HÉBREUX VI

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HOMÉLIE VI. C'EST POUR CELA QUE LE SAINT-ESPRIT DIT : SI VOUS ENTENDEZ AUJOURD'HUI SA VOIX, N'ENDURCISSIEZ POINT VOS CŒURS, COMME AU TEMPS DE MA COLÈRE ET AU JOUR DE LA TENTATION DANS LE DÉSERT, OU VOS PÈRES ME TENTÈRENT, OU ILS VOULURENT ÉPROUVER MA PUISSANCE, ET OU ILS VIRENT LES CHOSES QUE JE FIS PENDANT QUARANTE ANNÉES. AUSSI ME SUIS-JE IRRITÉ CONTRE CETTE GÉNÉRATION, ET J'AI DIT : ILS SE LAISSENT TOUJOURS EMPORTER PAR L'ÉGAREMENT DE LEURS COEURS, ILS NE CONNAISSENT POINT MES VOIES ; C'EST POURQUOI J'AI JURÉ, DANS MA COLÈRE, QU'ILS N'ENTRERAIENT POINT DANS LE LIEU DE MON REPOS. (III, 7, 8, 9, 10, 11, JUSQU'À IV, 10.)

 

Analyse.

 

1. Repos du sabbat, représentation temporelle du repos éternel.

2. L'incrédulité attire la colère de Dieu.

3. Conservons l'espoir tant que nous vivons.

4. Bonheur réservé aux élus dans le royaume des cieux.

 

1. Après avoir parlé de l'espérance, après avoir dit : « Nous serons de sa maison, si nous conservons une ferme confiance en lui et la glorification de l'espérance », Paul nous montre qu'il faut savoir attendre avec confiance, et il le prouve par les Écritures. Mais faites attention; car ce passage est tant soit peu difficile et obscur; c'est pourquoi nous devons vous exprimer notre opinion et vous exposer en peu de mots le sujet dans son ensemble, avant d'arriver au texte. Vous n'aurez plus besoin de nous une fois que vous connaîtrez le but et le plan de l'apôtre. C'était de l'espérance qu'il parlait; il nous disait qu'il faut espérer dans l'avenir, et que ceux qui auront souffert ici-bas trouveront ailleurs leur récompense, le fruit de leurs fatigues et le repos. II le prouve en se servant des paroles du prophète, et en nous disant. « C'est pour cela que le Saint-Esprit dit : Si vous entendez aujourd'hui sa voix, n'endurcissez pas votre coeur, comme au temps de ma colère et au jour de la tentation dans le désert, où vos pères me tentèrent, où ils voulurent éprouver ma puissance, et où ils virent les choses que je fis pendant quarante jours. Aussi me suis-je irrité contre cette génération, et j'ai dit : Ils se laissent toujours emporter par l'égarement de leurs coeurs, ils ne connaissent point mes voies ; c'est pourquoi je leur ai juré, dans ma colère, qu'ils n'entreraient point dans le lieu de mon repos ». (Ps. XCIV, 8, 9, 10, 11.) II y a, dit-il, trois sortes de repos. Il y a le repos de Dieu après la création, le repos de la Palestine où les Juifs devaient entrer, pour se reposer de tant de jours d'afflictions et de leurs travaux, enfin (et c'est bien là le repos), il y a le royaume des cieux où les élus se reposent éternellement de leurs travaux et de leurs afflictions. C'est de ces trois sortes de repos qu'il fait ici mention. Et pourquoi cette mention, s'il ne parle que d'un seul? C'est pour montrer que le prophète parle de cette troisième espèce de repos. Le premier, dit-il, il ne s'en occupe pas. Pourquoi remonter jusqu'aux premiers temps? Le repos de la Palestine, il n'en,parle pas non plus, puisqu'il est arrivé à sa fin. Reste le troisième repos, et ici nous devons ouvrir l'histoire, pour que nos paroles soient plus claires.

Après la sortie d'Égypte, et les fatigues d'une longue route, après avoir en Egypte, sur la mer Rouge et dans le désert, reçu d'innombrables témoignages de la puissance divine, les Juifs se décidèrent à envoyer des éclaireurs, chargés d'explorer la nature du sol. Les éclaireurs revinrent et, pleins d'admiration pour la contrée qu'ils avaient parcourue, ils se répandaient en éloges sur la fertilité du sol, tout en disant qu'il était habité par une nation courageuse et indomptable. Alors les Juifs, peuple ingrat et insensible, au lieu de se souvenir des anciens bienfaits de Dieu qui,lorsqu'ils étaient cernés partant d'armées égyptiennes leur barrant le passage, les avait arrachés aux périls ; au lieu de penser au rocher du désert, ouvert par la baguette de Moïse, à l'eau jaillissante, à la manne, et à tant d'autres miracles bien faits pour affermir leur foi, perdirent complètement la mémoire. Frappés d'étonnement et de stupeur, ils voulaient revenir en Egypte en disant : Dieu nous a amenés ici, pour nous faire périr avec nos femmes et nos enfants. Dieu donc, dans sa colère contre ces ingrats qui avaient sitôt oublié ses bienfaits, jura que la génération qui avait proféré de telles paroles n'entrerait pas dans le lieu du repos, et tous périrent dans le désert. Plus tard, quand cette génération n'était plus, David disait : « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme autrefois dans des jours de colère ». Pourquoi ? — C'est pour que vous ne soyez pas punis comme vos pères, c'est pour que vous ne soyez pas privés du repos. — Il parle ainsi, sans doute en faisant allusion à l'asile du repos véritable. Car, s'ils avaient déjà trouvé le repos, pourquoi leur dirait-il encore : « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme autrefois, en des jours de colère?»

Quel est donc ce lieu de repos, si ce n'est le royaume des cieux dont l'image et la représentation est le jour du sabbat? Il cite donc, je le répète, le témoignage du prophète en ces termes: « Aujourd'hui, si vous écoutez sa voix, ne vous, endurcissez pas comme en des jours de colère, comme à l'époque de la tentation dans le désert, lorsque vos aïeux me tentèrent, firent l'épreuve de mes puissances et virent, durant quarante ans, ce que je pouvais faire; c'est pour cela que je me suis irrité contre cette génération, et j'ai dit : Leurs coeurs sont toujours égarés :ils n'ont pas connu mes voies ; et je leur ai juré, dans ma colère, qu'ils n'entreraient pas dans mon lieu de repos ». Puis il ajoute : « Prenez garde, mes frères, que quelqu'un de vous ne tombe dans un dérèglement de cœur et dans une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant (12) ». Car c'est la dureté du cœur qui produit l'incrédulité. Semblables à ces membres raides et couverts d'un talus, qui résistent à la main du médecin, les âmes endurcies résistent à la parole de Dieu. Car il y a (479) probablement des hommes qui ne croient plus et pour qui les miracles opérés sont comme s'ils n'avaient pas eu lieu ; c'est pour cela qu'il dit «Prenez garde que quelqu'un d'entrevous ne tombe dans un dérèglement de coeur, et dans « une incrédulité qui le sépare du Dieu vivant ». Quand on parle de l'avenir, on rencontre plus d'incrédules que lorsqu'on. parle du passé. Voilà pourquoi il leur rappelle l'histoire et les circonstances dans lesquelles ils ont manqué de foi. Si vos pères, dit-il, ont souffert pour n'avoir pas espéré comme ils le devaient, à plus forte raison, vous, vous souffrirez; car il s'adresse à eux, aux hommes du temps présent. C'est toujours ce que veut dire ce mot « aujourd'hui ». — « Mais exhortez-vous chaque jour les uns les autres, pendant ce temps que l'Ecriture appelle aujourd'hui (13)»; c'est-à-dire; édifiez-vous les uns les autres, encouragez-vous pour qu'il ne vous arrive pas la même chose qu'à vos pères, « de peur que quelqu'un de vous, étant séduit par lé péché, ne tombe dans l'endurcissement ».

2. Voyez-vous comme le. péché engendre l'incrédulité? Si l'incrédulité produit la vie criminelle, l’âme, arrivée au fond de l'abîme, méprise, et dans son dédain elle ne veut plus rien croire, pour se délivrer de toute crainte. Nous lisons dans le Psalmiste : « Ils ont dit : Le Seigneur ne nous verra pas, et le Dieu de Jacob n'en saura rien ». (Ps. XCIII, 7.) Et ailleurs : « Nos lèvres sont à nous, qui donc est notre Seigneur? » (Ps. XI, 5.) Et encore : «Pourquoi l'impie a-t-il irrité Dieu? » (Ps. X, 13.) Et ailleurs : « L'insensé a dit en son  coeur : Il n'y a pas de Dieu. Ils se sont corrompus et ils ont contracté des penchants abominables ». (Ps. XIII, 1.) Et .ailleurs : « La crainte de Dieu n'est plus devant leurs yeux ». Et ailleurs : «Il a usé de ruse devant lui; Dieu a découvert et détesté l’iniquité de l'impie ». (Ps. XXXV, 2, 3.) Le Christ aussi parle en ces termes : « Tout homme qui agit mal craint la lumière et la fuit ». (Jean,  III, 20.) Puis il ajoute : « Nous sommes entrés dans la participation du Christ » : que veut dire ce mot? Nous ne faisons qu'un,  lui et nous. Il est la tête, nous sommes le corps, nous sommes ses cohéritiers et nous ne faisons avec lui qu'un même corps. Nous ne sommes qu'un seul corps , dit-il, formé de sa chair. et de ses os; « à condition toutefois de conserver jusqu'à la fin ce commencement de substance nouvelle qu'il a mis en nous ». — « Qu'est-ce que ce commencement de substance nouvelle? » C'est la foi par laquelle nous subsistons, par laquelle nous avons été régénérés, par laquelle nous sommes consubstantiels au Christ. Puis il ajoute : « Pendant que l'on «nous dit : aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs comme il arriva au temps du murmure qui excita ma colère. »(15) . — Il y a ici une transposition, voici quelle est la suite des idées : « Craignons donc que, négligeant la promesse qui nous est faite d'entrer dans le repos de Dieu, il n'y ait quelqu'un d'entre vous qui en soit exclu? » (IV, 1.)  — « Car on nous l'a annoncé aussi bien qu'à eux  (2)». — « Pendant que l'on nous dit : Aujourd'hui si vous entendez sa voix». — «Aujourd'hui » signifie « en tout temps » : ensuite il dit : « Mais la parole qu'ils entendirent ne leur servit de rien, n'étant pas accompagnée de la foi dans ceux qui l'entendirent(2)».Il montre pourquoi cette parole est restée inutile; c'est qu'elle n'était point accompagnée de la foi. Il prouve cette vérité par les exemples qu'il expose : « Quelques-uns », dit-il, « ayant entendu sa voix, irritèrent Dieu par leurs murmures; mais cela n'arriva pas à tous ceux que Dieu avait fait sortir de l'Egypte (16) ». —  « Or qui sont ceux que Dieu supporta avec peine pendant quarante ans, sinon ceux qui avaient péché, dont les corps demeurèrent étendus dans le désert (17) ? » — « Et qui sont ceux à qui Dieu jurait qu'ils n'entreraient jamais dans son repos, sinon ceux qui ne crurent pas en lui (18) ? ». — « En effet, nous voyons qu'ils ne purent y entrer, à cause de leur incrédulité (19) ».

Après avoir cité le témoignage de l'histoire, il emploie la forme interrogative, pour donner plus d'éclat à sa parole. « Il a dit, en effet, » s'écrie-il, « aujourd'hui si vous écoutez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme au jour de sa colère ». Quels sont ces coeurs endurcis dont il se souvient? Quels sont ceux qui n'ont pas cru en lui? Ne sont-ce pas les Juifs? Voici le sens de ces paroles : Ils ont entendu comme nous; mais cela ne leur a servi de rien. N'allez donc pas croire qu'il vous suffira d'entendre la parole de Dieu pour en profiter! Eux aussi, ils l'ont entendue, mais sans profit, parce qu'ils n'ont pas cru. Chaleb et Jésus n'ayant pas fait cause commune avec les incrédules, ont évité le châtiment qui leur a été infligé. Et voyez ce qu'il y a ici d'admirable. Il n'a pas dit : Ils n'ont pas fait cause commune ; il a dit « Ils ne se sont pas mêlés à eux ». Ils se sont séparés de ces séditieux unis dans une même pensée. Ici, selon moi, il nous fait entendre que cette pensée était une pensée de révolte.

« Nous entrerons dans son repos » , dit - il, « nous qui avons cru » ; et pour confirmer cette proposition, il ajoute : « Dans ce repos dont il parle en disant : J'ai juré dans ma colère qu'ils n'entreraient pas dans mon repos », et Dieu parle du repos qui suivit l'accomplissement de ses ouvrages, dans la création du monde (3). On pouvait peut-être lui dire: Cela ne signifie pas que nous n'entrerons pas dans le repos; cela signifie que ces hommes d'autrefois n'y sont pas entrés. Que fait-il, pour prévenir cette objection? Il s'étudie à prouver que ce repos des premiers temps n'empêche pas de parler d'un autre; que ce repos D'empêché pas de parler du repos qui nous attend au royaume des cieux. Il veut donc montrer qu'ils n'ont point obtenu ce lieu du repos. Pour que vous sachiez que c'est bien là ce qu'il veut dire, il ajoute : « Car l'Ecriture dit en quelque lieu, parlant du septième jour : Dieu se reposa le septième jour, après avoir achevé toutes ses oeuvres (4) ». Et il est dit encore ici Ils n'entreront point  dans mon repos (5) ». Vous voyez qu'un repos n'exclut pas l'autre. « Puisqu'il faut donc », dit-il, « que quelques-uns y entrent, et que ceux à qui la parole en fut premièrement portée, n'y sont (480) point entrés à cause de leur incrédulité (6), Dieu n détermine encore un jour particulier qu'il appelle aujourd'hui, en disant tant de temps après par David, ainsi que je viens de dire (7) ». Que veut-il dire ici? Puisque, dit-il, quelques élus doivent entrer dans le repos de Dieu et que les anciens Hébreux n'y sont pas entrés, voici une troisième espèce de repos qu'il établit. Mais comment prouve-t-il que certains élus doivent entrer dans ce repos de Dieu ? Ecoutons-le : « C'est que », dit-il, « après tant d'années », voilà David qui répète : « Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs, comme aux jours de sa colère. Car, si Jésus les avait établis dans ce repos, l'Ecriture n'aurait jamais parlé, après cela, d'un autre jour (6) ». Ce langage est clair et nous fait entrevoir quelqu'autre récompense. « Il y a donc encore un sabbat réservé au peuple de Dieu (9) »; d'où résulte cette conclusion , ce précepte : « N'endurcissez pas vos coeurs ». Car si un sabbat n'existait pas, et s'ils n'étaient pas exposés à subir les mêmes châtiments, à quoi bon ce précepte, à quoi bon cette recommandation de ne pas retomber dans les mêmes fautes, pour ne pas retomber dans le même abîme de souffrances? Et comment ceux qui étaient en Palestine pouvaient-ils subir les mêmes supplices, s'il n'y avait pas encore un repos?

3. C'est bien conclure que d'employer le mot de « sabbat », et non celui de « repos'», que d'employer ici le nom du jour où le peuple de Dieu courait se réjouir. Le sabbat, selon l'apôtre, c'est le royaume des cieux. Au jour du sabbat, les Hébreux doivent, se garder de tout péché, ils ne doivent songer qu'à adorer Dieu, comme faisaient les prêtres; ils ne doivent songer qu'aux oeuvres spirituelles. Voilà quelle doit être leur occupation au jour du sabbat : voilà quelle sera l'occupation des élus dans le royaume des cieux. Paul n'a pas précisément tenu ce langage, mais voici ce qu'il a dit : « Celui qui est entré dans le repos de Dieu se repose aussi lui-même, en cessant de « travailler, comme Dieu s'est reposé après ses ouvrages (10)». Dieu, dit-il, s'est reposé après ses ouvrages, et l'homme qui est entré dans le repos de Dieu, se repose comme lui ;  il leur parlait du repos, et ils voulaient savoir quand ce repos aurait lieu. Il répond donc à leurs désirs, en finissant.

Quant à ce mot « aujourd'hui », il le leur dit pour les sauver du désespoir. Exhortez-vous les uns les autres, dit-il, exhortez-vous chaque jour, tant que vous pouvez dire : « Aujourd'hui ». Cela veut dire que le pécheur même, tant qu'il peut dire « aujourd'hui », doit espérer. Loin de nous le désespoir, tant que nous vivons! Veillons seulement, dit-il, à ce que notre coeur ne soit jamais en proie à l'incrédulité. Et encore, si cela arrive, ne nous désespérons pas; mais ranimons-nous. Tant que nous sommes de ce monde; tant que nous pouvons dire a aujourd'hui », nous avons du temps devant nous. Dans ce passage, il parle non-seulement de l'incrédulité, mais des murmures. « Des murmures de ces hommes dont les cadavres sont étendus dans le désert». (Hébr. III, 17.) Puis,  pour que ses auditeurs n'aillent pas s'imaginer que le châtiment du coupable se bornera à la privation du repos, il met devant leurs yeux le supplice gui lui est réservé et il ajoute : « La parole de Dieu est vivante et efficace, et elle perce plus qu'une épée à deux tranchants; elle pénètre jusque dans les replis de l'âme et de l'esprit, jusque,  dans les jointures et la moelle des os; et elle démêle les pensées et les mouvements du coeur (12) »; c'est cou supplice de la géhenne qu'il parlé ici. C'est un supplice, dit-il, qui pénètre jusque dans les replis de notre coeur et qui dessèche notre âme. Il ne s'agit point ici de cadavres étendus dans le désert, sans sépulture; ils ne sont pas privés de la terré ; ils sont privés du royaume des cieux; ils sont livrés pour toujours à la géhenne ; ils sont livrés à une peine, à un supplice qui n'aura pas de fin.

Mais exhortez-vous les uns les autres ». (Hébr. III, 13.) Remarquez la douceur de ce langage. Il ne dit pas : Adressez-vous des réprimandes, mais exhortez-vous les uns les autres. C'est ainsi que nous. devons nous comporter envers ceux que le chagrin accable : c'est ce qu'il dit dans sa lettre aux habitants de Thessalonique: « Donnez des avis à ceux dont l'âme est inquiète ». Quant aux esprits pusillanimes, voici ce qu'il dit : « Consolez ceux qui ont l'esprit abattu; supportez les faibles; soyez patients envers tous ». (I Thess. V, 14.) Que veut dire ce mot « consolez? » Il veut dire: Ne les faites pas . tomber dans le désespoir; ne leur faites pas perdre courage; car ne pas consoler l'homme que l'affliction accable, c'est le jeter dans l'endurcissement. Il ne faut pas, dit-il, que vous vous endurcissiez , dans les piéges du péché. Les piéges du péché sont peut-être les piéges du démon, car c'est tomber dans le piège et l'erreur que de ne rien attendre de l'avenir, que de croire que nous n'avons pas de comptes à rendre; que nous n'expierons pas nos fautes, que nous ne ressusciterons pas un jour. Une erreur encore, c'est l'indifférence ou le désespoir. Une erreur c'est de tenir ce langage :J'ai péché et il n'y a plus d'espoir pour moi. Puis il les fait espérer en leur disant : « Nous sommes entrés dans la participation de Jésus-Christ ». (Hébr. III, 14.) C'est comme s'il leur disait : Celui qui nous a assez aimés, celui qui nous a assez estimés pour se revêtir de notre chair, ne nous laissera pas, périr. Réfléchissons, dit-il, à l'honneur qu'il a daigné nous faire. Le Christ et nous, nous ne faisons qu'un ; gardons-nous donc de ne pas croire en lui.

Et il revient encore sur ce qu'il a dit ailleurs:, « Si nous souffrons avec lui, nous régnerons avec lui » (II Tim. II, 12), c'est-à-dire : Nous sommes entrés en « participation avec lui », en participation des biens du Christ. Après avoir exhorté ses auditeurs par ces paroles qui leur montrent la récompense et le prix, après nous avoir dit: « Nous sommes entrés en participation avec le Christ», il les exhorte, en les affligeant et en les inquiétant : « Craignons », dit-il, « que négligeant la promesse qui nous est faite d'entrer dans le repos de Dieu, il n'y ait quelqu'un d'entre nous (481) qui en soit exclu ».    Voici en effet qui est clair et certain. « Ils voulurent éprouver ma puissance et me virent à l’oeuvre durant quarante jours ». Voyez-vous ? Il ne faut pas demander de comptes à Dieu, qu'il nous défende, ou non telle ou telle chose, il faut le croire, car Paul accusé ici ceux;qui ont tenté Dieu. Exiger de lui dés preuves de son pouvoir, de sa Providence, de sa sollicitude, . c'est n'être pas, encore bien sûr de sa puissance, de sa bonté et de sa clémence: C'est ce qu'il fait entendre aux Hébreux dans cette épître. Peut-être, voulaient-ils dans leur tentation, peser et mettre à l'épreuve son pouvoir, sa sollicitude et sa Providence. Voyez-vous aussi comme l'incrédulité irrite Dieu et attire sa colère? Que dit-il maintenant ? « Il y a donc encore un sabbat réservé au peuple de Dieu ». Voyez comme il raisonne et comme il conclut. Il a juré, dit-il, que vos pères n'entreraient pas dans son repos, et ils n'y sont pas entrés. Puis, longtemps après, il s'adresse aux Juifs et leur dit : « N'endurcissez pas vos coeurs comme vos pères ». C'est une preuve évidente qu'il s'agit ici d'une nouvelle espèce de repos. Car le repos de la Palestine, nous ne pouvons plus en parler; les Hébreux y étaient arrivés. Quant au repos du septième jour, il ne peut ici en être question; c'était une histoire des anciens jours. Il est donc ici question d'un autre repos qui est le repos véritable.  4. Oui : c'est bien là le lieu de repos d'où la tristesse, la douleur et les gémissements sont bannis, où l'on ne connaît plus les soucis, les fatigues, les angoisses, les craintes qui frappent et ébranlent l'âme. En fait de crainte, il n'y a là que la crainte de Dieu, crainte pleine dé charmés. On n'entendra point en ce lieu retentir ces paroles : « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front ». il n'y a là ni épines, ni ronces. Là, on n'entend pas répéter : « Tu enfanteras dans la douleur. Tu te tourneras vers ton époux et il sera ton maître ». (Gen. III, 19, XVIII, 16.) Là tout respire la paix, la joie, la gaieté , le plaisir, la bonté, la douceur, l'équité, la charité. Il n'y a là ni rivalité, ni jalousie, ni maladie, ni mort corporelle, ni mort spirituelle, ni ténèbres, ni nuit partout le jour, partout la lumière, partout le repos. Là point de fatigues, point de dégoût, là toujours un bonheur nouveau en perspective. Voulez-vous que je vous trace ici l'image du sort réservé aux élus, en ce lieu? C'est impossible; mais je m'efforcerai de vous en offrir une ombre. Levons les yeux au ciel, quand il n'y a pas de nuages à l'horizon, quand le ciel nous montre sa coupole azurée; puis, après avoir longtemps contemplé dans l’immobilité de l'extase ce ravissant spectacle, considérons le sol que nous aurons sous nos pieds, sol aussi supérieur à notre sol, que l'or est supérieur à la boue; puis élevons encore nos yeux vers le pavillon qui s'étend au-dessus de nos têtes. Contemplons là-haut les anges, les archanges, la foule innombrable des puissances immatérielles, le palais même de Dieu, le trône du Père. Mais ici, je le répète, la parole est impuissante à tout décrire, à tout peindre. Il faudrait ici l'expérience et la connaissance qui en est le fruit. Vous figurez-vous, dites-moi, l'existence d'Adam, au milieu du Paradis? Entre cette existence et la nôtre, il y a la distance du ciel à la terre. Mais cherchons une autre comparaison. Que l'empereur aujourd'hui régnant ait le bonheur de soumettre à son sceptre l'univers entier, qu'il soit affranchi des maux de la guerre et des soucis, qu'il soit entouré d'honneurs, qu'il passe sa vie dans les délices, qu'il ait une foule de satellites, que l’or afflue vers lui de tous côtés, qu'il commande l'admiration, quel sera, selon vous, la joie de ce souverain qui verra la guerre disparaître de la surfacé du globe? voilà ce qui aura lieu alors. Mais nous ne sommes pas encore parvenus à donner une. idée exacte du bonheur céleste ; il faut chercher une autre image.

Figurez-vous donc un fils d'empereur qui, après avoir été enfermé dans le sein de sa mère, après être resté dans un état complet d'insensibilité, parait. tout à coup à la lumière, monte sur le trône impérial et se trouve en état de goûter non successivement, mais tout à coup et à la fois toutes les joies du rang suprême : tel sera l'élu de Dieu. Il sera encore comme un captif qui, après avoir été chargé de fer, après avoir été en proie à d'innombrables souffrances, se verrait tout à coup transporté dans un palais. Mais non : cette image n'est pas encore fidèle. Ce bonheur, quoique ce soit un bonheur de roi, celui qui le possède le goûtera avec délices deux ou trois jours; avec le temps, il y trouvera encore du plaisir; mais ce plaisir sera moins vif, car ici-bas le sentiment de la félicité, quelle qu'elle soit, s'émousse par l'habitude, là-haut ce sentiment, loin de diminuer, ne fait ,que croître. Réfléchissez en effet au bonheur de l’âme parvenue à ce séjour où elle a devant elle une félicité sans fin, une félicité immuable et toujours croissante, une immortalité qui ne connaît ni les chagrins, ni les périls, une immortalité pleine de joies spirituelles et de délices innombrables.

Quand nous voyons dans la plaine les tentes des soldats formées de riches tapisseries, quand nous voyons briller les lances, les casques et les boucliers, nous voilà; tout ébahis et immobiles d'étonnement ; quand nous voyons le roi traverser le camp avec son armure d'or, et pousser son cheval avec ardeur, rien ne manque à notre admiration. Qu'éprouverons-nous donc, je vous le demande, quand-nous verrons les tabernacles des saints dressés pour toujours dans le ciel ? « Ils vous recevront », dit l'Evangile, « dans leurs tabernacles éternels ». Que direz-vous, quand vous verrez tous ces saints plus resplendissants que les rayons du soleil, et environnés non pas de l'éclat. du bronze ou du fer, mais de cette gloire dont 1'œil de l'homme ne peut supporter les lueurs? Je parle ici des saints, c'est-à-dire des hommes. Mais que direz-vous à l'aspect de ces milliers d'anges, d'archanges, de chérubins, de séraphins, de trônes, de dominations de principautés, de puissances dont la beauté surpasse l'imagination? Mais quand cesserai-je d'énumérer des merveilles que l'on ne peut comprendre?, « Jamais l'œil n'a vu, jamais l'oreille n'a entendu, jamais l'esprit n'a pénétré ce que Dieu prépare à ceux qui l'aiment ». (I Cor. 11, 9.)  (482) Qu'ils sont donc malheureux ceux qui n'obtiennent pas ce bonheur! Qu'ils sont heureux ceux qui .l'obtiennent ! Soyons donc du nombre des heureux, pour acquérir la félicité éternelle en Jésus-Christ Notre-Seigneur, auquel conjointement avec lé Pète et le Saint-Esprit, gloire, honneur et puissance, maintenant et toujours et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

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