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SECOND SERMON
POUR
LA VÊTURE D'UNE NOUVELLE CATHOLIQUE (a).
Vocavit vos de tenebris in admirabile lumen suum.
Il vous a appelée des ténèbres à son admirable lumière. I
Petr., n, 9.
Ma très-chère Sœur en
Notre-Seigneur Jésus-Christ, après les grandes miséricordes que Dieu a fait
éclater sur vous, je ne puis mieux commencer ce discours que par des actions de
grâces publiques, remerciant sa bonté paternelle qui vous a miraculeusement
(a) Prêché à Metz, dans la maison des
Nouvelles-Catholiques, un 2 février, vers 1663.
Prêché à Metz. L'orateur dit dans le second point : « Elle
(l'hérésie) enseigne que l'Eglise peut errer; elle enseigne que l'Eglise a erré
souvent: le ministre de cette ville l'a prêché et l'a écrit de la sorte. » Or
c'est là précisément ce que Paul Ferry, pasteur à Metz, disait dans son
Catéchisme général de la réformation de la religion.
Dans la maison des Nouvelles-Catholiques. On le voit
manifestement dans tout le sermon, particulièrement dans l'exorde.
Un 2 février. Le prédicateur dit dans la partie du discours
que nous venons d'indiquer, dans l'exorde : « Les deux principaux mystères que
nous célébrons en ce jour, conviennent très-bien avec ce sujet; » puis il parle
de la purification de la sainte Vierge et de l'oblation de l'Enfant Jésus.
Vers 1663. Le style du discours nous semble annoncer le
commencement de la deuxième époque. Résidant à Paris, Bossuet resta longtemps
chargé des intérêts du chapitre de Metz, et faisait de fréquents voyages dans
cette ville. C'est pendant une de ces visites qu'il prêcha notre sermon.
L'orateur prie le Saint-Esprit, dans l'exorde, de «répandre
sur ses lèvres deux beaux ornements de l'éloquence chrétienne : » lesquels? « La
simplicité et la vérité. » O vérité de l'éloquence, qui te manifestes dans la
forme, dans les images et dans l'action, qu'es-tu devenue? Et toi simplicité,
sceau de la foi, marque delà piété sincère, compagne du zèle apostolique; toi,
sainte messagère de l'Evangile qui parles seule au fond des cœurs, où te
retrouverai-je?
On sait que nous n'avons pu consulter le manuscrit
original.
404
délivrée de la puissance des ténèbres, pour vous
transporter
au royaume de son Fils.
En effet n'est-il pas bien
juste, ô grand Dieu, que votre sainte Eglise catholique vous loue et vous
glorifie dans les siècles des siècles? Car qui n'admirerait la profondeur de vos
jugements, ô éternel Roi de gloire, qui pour la punition de nos crimes ou pour
quelque autre secret conseil de votre sainte providence, ayant permis qu'en ces
derniers temps l'Eglise chrétienne fût déchirée par tant de sortes de schismes
et par tant de lamentables divisions, ne perdez pas pour cela les âmes que vous
avez choisies; mais qui étant riche en miséricorde, savez les éclairer même dans
le sein de l'erreur, et selon votre bon plaisir les attirez par des ressorts
infaillibles à la véritable croyance. C'est ce que vous avez fait paraître en
cette jeune fille, élevée dans le schisme et dans l'hérésie, que vous avez
regardée en pitié, ô Père très-clément et très-bon. On la nourrissait dans une
doctrine hérétique; mais vous avez voulu être son docteur. Vous lui avez ouvert
les yeux, pour voir votre admirable lumière : vous avez voulu faire paraître
qu'il n'y a point d'âge qui ne soit mûr pour la foi, et que l'homme est assez
savant quand il sait écouter vos saintes inspirations. Et voici qu'étant
instruite de la véritable doctrine, que nous avons reçue de nos pères par une
succession de tant de siècles, touchée en son cœur d'un extrême dégoût de ce
monde trompeur et d'un chaste amour de votre cher Fils, qu'elle désire choisir
pour son seul Epoux, elle se vient présenter devant vos autels, afin qun vous
ayez agréable qu'elle soit admise aujourd'hui à l'épreuve d'une vie retirée.
Bénissez-la, Seigneur, et soyez loué à jamais des grâces que vous lui faites :
que les anges et tous les esprits bienheureux chantent éternellement vos bontés.
Et vous, ma chère Sœur, que Dieu
comble de tant de bienfaits, considérez ces dévotes filles et toute cette pieuse
assemblée. Mais élevez plus haut vos regards; contemplez en esprit la sainte
Eglise de Dieu, tant celle qui règne dans le ciel que celle qui combat sur la
terre : croyez qu'elle triomphe de joie de voir en vous des effets si visibles
de la miséricorde divine. Eclatez aussi en hymnes et en cantiques; dites, dans
l'épanchement de votre âme : « O Seigneur,
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qui est semblable à vous (1) ! Que le Dieu d'Israël est bon
à ceux oui sont droits de cœur (2), » et qui marchent devant sa face en toute
simplicité !
Pour moi, afin de vous animer
davantage à rendre à notre grand Dieu de fidèles actions de grâces, je vous
donnerai avec l'assistance divine quelques avis succincts, mais très-importants,
et sur ce que vous avez fait et sur ce que vous allez faire. Je vous
représenterai premièrement la grande grâce que Dieu vous a faite de vous retirer
des ténèbres de l'hérésie; et après, je tâcherai de vous faire voir de quelle
sorte vous devez user de l'inspiration qu'il vous donne, de renoncer entièrement
à toutes les espérances du siècle : et il se rencontre fort à propos que les
deux principaux mystères que nous célébrons en ce jour, conviennent très-bien
avec ce sujet. Dans la purification de la Vierge, vous pouvez considérer avec
fruit que Dieu par sa pure bonté vous a purgée de votre hérésie ; et dans
l'oblation de l'Enfant Jésus, que l'on présente aujourd'hui à son Père, vous
devez faire réflexion sur le dessein que vous méditez, de vous consacrer pour
jamais à son service par une profession solennelle. C'est sur quoi je vous
entretiendrai en ce jour : vous ferez seule tout le sujet de cette exhortation.
Au reste n'attendez pas de moi tous ces ornements de la rhétorique mondaine;
mais priez seulement cet Esprit qui souffle où il veut, qu'il daigne répandre
sur mes lèvres ces deux beaux ornements de l'éloquence chrétienne, la simplicité
et la vérité, et qu'il étende par sa grâce le peu que j'ai à vous dire.
PREMIER POINT.
Si parlant aujourd'hui de nos
frères qui à notre grande douleur se sont séparés d'avec nous, j'appelle leur
église une église de ténèbres, je les prie de ne croire pas que, pour condamner
leur erreur, je m'aigrisse contre leurs personnes. Certes je puis dire d'eux
avec vérité ce que l'Apôtre disait des Juifs (3), que le plus tendre désir de
mon cœur et la plus ardente prière que je présente tous les jours à mon Dieu,
est pour leur salut. Je ne puis voir sans une extrême douleur les entrailles de
la sainte Eglise si
1 Psal. XXXIV, 10. — 2 Psal.
LXXII, 1. — 3 Rom.,
X, 1.
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cruellement déchirées; et pour parler plus humainement, je
suis touché au vif quand je considère tant d'honnêtes gens que je chéris, comme
Dieu le sait, marcher dans la voie de ténèbres. Mais afin qu'il ne semble pas
que je veuille faire aujourd'hui une invective inutile, je vous proposerai une
doctrine solide et conduirai ce discours, si Dieu le permet, avec une telle
modération que sans les charger d'injures, je les presserai par de vives raisons
tirées des Ecritures divines et des Pères leurs interprètes fidèles.
Je dis donc en premier lieu,
chrétiens, que Dieu est une pure et incompréhensible lumière, de laquelle toute
autre lumière prend son origine ; d'où vient que l'apôtre saint Jean dit que «
Dieu est lumière, et qu'en lui il n'y a point de ténèbres (1).» Et saint Paul
l'appelle « Père de lumière, qui habite une lumière inaccessible (2). « Le genre
humain, chrétienne assemblée, s'étant retiré de cette lumière éternelle,
languissait dans une nuit profonde et dans des ténèbres plus qu'égyptiennes,
lorsque Dieu touché de pitié envoya son cher Fils en la terre pour être la
lumière du monde, comme il dit lui-même en saint Jean (3). C'est lui qui est
cette véritable et universelle lumière, « qui illumine par ses clartés tout
homme venant au monde (4). » C'est la splendeur de la gloire du Père, qui étant
devenue chair dans la plénitude des temps, est entrée en société avec nous et
nous a faits participants de ses dons. Car ayant commencé sur la terre
l'exercice de son ministère par la prédication de la parole de vie que son Père
lui mettait à la bouche, il a assemblé près de sa personne les premiers
ministres de son Evangile, qu'il a appelés ses apôtres, parce qu'après sa course
achevée il les de voit envoyer par toutes les provinces du monde, pour agréger
ses brebis dispersées sous l'invocation de son nom et la profession de son
Evangile. Et comme il a dit de lui-même qu'il était la lumière du monde, ainsi
que je vous le rapportais tout à l'heure, de même a-t-il dit, parlant à ses
saints apôtres : « Vous êtes la lumière du monde : » Vos estis lux mundi
(5), parce qu'étant éclairés des lumières de ce bon pasteur par l'infusion de
son Saint-Esprit, ils ont eux-mêmes
1 I Joan., I, 5. — 2 I Tim.,
VI, 16. — 3 Joan., VIII, 12. — 4 Joan., I. 9. — 5 Matth.,
V, 14.
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communique la lumière aux peuples errants, comme dit
l'apôtre saint Paul écrivant aux Ephésiens : « Vous étiez autrefois ténèbres,
mais vous êtes maintenant lumière en Notre-Seigneur (1). »
Cette lumière, au commencement,
se répandit sur peu de personnes, parce que selon la parabole de l'Evangile
l'Eglise, d'un petit grain, devait devenir un grand arbre (2). Mais enfin par la
miséricorde de Dieu, la foi étant augmentée, on a fondé des églises par toutes
les parties de la terre, selon le modèle de celles que les saints apôtres
avaient établies. Fidèles, ne croyez pas que l'on ait divisé pour cela cette
première et originelle lumière, ou que l'on ait pour ainsi dire arraché quelque
rayon aux églises apostoliques pour les porter aux autres églises. Certes cela
ne s'est pas fait de la sorte : cette lumière a été étendue; mais elle n'a pas
été divisée. En faisant de nouvelles églises, on n'a pas fait des sociétés
séparées : « On a été prendre des premières églises la continuation de la foi et
la semence de la doctrine : » Traducem fidei et semina doctrinœ cœlerœ exindè
Ecclesiœ mutuatœ sunt, dit Tertullien (3). Toutes les églises sont
apostoliques, parce qu'elles sont descendues des églises apostoliques. Un si
grand nombre d'églises, dit Tertullien, ne sont que cette Eglise unique et
première que les apôtres avaient fondée. Elles sont toutes premières et toutes
apostoliques, parce qu'elles se sont toutes rangées à la même paix, qu'elles se
sont associées à la même unité, qu'elles ont toutes le même principe. « L'Eglise
éclairée par le Sauveur Jésus, qui est son véritable soleil, dit l'admirable
saint Cyprien, bien qu'elle répande ses rayons par toute la terre, n'a qu'une
même lumière qui se communique partout : » Ecclesia Domini luce perfusa per
totum orbem radios suos porrigit; unum tamen lumen est, quod ubique diffunditur,
nec unitas corporis separatur (4).
Par où vous voyez, mes chers
Frères, que l'Eglise est le lieu sacré dans lequel Jésus-Christ renferme le
trésor des lumières célestes. Quelque docte que soit un homme, quelque beaux
sentiments qu'il professe, il marche dans les ténèbres s'il abandonne
1 Ephes., V, 8. — 2 Luc., XIII, 19. — 3 De
Prœscript., n. 20. — 4 Lib. De Unit. Eccl., p. 195.
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l'unité de l'Eglise. Celui-là ne peut avoir Dieu pour Père,
qui n'a pas l'Eglise pour Mère. En vain nos adversaires se glorifient-ils en
toutes rencontres de la science des Ecritures, qu'ils n'ont jamais bien étudiées
selon la méthode des Pères, qui ont fait gloire de suivre les interprétations de
leurs ancêtres. « Nous enseignons, disaient-ils, ce que nous ont appris nos
prédécesseurs; et nos prédécesseurs l'ont reçu des hommes apostoliques; et
ceux-là, des apôtres; et les apôtres, de Jésus-Christ; et Jésus-Christ, de son
Père. » C'est à peu près ce que veulent dire ces mots du grand Tertullien :
Ecclesia ab apostolis, apostoli à Christo, Christus à Deo tradidit (1). O la
belle chaîne, ô la sainte concorde, ô la divine tissure que nos nouveaux
docteurs ont rompue! Cette belle succession était la gloire de l'Eglise de Dieu
: c'est ce que nous opposions aux ennemis de Jésus, que malgré les tyrans et les
hérétiques, malgré la violence et la fraude, l'Eglise de Jésus-Christ était
demeurée immobile.
Ils renoncent volontairement à
cet avantage. N'ont-ils pas osé assurer, dans l'article XXXI de leur Confession,
qu'il a été nécessaire que Dieu en notre temps, auquel l'état de l'Eglise était
interrompu, ait suscité gens d'une façon extraordinaire, pour dresser l'Eglise
de nouveau qui était en ruine et désolation? O parole inouïe aux premiers
chrétiens, si ce n'est certes qu'elle a toujours été témérairement avancée par
les hérétiques leurs prédécesseurs, et toujours constamment réfutée par nos
Pères les orthodoxes! L'avez-vous jamais cru, ô saints martyrs, ô bienheureux
évêques, ô docteurs divinement éclairés ; l'avez-vous jamais cru que cette
Eglise que vous fondiez par votre sang, ou que vous instruisiez par votre
doctrine, dût être durant tant de siècles entièrement abolie, jusqu'à ce que
Luther et Calvin la vinssent dresser de nouveau? Cette cité qui a occupé tout le
monde, Dieu l'a fondée éternellement, dit l'admirable saint Augustin (2); le
firmament tomberait aussitôt que l'Eglise serait éteinte : Deus fundavit eam
in œternum.
Certes il est indubitable, ô
Sauveur Jésus : comme durant toute l'éternité vous serez béni dans le ciel,
ainsi pendant toute la durée
1 De Prœscript., n. 37. — 2 In Psal. XLVII,
n. 7.
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de ce siècle vous aurez toujours des adorateurs sur la
terre. Et où seront ces adorateurs, si votre Eglise doit tomber en ruine?
Comment pourriez-vous être adoré dans une église entièrement désolée , une
église infectée d'erreurs, faisant profession publique d'idolâtrie, une église
enfin telle qu'elle a été durant plusieurs siècles suivant l'opinion de nos
adversaires? Seigneur Jésus, encore une fois où étaient alors vos adorateurs? Eh
! dites-nous, je vous prie, nos Frères, qui dites si hautement que vous voulez
suivre les Ecritures, dans quel évangile ou dans quelle prophétie voyez-vous que
l'Eglise dût un jour tomber en ruine, qu'elle dût être désolée durant tant de
siècles? La Synagogue même des Juifs, qui n'avait pas de si belles promesses,
a-t-elle jamais eu de si longues éclipses? Est-ce là cette Eglise fondée sur la
pierre, contre laquelle les portes d'enfer ne peuvent jamais prévaloir (1)?
Comment est-ce que l'Eglise de Dieu est enfin tombée en ruine, et a été
obscurcie d'erreurs, elle que l'Apôtre appelle la colonne et le soutien de la
vérité (2)? Le Sauveur Jésus parlant à ses disciples, et en leur personne à ceux
qui se devaient assembler avec eux ou qui leur devaient succéder : « Je serai,
dit-il, avec vous jusqu'à la consommation des siècles (3). » Où étiez-vous donc,
ô Sauveur, quand nos réformateurs, sans aveu, sont venus dresser de nouveau
votre Eglise?
Certes je vous l'avoue, mes
chers Frères, je ne puis modérer ma douleur, quand je vois de telles paroles
prononcées par des chrétiens. Aussi ont-ils tâché de les adoucir par diverses
explications, autant vaines que spécieuses. Je vous les rapporterai, s'il vous
plaît; et puis à l'honneur de la vérité pour la consolation de nos âmes, nous
les réfuterons en esprit de paix. Il leur a semblé fort étrange de dire que
l'Eglise de Jésus-Christ dût cesser si longtemps d'être sur la terre. Les
luthériens de la Confession d'Augsbourg, leurs frères et leurs nouveaux alliés
assurent en l'article vu qu'il y a une Eglise sainte qui demeurera toujours. Ils
parlent de l'Eglise qui est en ce monde. Et leurs propres églises, qui sont dans
la Suisse et autres pays, disent au chapitre XVII qu'il faut qu'il y ait
toujours eu une Eglise, qu'elle soit encore et qu'elle
1 Matth., XVI, 18. — 2 I Tim.,
III, 15. — 3 Matth., XXVIII, 20.
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dure jusqu'à la fin des siècles; c'est-à-dire une assemblée
des fidèles appelés et recueillis de tout le monde. Interrogez nos frères
errants, il faudra qu'ils répondent la même chose. Demandez-leur où était cette
Eglise, lorsqu'il n'en paraissait dans le monde aucune qui fit profession de
leur foi. Comme c'est une chose évidente, ils vous répondront tous qu'elle était
cachée, qu'elle ne paraissait pas par un terrible jugement de Dieu, qui la
retirait de la vue des médians. Ils pensent ainsi réparer l'injure qu'ils
feraient à l'Eglise, s'ils osaient assurer qu'elle fût entièrement abolie. Mais
quelle âme vraiment chrétienne ne déplorerait pas leur aveuglement?
Ah ! que vous êtes vraiment
redoutable, en vos conseils, ô grand Dieu, qui avez permis par une juste
vengeance que ceux qui ont déchiré votre Eglise ne sussent pas même ce que c'est
que l'Eglise! L'Eglise à votre avis, nos chers Frères, n'est-ce qu'une multitude
sans union? Consiste-t-elle en des gens dispersés, qui n'ont rien de commun
qu'eu esprit? Est-ce assez qu'ils croient intérieurement? N'est-il pas
nécessaire qu'ils fassent profession de leur foi? Mais l'Apôtre dit expressément
que « l'on croit dans le cœur à justice, et que l'on confesse par la bouche à
salut (1) ». Et le Sauveur lui-même : « Qui me confessera, dit-il, devant les
hommes, je le confesserai devant mon Père céleste (2). » De plus, est-ce assez
que chacun la professe en particulier ? Ne faut-il pas que ceux qui invoquent
avec sincérité le nom du Seigneur, lient ensemble une sainte société par la
confession publique de la même foi? Et cette Eglise cachée, dont vous nous
parlez, comment pouvait-elle avoir une confession publique? Qu'est-ce autre
chose qu'un amas de personnes timides, qui n'osaient confesser ce qu'ils
croyaient, qui démentaient leurs consciences, en s'unissant de corps à une
église dont ils se séparaient en esprit? Certes, s'ils se fussent séparés d'avec
nos pères, leur séparation les eût rendus remarquables et leur société se serait
produite; elle n'aurait pas été cachée, comme vous le dites. Et s'ils sont
demeurés unis, quoi! ces justes, ces gens de bien, cette église prédestinée
allaient adorer Dieu dans nos temples qui étaient des temples d'idoles , et
1 Rom., X, 10. — 2 Matth., X, 32.
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communiquaient à nos prières qui renversaient la dignité du
Médiateur, et assistaient à nos sacrifices qui réduisent à néant celui de la
croix? Chers Frères, en quel abîme d'erreurs tombez-vous?
Mais pour vous presser encore
davantage, il n'y a point d'Eglise sans foi. Et comment croiront-ils, s'ils
n'entendent? et comment entendront-ils, s'ils n'ont des prédicateurs? et peut-il
y avoir des prédicateurs où il n'y a point de pasteurs? Dis-moi donc, ô église
cachée, à laquelle Luther et Calvin ont eu leur refuge, d'où ils tirent leur
succession, bien qu'il leur soit impossible de la montrer; dis-moi où étaient
tes pasteurs? Si c'étaient ceux de l'Eglise romaine, donc tu n'entendais qu'une
fausse doctrine contraire à celle des réformateurs; donc tu recevais des
sacrements mutilés, car ils ne les administraient pas d'autre sorte ; donc tu te
pouvais sauver dans cette communion, et néanmoins c'est une chose assurée que
l'on ne se peut sauver que dans la communion de la vraie Eglise. Et si l'on se
sauvait en ce temps dans la communion de l'Eglise romaine, nous nous y pouvons
sauver à présent. Par conséquent, ô église cachée devant que Luther te vînt
découvrir, les pasteurs de l'Eglise romaine n'étaient pas tes véritables
pasteurs. Que si tu étais régie par d'autres pasteurs, je demande que l'on m'en
montre la liste, et que l'on me fasse voir les églises qu'ils ont gouvernées et
les chaires qu'ils ont remplies : c'est une chose impossible.
Car lorsqu'ils nous allèguent
les hussites et les albigeois, chrétiens, vous voyez assez combien cette évasion
est frivole. Ces hussites et ces albigeois venaient eux-mêmes, à ce qu'ils
disaient, dresser de nouveau l'Eglise. Et je demanderai toujours où était
l'Eglise avant les hussites? Où était-elle avant les albigeois? En vain ils
prétendent tirer leur autorité de gens qui se sont produits d'eux-mêmes aussi
bien qu'eux, et qui après avoir quelque temps agité le christianisme, sont
retournés dans l'abîme duquel ils étaient sortis tout ainsi qu'une noire vapeur.
Et dites-moi donc, je vous prie, quel monstre d'église est-ce que cette église
cachée, église sans pasteurs ni prédicateurs, bien que selon la doctrine de
l'Apôtre (1) Dieu ait mis dans le corps de l'Eglise les uns pasteurs et
1 Ephes., IV, 11.
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les autres docteurs, sans quoi l'Eglise ne peut consister
(1)? Eglise sans sacrements et sans aucune profession de foi, église vraiment de
ténèbres, digne certes d'être cachée, puisqu'elle n'a aucuns traits de l'Eglise
de Jésus-Christ. Le Sauveur ayant ordonné à ses apôtres que ce qu'ils
entendaient en particulier, ils le prêchassent hautement sur les toits (2),
c'est-à-dire dans l'évidence du monde , nous parler d'une église cachée, en
vérité n'est-ce pas nous parler d'une église de l'Antéchrist?
Car l'Eglise chrétienne dès son
berceau était connue par toute la terre, ainsi que l'Apôtre dit aux Romains : «
Votre foi est annoncée par tout le monde (3). » Et bien qu'elle fût persécutée
de toutes parts, elle se rendait illustre par ses propres persécutions et par
son invincible constance. « Nous savons de cette secte, disaient les Juifs à
l'apôtre saint Paul (4), que l'on lui contredit partout. » L'Eglise fut donc
connue sitôt après la mort du Sauveur. Et en effet étant nécessaire que tous les
gens de bien se rangent à la société de l'Eglise, comme nos adversaires mêmes le
professent, se peut-il une plus grande absurdité que de dire qu'elle soit
cachée? Comment veut-on que les hommes se rangent à une société invisible?
Partant cette église cachée à laquelle ils se glorifient d'avoir succédé,
n'étant pas selon leur propre confession cette cité élevée sur la montagne,
exposée à la vue des peuples, que reste-t-il autre chose, sinon qu'elle fut au
fond de l'abîme, dont elle est sortie pour un temps au grand malheur du
christianisme, pour la punition de nos crimes? C'est pourquoi il est arrivé que
ces doctes, ces beaux esprits, qui ont écrit de si belles choses, ils ont tout
su excepté l'Eglise ; et faute de la connaître, toutes leurs autres
connaissances leur ont tourné à damnation éternelle.
Il n'y a rien de si froid, ni de
si mal digéré que ce qu'ils ont dit des qualités que devait avoir l'Eglise de
Jésus-Christ. La perfection de l'Eglise est dans l'unité; et cette unité,
chrétiens , jamais ils ne l'ont entendue. Laissons les longues disputes et les
arguments difficiles : l'union qu'ils ont faite depuis peu d'années avec leurs
nouveaux frères les luthériens, décide tous nos doutes sur cette
1 Art. 25 de leur Confession. — 2
Matth., X, 27. — 3 Rom.,
I, 8. — 4 Act., XXVIII, 22.
413
matière. Les contentions de ces deux sectes sont connues à
tout le monde : elles se sont traitées très-longtemps d'impies et d'hérétiques;
enfin elles se sont unies. Ce n'est pas une chose nouvelle que deux sectes
s'unissent ensemble; mais qu'elles se soient unies en conservant la même
doctrine, qui les a si longtemps séparées, c'est ce qui fait voir
très-évidemment qu'ils ne savent pas ce que c'est que l'Eglise.
Car je leur demande, mes Frères
: La secte des luthériens mérite-t-elle le nom d'Eglise? Si elle n'est pas
Eglise, pourquoi communier avec elle? Pourquoi souiller votre communion par une
communion schismatique? L'Eglise ne connait qu'elle-même : elle ne reçoit rien
qui lie soit à elle. « L'étranger et l'incirconcis n'y entreront point, » disait
autrefois le Prophète (1). Que s'ils sont la vraie Eglise, donc les luthériens
et les calvinistes ne font que la même Eglise. Et qui a jamais ouï dire que
l'Eglise de Jésus-Christ fût un amas de sectes diverses, qui ont une profession
de foi différente et contraire en plusieurs points, dont les pasteurs n'ont pas
la même origine, et ne communiquent entre eux ni dans l'ordination ni dans les
synodes ? Cette union, n'est-ce pas plutôt une conspiration de factieux qu'une
concorde ecclésiastique! Comme on voit les mécontents d'un Etat entrer dans le
même parti chacun avec son intérêt distingué de celui des autres, et ne
s'associer seulement que pour la ruine de leur commune patrie, pendant que les
fidèles serviteurs du prince sont unis véritablement pour le service du maître :
ainsi en est-il de cette fausse union que nos réformateurs prétendus ont faite
depuis peu de temps. Et c'est ce que faisaient ces hérétiques dont parle
Tertullien : Pacem quoque passim cum omnibus miscent : « Ils entrent en
paix avec tous indifféremment : car il ne leur importe pas, ajoute ce grand
personnage, d'avoir des sentiments opposés, pourvu qu'ils conspirent à renverser
la même vérité : » Nihil enim interest illis, licèt diversa tractantibus, dùm
ad unius veritatis expugnationem conspirent (2).
C'a toujours été l'esprit qui a
régné dans les hérésies. Les ariens ne voulaient autre chose, sinon que l'on
supprimât le mot de
1 Isa., LII, 1. — 2 De Prœscript., n. 41.
414
Consubstantiel, comme apportant trop grand trouble à
l'Eglise; et qu'après, en dissimulant le reste de la doctrine, on vécût en bonne
intelligence. Ainsi, disent les calvinistes, ne parlons plus de la réalité du
corps de Jésus-Christ dans l'Eucharistie, sur laquelle nos pères se sont si
longtemps combattus; du reste unissons-nous, et que chacun demeure dans sa
croyance. O la nouvelle façon de terminer les schismes, toujours inconnue à
l'Eglise et toujours pratiquée parles hérétiques ! Ils ont trouvé le moyen de
s'unir dans le schisme même. Schisma est unitas ipsis, disait le grave
Tertullien (1) : « L'unité même parmi eux est un schisme. » Ils professent une
foi contraire, c'est le schisme; ils les reçoivent à la même communion, c'est
l'unité. Car si les articles dans lesquels vous différez sont essentiels,
pourquoi vous unissez-vous? Et s'ils ne le sont pas, pourquoi avez-vous été si
longtemps séparés? Pourquoi est-ce que Calvin, qui est venu le dernier, n'a pas
tendu les mains à Luther? Que ne lui a-t-il donné ses églises? Pourquoi a-t-il
voulu être chef de parti au préjudice de l'Evangile? Pourquoi a-t-il divisé le
troupeau de Jésus ?
Certes il fallait bien que vos
pères crussent que les articles de foi qui vous séparaient fussent importants;
autrement comment les excuserez-vous de n'avoir pas accouru à la même unité?
Maintenant de savoir si le corps de Jésus-Christ est réellement en l'Eucharistie
ou s'il n'y est pas, cela vous semble une chose de peu d'importance : donc que
de synodes inutiles, que de folles disputes, que de sang répandu vainement pour
soutenir qu'il n'y était pas! Savoir si Jésus y est ou s'il n'y est pas, c'est
une chose de peu d'importance: donc un tel bienfait du Sauveur Jésus demeurera
dans le doute. Certes si Jésus y est, il n'y peut être que par un amour infini;
et ainsi ceux qui le nieraient, quel tort ne feraient-ils pas à sa miséricorde,
ne reconnaissant pas une grâce si signalée? Et vous appelez cela une affaire de
peu d'importance contre la dignité de la chose qui crie contre vous, contre les
luthériens mêmes que vous appelez et qui vous refusent: contre vos pères qui
vous crient qu'ils ont cru cet article important, et que s'il ne l'était pas, en
vain ont-ils apporté tant de troubles au monde !
1 De Prœseript., n. 42.
415
Ne doutons donc pas, ma
très-chère Sœur, qu'ils ne marchent dans les ténèbres. L'apôtre saint Jean a dit
que « qui n'aime pas ses frères, ne sait où il va et demeure dans l'obscurité
(1). » Comment donc ne sont-ils point aveugles, eux qui se sont séparés d'avec
nous pour des causes si peu légitimes, puisque nous les voyons s'ôter à
eux-mêmes, dans ces derniers temps, celle que leurs pères et les nôtres avaient
toujours crue être la principale : dignes certainement après avoir rompu la
vraie paix, d'entrer dans une fausse concorde, comme je vous le viens de montrer
tout à l'heure ; concorde qui les fortifie peut-être selon la politique
mondaine, mais si nous le savons comprendre, qui les ruine très-évidemment selon
la règle de la vérité ? Rendez donc grâces à Dieu, ma très-chère Sœur, qui vous
a tirée de la société des ténèbres.
Ah ! qui me donnera des paroles
assez énergiques pour déplorer ici leur malheur? Certes je l'avoue, chrétiens,
il est bien difficile de se départir de la première doctrine dont on a nourri
notre enfance. Tout ce qui nous paraît de contraire nous semble étrange et nous
épouvante : notre âme possédée des premiers objets, ne regarde les autres
qu'avec horreur. Que pouvons-nous faire dans cette rencontre ? Rendre grâces
pour nous et pleurer pour eux. Cependant ne laissons pas de les exhorter à
rentrer en concorde avec nous ; et afin de le faire avec des paroles plus
énergiques, employons celles de saint Cyprien, ce grand défenseur de l'unité
ecclésiastique. Voici comme parle ce grand personnage à quelques prêtres de
l'Eglise romaine, qui s'étaient retirés de la société des fidèles, sous le
prétexte de maintenir la pure doctrine de l'Evangile contre les ordonnances des
pasteurs de l'Eglise. « Ne pensez pas, mes Frères, que vous défendiez l'Evangile
de Jésus-Christ, en vous séparant de son troupeau et de sa paix et de sa
concorde; étant certes plus convenable à de bons soldats du Sauveur de ne point
sortir du camp de leur capitaine, afin que demeurant dedans avec nous, ils
puissent pourvoir avec nous aux choses qui sont utiles à l'Eglise. Car puisque
notre concorde ne doit point être rompue, et que nous ne pouvons pas quitter
l'Eglise pour
1 I Joan., II, 11.
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aller à vous, ce que nous ferions volontiers si la vérité
le pouvait permettre, nous vous prions et nous vous demandons avec toute
l'ardeur possible, que vous retourniez plutôt à notre fraternité et à l'Eglise
de laquelle vous êtes sortis : » Nec putetis sic vos Evangelium Christ
asserere, dùm vosmetipsos à Christi grege et ab ejus pace et concordià
separatis; cùm magis militibus gloriosis et bonis congruat intra domestica
castra consistere, et intùs positos ea quœ in commune tractanda sunt agere ac
providere. Nam cùm unanimitas et concordià nostra scindi omninb non debeat, quia
nos Ecclesià derelictà foras exire et ad vos venire non possumus, ut vos magis
ad Ecclesiam matrem et ad nostram fraternitatem revertamini, quibus possumus
hortamentis petimus et rogamus (1).
SECOND POINT.
Dans la conduite de Dieu sur
votre âme (a), je trouve ceci de très-remarquable, que le Saint-Esprit
agissant en vous, y a fait naître en même temps l'amour de l'Eglise et celui de
la sainte virginité. N'était-ce pas peut-être pour vous faire entendre que les
églises des hérétiques que vous abandonniez généreusement, étaient des églises
prostituées, et que la seule Eglise vierge c'est la catholique, à laquelle la
grâce divine vous a appelée ? Que l'Eglise doive être vierge, il n'est rien de
plus évident, parce que tous les docteurs nous enseignent qu'il y a une
ressemblance parfaite entre la bienheureuse Vierge et l’Eglise; et c'est
pourquoi cette femme de l'Apocalypse qui paraît revêtue du soleil, nous
représente tout ensemble l'Eglise et Marie. La sainte Mère de notre Sauveur est
vierge et mariée tout ensemble : elle est également Vierge et Mère. Il en est
ainsi de l'Eglise. Car l'Eglise, aussi bien que la sainte Vierge, conçoit et
enfante par le Saint-Esprit. L'Eglise, comme la sainte Vierge, a un Epoux chaste
qui n'est pas le corrupteur de sa pureté ; mais plutôt qui en est le gardien
1 Ad Conf.
Rom., epist. XLIV, p 58.
(a) Ce morceau, dans le manuscrit de Bossuet, ne
fait point corps avec ce qui précède : mais comme son discours n'est pas entier,
pour le compléter, autant, qu'il est en nous, nous avons cru pouvoir y réunir ce
fragment, qui revient parfaitement à la matière traitée dans la première partie,
et qui probablement a été fait pour le même sujet (Edit. de Dérofis).
417
fidèle, et par conséquent elle est vierge. Mais peut-être
voulez-vous savoir ce que c'est que la virginité de l'Eglise : contentons en peu
de mots ce pieux désir.
La virginité de l'Eglise, c'est
sa vérité et son unité : et de là vient que je vous disois que les églises des
hérétiques sont des églises prostituées, parce qu'en perdant l'unité, elles se
sont éloignées de la vérité. Toute âme qui est dominée par l'erreur est une âme
adultère et prostituée, parce que l'erreur est la semence du diable, par
laquelle ce vieux serpent, ce vieux adultère, qui est menteur et père du
mensonge, corrompt l'intégrité des esprits. Et c'est aussi pour cela que
l'Eglise est vierge, parce que l'erreur n'y a point d'accès ; la doctrine de
l'Eglise est vierge, parce qu'elle la conserve aussi pure que son divin Epoux la
lui a donnée.
Que cherchiez-vous donc, ma
très-chère Sœur, quand abandonnant l'hérésie vous êtes accourue à l'Eglise ?
Vous cherchiez la virginité de l'Eglise que l'hérésie ne reconnaît pas. Comment
est-ce que nous montrons que l'hérésie ne reconnaît pas la virginité de
l'Eglise? Elle enseigne que l'Eglise, la vraie Eglise n'est pas infaillible :
elle enseigne que l'Eglise peut errer : elle enseigne que l'Eglise a erré
souvent. Le ministre de cette ville l'a prêché et l'a écrit de la sorte. O
ministre d'iniquité, vous ne connaissez pas la virginité de l'Eglise. Si elle
peut errer, elle n'est pas vierge ; car l'erreur est un adultère de l’âme. Mais
comment connaîtriez-vous sa virginité, puisque vous ne connaissez pas même sa
sainteté? « Je crois la sainte Eglise, » disent les apôtres dans leur Symbole.
Est-elle sainte, si elle ment? Est-elle sainte, si elle enseigne l'erreur, si
elle la confirme par son autorité ? Donc l'Eglise que vous nous prêchez est une
église prostituée ; et cette jeune fille a bien fait quand elle a quitté cette
église, et qu'elle a cherché une Eglise, vierge. Mais notre Eglise, ma
très-chère Sœur, est encore vierge par son unité.
L'origine de l'unité, c'est le
Fils de Dieu : il n'a paru qu'en un seul lieu de la terre ; mais ses
prédicateurs ont été par tout l'univers, et ils y ont fondé des églises. L'unité
ne s'est pas divisée, mais elle s'est étendue ; et cette unité sainte et
indivisible, la succession continuelle nous l'a apportée. Considérez les
troupeaux
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rebelles; leurs noms vous marquent leur séparation.
Zuingliens, luthériens, calvinistes sont des noms nouveaux : ce n'est donc
pas l'unité qui les a produits, parce que l'unité est ancienne; mais l'unité les
a condamnés, parce qu'il appartient-à l'unité sainte, qui communique avec
l'Eglise ancienne par une succession vénérable; il appartient, dis-je, à cette
unité de condamner l'audace de la nouveauté. Donc leurs noms sont des noms de
schisme : notre nom, c'est un nom de communion. Mon nom, c'est chrétien, dit
saint Pacien (1); mon surnom, c'est catholique. Catholique, c'est
universel; catholique, c'est un nom d'unité, un nom de charité et de
paix. Donc l'Eglise catholique est l'Eglise vierge, parce qu'elle possède
l'unité sainte, qui la lie inséparablement à l'Epoux unique. C'est pourquoi les
églises des hérétiques ayant perdu l'unique Epoux, elles prennent le nom de
leurs adultères.
L'hérésie n'a point de vierges
sacrées : quoiqu'elle se vante d'être l'Eglise, elle n'ose imiter l'Eglise en ce
point. Il n'y a que la vraie Eglise qui sache saintement consacrer les vierges.
Et certes comme l'Eglise catholique est l'Eglise vierge, c'est elle aussi qui
nourrit les vierges. Jésus-Christ ne les reçoit pas pour Epouses, si l'Eglise sa
bien-aimée ne les lui présente : et c'est pourquoi vous ayant destinée dès
l'éternité à ce mariage spirituel, que la pureté virginale contracte avec lui,
il vous a inspiré dans le même temps ce double désir, d'aimer la virginité de
l'Eglise et de garder la virginité dans l'Eglise. Réjouissez-vous donc en
Notre-Seigneur ; préparez-vous aux embrassements de l'Epoux céleste. C'est lui
qui est engendré dans l'éternité par une génération virginale ; c'est lui qui
naissant dans le temps, ne veut point de Mère qui ne soit parfaitement vierge,
et il consacre son intégrité par une divine conception et par une miraculeuse
naissance.
1 S. Pacian., ad Sympron., epist.
I.
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