Chapelle N-D du Vorbourg / CH-2800 Delémont (JU) / tél/fax + 41 032 422 21 41 |
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Fêtes du Vorbourg, du 13 au 20 septembre« Pèlerinage vers soi-même... pour y trouver qui ? »
Chaque jour la messe sera célébrée à 5 h 30, 6 h 30, 7 h 30, 8 h 30, 10 h et
20 h. A l'ouverture de la Semaine du Vorbourg par les Vêpres solennelles, dimanche 14 septembre à 16 h, son sujet s'appuiera sur les textes de la Genèse, 12, 1-9: «Partir chez soi...» Les célébrations à 20 h sont animées par les Unités du Jura pastoral: - Lundi 14 septembre, pour l'Unité pastorale St-Germain par la paroisse de
Courroux, «La route du silence» 1 Rois 19,9-18 et Luc 11, 1-4 - Mardi 15 septembre, par l'Unité pastorale Sts Pierre et Paul, par la paroisse
de Delémont, «Le tapis de la méditation» Isaïe 55, 6-11 et Luc 10, 38-42 - Mercredi 16 septembre, pour l'Unité pastorale Ste Colombe, «L'échelle de
l'amour» Osée 2, 16-22 et Jean 17, 21-26. - Jeudi 17 septembre, célébrations en langue allemande avec le Laufonnais - Vendredi 18 septembre, par le doyenné d'Ajoie - Clos du Doubs, «Les fenêtres
de la communauté» Deutéronome 22,1-4 et Matthieu 18, 15-22 - Samedi 19 septembre, par le doyenné du Jura bernois, « Une école d'espérance
et de paix» Galates 5, 22-25 et Jean 4, 7-15 - Dimanche 20 septembre, Jeûne fédéral, clôture par les vêpres à 15 h, «Et maintenant... Prends ta vie en main» Luc 4, 16-30 Dimanche d'Ouverture : « Partir chez soi ». Genèse 12,1-9Je dois vous l'avouer, j'ai un grain de folie pour Abraham. J'adore ce personnage, tout simplement parce qu'il me dit qui je suis, et qui je suis pour Dieu. Il est mon miroir, mon reflet, l'expression de mon visage. Il est celui qui me montre la route. J'aime Abraham, non pas à cause de sa grande barbe blanche ou à cause de son âge, mais à cause de ses pieds. Abraham est un grand marcheur. En continuel déplacement, comme vous, comme moi. Avec ses pieds, Abraham est parti, il a pris la route, les pieds dans le sable, pour avancer, pour aller, pour monter et descendre les collines jusqu'au chêne de More. Mais avant de partir, Abraham a du prendre du temps pour lui, pour saisir la nouveauté de sa vie, pour découvrir son identité. N'êtes-vous pas parti vous aussi ? N'avez-vous pas quitté votre milieu de vie ? N'avez-vous pas laissé derrière vous famille, parents, enfants, amis pour monter, marcher peut-être, jusqu'au Vorbourg ? Mais, où est allé Abraham avec ses pieds brûlés par le soleil ? En venant ici qu'êtes-vous venu chercher ? Où allez-vous vraiment ? Abraham n'est pas parti bien loin. Il est d'abord parti chez lui. Dans le texte biblique, il ne faut pas traduire : « Pars, quitte ton pays », il faut traduire : « Va, vers toi ». Qu'est-ce que cela signifie, « va vers toi » ? Comment voulez-vous partir, aller chez les autres, si vous ne vous êtes pas mis en quête de vous-même ? Va vers toi-même, pars vers toi-même, d'abord, si tu veux rencontrer les autres. Mets-toi en mouvement toi-même, pour toi-même, si tu veux rencontrer les autres en vérité. Fais d'abord la vérité sur toi pour être bien avec les autres. En d'autres mots, creuse et construit ton identité, ton identité d'homme, de femme, de père ou de mère, de fils ou de fille, de collègue, etc. Lorsque Dieu dit à Abraham, va vers toi, il désire un éveil, une résurrection, un changement, une transformation pour un nouveau départ. Abraham doit être conscient de ce qu'implique ce nouveau départ. L'appel de Dieu implique tout un travail sur lui. Ce qu'Abraham doit découvrir, c'est son identité de fils de Dieu. Cà veut dire qu'il devient porteur d'une vie nouvelle, d'une espérance pour l'humanité. Il devient porteur d'un amour, porteur d'un souffle nouveau, d'une vie nouvelle. Mais pour devenir vraiment fils de Dieu en répondant à l'appel de Dieu, Abraham a tout un travail à faire. Quitter le monde des idoles dans lequel il était familier. Quitter son milieu naturel. Quitter des habitudes, des entreprises, une manière de vivre. En d'autres mots, Abraham est appelé à vivre un exode, un passage, une sortie, une Pâques. Voilà ce que signifie l'appel de Dieu à Abraham : « Va, vers toi ». Va vers toi, pars vers toi-même pour prendre conscience de ce que tu es appelé à devenir. Va et sois lucide sur ta réponse. Puis, va, avec toi-même, vers le pays que je t'indiquerai. Au début de cette semaine de prière, de pèlerinage, n'entendez-vous pas, vous aussi, cette parole de Dieu à Abraham ? A vous aussi, Dieu vous dit : «Va vers toi ». Comme membres de l'Eglise qui est au Jura, vous êtes appelés à de grands changements. Un nouveau projet pastoral se met en place. Des changements importants ont lieu au niveau de tous les agents pastoraux. Un exode, une Pâque est en route, en mouvement. L'Esprit est à l'œuvre. Un appel se dessine. Non pas parce que c'est bien d'avoir un projet pastoral, mais tout simplement parce que la vie des hommes et des femmes de ce territoire appelle une nouvelle présence, une nouvelle dynamique d'Eglise, pour rejoindre les hommes et les femmes d'ici là où ils sont et non pas là où je voudrais qu'il soit. Mon intention est claire. Vous désirez rayonner de l'Evangile, créer des communautés qui rayonnent l'Evangile ? Commencez par travailler sur vous, « va vers toi », édifiez en vous un sanctuaire intérieur, creusez en vous une source vivante, un lieu habité. Avant de partir dans le désert, Abraham est invité à faire une halte en lui-même. C'est à un pèlerinage intérieur que je vous invite. C'est là que vous rencontrerez Celui qui vous appelle. Lui saura vous engendrer à une vie nouvelle et à une nouvelle espérance pour la société dans laquelle vous vivez. Comment construire ce sanctuaire intérieur ? C'est quoi ce sanctuaire intérieur ? De quoi est-il fait ? Je vous propose de construire votre sanctuaire intérieur un peu comme on construit une demeure, une maison. Une maison a besoin d'un sol, sur ce sol on va y poser un tapis, une moquette. Néanmoins, cette maison a besoin de murs solides, elle a besoin d'un toit, tout comme elle a besoin de fenêtres. Mais au cœur de la maison, il y a un lieu central, un lieu source, un lieu dynamique qu'il faut créer. Le sol, c'est le silence. Pas de vie intérieure sans silence. Notre vie a besoin d'un arrière fond de silence. Quitter tous les bruits, intérieurs et extérieurs. Se retrouver soi-même pour être bien avec soi et avec les autres. Sur ce sol, j'y pose le tapis de la méditation, de la prière, de la contemplation. Une méditation, une prière enracinée dans l'écoute de la Parole de Dieu. L'écoute implique toujours un arrière fond de silence. Toute maison a besoin de s'édifier avec des murs. Votre sanctuaire intérieur aussi. Les murs de l'écoute, des choix, de l'obéissance à la Parole de Dieu. Ces murs vous permettront d'y adosser une échelle, l'échelle de l'amour. Plus j'écoute la Parole de Dieu, plus je me laisse engendrer par elle, plus grandit en moi le désir d'aimer et d'être aimé par Dieu. Ces murs ont besoin de fenêtres, ouvertes tantôt pour communier avec les autres, mais aussi fermées parfois pour fuir les bruits qui m'empêchent d'écouter. Au cœur de la maison, du sanctuaire, un lieu central, un autel, le Christ qui va donner une âme pour que rayonne la Bonne Nouvelle qu'il sème en nos vies. Le silence, l'écoute de la Parole de Dieu, la méditation et la prière, l'amour fraternel, l'esprit communautaire, l'ouverture à la vie concrète des gens, tout cela façonné par le Christ, animé par le Christ pour susciter auprès des hommes et des femmes qui vous rencontrerons, une nouvelle espérance. Votre sanctuaire intérieur deviendra alors cet espace qui vous donnera de rayonner. Vous serez alors comme Abraham, capables de partir, de traverser tous les déserts de vos vies, capables d'aller toujours plus loin à la rencontre des espaces humains, les pauvres, les affamés, les affligés, pour que vienne le Royaume de Dieu. Lundi : La route du silence 1 Rois 19, 9-18 + Luc 11,1-4Le silence ! Je désire vous introduire dans le silence. Le silence intérieur. « Va vers ton silence ». C'est une autre manière de vous dire comme Dieu l'a dit à Abraham : « Va vers toi ». Pas facile le silence, pas facile d'évacuer le bruit, non seulement le bruit extérieur, celui du vent, des machines, de la musique, de la parole, mais surtout le bruit intérieur. Les pensées qui m'envahissent, les soucis qui ne me laissent pas tranquille, les émotions qui me troublent. Au monastère, nous lisons souvent sur le visage des hôtes soit l'étonnement, soit la peur, lorsqu'ils entrent au réfectoire pour le repas en silence. « Ce silence si oppressant que le citadin le noie dans les mots », disait Théodore Monot, habitué au silence des déserts. Le silence, c'est d'abord un retrait, se retirer, faire retraite. Non pas
pour se taire, mais pour se rendre disponible. Se rendre disponible à soi-même
et accepter de descendre dans les profondeurs intérieures, de visiter mes
grandes aspirations comme d'y croiser mes blessures les plus intimes. Alors, le
silence devient une épreuve, et la retraite, aussi bénéfique soit-elle, pourra
nous travailler le cœur. « Mon âme se tient, égale et silencieuse, comme un petit enfant contre sa mère », dit le psaume 131. Etre en silence, c'est se laisser approcher par Dieu. « Nous tenant en silence, Dieu vient à nous plus facilement que dans le bruit », me disait un moine. Encore faut-il comprendre cette présence mystérieuse de Dieu qui entre en dialogue avec le plus intime de nous-mêmes. Elie en a fait l'expérience sur la montagne où Dieu l'attendait. Dieu, il ne l'a pas rencontré dans le tonnerre ni dans la fureur. Dieu ne se présente pas à l'homme avec trompettes et fracas. Il est, comme le découvre Elie à l'Horeb, « une voix de fin silence ». Quand saint Benoît invite ses moines, et ceux qui les rejoignent, à incliner l'oreille du cœur, c'est pour entrer dans cette écoute mystérieuse d'un Dieu présent au cœur de l'homme. C'est la rencontre de deux silences : « Le silence de l'homme attire le silence de Dieu. Heureusement, Dieu lit dans le silence des cœurs », écrivait Julien Green. L'oreille écoute : dans le silence, Dieu parle. Retournons auprès d'Elie. Le premier mouvement d'Elie le conduit dans une grotte. La grotte c'est le lieu propice à la prière. Mais la grotte c'est aussi la nuit, ce moment favorable pendant lequel le Seigneur nous parle au cœur. Elie, cet homme déterminé à défendre son Seigneur, attaché à ses conceptions du service du Très Haut, le Seigneur lui demande de sortir, sortir de ces certitudes, quitter toutes ses représentations pour n'écouter que la Parole de Dieu. Et seul, le bruit d'une brise légère lui signale la présence de Dieu. Si tu veux entendre la voix de Dieu, entre dans le silence de ton cœur, quitte le brouhaha de ton environnement, fuis la violence du monde. Rejoignons l'expérience de Jésus. Jésus, lui aussi, s'en va vers lui-même. Il quitte le bruit des foules, il laisse ses disciples murmurer entre eux. Il se retire dans le désert du silence pour laisser toute la place à Dieu son Père. Dans le silence de Jésus, couché à même le sol, comme pour se rendre totalement disponible et se laisser germer par son Père, il écoute, comme Elie, le bruit d'une brise légère. Légère est la Parole de Dieu quand elle est reçue par un cœur silencieux et disponible. Et c'est là que Jésus entend la volonté de son Père. Littéralement soufflés par ce silence de Jésus, les disciples s'approchent pour lui demander de leur partager son expérience intérieure. Apprends-nous à entrer en nous, apprends-nous le silence intérieur, apprends-nous à construire un sanctuaire intérieur. Apprends-nous le souffle qui t'anime. Jésus se relève. Jésus fait jaillir de son cœur sa propre prière, ce qui a germé en son cœur, ce qui l'a habité. Jésus exprime alors le désir le plus profond qu'il puisse dévoiler à ses disciples : que le Nom de Dieu soit sanctifié et que son Règne vienne. En d'autres mots, il invite Dieu son Père à manifester toute sa puissance et toute sa gloire pour que le monde des pauvres, des affligés et des affamés trouvent le vrai bonheur. Le silence de Jésus fait surgir une parole forte, une parole qui ouvre, une parole qui féconde. Et vous, frères et sœurs, vous qui désirez apporter un nouveau souffle dans votre vie et dans vos communautés chrétiennes, porteurs d'un projet pastoral, je vous invite à rejoindre d'abord votre cœur, votre vie intérieure, pour construire au plus profond de vous-mêmes, un sanctuaire intérieur. Pour cela, je vous propose aujourd'hui un premier palier, un sol de silence, dans votre sanctuaire intérieur. Apprenez le silence intérieur. Demain, nous poserons un tapis, une moquette sur ce sol silencieux de votre sanctuaire intérieur. Voici quelques chemins qui pourront vous aider à faire silence en vos vies, à construire quelque chose de solide en vos cœurs, pour vous rendre disponible à édifier le Royaume de Dieu, pour devenir ensemble des communautés qui rayonnent l'Evangile. Apprenez le silence du respect devant la parole de l'autre ; Mardi : Le tapis de la méditation Isaïe 55, 6-11 + Luc 10,38-42Si, hier, j'ai évoqué l'importance de construire un sol de silence pour édifier en nous-mêmes un sanctuaire intérieur, je vous invite aujourd'hui à poser sur ce sol, un tapis, une moquette, le tapis de la méditation. Et pour vous aider à poser ce tapis, je désire explorer les profondeurs de spiritualité que l'on peut trouver dans la tradition chrétienne. Comme je le disais hier, créer en soi un sol de silence, c'est se rendre disponible à l'écoute de Dieu, c'est donc créer en soi une attitude favorable pour rencontrer Dieu qui me cherche et que je cherche. Dire « tu » à Dieu, c'est parler à Dieu comme je parle à un parent ou à un ami, c'est tourner mon cœur et mon esprit vers Dieu. C'est mettre en place une attitude de relation personnelle avec Dieu parce que je désire m'entretenir avec lui. Cette attitude d'écoute, ce regard tourné vers Dieu peut se vivre partout. A la maison, au travail, en promenade, en voiture. A tout moment, je peux laisser jaillir ma prière qui peut être un cri, une louange, une reconnaissance. Cette prière qui jaillit spontanément de mon cœur est l'expression d'une communion avec Dieu. Une communion permanente qui se vit dans le silence du cœur. Saint Benoît, dans sa Règle, invite le moine à prier continuellement, tout en précisant que la prière la meilleure c'est une prière brève. Que veut-il dire par là ? La tradition monastique propose deux voies pour nous aider à vivre ces moments de communion avec Dieu : d'une part, la méditation, par la répétition d'une phrase ; d'autre part, la Lectio divina, une lecture lente des Ecritures saintes. La méditation, caractérisée par la répétition d'une phrase, c'était un peu comme le sanctuaire intérieur portable et mobile des Pères du désert. Quand ils étaient assis en silence, la méditation gardait leurs distractions à l'écart, et quand ils travaillaient, la méditation leur permettait de transmuer leur travail en prière. Une des phrases favorites de ces premiers moines était : « Dieu, viens à mon aide ; Seigneur, à notre secours ». Voilà une prière toute simple, tirée d'un psaume, qui balançait leur journée. Elle peut être dite indéfiniment, intérieurement et individuellement jusqu'au moment où ils viennent la dire ensemble quand ils se rassemblent à l'église pour la prière commune. Faites-en vous-mêmes l'expérience. Si, le dimanche, à l'Eucharistie, vous captez une phrase des Ecritures qui vous parle, emportez-là avec vous, répétez-là souvent dans la journée. Elle deviendra comme une musique intérieure qui vous permettra de sortir de vous-mêmes et d'écarter les bruits de votre tête. Vous verrez alors que la répétition d'une telle phrase fera peu à peu son entrée dans votre cœur, au point qu'elle irriguera toute votre journée et transformera votre perception de la vie. Vous pouvez aussi reprendre l'une ou l'autre phrase de la Prière du Notre Père ou, ce qu'on appelle dans l'Eglise orthodoxe, la Prière de Jésus : « Seigneur Jésus-Christ, aie pitié de moi, pécheur ». La méditation chrétienne, c'est murmurer une phrase des Ecritures, dans un climat de silence intérieur, pour vivre une communion spontanée et permanente avec Dieu. Néanmoins, pour saint Benoît, habiter le silence et méditer de façon créative passe par la lecture. Lire les Ecritures saintes pour nourrir la prière. Mais attention, il ne s'agit pas ici d'une lecture rapide ou lente, pour extraire des informations ou pour savourer l'émotion. Il s'agit ici de prendre un passage des Ecritures saintes et de le lire avec l'intime conviction que Dieu veut me dire quelque chose de très personnel à travers ce texte. Dans la prière, je dis « tu » à Dieu. Dans la lecture, c'est Dieu qui me dit « Tu ». A mesure que je laisse Dieu me parler, je me sens porté à lui parler en retour. Le texte que j'ai sous les yeux, ma Bible ouverte entre mes mains, c'est un cadeau à accueillir. C'est quelqu'un qui vient à moi pour me parler, pour entrer dans ma vie, pour faire de ma vie quelque chose de neuf. Il y vient à travers des récits, des prières, des informations, de l'histoire, des genres littéraires très différents. Comme le dit le prophète Isaïe, « vos pensées ne sont pas mes pensées, et mes voies ne sont pas mes voies ». lire lentement les Ecritures, c'est laisser résonner en moi la Parole de Dieu, c'est accueillir les pensées et les voies de Dieu. C'est en quelque sorte, se laisser façonner par la Parole de Dieu. « De même que la pluie et la neige descendent des deux et n'y retournent pas sans avoir arrosé la terre, sans l'avoir fécondée et l'avoir fait germer, ainsi en est-il de la parole qui sort de ma bouche, elle ne revient pas vers moi sans effet », dit encore le prophète Isaïe. Que fait Marie alors que sa sœur Marthe s'adonne aux activités du ménage ? Dans le silence, elle goûte la Parole de son Seigneur, elle la murmure, elle la médite, elle la répète en son cœur, elle l'accueille pour en faire une prière qui habite toute sa vie. Marthe traduit son écoute amicale et fraternelle de Jésus en situation de service. Il n'y a pas d'opposition entre l'une et l'autre. L'une et l'autre écoute le Seigneur, cueille sa Parole. Marie laisse surgir la Parole en son cœur pour la contempler. Marthe laisse surgir la Parole en son cœur pour la traduire en service. Nous avons tous besoin d'un sol de silence pour construire chacun son sanctuaire intérieur. Nous avons tous besoin de revêtir ce sol d'un tapis de méditation, d'intériorité, de prière pour écouter la Parole de Dieu et la laisser résonner en nous. Elle nourrira ainsi notre vie en devenant comme un murmure au fond de notre cœur. Je termine avec cette belle parole d'un chartreux : « J'aimerais dire que la lecture porte la nourriture substantielle à la bouche, que la méditation la triture et la mâche, que la prière la goûte, et que la contemplation est la douceur même qui réjouit et refait ». Frères et sœurs, installez un sol de silence dans vos vies, couvrez-le d'un
tapis, celui de l'écoute pour permettre à la Parole de Dieu d'entrer dans tous
les recoins de vos vies. Mercredi : L'échelle de l'amour Osée 2,16-22 + Jean 17, 21-26Réaliser un projet pastoral, redonner vie aux communautés chrétiennes,
proposer un chemin d'espérance à tout homme, façonner un nouveau visage de la
société, ne peut se faire que dans la mesure où chacun effectue un pèlerinage
vers soi-même. Parler de l'amour, c'est parler de liberté, et parler de liberté, c'est
parler d'obéissance. Mais pour vivre une bonne obéissance, il faut d'abord
savoir à quoi l'on choisit d'obéir. En second lieu, on doit choisir ce qui ouvre
sur des futurs possibles, non ce qui enferme et asservit. Une question se pose.
Y a-t-il des moyens qui permettent de choisir librement ce qui va accroître sa
liberté future ? Ce qui peut ouvrir votre avenir ? La réponse de Saint Benoît dans sa Règle est aussi simple qu'elle est
exigeante : écouter. Pour obéir, écouter. Pour choisir, écouter. Pour aimer,
écouter. Ecouter, écouter Dieu, écouter l'autre, écouter son cœur, c'est le
premier échelon de l'amour. Dans la Bible, il y a des pages merveilleuses sur l'expérience de l'écoute.
Souvenez-vous du jeune Salomon appelé à succéder à son père David comme roi de
Juda. Avant de commencer son règne par un acte de culte à Dieu, il se rend à
Gabaon pour offrir un sacrifice. Mais la nuit précédente, il fait un rêve. Son
Seigneur lui apparaît et déclare : « Demande ! Que puis-je te donner ? » Cette
offre est fabuleuse. Salomon pourrait exiger beaucoup : un grand royaume, la
soumission de tous ces ennemis, la victoire à la guerre. En revanche, il demande
: « un cœur qui écoute ». Salomon souhaite recevoir de Dieu un cœur capable
d'écouter. Salomon demande en somme que toute sa personne soit animée par la
capacité d'écouter. Il est un autre épisode biblique éloquent à ce propos : Samuel, un enfant,
dort dans le sanctuaire. Dans son sommeil, une voix l'appelle. Il va alors vers
le vieux prêtre Eli pour lui demander ce qu'il veut : « Je ne t'ai pas appelé »,
réplique celui-ci. Samuel retourne se coucher, mais on l'appelle de nouveau. Et
ainsi une troisième fois, Eli, ayant compris que l'appel venait de Dieu, lui
conseille : « Si on t'appelle encore, tu diras : « Parle, Seigneur, car ton
serviteur écoute ». Voilà l'authentique écoute de Dieu, dont la voix est si
difficile à déceler. Or, dans notre tradition chrétienne, nous nous croyons
autorisés à dire : « Ecoute, Seigneur, ton serviteur te parle ! » Nous avons
tant à lui dire que nous ne le laissons pas même parler. Laisser l'autre parler
! Au temps du prophète Osée, face à l'infidélité du peuple de Dieu, Dieu
s'adresse au prophète. Il l'invite à écouter son cœur. Dieu lui demande
d'écouter sa voix chaleureuse. « Ecoute. Je vais séduire la prostituée,
sous-entendue, le peuple infidèle. Je vais la conduire au désert, dans ce lieu
où je pourrai lui parler au cœur. Je vais parler à son cœur, malgré son
infidélité, malgré son refus de l'alliance, je vais la séduire pour lui redonner
toute sa dignité ». Osée écoute, il reçoit cette parole en son cœur pour la
transmettre au peuple, pour l'inviter à son tour à écouter l'appel de Dieu. On le voit bien, dans toute la tradition biblique, Dieu ne cesse de parler,
Dieu ne cesse d'appeler, Dieu ne cesse de nous inviter à l'écouter, à recevoir
ses paroles d'amour. Ecouter, c'est l'attitude authentique de tout homme qui
cherche Dieu. Ecouter la voix de Dieu, tel que nous le révèle l'évangile de Jean, c'est
entrer dans la connaissance de la vérité. La vérité, c'est l'amour que Dieu
porte à chacun. Faire la vérité, c'est entrer dans ce qui constitue le secret de
Dieu : son amour. Entrer dans l'amour de Dieu, c'est entrer dans ce qui
constitue le noyau, la source, le centre, le cœur de la vie de Dieu. Voilà ce que je veux souligner en vous invitant à grimper les échelons de
l'amour. Tout d'abord, l'écoute qui est de loin le don le plus grand qu'il vous
faut quémander à Dieu. L'écoute devrait vous habiter tous les jours, à tout
instant, comme le silence, pour que résonne en vous la voix de Dieu qui parle en
vos cœurs. Avant d'être défini par sa foi, sa prière ou ses œuvres, le croyant
est un auditeur qui s'exerce à l'art de l'écoute. Elle est le premier rapport
qui le lie à Dieu. La route du silence est parsemée d'écoute. Le tapis de la méditation vous
pose en attitude d'écoute. Et l'écoute de la voix de Dieu qui parle dans les
Ecritures, dans le témoignage des hommes, vous conduit à choisir la vie que Dieu
vous offre. Dès lors, vous pourrez grandir en amour les uns pour les autres. Plus vous construirez votre vie sur le silence, sur la méditation, sur
l'écoute, plus votre sanctuaire intérieur deviendra le reflet d'une vie
construite sur l'amour de Dieu. Alors, vous pourrez proclamer et chanter qu'il vaut la peine d'entrer dans le
chantier de l'obéissance, de l'adhésion à Dieu. Alors vous deviendrez pleinement
libre, capables de changement, capables de choix ouverts sur l'avenir. Vous
deviendrez d'authentiques agents de communion, des artisans de paix et de
justice pour faire de la société un espace nouveau d'hommes libres et heureux. Croyez-moi, c'est en vous exerçant patiemment au silence, à la méditation, à
l'écoute que vous parviendrez à grandir dans une vie qui fera de vous les
témoins de l'amour de Dieu pour tout homme. Vous deviendrez ce sanctuaire
intérieur en qui tout homme pourra découvrir le visage de Dieu. L'échelle de l'amour ? Commence par faire silence, pose le tapis de la méditation, puis, écoute pour accueillir la voix aimante de Dieu. Ainsi, ton sanctuaire intérieur deviendra un foyer habité par l'amour de Dieu. Vendredi : Les fenêtres de la communauté. Deutéronome 22,1-4 + Matthieu 18,15-22Durant cette semaine de pèlerinage, je vous propose de construire votre
sanctuaire intérieur, pour devenir artisans d'un nouveau projet pastoral,
artisans d'une Eglise capable de choix et de sens, d'une Eglise engagée pour une
société plus humaine. Avoir sa fenêtre ouverte sur ces réalités, laisser vivre un cœur qui, comme
le Christ, voit la misère de son peuple, c'est rester ouvert sur les réalités du
monde. Samedi : Une école d'espérance et de paix Galates 5, 22-25 + Jean 4, 7-15Votre sanctuaire intérieur s'achève bientôt. Il est composé de tous les
éléments nécessaires pour vivre sereinement et dignement votre vocation
chrétienne. Dimanche : Célébration de clôture — Maintenant... prends ta vie en main. Luc 4,16-30Toute une semaine pour construire un sanctuaire. Et pas n'importe quel
sanctuaire. Un sanctuaire intérieur. Au niveau du cœur. Là où Dieu nous parle et
nous attend pour y faire sa demeure. |