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DISCOURS SUR LE PSAUME II.LÉGLISE ET SES PERSÉCUTEURS. Les méchants veulent secouer le joug de Dieu et de son Christ ; mais il a établi, ce Christ chef de sou royaume ou de lEglise qui sétendra partout. Comprenez cette puissance, et faites-vous de la foi un abri contre ses vengeances. 1. « A quoi bon ce frémissement des nations , et ces vaines machinations des peuples? Les rois de la terre se sont levés, les princes ont formé des ligues contre le Seigneur et contre son Christ (Ps. II, 1-2 ) » . Le psalmiste dit: « A quoi bon», comme il dirait: Cest en vain; car ces ligueurs nont pas atteint le but quils se proposaient, lextinction du Christ: cest la prédiction des persécuteurs de Jésus dont il est fait mention dans les Actes des Apôtres (Act. IV, 26 ). 2. « Brisons leurs liens, et rejetons leur joug loin de nous (Ps. II, 3 ) ». Bien que ces paroles soient susceptibles dun autre sens, il est mieux de les appliquer à ceux dont le Prophète a dit quils machinaient en vain ; en sorte que « brisons leurs chaînes, et rejetons leur joug loin de nous », signifie: appliquons-nous à éluder les devoirs et à rejeter le fardeau de la religion chrétienne. 3. « Celui qui habite dans les cieux se rira deux, le Seigneur les persiflera (Ib. 4. ) ». La même pensée est deux fois exprimée: car au lieu de: « Celui qui habite dans les cieux », le Psalmiste a dit: « Le Seigneur » ; et « se rira », est remplacé par « persiflera ». Gardons-nous toutefois dentendre ces expressions dune manière humaine, comme si Dieu plissait des lèvres pour rire, et des narines pour se moquer. Il faut entendre par là, le pouvoir quil donne à ses élus de lire dans lavenir, dy voir le nom du Christ se transmettant jusquaux derniers humains, semparant de tous les peuples, et de comprendre ainsi combien sont vaines les trames des méchants. Ce pouvoir qui leur découvre cet avenir, cest la moquerie et le persiflage de Dieu. « Celui qui habite les cieux se rira deux ». Si, par les cieux, nous comprenons les âmes saintes, cest en elles que le Seigneur connaissant ce qui doit arriver, se rit des vains complots et tourne en dérision. 4. « Alors il leur parlera dans sa colère, et les confondra dans sa fureur (Ps. II, 5 ) ». Pour nous mieux préciser leffet de cette parole, David a dit: « Il les confondra » ; en sorte que « la colère » de Dieu est identique « à sa fureur ». Mais cette colère et cette fureur du Seigneur Dieu, ne doit pas sentendre dune perturbation de lâme; cest le cri puissant de la justice dans toute créature, soumise à Dieu pour le servir. Car il faut bien nous rappeler et croire ce qua écrit Salomon : « Pour toi, ô Dieu de force, tu es calme dans tes jugements, et tu nous gouvernes avec une sorte (124) de respect (Sag. XII, 18 ) ». En Dieu donc, la colère est ce mouvement qui se produit dans une âme connaissant la loi de Dieu, quand elle voit cette même loi violée par le pécheur; elle est cette indignation des âmes justes qui flétrit par avance bien des crimes. Cette colère de Dieu pourrait fort bien se dire encore des ténèbres de lesprit qui envahissent tout infracteur de la loi de Dieu. 5. « Moi, je suis établi par lui, pour régner en Sion, sur la montagne sainte, pour prêcher sa loi (Ps. II, 6 ) ». Ces paroles sappliquent évidemment à Notre-Seigneur Jésus-Christ. Si, pour nous, comme pour beaucoup dautres, Sion veut dire contemplation, nous ne pouvons mieux lentendre que de lEglise, dont lâme sélève chaque jour pour contempler en Dieu ses splendeurs, selon ce mot de lApôtre: « Nous verrons à découvert la gloire du Seigneur (II Cor. III, 18 ) »; voici donc le sens: « Moi, je suis établi par lui pour régner sur la sainte Eglise », appelée ici montagne à cause de sa hauteur et de sa solidité. « Cest moi quil a établi roi » : moi, dont les impies cherchaient à briser les chaînes et à secouer le joug. « Pour prêcher sa loi»: qui ne comprendrait cette expression, en voyant la pratique de chaque jour? 6. « Le Seigneur ma dit : Tu es-mon Fils; je tai engendré aujourdhui (Ps. II, 7 ) ». Dans ce jour, on pourrait voir la prophétie du jour où Jésus-Christ naquit en sa chair. Néanmoins comme « aujourdhui » indique linstant actuel, et que dans léternité, il ny a ni un passé qui ait cessé dêtre, ni un futur qui ne soit pas encore, mais seulement un présent; car tout ce qui est éternel est toujours cette expression: « Aujourdhui, je tai engendré », sentendra dans le sens divin, selon lequel la foi éclairée et catholique professe la génération ininterrompue de la puissance et de la sagesse de Dieu, qui est son Fils unique. 7. « Demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage (Ib. 8 )» . Ceci nest plus éternel, et sadresse au Verbe fait homme, qui sest offert en sacrifice, à la place de tous les sacrifices, « qui intercède encore pour nous (Rom. VIII, 34 )»; en sorte que cest à Jésus-Christ, dans léconomie temporelle de lIncarnation opérée pour le genre humain, quest- adressée cette parole: « Demande-moi »: oui, demande que tous les peuples soient unis sous le nom chrétien, afin quils soient rachetés de la mort, et deviennent la possession de Dieu. « Je te donnerai les nations en héritage », afin que tu les possèdes pour leur salut, et quelles te produisent des fruits spirituels. « Et ta possession sétendra jusquaux confins de la terre ». Cest la même pensée répétée. «Les confins de la terre » sont mis ici pour les nations, mais dans un sens plus clair, afin que nous comprenions toutes les nations : le Psalmiste a dit « possession » au lieu de « héritage ». 8. « Tu les gouverneras avec un sceptre de fer », dans linflexible justice. « Tu les briseras comme un vase dargile (Ps. II, 9 ) », cest-à-dire tu briseras en eux les passions terrestres, les immondes soucis du vieil homme, et tout ce quil a puisé, pour se linculquer, dans la fange du péché. « Et maintenant, ô rois, comprenez » (Ib. 10 ) ». « Maintenant » , cest-à-dire, quand vous aurez une vie nouvelle, ayant brisé cette enveloppe de boue, ces vases charnels de lerreur, qui sont lapanage de la vie passée, oui, « alors comprenez, vous qui êtes rois », puisque vous pouvez dune part diriger tout ce quil y a chez vous de servil et danimal, et dautre part combattre, non comme frappant lair, mais châtiant vos corps et les réduisant en servitude (I Cor., IX, 26, 27 ). « Instruisez-vous, vous tous qui jugez la terre ». Cest une répétition. « Instruisez-vous » est mis pour « comprenez »; et, «vous qui jugez la terre», pour « vous qui êtes rois ». Le Prophète veut dire que lhomme spirituel doit juger la terre; car ce que nous jugerons nous est inférieur; et tout ce qui est inférieur à lhomme spirituel, peut bien sappeler terre, puisquil est meurtri par la chute terrestre. 9. « Servez le Seigneur avec crainte (Ps., II, 11 ) »; parole qui prévient lorgueil que nous donnerait cette autre: « O rois qui jugez la terre». « Et tressaillez en lui avec tremblement ». « Tressaillez », est fort bien ici pour corriger ce quaurait de pénible: « Servez. le Seigneur avec crainte ». Mais afin que celte jubilation naille point jusquà la témérité, le Prophète ajoute : « avec tremblement» : ce qui nous invite à garder avec soin et vigilance le principe de la sanctification. «Et maintenant comprenez, ô rois », peut encore. sentendre (125) ainsi: Et maintenant que je suis constitué roi, ne vous en affligez point, ô rois de la terre, comme dun empiétement sur vos privilèges; mais plutôt instruisez-vous et comprenez quil vous est avantageux de vivre sous la tutelle de celui qui vous donne lintelligence et linstruction. Lavantage qui vous en reviendra, sera de ne point régner à laventure, mais de servir avec tremblement le Seigneur de tous, de vous réjouir dans lattente dune félicité sans mélange, vous tenant en garde et dans la circonspection contre lorgueil qui vous en ferait déchoir. 10. « Emparez-vous de la doctrine, de peur quun jour le Seigneur nentre en colère, et que vous ne perdiez la voie de la justice (Ps. II, 2 )». Cest ce qua déjà dit le Prophète: « Instruisez- vous et comprenez » ; car sinstruire et comprendre, cest semparer dune doctrine. Cependant lexpression : « apprehendite, emparez-vous», désigne assez clairement un certain abri, un rempart contre tout ce qui pourrait arriver, si lon apportait moins de soin à semparer. « De peur quun jour le Seigneur ne sirrite », renferme un certain doute, non point dans la vision du prophète, qui en a la certitude, mais dans lesprit de ceux quil avertit; car ceux qui nont point une révélation claire de la colère ny pensent dordinaire quavec doute. Ceux-là donc doivent se dire: « Emparons-nous de la doctrine, de peur que le Seigneur ne sirrite, et que nous ne perdions la voie de la justice». Déjà nous avons exposé plus haut comment « sirrite le Seigneur (Sup. n. 4 )». « Et que vous perdiez la voie de la justice ». Cest là un grand châtiment, que redoutent ceux qui ont déjà goûté les douceurs de la justice. Celui qui perd la voie de la justice, doit errer misérablement dans les voies de liniquité. 11. « Quand bientôt senflammera sa colère, bienheureux ceux qui auront mis en lui leur confiance (Ps. II, 13 ) ». Cest-à-dire, quand éclatera cette vengeance qui est préparée aux pécheurs et aux impies, non-seulement elle épargnera ceux qui auront mis leur confiance dans le Seigneur, mais elle servira à leur établir, à leur élever un trône bien haut. Le Prophète ne dit pas : « Quand bientôt senflammera sa colère, ceux qui se confient en lui seront en sûreté » ; comme sils devaient seulement échapper à la vengeance: mais il les appelle « bienheureux », ce qui exprime la somme, le comble de tous les biens. Quant à lexpression : « In brevi, bientôt », elle signifie, je crois, quelque chose de soudain, pour les pécheurs, qui ne lattendront que dans un lointain avenir.
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