa mère. » Remarquez quel mot profond. C'est après que Jésus est né qu'il est appelé par les hommes du nom de Jésus, qui lui avait été donné par l'Ange, avant même qu'il fût conçu. C'est qu'il n'est pas moins le Sauveur des anges que des hommes, des anges depuis le commencement du monde, et des hommes depuis son incarnation.

3. « Il fut donc appelé Jésus, c'est le nom que l'Ange lui avait donné.» Ainsi toute parole se trouve confirmée par l’autorité de deux ou trois témoins (Matth. XVIII, 16). Celui que le Prophète nous fait voir amoindri, l’Evangile, plus explicite, nous le montre comme incarné. C'est nous, mes frères, oui c'est nous que regarde cette parabole car pour Jésus-Christ il n'a besoin du témoignage de l'Ange ni des hommes; mais selon ce qui est écrit: « il fait tout pour les élus (II. Tim. II, 10).» Si, donc nous ne voulons point qu'il semble que nous ayons pris le nom de notre Dieu en vain, il faut que nous cherchions un triple témoignage de notre salut. Ainsi, mes frères, il faut que nous aussi nous soyons circoncis, pour recevoir le nom du salut, mais circoncis en esprit et en vérité, non point au sens littéral, circoncis, dis-je, non dans un de nos membres, mais dans notre corps tout entier. Car, bien que c'est précisément dans cette partie du corps, où il est ordonné aux Juifs de pratiquer la circoncision, que se trouve l'excroissance de Leviathan, qui procède du mal et qui doit être retranchée, cependant il est vrai qu'elle a envahi le corps tout entier. De la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête, il n'y a pas une place saine en nous, pas une qui ne soit infectée par le poison. Par conséquent, si le peuple, alors qu'il était encore petit comme un enfant dans la foi et la charité, pouvait se contenter d'une circoncision restreinte, maintenant qu'il est devenu homme parfait, il est obligé de recevoir le baptême de tout le corps, ce qui n'est autre chose que la circoncision de l'homme tout entier. Voilà pourquoi notre Sauveur a voulu être circoncis le huitième jour de sa naissance, et à trente ans être mis en croix, où son corps tout entier fut assailli par la souffrance, et si nous sommes entrés en lui par la ressemblance de la mort, comme s'exprime l'Apôtre (Rom. VI, 5), c'est en observant les dernières prescriptions de la loi.

4. Quelle est la morale renfermée dans notre circoncision, sinon celle dont parle l'Apôtre, lorsqu'il dit: nous sommes satisfaits de la nourriture et des habits que nous avons. Cette pauvreté volontaire, le labeur de la pénitence, l'exacte observance de la discipline, nous purifient parfaitement et détruisent en nous tous les mauvais germes. Nous devons d'ailleurs chercher, dans cette circoncision, un triple témoignage de salut de l'Ange, de Marie et de Joseph. L'Ange du grand conseil doit, avant tout, nous imposer le nom du salut. Il faut de plus l'attestation de notre communauté, qui est comme la mère de chacun de nous, une mère, que dis-je? une Vierge comme celle que l'Apôtre a fiancée au Christ, son unique époux, pour la lui montrer comme une vierge pure et sainte. Mais celui qui cherche à imiter le Sauveur ne doit pas dédaigner le témoignage de son ministre : or, ce ministre est Joseph, qui eut le titre d'époux, mais qui, en réalité, ne fut que le serviteur, le tuteur, le nourricier, non le père dont il n'eut que le nom.

5. Disons-le plus clairement encore. Il faut, mes frères, que non-seulement du dehors, mais encore ceux de l'intérieur rendent un bon témoignage de nous; il n'y a que celui dont la conduite plaît à tout le monde, et n'est pénible pour personne, qui reçoive un témoignage rassurant de tous ses frères au sujet de son salut. C'est en vain que l'accusateur acharné de ses frères l'attaque sur les choses qui ne paraissent qu'au dehors aux religieux, celui à qui tous ses frères rendent un bon témoignage. Quiconque, dans un aveu aussi plein d'humilité que de sincérité, expose à ses supérieurs, avec le désir de se soumettre à leurs décisions, non-seulement les fautes de sa vie mondaine, mais aussi les négligences de sa profession présente, (car « nous faisons tous beaucoup de fautes (Jacob. III, 2 et Joan. I, 9), » à moins que nous rie nous croyions plus saints que le disciple bien-aimé du Seigneur,) recevra d'eux aussi un bon témoignage. Il n'a même plus rien à redouter de ce terrible accusateur, car le Seigneur ne juge pas deux fois la même faute. Mais peut-être essaiera-t-il de trouver notre intention en défaut, et tentera-t-il de dresser de ce côté un acte d'accusation qui réduise à néant le témoignage de nos frères et celui de nos supérieurs; voilà pourquoi nous avons besoin du témoignage de celui qui voit le dedans et qui regarde plutôt au cœur qu'au visage. D'ailleurs, c'est par lui qu'il faut commencer, et ne rien concevoir dans notre esprit qui n'ait reçu de lui, avant d'être conçu, un nom de salut. Puis, quand nous en venons à l'acte extérieur , il faut nous assurer les témoignages extérieurs, selon ce que dit l'Apôtre : « Tâchez de faire le bien avec tant de circonspection qu'il soit approuvé non-seulement de Dieu, mais aussi des hommes (Cor. VIII, 21). »

Haut du document

Précédente Accueil Remonter Suivante