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LIVRE VINGT-TROISIÈME. GÉNÉALOGIE SELON SAINTE MATTHIEU.

 

Fauste attaque la généalogie du Christ selon saint Matthieu. — Le Saint prouve que le Christ est tout a la fois Fils de Dieu et issu de la race de David par Marie et par Joseph son époux. — L'homme tout entier vient de Dieu. — Joachim, père de Marie. — Dieu est l'auteur de notre corps.

 

CHAPITRE PREMIER. IL Y A EU PLUSIEURS JÉSUS : DUQUEL S'AGIT-IL ?

CHAPITRE II. SAINT MATTHIEU, SELON FAUSTE, NE DONNE JÉSUS POUR FILS DE DIEU QU'AU SORTIR DU BAPTÊME.

CHAPITRE III. JÉSUS N'ÉTANT PAS FILS DE JOSEPH, N'EST POINT FILS DE DAVID.

CHAPITRE IV. MARIE ELLE-MÊME NE DESCEND POINT DE DAVID, SELON FAUSTE.

CHAPITRE V. FAUSTE RÉFUTÉ PAR LE TEXTE DE SAINT MATTHIEU.

CHAPITRE VI. FAUSTE QUI A CALOMNIÉ ABRAHAM, ISAAC ET JACOB, ESSAIE D'ÉBRANLER L'AUTORITÉ DE SAINT MATTHIEU.

CHAPITRE VII. JÉSUS EST A LA FOIS FILS DE DIEU ET FILS DE DAVID.

CHAPITRE VIII. COMMENT LE CHRIST, MARIE ET JOSEPH SONT DE LA FAMILLE DE DAVID.

CHAPITRE IX. JOACHIM, PÈRE DE MARIE, SELON UN LIVRE APOCRYPHE.

CHAPITRE X. COMMENT LE FILS DE DIEU A ÉTÉ ENFERMÉ DANS LE SEIN D'UNE VIERGE. APOSTROPHE AUX MANICHÉENS.

 

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CHAPITRE PREMIER. IL Y A EU PLUSIEURS JÉSUS : DUQUEL S'AGIT-IL ?

 

Fauste. Un jour que je disputais dans une nombreuse assemblée, un homme prit la parole et me dit : Admets-tu que Jésus soit né de Marie ? — De quel Jésus parles-tu ? répondis-je. Car il y a eu plusieurs Jésus dans la loi hébraïque : un, fils de Navé et disciple de Moïse (1) ; un autre, fils du grand-prêtre Josédech (2) ; un troisième, qu'on appelle fils de David (3) ; un autre encore qu'on appelle Fils de Dieu (4). Duquel des quatre me demandes-tu si je le crois fils de Marie ? — Du Fils de Dieu, réplique-t-il. — Et sur quelle autorité, d'après quel maître l'admettrais-je ? — D'après Matthieu. — Qu'a donc écrit Matthieu ? — « Livre de la généalogie de Jésus-Christ, fils de David, fils d'Abraham, etc..... (5) » — Je pensais, repartis je, que tu allais dire : Livre de la généalogie de Jésus-Christ Fils de Dieu, et je me disposais à protester; mais comme tu as cité le texte si fidèlement, je n'ai qu'une observation à te faire : c'est de réfléchir à ce que tu viens de dire. Car ce n'est pas la généalogie du Fils de Dieu que Matthieu prétend s'être proposé d'écrire, mais celle du fils de David.

 

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CHAPITRE II. SAINT MATTHIEU, SELON FAUSTE, NE DONNE JÉSUS POUR FILS DE DIEU QU'AU SORTIR DU BAPTÊME.

 

Jusque-là, à ajouter foi à ses paroles, l'enfant de Marie sera pour moi le fils de David ; mais, dans toute cette généalogie, il n'est nulle part fait mention du Fils de Dieu, jusqu'à l'époque du baptême, et tu calomnies l'écrivain en pure perte, quand tu supposes qu'il a enfermé le Fils de Dieu dans le sein d'une femme. Mais Matthieu réclame, comme on le voit, dès la première ligne, il se justifie de cette imputation

 

1. Ex. XXXIII, 11 ; Eccli. XLVI, 1. — 2. Agg. I, 1. — 3. Rom. I, 1, 3. — 4. Marc, I, 1. — 5. Matt. I, 1.

 

sacrilège, attestant que c'est le fils de David, et non le Fils de Dieu qu'il fait sortir de cette suite de générations. Si tu consultes la pensée et le but de l'écrivain, il entend moins nous le donner comme né de Marie, que comme formé par le baptême dans l'eau du Jourdain. Il nous dit, en effet, que celui que Jean a baptisé, celui qu'il a, dès le début, désigné comme fils de David, est devenu, ce jour-là, Fils de Dieu (1), à un certain âge déjà, (environ trente ans, selon Luc), alors qu'on entendait une voix lui dire : « Tu es mon Fils ; je t'ai engendré aujourd'hui (2) ». Tu vois donc que ce qui était né de Marie, trente ans auparavant, selon Luc, n'était point proprement le Fils de Dieu, mais ce qui a été fait par le baptême dans le Jourdain, c'est-à-dire un homme nouveau, tel qu'il se forme en nous quand nous passons des erreurs de la gentilité à la foi en Dieu. Et encore, je ne sais si la foi que, vous appelez catholique lui donne suffisamment cette qualité ; mais, en tout cas, c'est l'opinion de Matthieu, si toutefois ces paroles sont de lui. Car nulle part on ne lit, à propos des enfantements de Marie, que ces paroles aient été prononcées : « Tu es mon Fils, je t'ai engendré aujourd'hui », ou : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances ». Cela n'a été dit que lors de l'expiation du Jourdain. Si tu crois à ces textes tels qu'ils sont écrits, tu seras un disciple de Matthieu (car c'est là le terme que je dois employer), mais point un catholique. Car nous connaissons la foi catholique, qui est aussi éloignée de la pensée, de Matthieu qu'elle l'est de la vérité. En effet, d'après votre symbole, vous croyez en Jésus-Christ Fils de Dieu, qui est né de la vierge Marie: par conséquent votre foi est que le Fils de Dieu, est venu par la vierge Marie ; celle de Matthieu, qu'il est venu par le Jourdain ; et la nôtre qu'il vient de Dieu, d'où il suit que Matthieu, en supposant le texte authentique, vous est aussi

 

1. Matt. III, 16, 17. — 2. Luc, III, 23, 22.

 

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opposé qu'à nous; sauf qu'il est un peu plus habile que vous en nommant ce qui est né d'une femme, fils de David, plutôt que le Fils de Dieu. Vous êtes donc forcés d'avouer de deux choses l'une : ou que ce n'est pas Matthieu qui a écrit cela, ou que vous n'avez pas la foi apostolique.

 

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CHAPITRE III. JÉSUS N'ÉTANT PAS FILS DE JOSEPH, N'EST POINT FILS DE DAVID.

 

Pour nous, bien que personne ne puisse nous faire renoncer à la croyance que le Fils de Dieu vient de Dieu, cependant s'il fallait faire une large concession à l'ignorance malhabile, et si nous devions absolument admettre des erreurs, nous aimerions mieux Jésus devenu Fils de Dieu dans le Jourdain que naissant Fils de Dieu du sein d'une femme. Du reste, l'enfant né de Marie, s'il en est né un, ne peut être nommé fils de David, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il a Joseph pour vrai père. Or, c'est ce que vous n'accordez pas ; il faut donc que vous renonciez à le dire fils de David. En effet, la généalogie descend d'Abraham à David, et de David à Joseph par tous les patriarches des Hébreux : mais Jésus n'étant point conçu de Joseph, comme on le lit, il n'est donc point fils de David : et Matthieu est véritablement fou de nous donner tout d'abord pour fils de David celui dont il va dire qu'il n'est point né de l'union de Joseph et de Marie. Ainsi donc, si le fils de Marie même ne peut être appelé fils de David, parce qu'il n'est pas le fils de Joseph, à combien plus forte raison ne peut-il être nommé le Fils de Dieu.

 

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CHAPITRE IV. MARIE ELLE-MÊME NE DESCEND POINT DE DAVID, SELON FAUSTE.

 

De plus, la Vierge elle-même ne nous est point donnée comme issue de la tribu à laquelle appartenait certainement David, je veux dire la tribu de Juda, qui fournissait des rois aux Juifs; mais elle était de la tribu de Lévi, qui donnait les prêtres : ce qui est évident, puisqu'elle a eu pour père un certain prêtre du nom de Joachim, qui n'est mentionné nulle part dans la susdite généalogie. Comment donc rattachera-t-on Marie à la race de David, à laquelle ni son père ni son mari n'appartenaient? Par conséquent, tout ce qui a pu naître d'elle, n'est point fils de David, à moins qu'on ne la rapproche tellement de Joseph, qu'elle soit évidemment ou sa fille ou son épouse.

 

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CHAPITRE V. FAUSTE RÉFUTÉ PAR LE TEXTE DE SAINT MATTHIEU.

 

Augustin. La foi catholique, et en même temps apostolique, est que Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ est Fils de Dieu selon la divinité, et fils de David selon la chair. Nous le démontrons par l'Evangile et par les lettres des Apôtres, de telle sorte qu'on ne peut contester nos preuves, à moins de rejeter ces parties de l'Ecriture. Nous ne procédons pas comme cet inconnu, que Fauste se donne pour adversaire, qui cite quelques mots, et n'a plus d'autres témoignages à opposer aux arguties de l'imposteur. Quand j'aurai produit ces témoignages, Fauste n'aura plus rien à répliquer; il ne lui restera d'autre ressource que de recourir au moyen par lequel il cherche à éluder les vérités les plus clairement exprimées dans les Ecritures, à savoir de prétendre qu'il y a eu des falsifications et des interpolations dans ces livres divins. J'ai déjà réfuté plus haut, autant que cela m'a paru nécessaire, et dans cet ouvrage même, cette folie, cette manie présomptueuse et cette audace; je n'ai donc pas besoin de répéter ce que j'ai dit, puisqu'enfin il faut songer à garder des bornes. A quoi bon rechercher et recueillir tous les témoignages dispersés dans toutes les Ecritures, pour prouver contre Fauste, par des livres d'une autorité incontestable et divine, que celui que nous appelons Fils unique de Dieu, Dieu en Dieu de toute éternité, est le même que nous appelons aussi fils de David, parce qu'il a pris la forme d'esclave de la Vierge Marie, épouse de Joseph? Mais comme Fauste discute ici sur Matthieu, et que je ne puis pas donner en entier le livre de cet évangéliste, chacun peut le lire et voir comment Matthieu suit jusqu'à sa passion et à sa résurrection celui qu'il nomme fils de David au moment de donner sa généalogie, et ne le distingue point de celui qu'il déclare conçu du Saint-Esprit et né de la Vierge Marie. Et il apporte en preuve ces paroles du Prophète : « Voilà que la Vierge concevra et enfantera un Fils et on le nommera Emmanuel, ce que l'on (368) interprète par, Dieu avec nous (1) ». Il déclare que celui qui, étant baptisé par Jean, entendit une voix du ciel dire : « Celui-ci est mon Fils « bien-aimé en qui j'ai mis mes complaisances (2)», est le même que celui qu'on appelle, à partir de l'enfantement de la Vierge : « Dieu avec nous ». A moins que Fauste ne trouve que le nommer Dieu, soit moins que de l'appeler Fils de Dieu. Car pour prouver que Matthieu ne l'a cru Fils de Dieu qu'au sortir du baptême, il se base sur cette parole descendue du ciel : « Celui-ci est mon Fils » ; tandis que l'Evangéliste a déjà cité le témoignage du Prophète inspiré d'en haut, où l'enfant même de la Vierge est appelé : « Dieu avec nous ».

 

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CHAPITRE VI. FAUSTE QUI A CALOMNIÉ ABRAHAM, ISAAC ET JACOB, ESSAIE D'ÉBRANLER L'AUTORITÉ DE SAINT MATTHIEU.

 

Nous devons ainsi observer et suivre pas à pas ce fou, ce misérable babillard qui ne manque jamais l'occasion de donner une apparence de fausseté aux textes de l'Ecriture dans l'esprit de ceux qui lisent ses sottises. C'est ainsi qu'il a dit qu'Abraham, lorsqu'il rendait mère sa servante, ne croyait point à la promesse que Dieu lui avait faite de lui donner un fils de Sara, tandis que l'Ecriture atteste que cette promesse n'a été faite que plus tard (3). C'est ainsi qu'il accuse le patriarche d'avoir menti en faisant passer Sara pour sa sueur, tandis qu'il n'a lu nulle part la généalogie de Sara dans les Ecritures, qui sont ici les seuls témoins à consulter (4). C'est ainsi qu'il accuse Isaac d'avoir aussi menti en donnant Rébecca pour sa sueur, alors que l'origine de celle-ci est clairement constatée dans l'Ecriture (5); qu'il fait un crime à Jacob, de ce qu'il y avait chaque jour contestation entre ses quatre femmes, à qui s'emparerait de lui pour la nuit, lorsqu'il rentrait de la campagne, quand on lui démontre qu'il n'a lu cela nulle part. Voilà l'homme qui se vante de haïr comme menteurs les auteurs des divines Ecritures ; qui ose calomnier l'autorité de l'Evangile, si haute, si respectée du monde entier, jusqu'à chercher à faire croire que c'est un inconnu sous le nom de Matthieu (il n'ose dire Matthieu lui-même, pour ne pas être

 

1. Luc, VII, 14; Matt. I, 23. — 2. Matt. III, 17. — 3. Gen. XVI, 4 ; XVII, 17. — 4. Id. XII, 13; XX, 2,12. — 5. Id. XXVI, 7 ; XXIV.

 

écrasé sous le poids d'un nom d'apôtre), qui a écrit sur le Christ des choses qu'il ne veut pas croire, et qu'il essaie de réfuter par de calomnieux sophismes.

 

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CHAPITRE VII. JÉSUS EST A LA FOIS FILS DE DIEU ET FILS DE DAVID.

 

Ces paroles : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances », qui ont été prononcées près des eaux du Jourdain, l'ont été également sur la montagne (1). Or, de ce que cette voix a retenti, ici aussi, du haut du ciel, il ne suit pas que Jésus n'ait pas été Fils de Dieu auparavant; puisque c'est du sein de la Vierge « qu'a pris la forme d'esclave Celui qui étant dans la forme de Dieu, n'a pas cru que ce fût une usurpation de se faire égal à Dieu (2)». Enfin, le même apôtre Paul dit ailleurs, dans le langage le plus clair « Mais lorsqu'est venue la plénitude des « temps, Dieu a envoyé son Fils formé d'une « femme, soumis à la loi (3) » ; employant le mot femme dans le sens de la locution hébraïque (Mulier au lieu de Femina). Jésus est donc Fils de Dieu et Seigneur de David, selon la divinité, et en même temps fils de David, de la race de David, selon la chair. Et si ce point de notre croyance était inutile, l'Apôtre ne le recommanderait pas aussi vivement à Timothée, en disant : « Souvenez-vous que le Seigneur Jésus-Christ, de la race de David, est ressuscité d'entre les morts, selon mon Evangile (4)». Il a d'ailleurs soigneusement prévenu les fidèles que quiconque annonce un autre Evangile, doit être anathèmes.

 

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CHAPITRE VIII. COMMENT LE CHRIST, MARIE ET JOSEPH SONT DE LA FAMILLE DE DAVID.

 

Qu'il y a-t-il donc de choquant, pour un disciple du saint Evangile, à ce que le Christ né de la Vierge sans la participation de Joseph, soit cependant appelé fils de David, quoique Matthieu l'Evangéliste fasse descendre sa généalogie, non pas jusqu'à Marie, mais jusqu'à Joseph? La première raison de cela, est qu'il fallait d'abord faire honneur à l'époux, à cause de son sexe : car, pour s'être abstenu

 

1. Matt. XVII, 5. — 2. Phil. II, 7, 6. — 3. Gal. IV, 4.   4. II Tim. II, 8. — 5. Gal. I, 8, 9.

 

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de son épouse, Joseph n'en est pas moins son époux, puisque le même Matthieu qui nous raconte que la Vierge avait conçu, non de son époux, mais du Saint-Esprit, nous dit aussi que l'Ange appela Marie épouse de Joseph. Et si ce n'est pas l'apôtre Matthieu qui a écrit ces vérités, mais, comme le pensent les Manichéens, quelque autre qui aurait écrit ces faussetés sous son nom, ce faussaire se serait-il contredit dans des choses si évidentes, si rapprochées, au point d'amener, sans raison aucune, jusqu'à Joseph, qu'il dit n'avoir point connu Marie, la généalogie de celui qu'il appelle Fils de David, né de la Vierge Marie sans la participation d'aucun homme, et cela, en donnant par ordre de générations tous les noms de ses ancêtres ? Si, en effet, un homme énumérait les ancêtres du Christ, de David à Joseph, et l'appelait fils de David, et qu'un autre le déclarât né de la Vierge Marie, sans la participation d'aucun homme, mais ne l'appelât point fils de David : il ne faudrait pas pour cela conclure de leur contradiction que l'un du moins, sinon tous les deux, serait dans le faux. Nous devrions penser, au contraire, que tous les deux ont pu dire la vérité : à savoir que Joseph devait être nommé époux de Marie, chaste époux, non par le commerce charnel, mais par l'affection, non par l'union du corps, mais par celle, bien plus précieuse, de l'âme; que par conséquent l'époux de la Vierge mère du Christ n'a point dû être détaché de la suite des parents du Christ, et que Marie elle-même avait dans les veines quelques gouttes du sang de David, afin que la chair du Christ, quoique enfantée d'une Vierge, ne pût être étrangère à la race de David. Mais comme c'est un seul et même écrivain qui dit les deux choses, qui nous présente Joseph comme époux de Marie et la Vierge comme mère du Christ, le Christ comme issu de la race de David; et Joseph comme faisant partie de la généalogie du Christ, à partir de David : que reste-t-il à celui qui aime mieux croire à l'Evangile qu'aux fables des hérétiques, sinon d'admettre que Marie n'était point étrangère à la famille de David, qu'on ne l'a pas appelée, sans raison, épouse de Joseph, bien qu'il ne lui ait point été uni charnellement, mais par égard pour le rang dû au sexe, et à cause de l'union de leurs cœurs ; que Joseph n'a point dû être détaché de l'arbre généalogique, à cause de sa dignité d'homme et pour ne pas paraître séparé de la femme à qui son affection l'unissait, et aussi pour que les disciples fidèles du Christ ne considérassent point l'union charnelle comme tellement essentielle au mariage, qu'on ne puisse être époux sans elle, mais qu'ils apprissent que des époux fidèles sont d'autant plus unis aux membres du Christ, qu'il imitent de plus près les parents du Christ.

 

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CHAPITRE IX. JOACHIM, PÈRE DE MARIE, SELON UN LIVRE APOCRYPHE.

 

Nous croyons donc que Marie tenait aussi à la race de David, parce que nous croyons aux Ecritures qui affirment ces deux choses : que le Christ est de la race de David selon la chair (1), et que Marie est devenue sa mère, non par union charnelle avec aucun homme, mais en restant Vierge (2). Ainsi, quiconque nie que Marie ait été de la famille de David, résiste évidemment à l'autorité si respectable des Ecritures; il faut qu'il nous démontre le contraire, il faut qu'il le prouve, non par des écrits quelconques, mais par des Ecritures ecclésiastiques, canoniques, catholiques. Les autres sont pour nous, sous ce rapport, sans poids et sans autorité. Ce sont celles-là que reçoit et maintient l'Eglise, l'Eglise qu'elles ont prophétisée et qui existe telle qu'elle a été promise. Par conséquent, l'assertion de Fauste, que Marie aurait eu pour père un prêtre nommé Joachim, de la tribu de Lévi, ne reposant sur aucun témoignage canonique, je ne m'en embarrasse pas le moins du monde. Mais quand je l'admettrais, je pourrais m'en tirer encore en disant que ce Joachim devait tenir en quelque façon à la race de David et était passé par quelque adoption de la tribu de Juda à celle de Lévi, soit lui, soit un de ses aïeux; ou qu'il était né dans la tribu de Lévi, de manière à avoir des liens de consanguinité avec la race de David. C'est ainsi que Fauste lui-même avoue qu'il aurait pu se faire que Marie fût de la tribu de Lévi, bien qu'il soit constant qu'elle a été donnée à un homme de la race de David, c'est-à-dire de la tribu de Juda; il ajoute même qu'on aurait pu admettre le Christ comme un fils de David, si Marie avait été fille de Joseph. Par conséquent, si, étant fille de Joseph, elle s'était mariée dans

 

1. Rom. I, 3 ; II Tim. II, 8. — 2. Matt. I, 18; Luc, I, 27.

 

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la tribu de Lévi, on serait autorisé à appeler fils de David tout enfant qui naîtrait d'elle, même dans la tribu de Lévi ; de même si la mère de ce Joachim, que Fauste donne pour père à Marie, étant de la tribu de Juda et de la race de David, s'était mariée dans la tribu de Lévi, on pourrait en toute vérité dire que Joachim, Marie et son fils seraient de la race de David. Voilà ce que j'admettrais, ou quelque autre chose de ce genre, si j'attachais de la valeur à un livre apocryphe où on lit que Joachim fut père de Marie, plutôt que d'accuser de mensonge l'Evangile où il est écrit, tout à la fois que Jésus-Christ, Fils de Dieu, notre Sauveur, était, selon la chair, de la race de David, et qu'il est né de la Vierge Marie. Il nous suffit donc que les Ecritures qui affirment cela, et auxquelles nous croyons, ne puissent être convaincues de fausseté par ceux qui les combattent.

 

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CHAPITRE X. COMMENT LE FILS DE DIEU A ÉTÉ ENFERMÉ DANS LE SEIN D'UNE VIERGE. APOSTROPHE AUX MANICHÉENS.

 

Que Fauste ne réplique pas: Si je ne puis prouver que Marie n'était pas de la race de David, c'est à toi à démontrer qu'elle en était. Car je le démontre par le document le plus clair, le plus irréfragable, puisque l'Ecriture, dont l'autorité ne saurait être ébranlée, affirme que le Christ est de la race de David et qu'il a eu pour mère la Vierge Marie sans la participation d'aucun homme. Mais quelle délicatesse dans Fauste, quelle sainte horreur pour tout ce qui blesse la décence, quand il nous dit : « Vous calomniez l'écrivain en pure perte, quand vous supposez qu'il a enfermé le Fils de Dieu dans le sein d'une femme ! »

Assurément, la foi catholique, qui reconnaît que le Christ, Fils de Dieu, est né d'une vierge selon la chair, n'enferme pas ce même Fils de Dieu dans le sein d'une femme, de telle sorte qu'il ne soit plus dehors, qu'il ait cessé de gouverner le ciel et la terre, qu'il ait quitté le sein de son Père. Mais vous, Manichéens, dont l'intelligence ne saisit que des images matérielles, vous ne comprenez rien à ceci comment le Verbe de Dieu, vertu et sagesse de Dieu, subsistant en lui-même et dans son Père, gouvernant l'univers créé, atteint d'une extrémité à l'autre avec force et dispose toutes choses avec douceur (1). Dans cette merveilleuse et ineffable facilité de tout disposer, il s'est préparé une mère sur la terre; et, pour racheter ses serviteurs de la servitude de la corruption, il a pris en elle la forme d'un esclave, c'est-à-dire un corps mortel; après avoir pris ce corps, il l'a montré; après l'avoir montré, il l'a livré à la mort; après l'avoir livré à la mort, il l'a ressuscité, il l'a rebâti comme on relève un temple détruit. Mais vous qui repoussez ces croyances comme sacrilèges, vous enfermez votre dieu, non plus dans le sein d'une vierge, mais dans le ventre de toutes les femelles des animaux, depuis l'éléphant jusqu'à la mouche. Quoi ! vous méprisez le vrai chrétien parce qu'il reconnaît que le Verbe s'est fait chair dans le sein d'une vierge, qu'il s'est fait de l'homme un temple, sans aucun changement dans sa nature propre, en conservant son immuable pureté; et votre dieu vous est cher parce qu'étant enchaîné par tant de liens charnels, souillé même dans la partie qui doit être clouée à notre globe, il demande en vain merci, ou même est tellement accablé, qu'il n'a pas seulement, la force de crier au secours !

 

1. Sag. VIII, 1.

 

 

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