Nativ. Marie II
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SECOND SERMON
POUR
LE JOUR DE LA NATIVITÉ DE LA SAINTE VIERGE (a).

 

Quis, putas, puer iste erit?

 

Quel, pensez-vous , que sera cet enfant? Luc., I, 66.

 

C'est en vain que les grands de la terre, s'emportant quelquefois plus qu'il n'est permis à des hommes, semblent vouloir cacher les faiblesses de la nature sous cet éclat trompeur de leur éminente fortune. Je reconnais, mes Sœurs, avec l'Apôtre (1), que nous sommes obligés de les honorer comme les lieutenants de Dieu sur la terre, auxquels sa providence a commis le gouvernement de ses peuples; et c'est ce respect que nous leur rendons qui établit la fermeté des Etats, la sûreté publique et le repos des particuliers. Mais comme il leur arrive souvent qu'enivrés de cette prospérité passagère, ils se veulent mettre au-dessus de la condition

 

1 Rom., XIII et seq.

(a) Prêché aux grandes Carmélites de la rue Saint-Jacques en 1661, la même année que Bossuet prêcha le Carême dans cette communauté religieuse.

Le lecteur remarquera sans peine les signes de cette date.

Il manque dans toutes les éditions, même dans celles qui se publient de nos jours, deux passages importants : l'un à la fin du premier point, l'autre vers le milieu du second, commençant par ces mots : « Il me souvient de ces mères à qui l'on déchire les entrailles... »

Le manuscrit original se trouve à la bibliothèque du séminaire de Meaux.

 

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humaine, c'est avec beaucoup de raison que le plus sage de tous les hommes entreprend de confondre leur témérité (a). Il les ramène au commencement de leur vie, il leur représente leurs infirmités dans leur origine ; et bien qu'ils aient le cœur enflé de la noblesse (b) de leur naissance, il leur fait bien voir que si illustre qu'elle puisse être, elle a toujours beaucoup plus de bassesse que de grandeur. Pour moi, dit Salomon (1), quoique (c) je sois le maître d'un puissant Etat, j'avoue ingénument que ma naissance ne diffère en rien de celle des autres. Je suis entré nu en ce monde, comme étant exposé à toutes sortes d'injures; j'ai salué comme les autres hommes la lumière du jour par des pleurs, et le premier air que j'ai respiré m'a servi ainsi qu'à eux (d) à former des cris : Primam vocem similem omnibus emisi plorans (2). Telle est, continue-t-il, la naissance des plus grands monarques (e); et de quelque grandeur que les flattent leurs courtisans, la nature qui ne sait point flatter, ne les traite pas autrement que les moindres de leurs sujets.

Voilà où le plus sage des rois appelle les grands de ce monde, pour convaincre leur ambition ; et d'autant que c'est là sans doute où elle a le plus à souffrir, il n'est pas croyable combien d'inventions ils ont recherchées pour se tirer du pair, même dans cette commune faiblesse. il faut, à quelque prix que ce soit, séparer du commun des hommes le prince naissant. C'est pourquoi chacun s'empresse à lui rendre des hommages qu'il ne comprend pas. S'il paraît dans la nature quelque changement ou quelque prodige, on en tire incontinent des augures de sa bonne fortune, comme si cette grande machine ne remuait que pour cet enfant. Comme le temps présent ne lui est point favorable, parce qu'il ne lui donne rien qui le distingue de ceux de son âge, il faut consulter l'avenir et avoir recours nécessairement à la science des pronostics. C'est ici que les astrologues mêlant dans leurs vaines

 

1 Sap., VII, 1, 2.— 2 Ibid., 3.

 

(a) Var. : Ils se mettent au-dessus de la condition humaine, comme on en a vu mille et mille exemples dans les cours des princes ; le sage Salomon nous donne un moyen bien puissant pour confondre leur témérité. — (b) Et bien qu'ils vantent sans cesse la noblesse. — (c) Encore que. — (d) Comme à eux. — (e) De tous les rois.

 

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spéculations la curiosité et la flatterie, leur font des promesses hardies, dont ils donnent pour cautions (a) des influences cachées. C'est dans ce même dessein que les orateurs tâchent (b) de faire valoir l'art des conjectures; et ainsi l'ambition humaine ne pouvant se contenir dans cette simple modestie que la nature tâche de nous inspirer, elle s'enfle et se repaît de doutes et d'espérances.

Grâce à la miséricorde divine, nous sommes appelés aujourd'hui à la naissance d'une Princesse qui ne demande point ces vains ornements. Gardons-nous bien, mes Sœurs, de célébrer sa nativité avec ces recherches téméraires dont les hommes se servent en de pareilles rencontres ; mais plutôt considérant que celle dont nous parlons est la Mère du Sauveur Jésus, apprenons de son Evangile de quelle manière il désire que nous solennisions la naissance de ses élus. Les parents de saint Jean-Baptiste nous en donnent un bel exemple : ils ne pénètrent pas les secrets de l'avenir avec une curiosité trop précipitée ; toutefois adorant en eux-mêmes les conseils de la Providence, ils ne laissent pas de s'enquérir modestement entre eux quel sera un jour cet enfant : Quis, putas, puer iste erit ? Je me propose aujourd'hui de faire (c), pour la Mère de notre Maître, ce que je vois pratiqué pour son précurseur.

Ames saintes et religieuses, qui voyez cette incomparable Princesse faire son entrée en ce monde, quel pensez-vous que sera cet enfant? Quis, putas, puer iste erit? Que me répondrez-vous à cette question, et moi-même que répondrai-je? (d) Tirons la réponse du saint évangile que nous avons lu ce matin, dans la célébration des divins mystères : De quâ natus est Jesus (1) ; viendra le temps que Jésus, la Sagesse du Père et l'unique Rédempteur

 

1 Matth., I, 16.

 

(a) Var. : Pour garants. — (b) Que les orateurs du siècle, dans ces belles oraisons qu'ils appellent généthliaques d'un nom magnifique, tâchent. — (c) J'ai cru que je pouvais faire aujourd'hui.— (d) N. marg. Consulterai-je les astres pour lire dans leurs diverses figures la destinée de Marie ? Mais je sais que notre Sauveur est le seul astre qui la domine. Irai-je étudier dans les livres des rhétoriciens les artifices dont ils se servent pour deviner de bonne grâce ? Mais cette petite innocente ne prendra pas plaisir aux afféteries de la rhétorique; elle aime sur toutes choses cette naïve simplicité qui reluit de toutes parts dans l'Evangile de son cher Fils. En effet puisque la question que je vous ai proposée est prise de l'Evangile, il sera bien à propos que j'en tire aussi la réponse.

 

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de nos âmes, se revêtira d'une chair (a) humaine dans les entrailles de cette fille dont nous honorons la naissance. C'est par cet éloge, mes Sœurs, qu'il nous faut estimer sa grandeur, et juger avec certitude quel sera un jour cet enfant. La nativité de la sainte Vierge nous fait voir le temple vivant où se reposera le Dieu des armées, lorsqu'il viendra visiter son peuple ; elle nous fait voir le commencement de ce grand et bienheureux jour que Jésus doit bientôt faire luire au monde. Nous aurons bientôt le salut, puisque nous voyons déjà sur la terre celle qui doit y attirer le Sauveur. La malédiction de notre nature commence à se changer aujourd'hui en bénédiction et en grâce, puisque de la race d'Adam, qui était si justement condamnée, naît la bienheureuse Marie, c'est-à-dire celle de toutes les créatures qui est tout ensemble la plus chère à Dieu et la plus libérale aux hommes. Car la grandeur de la sainte Vierge est une grandeur bienfaisante, une grandeur qui se communique et qui se répand; et la suite de ce discours vous fera paraître que sa dignité de Mère de Dieu la rend aussi la mère des fidèles : de sorte qu'il n'y a rien, âmes chrétiennes, que nous ne puissions (b) justement attendre de la protection de cette Princesse que le Ciel nous donne aujourd'hui pour être, après le Sauveur Jésus, le plus ferme appui de notre espérance.

Et c'est ce que je me propose de vous faire entendre par ce raisonnement invincible, dont les deux propositions principales feront le partage de ce discours. Afin qu'une personne soit en état de nous soulager par son assistance près de la Majesté divine, il est absolument nécessaire que sa grandeur l'approche de Dieu, et que sa bonté l'approche de nous. Si sa grandeur ne l'approche de Dieu, elle ne pourra puiser dans la source où toutes les grâces sont renfermées ; si sa bonté ne l'approche de nous, nous n'aurons aucun bien par son influence. La grandeur est la main qui puise; la bonté, la main qui répand; et il faut ces deux qualités pour faire une parfaite communication. Marie étant la mère de notre Sauveur, sa qualité l'élève bien haut auprès du Père éternel; et la même Marie étant notre mère, son affection la rabaisse jusqu'à compatir à notre faiblesse, jusqu'à s'intéresser à notre

 

(a) Var. : Prendra une chair. — (b) Que nous ne devions.

 

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bonheur. Par conséquent il est véritable que la nativité de cette Princesse doit combler le monde de joie, puisqu'elle le remplit d'espérance; et l'explication que je vous propose de ces vérités importantes, établira la dévotion à la sainte Vierge sur une doctrine solide et évangélique.

 

PREMIER POINT.

 

Encore que les idées différentes que nous nous formons à nous-mêmes pour nous représenter l'essence divine ne soient pas une véritable peinture, mais seulement une ombre imparfaite, celle qui semble la plus auguste et la plus digne de cette Majesté souveraine, c'est de comprendre la Divinité comme un abîme immense et comme un trésor infini, où toutes sortes de perfections sont glorieusement rassemblées. En effet Dieu porte en son sein tout ce qui peut jamais avoir l'être;  toutes les grâces, toutes les beautés que nous voyons semées sur les créatures se ramassent toutes en son unité; et il dit à Moïse son serviteur », qu'il lui montrera tout le bien en lui découvrant son essence. C'est que la nature du bien, que nous voyons ici partagée, se trouve totalement renfermée en Dieu. Mais, mes Sœurs, ce n'est pas assez qu'elle y soit ainsi renfermée, il faut que de cette source infinie il coule quelques ruisseaux  sur les créatures; sans quoi il est certain qu'elles demeureraient éternellement enveloppées dans la confusion du néant, parce que n'étant rien par nous-mêmes, nous ne pourrons jamais avoir d'être qu'autant que cette cause première laisse tomber sur nous, pour ainsi parler, quelque rayon ou quelque étincelle du sien. Ainsi pour produire les créatures, il faut que ce trésor immense, il faut que ce vaste sein de Dieu, où toutes choses sont renfermées, s'ouvre en quelque sorte et coule sur nous. Et qu'est-ce qui l'ouvre? C'est la bonté; c'est là son office et sa fonction, d'ouvrir le trésor de Dieu pour le communiquer à la créature ; et s'il est permis à des hommes de distinguer les devoirs des divers attributs de Dieu, nous pouvons dire avec raison que comme c'est l'infinité qui renferme

 

1 Exod., XXXIII, 19.

 

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en Dieu tout le bien, c'est aussi la bonté qui le communique.

C'est ce qu'il m'est aisé de vous expliquer par une belle division de saint Augustin. Tous ceux qui donnent leurs biens aux autres, dit cet admirable docteur, le donnent par l'une de ces trois raisons : ou par une force supérieure qui les y oblige, et ils donnent par nécessité ; ou par quelque intérêt qui leur en revient, et ils le font pour l'utilité ; ou par une inclination bienfaisante, et c'est un effet de bonté. Ainsi le soleil donne sa lumière parce que Dieu lui a posé cette loi, c'est nécessité; un grand seigneur répand ses trésors pour se faire des créatures, il le fait pour l'utilité; un père donne à son fils à cause qu'il l'aime ; c'est un sentiment de bonté. Maintenant il est clair, mes Sœurs, que ce ne peut pas être la nécessité qui oblige Dieu à étendre sur nous sa munificence, parce qu'il n'y a aucune puissance qui le domine; ni l'utilité, parce qu'il est Dieu et qu'il n'a pas besoin de ses créatures; d'où il résulte que la bonté est l'unique dispensatrice des grâces, que c'est à elle d'ouvrir le trésor de Dieu et à tirer de son sein immense tout ce que nous avons de bien (a). C'est pourquoi nous lisons dans les saintes Lettres qu'après la création de cet univers, Dieu considérant ses ouvrages, se réjouit en quelque sorte de ce qu'ils sont bons: Et erant valdè bona (1). D'où vient cela, dit saint Augustin (2), sinon qu'il se plaît de voir en ses œuvres l'image de la bonté qui les a produites? Et de là il s'ensuit manifestement qu'il n'y a que l'amour en Dieu qui soit libéral parce que comme le propre de cette justice sévère c'est d'agir avec rigueur, et le propre de la puissance c'est d'agir avec efficace, ainsi le propre de la bonté, c'est d'agir par un pur amour.

Mais cette belle manière d'agir par amour paraît encore plus visiblement en la personne du Dieu incarné. Il sait que c'est l'amour du Père éternel qui l'a envoyé sur la terre : Sic Deus dilexit mundum (3) : « Dieu a tant aimé le inonde, qu'il lui a donné son Fils unique. » Il avait montré de l'amour à l'homme dans l'ouvrage delà création, « lorsqu'il le créa, dit Tertullien, non par une parole

 

1 Gen., I, 31. — 2 De Genes. ad litt., lib. imperf., cap. V, n. 22. — 3 Joan., III, 16.

(a) Var. : Tout ce que les créatures possèdent.

 

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de commandement, ainsi que les autres, mais par une voix caressante et comme flatteuse: Faisons l'homme: » Non imperiali verbo, sed familiari manu, etiam verbo blandiente prœmisso: Faciamus hominem (1). Voilà de l'amour dans la création ; mais qui ne va pas encore jusqu'à cette extrême tendresse que la rédemption nous a fait paraître. Ce second amour du Père éternel par lequel il a voulu réparer les hommes, n'est pas un amour ordinaire ; c'est un amour qui a du transport. Dieu a tant aimé Je monde! Voyez l'excès, voyez le transport. Et c'est pourquoi le Dieu incarné brûle d'un si grand amour (a) pour les hommes, parce qu'il « ne fait, nous dit-il lui-même (2), que ce qu'il voit faire à son Père. » Comme son Père nous l'a donné par amour, c'est aussi par l'amour qu'il donne, et c'est l'amour qu'il a pour les hommes qui fait la distribution de ses grâces.

Cette doctrine évangélique étant supposée, approchons-nous, mes Sœurs, avec révérence du berceau de la sainte Vierge, et jugeons quelle sera un jour cette fille par l'amour que Jésus sentira pour elle. Et d'abord je pourrais vous dire que l'amour du Sauveur Jésus, qui est une pure libéralité à l'égard des autres, à l'égard de sa sainte Mère est comme une dette, et qu'il passe en nature d'obligation, parce que c'est un amour de Fils.

Mais pénétrons plus profondément les secrets divins sous la conduite des Lettres sacrées ; et pour connaître mieux quel est cet amour du Fils de Dieu pour la sainte Vierge, considérons-le, chrétiens, comme un accomplissement nécessaire du mystère de l'incarnation. Suivez, s'il vous plaît, mon raisonnement; il est tiré du divin Apôtre en cette admirable Epître aux Heureux. C'est une sainte et salutaire pensée de méditer continuellement en nous-mêmes, dans l'effusion de nos cœurs, la tendre affection de notre Sauveur pour les hommes, en ce qu'il n'a rien dédaigné de ce qui était de notre nature. Il a tout pris jusqu'aux moindres choses, tout jusqu'aux plus grandes infirmités. Il a bien voulu avoir faim et soif, tout ainsi que les autres hommes ; et « si vous

 

1 Advers. Marcion., lib. II, n. 4. — 2 Joan., V, 19.

 

(a) Var. ; Ressent un si grand amour.

 

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exceptez le péché, il n'a rejeté de lui aucune de nos faiblesses (1). » C'est ce qu'il est venu chercher sur la terre ; et au lieu de nos infirmités qu'il a prises, il nous a communiqué ses grandeurs. Et n'est-ce point, mes Sœurs, pour cette raison que l'Eglise inspirée de Dieu appelle l'incarnation un commerce? En effet, dit saint Augustin (2), c'est un commerce admirable où Jésus, ce céleste négociateur, étant venu du ciel en la terre dans le dessein de trafiquer avec une nation étrangère, qu'a-t-il fait? Ah ! il nous a apporté les biens qui sont propres à cette céleste patrie qui est son naturel héritage, la grâce, la gloire, l'immortalité ; et il a pris les choses que cette misérable terre produit, la faiblesse, la misère, la corruption. O commerce de charité ! ô riche commerce ! ah ! combien il devrait élever nos âmes à l'espérance des biens éternels ! Jésus s'est plu dans mon néant, et je ne veux point me plaire dans sa grandeur ! Son amour lui a fait trouver une douce satisfaction en se revêtant de ma pourriture, et je n'en veux point trouver à me revêtir de sa gloire, et mon cœur aime mieux courir après des délices qui passent et des biens que la mort enlève !

Mais revenons à notre sujet, et demandons au divin Epoux d'où vient qu'il ne s'est pas contenté de se revêtir de notre nature, et qu'il veut prendre encore nos infirmités. La raison en est claire dans les Ecritures : c'est que le dessein de notre Sauveur, dans sa bienheureuse incarnation, est de se rendre semblable aux hommes ; et comme tous ses ouvrages sont achevés et ne souffrent aucune imperfection, de là vient, de là vient, mes Sœurs, qu'il ne veut point de ressemblance imparfaite. Ecoutez l'apôtre saint Paul : « Il s'est uni, dit-il (3), non pas aux anges, mais à la postérité d'Abraham ; et c'est pourquoi il fallait qu'il se rendît en tout semblable à ses frères, » il veut être semblable aux hommes. Il faut, dit saint Paul, qu'il le soit en tout, autrement son ouvrage serait imparfait. C'est pourquoi dans le jardin des Olives, je le vois dans la crainte, dans la tristesse (4), dans une telle consternation, qu'il sue sang et eau dans la seule appréhension du supplice qu'on lui prépare (5). Dans quelle histoire a-t-on jamais lu qu'un accident

 

1 Hebr., IV, 15.— 2 Enarr. II in Psal. XXX, n. 3; Enarr. in Psal. CXLVIII, n. 8. — 3 Hebr., II,  16,  17.  — 4 Marc, XIV, 33. —  5 Luc., XXII, 44.

 

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pareil soit jamais arrivé à d'autres qu'à lui ? Et n'avons-nous pas raison de conclure d'un effet si extraordinaire que jamais homme n'a eu les passions si tendres ni si fortes que mon Sauveur, bien qu'il les eût toujours modérées parce qu'elles étaient très-soumises à la volonté de son Père? Et d'où vient, ô divin Sauveur, que vous les prenez de la sorte ? Ah ! c'est que je veux être semblable à vous. Et s'il ne l'était pas en ce point, il eût cru qu'il eût manqué quelque chose au mystère de l'incarnation.

A plus forte raison doit-on dire que son cœur était tout d'amour pour la sainte Vierge sa Mère. Car s'il s'est si franchement revêtu de ces sentiments de faiblesse, qui semblaient indignes de sa personne, de ces langueurs mortelles, de ces vives appréhensions; s'il les a purs et si entiers, combien doit-il plutôt avoir pris l'affection envers les parents, puisque dans la nature même il n'y a rien de plus naturel, de plus équitable, de plus nécessaire ? Ne serait-ce pas en quelque sorte mépriser sa chair, que de n'aimer pas fortement cette sainte Vierge, du sang de laquelle elle était formée ? Tellement qu'il est impossible que le cœur du divin Jésus ne fût pénétré, jusqu'au fond, de l'amour de Marie sa Mère très-pure, puisque cet amour filial était l'accomplissement nécessaire de sa bienheureuse incarnation.

Et ne me dites pas que ce grand amour étant une suite de l'incarnation, le Fils de Dieu n'a pu en être touché qu'après s'être revêtu d'une chair humaine. Car pour vous découvrir les secrets conseils de la Providence divine en faveur de l'incomparable Marie, remarquez une belle doctrine de Tertullien, au second livre Contre Marcion. C'est là que ce grand homme enseigne aux fidèles que depuis que le Fils de Dieu eut résolu de s'unir à notre nature, dès lors il a pris plaisir de converser avec les hommes et de prendre les sentiments humains. C'est pour cela, dit Tertullien, qu'il est souvent descendu du ciel, et que dès l'Ancien Testament il parlait en forme humaine aux patriarches et aux prophètes. Il considère ces apparitions différentes comme des préparatifs de l'incarnation ; de cette sorte, dit-il, il s'accoutumait et il apprenait pour ainsi dire à être homme ; « il se plaisait d'exercer, dès l'origine du monde, ce qu'il devait être enfin dans la plénitude des

 

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temps : » Ediscens jam inde à primordio hominem quod erat futurus in fine (1).

Et si dès l'origine du monde, avant qu'il eût pris une chair humaine, il se plaisait déjà de se revêtir de la forme et des sentiments humains, tant il était passionné pour notre nature, ne croyons pas, mes Sœurs, qu'il ait attendu sa venue au monde pour prendre des sentiments de fils pour Marie. Dès le premier jour qu'elle naît au monde, il la regarde comme sa Mère parce qu'elle l'est en effet selon l'ordre des décrets divins. Il regarde en elle ce sang dont sa chair doit être formée, et il le considère déjà comme sien, il s'en met pour ainsi dire en possession en le consacrant par son Esprit-Saint ; ainsi son alliance avec Marie commence à la nativité de cette Princesse, et avec l'alliance l'amour, et avec l'amour la munificence. Car, mes Sœurs, il est impossible qu'un Dieu aime et ne donne pas ; et le commencement de ce discours vous a fait connaître que rien n'est plus libéral que l'amour de Dieu, et que c'est lui qui ouvre le trésor des grâces. Combien donc illustre, combien glorieuse est votre sainte nativité, ô divine, ô très-admirable Marie ! quelle abondance de dons célestes est aujourd'hui répandue sur vous ! Il me semble que je vois les anges qui contemplent avec respect le palais qui.est déjà marqué pour leur Maître, par un caractère divin que le Saint-Esprit y imprime. Mais je vois le Fils de Dieu, le Verbe éternel, qui vient lui-même consacrer son temple et l'enrichir de trésors célestes avec une profusion qui n'a point de bornes, parce qu'il veut, ô bénit Enfant dans lequel notre bénédiction prend son origine, il veut que vous naissiez digne de lui et qu'il vous serve d'avoir un Fils qui soit l'auteur de votre naissance. Quel esprit ne se perdrait pas dans la contemplation de tant de merveilles ! quelle conception assez relevée pourrait égaler cet honneur, cette majesté de Mère de Dieu !

Mais pourriez-vous croire, mes Sœurs, que tous les fidèles peuvent prendre part à la gloire d'un si beau titre? Nous pouvons participer en quelque façon à la dignité de Mère de Dieu. Rejetons loin de nous les discours humains, les raisonnements naturels; écoutons

 

1 Adv. Marc., lib. II, n. 27.

 

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parler Jésus-Christ lui-même : « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est mon frère, ma sœur et ma mère (1); » c'est-à-dire, ô divin Sauveur, que vous ne reconnaissez aucune alliance qui vous soit plus considérable que celle qui est établie par l'obéissance à la volonté du Père céleste ; c'est là ce qui approche les hommes de vous. Il dépend de toi, ô fidèle, il dépend de toi de choisir à quel titre tu appartiendras, de quelle sorte tu seras uni au Sauveur des âmes. Jésus-Christ nous aime si fort, qu'il ne refuse avec nous aucun titre d'affinité ni aucun degré d'alliance. Fais la volonté de son Père, et tu peux lui être ce que tu voudras. Si le titre de frère te plaît, Jésus-Christ te l'offre. Si tu admires la dignité de sa Mère, toute grande, toute éminente qu'elle est, il ne t'exclut pas même d'un si grand honneur: Ille meus frater, soror et mater est. Tu peux participer en quelque façon à l'amour qu'il a pour sa Mère. Omnia vestra sunt (2). Marie est à nous; tout est à nous, puisque Jésus-Christ même est à nous.

O mes Sœurs, que nous sommes riches ! Mais à ses richesses spirituelles nous voulons joindre l'amour des biens de la terre, et nous faisons évanouir les trésors célestes. Mais écoute la loi qu'il t'impose : pour être élevé à de si beaux titres, il ne faut pas faire notre volonté, mais la volonté du Père céleste, puisque le nœud de cette alliance, c'est de faire la volonté de son Père; celui qui fait sa volonté propre, il n'est rien au Sauveur Jésus. Faisons la volonté de son Père, et nous toucherons de près à Jésus. Or la volonté de son Père est que nous ne nous plaisions point à nous-mêmes. Car «Jésus n'a point cherché sa volonté propre : » Christus non sibi placuit (3); mais il l'a soumise à son Père, obéissant jusqu'à la mort. Marie n'a point cherché sa volonté propre; mais contre son inclination naturelle, elle a offert à la croix son Fils bien-aimé. Elle n'a pas été menée au Thabor pour y voir la gloire de son cher Jésus; mais elle a été conduite au Calvaire pour y voir son ignominie, et là sacrifier sa volonté propre à la volonté du Père éternel. Sacrifions la nôtre, mes Sœurs, n'écoutons jamais nos désirs; écoutons la voix de l'obéissance, et alors Marie sera notre Mère. C'est notre seconde partie, par laquelle j'achèverai ce

 

1 Matth., XII, 50. — 2 I Cor., III, 22. — 3 Rom., XV, 3.

 

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discours. C'est assez arrêter les yeux sur cette haute dignité de Mère de Dieu; je me sens ébloui d'un si grand éclat, et je suis contraint de baisser la vue. Mais de même que nos faibles yeux éblouis de la clarté du soleil dans l'ardeur de son midi, l'attendent quelquefois pour le regarder plus à leur aise lorsqu'il penche sur son couchant, dans lequel il semble à nos sens qu'il descende plus près de la terre : ainsi étant étonné, ô Vierge admirable, d'avoir osé vous considérer (a) si longtemps dans la qualité éminente de Mère de Dieu, qui vous approche si fort de la Majesté divine (b), il faut maintenant que je vous contemple en la qualité de Mère des hommes, qui vous abaisse jusqu'à nous par une miséricordieuse condescendance. C'est ce qui me reste à vous expliquer. Renouvelez, s'il vous plaît, vos attentions.

 

SECOND POINT.

 

Pour entendre solidement quelle est cette fécondité de Marie, qui lui donne tous les chrétiens pour enfants, distinguons avant toutes choses deux sortes de fécondité : fécondité de nature, fécondité de la charité. Nous voyons dans les adoptions que des hommes privés d'enfants, ce que la nature leur a refusé, ils tâchent de l'acquérir par l'amour. C'est ainsi que la charité engendre (c) ; et ceux qui ont entendu l'Apôtre disant: « Mes petits enfants, que j'enfante de nouveau jusqu'à ce que Jésus-Christ soit formé en vous (1), » savent bien que la charité se fait des enfants. C'est pourquoi saint Augustin dit souvent que : Charitas mater est (2); et pour reprendre cette vérité jusqu'au principe, remarquons que cette double fécondité, que nous voyons dans les créatures, est émanée de celle de Dieu, duquel toute paternité prend son origine. La nature de Dieu est féconde, et lui donne son Fils naturel qu'il engendre dans l'éternité. La charité de Dieu est féconde, et lui donne des fils adoptifs; c'est de laque nous sommes nés avec tous les enfants d'adoption. Marie participe à la fécondité naturelle de Dieu

 

1 Gal., IV, 19.— 2 In Epist. Joan., tract. II, n. 4; Enar. in Psal. CXLVII, n. 14.

 

(a) Var. : De vous avoir considérée. — (b) Qui vous élève si fort au-dessus de nous. — (c) Est féconde.

 

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engendrant son propre Fils, et à la fécondité de sa charité engendrant aussi les fidèles : Cooperata est charitate (1).

Donc, mes Sœurs, réjouissons-nous en la sainte nativité de Marie, et célébrons ce bienheureux jour par de sincères actions de grâces. Comprenons que nos intérêts sont unis très-étroitement à ceux de Jésus, puisque tout ce qui naît pour Jésus naît aussi pour nous. Voyons naître pour nous, avec cette Vierge, une source de charité qui ne tarit point, une source toujours vive, toujours abondante. Buvons à cette source, mes Sœurs; jouissons de cet amour maternel ; il est plein de douceur, mais ce n'est pas d'une douceur molle.

Mais que nos esprits ne s'arrêtent pas à une vaine spéculation ; méditons ce qu'exige de nous la maternité de Marie, et de quelle sorte nous devons vivre pour être véritablement ses enfants. Ceux qui sont ses véritables enfants, ce ne sont pas ces chrétiens délicats , qui ne peuvent souffrir les afflictions et qui tremblent au seul nom de la pénitence. O Marie, ce ne sont pas là vos enfants. Vous les voulez plus forts et plus généreux ; et ces forts et ces généreux, vous les trouvez au pied de la croix. Appuyons par l'Ecriture divine cette vérité importante ; et posons pour premier principe que les fidèles sont à Marie en tant que Jésus-Christ les lui a donnés, parce qu'étant achetés au prix de son sang, il n'y a que lui seul qui peut nous donner. Or recherchant dans son Evangile où Jésus nous a donnés à Marie, je trouve qu'il nous a donnés étant sur la croix. Où est-ce qu'il a dit à son cher disciple : « O disciple, voilà votre mère (2)? » Où est-ce qu'il a dit à Marie : « 0 femme, voilà votre fils? » N'est-ce pas du haut de la croix? C'est là donc qu'en la personne de son bien-aimé, il donne tous les fidèles à sa sainte Mère; c'est là que nous devenons ses enfants.

Et d'où vient que notre Sauveur a voulu attendre cette heure dernière, pour nous donner à Marie comme ses enfants? En voici la véritable raison : c'est qu'il veut lui donner pour nous des entrailles et un cœur de mère. Et comment cela, direz-vous? Admirez, mes Sœurs, le secret de Dieu. Marie était au pied de la croix; elle voyait ce cher Fils tout couvert de plaies, étendant ses bras à

 

1 S. August., de sancta Virginit., n. 6.—2 Joan., XIX, 26, 27.

 

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un peuple incrédule et impitoyable, son sang qui débordait de tous côtés par ses veines cruellement déchirées: qui pourrait vous dire quelle était l'émotion du sang maternel? Ah! jamais elle ne sentit mieux qu'elle était mère. Toutes les souffrances de son Fils le lui faisaient sentir au vif. Que fera ici le Sauveur ? Vous allez voir, mes Sœurs, qu'il sait parfaitement le secret d'émouvoir les affections.

Quand l’âme est prévenue de quelque passion violente, elle reçoit aisément les mêmes impressions pour tous les autres qui se présentent. Par exemple, vous êtes possédé d'un mouvement de colère, il sera difficile que ceux qui approchent de vous n'en ressentent quelques effets. Et de là vient que, dans les séditions populaires, un homme qui saura ménager avec art les esprits de la populace irritée, lui fera aisément tourner sa fureur contre ceux auxquels on pensoit le moins. Il en est de même des autres passions, parce que l’âme étant déjà excitée, il ne reste plus qu'à l'appliquer sur d'autres objets, à quoi son propre mouvement la rend extrêmement disposée. C'est pourquoi le Sauveur Jésus, qui voulait que sa Mère fût aussi la nôtre afin d'être notre frère en toute façon, considérant du haut de sa croix combien son âme était attendrie, comme si c'eût été là qu'il l'eût attendue , il prit sou temps de lui dire, lui montrant saint Jean : « O femme, voilà votre fils. » (a) Ce sont ses mots, et voici son sens : O femme affligée, à qui un amour infortuné fait éprouver maintenant jusqu'où peut

 

(a) Note marg. : Saint Jean nous représente en cette action l'universalité des fidèles. Comprenez, s'il vous plaît, ce raisonnement. Tous les autres disciples de mon Sauveur l'ont abandonné ; et Dieu l'a permis de la sorte, afin de nous faire entendre qu'il y en a peu qui suivent Jésus-Christ à la croix. Donc tous les autres étant dispersés, la Providence n'a retenu près du Dieu mourant que Jean le bien-aimé de son cœur. C'est l'unique, c'est le vrai fidèle. Car celui-là est vraiment fidèle à Jésus, qui suit Jésus jusqu'à la croix; et ainsi cet unique fidèle représente tous les fidèles. Par conséquent lorsque Jésus-Christ parlant à sa Mère, lui dit que saint Jean est son fils, ne croyez pas qu'il considère saint Jean comme un homme particulier : il lui donne en la personne de Jean tous ses disciples et tous ses fidèles tous les héritiers de la nouvelle alliance et tous les enfants de la croix. De là vient, comme je l'ai remarqué, qu'il l'appelle femme; il veut dire femme par excellence, femme choisie singulièrement pour être la Mère du peuple élu. O femme, lui dit-il, ô nouvelle Eve, voilà votre fils; et lui et tous les fidèles qu'il représente, ce sont vos enfants. Jean est mon disciple et mon bien-aimé ; recevez en sa personne tous les chrétiens, parce qu'il tient la place d'eux tous, et qu'ils sont tous aussi bien que Jean mes disciples et mes bien-aimés.

 

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aller la tendresse et la compassion d'une mère, cette même affection maternelle dont vous êtes touchée si vivement pour moi (a), ayez-la pour Jean mon disciple et mon bien-aimé ; ayez-la pour tous mes fidèles, que je vous recommande en sa personne, parce qu'ils sont tous mes disciples et mes bien-aimés. Ce sont ces paroles, mes Sœurs, qui imprimèrent au cœur de Marie une tendresse de mère pour tous les fidèles comme pour ses véritables en-fans. Car est-il rien de plus efficace sur le cœur de la sainte Vierge que les paroles de Jésus mourant? Il me souvient ici de ces mères à qui on déchire les entrailles par le fer pour en arracher leurs enfants, et les mettre au monde par violence. Il vous est arrivé quelque chose de semblable, ô bienheureuse Marie. C'est par le cœur que vous nous avez enfantés, puisque c'est par la charité : Cooperata est charitate. Et j'ose dire que ces paroles de votre Fils, qui étaient ses derniers adieux, entrèrent en votre cœur ainsi qu'un glaive tranchant, et y portèrent jusqu'au fond avec une douleur excessive un amour de mère pour tous les fidèles. Ainsi vous nous avez pour ainsi dire enfantés d'un cœur déchiré par la violence d'une affliction sans mesure; et toutes les fois que les chrétiens paraissent devant vos yeux, vous vous souvenez de cette dernière parole et vos entrailles s'émeuvent sur nous comme sur les enfants de votre douleur.

Doutez-vous après cela, chrétiens, quels sont les enfants de la sainte Vierge? Qui ne voit que ses véritables enfants ce sont ceux qu'elle trouve au pied de la croix avec Jésus-Christ crucifié ? Et qui sont ceux-là? Ce sont ceux qui mortifient en eux le vieil homme, qui crucifient le péché et ses convoitises par l'exercice de la pénitence. Voulez-vous être enfants de Marie, prenez sur vous la croix de Jésus. C'est ce que vous avez déjà commencé lorsque vous avez renoncé au monde. Mais persévérez dans votre vocation, retranchez tous les jours les mauvais désirs ; et puisque vous avez méprisé le monde, qu'aucune partie de sa pompe ne soit capable de vous attirer, que le souvenir de ses vanités n'excite que du mépris en vos cœurs. Ainsi, mes Sœurs, vous vous rendrez dignes du glorieux et divin emploi que la charité vous impose, de

 

(a) Var. : Qui se réveille si vivement en votre âme pour moi.

 

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travailler au salut des âmes. Il les faut gagner par les mêmes voies que Jésus-Christ se les est acquises, par l'humiliation et parla bassesse, par la pauvreté et par les souffrances, par toutes sortes de contradictions. Voyez la bienheureuse Marie, elle engendre les fidèles parmi ses douleurs; de sorte qu'en méditant aujourd'hui la nativité de la sainte Vierge, songez que si elle doit être Mère des fidèles, c'est par les afflictions et par les douleurs qu'elle les doit engendrer à Dieu; et croyez que travaillant au salut des âmes, c'est la mortification et la pénitence qui rendront vos soins fructueux.

Et vous, ô pécheurs mes semblables, venez au berceau de Marie implorer le secours de cette Princesse, invoquer d'un cœur contrit et humilié une Mère si charitable. Mais si vous avez dessein de lui plaire, prenez sur vous la croix de Jésus ; n'écoutez plus le monde qui vous avait précipités dans l'abîme, ni ses charmes qui vous a voient abusés. Déplorez vos erreurs passées, et qu'une douleur chrétienne efface les fautes que vous ont fait faire tant de complaisances mondaines. Si l'innocence a sa couronne, la pénitence a aussi la sienne. Jésus est venu chercher les pécheurs ; et Marie, toute innocente qu'elle est, leur doit la plus grande partie de sa gloire, puisqu'elle n'aurait pas été la Mère d'un Dieu, si le désir de délivrer les pécheurs n'avait invité sa miséricorde à se revêtir d'une chair mortelle. S'il reste encore quelque dureté, que les larmes de cet enfant l'amollissent.

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