DIX VIERGES
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SERMON (a) SUR LA PARABOLE ÉVANGÉLIQUE DES DIX VIERGES. Le royaume des cieux est, semblable à dix vierges, etc. (Matth. XXV, 1).

1. L'Époux c'est le Christ; à sa voix celui qui est ami, s'arrête, écoute il se réjouit d'entendre la voix de l'Époux. C'est à lui que nous a fiancés l'Apôtre dont voici les paroles : « J'ai promis de vous allier, chaste vierge. à Jésus-Christ seul (II Cor. XI, 2). » Je crains qu'il ne puisse tenir sa promesse, c'est-à-dire qu’il ne puisse unir notre âme vierge, mais vierge chaste, avec Jésus-Christ. Il ajoute le mot chaste, parce qu'il en est qui sont vierges de corps, mais qui perdent leur pureté par des pensées immondes, et souillent, par les ordures d'une affection coupable, la fleur embaumée de la pudeur. On les désigne sous le nom des cinq vierges folles, un sentiment qui n'est pas selon la droite intention les rend insensées. Le Christ est vierge, fils d'une vierge, et il veut pour épouse une vierge. Si vous avez la pureté des anges, je dis plus, la sainteté du Christ et de sa mère, réjouissez-vous, tressaillez d'allégresse, précipitez-vous avec transport dans les bras de Jésus-Christ, et, poussez, en soupirant, ce cri d'amour: « Qu'il me baise d'un baiser de sa bouche (Cant. I, 1). » Vous êtes donc l'Épouse de Jésus-Christ : mais pesez ce titre avec attention. Les mots époux et épouse dérivent, selon les grammairiens, d'un verbe latin qui signifie promettre. On appelle époux ceux qui se promettent l'un à l'autre, en sorte que ni l'un ni l'autre ne se marie avec un autre. Or, après ce jour des fiançailles, il s'écoule un temps qui tantôt est court, tantôt long ; il y a cependant une époque déterminée, à laquelle ils doivent se réunir et vivre ensemble par le mariage. Ces fiançailles sont sages et bonnes, car, dans l'intervalle, l'amour mutuel des fiancés s'accroît et s'augmente, et plus il est différé, plus le désir de s'unir l'un à l'autre s'enflamme; parce que, comme dit Salluste, pour l'esprit embrasé de désirs, rien ne se hâte jamais assez, les époux soupirent avec plus d'impatience après le jour des noces. Aussi, pour obtenir Rachel, Jacob sue durant sept ans à partir de ses fiançailles, il couche en plein air, exposé aux rigueurs du froid et aux ardeurs du soleil, et son cœur, consumé d'amour, n'est pas abattu par de telles

a Ce discours ne manque pas d'élégance, néanmoins il ne parait pas être de saint Bernard.

épreuves (Gen. XIX, 20). Mais où veux-je en venir par là? A ce que, si vous êtes déjà la fiancée du Christ, vous brûliez d'amour, vous soyez enflammée de désirs, vous soupiriez fortement, parce que la joie de l'amatir tant souhaitée n'est point encore venue. Un auteur a dit : « Que tout amant ait le visage pâle, car la pâleur et la maigreur sont des indices certains d'amour. Qu'avez-vous à faire de repas copieux et succulents et de vin ? Tout cela n'est pas pour les moines. Aux habitants de Babylone, les repas splendides. Si votre époux vous voit maigrir, pâlir à cause de l'amour que vous ressentez pour lui, s'il vous voit brûler de désirs impatients, il hâtera le jour de l'union, il vous prodiguera ses baisers, il vous serrera dans ses bras: O jour heureux des noces ! ô heureuse l'épouse qui s'unit par un tel mariage! Recevez ces baisers, ô épouse fortunée, rendez étreinte pour étreinte, et chantez : Ce que j'ai désiré, je le vois, ce que j'ai tant aimé, je le possède : je suis unie dans le ciel à celui que sur la terre j'ai aimé de tout mon cœur.

2. « Le royaume des cieux est semblable à dix vierges, » que le roi du ciel introduira dans cet heureux séjour et dans sa couche nuptiale, si elles marchent 'à sa rencontre en tenant à la main des lampes allumées. Mais que faisons-nous? car il y en a cinq de folles et cinq de sages ? Je crois qu'il y en a davantage et que le nombre des folles surpasse de beaucoup celui des sages. Du reste, toutes « sortirent au devant de l'Époux, après avoir pris leurs lampes. Elles sortirent. » D'où sortirent-elles? des richesses sans doute et de la vie séculière, selon cette parole: « Retirez-vous, sortez de ce lieu, ne touchez pas à ce qui est immonde (Isa. LII, 11) . » Abraham entend aussi cette parole : « Sors de ton pays et du lieu qu'habite ta parenté et de la maison de ton père (Gen. XI, 1). » Loth reçoit également l'ordre de quitter Sodome, et la défense de regarder en arrière s'il ne veut être enveloppé dans les flammes qui dévorent cette ville coupable. Mais que dit-il à l'ange : « Il y a là, tout près, une ville où je puis trouver un refuge, elle est petite et j'y trouverai mon salut (Gen. XIX, 20). » N'est-ce pas peu de chose, et mon âme vivra? Cette petite ville rapprochée, qui n'est pas loin du siècle, et dans laquelle Loth échappe à l'incendie de Sodome, c'est le monastère. N'est-elle point petite en comparaison de cette cité du monde, vaste, populeuse et pleine de malice, que dévorent les flammes de la cupidité et des passions ? C'est de là que nous sortons pour nous réfugier dans la petite ville qui est tout près, en abandonnant Sodome qui brûle avec ses habitants. « J'y trouverai mon salut, » dit Loth. Oui, nous trouverons le salut dans cette petite cité, si nous ne regardons pas en arrière, si les étincelles de Sodome (qui, par un juste châtiment, est livrée aux flammes non loin de là), ne viennent pas nous incendier. C'est de cette ville que sortirent les vierges pour aller au devant de l'Époux et de l'Épouse. Car la flamme des Sodomites brûle loin des vierges.

3. Elles sortirent avec des lampes, les reins ceints et tenant à la main des flambeaux; afin que le lien de la chasteté ceigne le corps, et que la lumière du bon exemple brille dans la conduite pour l'utilité du prochain et la gloire de Dieu le Père. C'est ainsi que Gédéon cachant des lumières dans des vases de terre, mais pour les faire briller à l'heure du combat en brisant l'enveloppe qui les renfermait, effrayait, par cet éclat soudain, les ennemis, et leur faisait prendre la fuite (Judic. VII, 20). Les princes des ténèbres sont effrayés, en effet, en voyant la lumière des bonnes œuvres, parce que les ténèbres ne peuvent tenir devant la lumière. « Les vierges sages prirent de l'huile dans leurs vases avec leurs lampes (Matth. XXV). » Remarquez leur sagesse : elles savaient que la nuit se prolongerait : et, ne sachant à quelle heure l'Époux arriverait, elles ne se contentent pas de l'huile que renfermaient leurs lampes, elles en prennent encore dans des vases.; en sorte que si, par hasard, celle de leurs lampes venait à manquer, elles pussent les garnir de celle de leurs vases pour entretenir la lumière. L'huile dans la lampe, ce sont les bonnes œuvres dans leur éclat: mais quand cet éclat brille aux, yeux du prochain, quand on l'admire et le loue, souvent l'esprit de celui qui a fait ces bonnes œuvres s'enfle et s'élève: et tandis qu'il se glorifie en lui, et, non dans le Seigneur, la lumière de sa lampe s'éteint: elle manque d'un aliment convenable, et, tout en brillant devant les hommes, elle n’est que ténèbres devant Dieu. Les vierges sages, outre l'huile qu'elles ont dans leurs lampes, en mettent dans des vases; c'est que les saintes âmes, en attendant l'arrivée de l’époux, lui crient chaque jour de loin, dans les désirs de leur cœur : « Que votre règne nous arrive, » outre les œuvres qui paraissent aux yeux du prochain pour la gloire de Dieu, elles eu font d'autres dans le secret, où l'œil du Seigneur pénètre seul: afin que si, par accident, le souffle de la louange humaine vient à éteindre les actions brillantes et remarquables, l'huile du secret de la conscience supplée à leur défaut. Voilà la gloire de la fille du roi qui vient du dedans, lorsqu'elle se glorifie plus de ce qui brille dans les vases de sa conscience que de ce qui éclate au dehors : elle croit que tout ce qui s'aperçoit est perdu, et elle ne regarde pas comme digne de louange ce que les hommes accueillent avec force félicitations. Elle fait ses prières,, elle répand des larmes en témoignage de son amour, et s'entretient avec son bien-aimé par ses gémissements et ses soupirs. Telle est la gloire, mais la gloire intérieure et cachée de la fille et de l'amie du roi. Les vierges folles n'ont pas cette huile-là, parce qu'elles ne pratiquent le bien que par amour pour l'éclat de la vaine gloire et la faveur humaine. Cette huile, qui est le motif de leur confiance, les vierges prudentes la placent dans les vases secrets de leur conscience.

4. « L'Epoux tardant, elles s'endormirent toutes et sommeillèrent. » Les bonnes vierges dorment dans le Seigneur, et la tête doucement inclinée sur la poitrine de Jésus-Christ, elles attendent le dernier matin. Le matin, dit le Psalmiste, « je me présenterai devant vous et je votas verrai (Psal. v. 5). » Oh! dans quel agréable sommeil sont plongées celles dont la chair se repose dans l’espérance, et l'esprit goûte la joie en lui-même ; on aime à se rappeler à ce sujet, que saint Germain, évêque d'Auxerre, dans son voyage à Rome, étant venu à Autun, se rendit au tombeau de saint Cassien, et, l'appelant par son nom : Que faites-vous, mon très-cher frère, lui dit-il? Le saint répondit du fond de son sépulcre Je me repose doucement en paix et j'attends l'arrivée du Rédempteur . Voilà le sommeil des vierges prudentes à qui l'esprit céleste a dit « de se reposer de leurs travaux (Apoc. XIV, 13). » On n'adresse pas ce langage aux vierges folles, tel n'est pas leur sommeil. Elles ne se reposent pas de leurs travaux, celles dont la chair voit la corruption, celles dans les os de qui entre la pourriture et en qui elle fourmille : voilà pour la chair. Quant à l'âme, ensevelie dans l'enfer, comment dort-elle, troublée comme elle l'est au milieu des tourments, dévorée par la soif, n'espérant pas même une goutte d'eau, et, dans sa conscience mauvaise, voyant avec horreur venir le jour de la résurrection et approcher le juge souverain ?

5. « Elles s'endormirent et sommeillèrent toutes. Or, au milieu de la nuit, un cri fut poussé : voici l'Epoux qui vient : sortez à sa rencontre. » O cri plus doux aux oreilles des vierges sages que tous les concerts et que toutes les harmonies ! « L'Epoux arrive! » Pensez-vous que ce soit le cri du Fils de Dieu, ce cri qu'entendront, quand le bienheureux moment en sera venu, tous ceux qui sont dans les sépulcres, et qui, après l'avoir entendu, vivront (Joan. V. 25 ) ? Seigneur Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, donnez, à cette heure, à mes oreilles la joie et l'allégresse, et mes ossements humiliés tressailliront de bonheur. Je vous en conjure, Seigneur, que je ne craigne point les terribles paroles qu'ouïront ceux à qui vous direz : « Allez, maudits, au feu éternel (Matth. XXV, 41 ). » Ce cri sera peut-être celui de l'archange sonnant de la trompette ; le Seigneur, en effet, doit à ce bruit et au son de la dernière trompette descendre du ciel (I Thessal. IV. 15 ). La trompette retentira, et, à ces éclats retentissants, pour employer les expressions de saint Jérôme, l'univers entier sera consterné. Quand l'ange la fera sonner, quand elle réveillera les hommes, elle ébranlera même les sombres abîmes des enfers. Les malheureux qui s'y trouvent enfermés l'entendront alors, eux qui actuellement entendent sans y vouloir répondre, cette invitation : «Allez à sa rencontre. » Il y aura alors un grand fracas, parce que, comme la Sibylle le dit, la trompette laissera tomber de tristes s sons du haut des cieux ; et le Seigneur appellera le ciel d'en haut, et la terre dans le dessein de faire, en sa présence, le discernement de son peuple, et de séparer les vierges sages des vierges folles ; il appellera le ciel d'en haut, afin que les vertus des cieux soit ébranlées du lieu de leur séjour, et que tous les anges soient réunis avec lui pour juger. Le Psalmiste dit: « il appellera le ciel d'en haut ( Psal. XLIX. 4 ), » c'est-à-dire les esprits et les âmes des justes, à qui il avait été dit auparavant de se reposer encore un peu jusqu'à ce que le nombre de leurs frères fût complété ( Apoc. VI, 11). Quittant donc la demeure céleste, ces saintes âmes, revenues dans leurs corps, se réjouiront avec d'autant plus de sécurité, qu'elles seront plus assurées qu'elles ne connaîtront plus la corruption. Alors, en un moment, en un clin-d'œil, selon Ezéchiel (Ezech. XXXVII, 1 ), dans le champ plein d'ossements, les os des morts se réuniront aux os, les nerfs aux nerfs et les jointures aux jointures ; parce que le corps ressuscitera spirituel, après avoir été mis en terre, animal ( I Cor. XV, 44 ) : et, ressuscité des morts, il ne meurt plus, le trépas n'a plus de pouvoir sur lui. Alors à l'aube, à l'aurore de ce jour, à la venue de l'Epoux, un grand cri réveillera tous ceux qui dorment et fera résonner, avec une très-grande force et efficacité, ces paroles : « sortez à sa rencontre » Partez, vous qui dormiez, et hâtez-vous d'aller au devant du juge. En ce moment, toutes les tribus de la terre se plaindront. «Alors les hommes diront aux montagnes : tombez sur nous: et aux collines : ensevelissez-nous (Luc. XXIII, 30).» Vous que le souvenir de la conscience n'accuse pas, quittez vos tombeaux, et, avec le sentiment de vos bonnes œuvres et de vos mérites, considérez, avec joie, le juge qui vient.

6. Quant aux réprouvés, ce ne sera pas tant leur volonté propre qui les produira au dehors que la puissance du juge ; ils ne sortiront pas de leurs sépulcres, mais, pour parler plus justement, ils en seront arrachés; c'est donc avec beaucoup de raison que ce jour est appelé jour de colère, jour de calamité et de misère, jour d'obscurités et de ténèbres (Sophon. X, 15) ; alors :

Au signal du jugement, la terre se couvrira de sueur;

Des cieux tombera le feu et pleuvra un fleuve de soufre

Et la terre entr'ouverte laissera voir les abîmes du chaos.

Car le feu montera en la présence du Seigneur et embrasera ses ennemis tout autour, parce qu'il les trouvera alors nus et sans abri, comme les habitants de Sodome (Psalm. XCVI, 3 ). Ils ressusciteront en cet état , et le feu avec une pluie de soufre les brûlera et les dévorera. Alors se produira un spectacle tout-à-fait étonnant; an verra un corps incorruptible qui ne pourra se consumer, et qui brûlera sans mourir. Il sera dévoré par les flammes sans être diminué: pas un seul cheveu ne tombera de sa tête : car rien du corps ne pourra être retranché ou calciné, après qu'il aura été revêtu de l'incorruptibilité. Voyez la Salamandre qui marche sans être atteinte par le feu, sur les charbons enflammés. On dit que la pierre d'asbeste, une fois embrasée, brûle d'un feu qui ne peut être éteint, d'un feu qui s'attache à ses molécules sans les consumer. C'est ainsi, je pense, que ce feu de soufre brûlera les ennemis du Seigneur. Il épargnera les justes, comme jadis les trois enfants de Babylone ( Dan. III, 50 ), il ne les fera pas souffrir, il ne leur causera aucun tourment, lorsque le Seigneur réformera notre corps, en le faisant passer de l'état d'humilité à la ressemblance de son corps glorieux. Quelle sera alors, je vous le demande, la pensée des pécheurs, de ceux qui, à présent, se réjouissent quand ils ont fait le mal, et tressaillent de joie dans les choses les plus coupables (Prov. II, 14) ? Quelles réflexions, dis-je, feront-ils en voyant les éléments dévorés par les flammes, la terne entr'ouvrir ses flancs, et, par cette effroyable déchirure, laisser apercevoir les abîmes de l'enfer, et les morts se lever. En même temps il viendra du ciel accompagné de tous losanges, ce juge à qui le père a donné tout jugement ? Malheureux que je suis, en écrivant ces mots, mon cœur palpite de frayeur, mes yeux se baignent de larmes, et je serais bien ébranlé, si je ne connaissais pas les miséricordes du Seigneur.

7. Mais revenons à notre sujet. « Alors toutes ces vierges se levèrent et: préparèrent leurs lampes, » c'est-à-dire leurs consciences, leurs propres pensées; les accusant ou même les défendant, car il est dit : «Je t'accuserai et je te placerai contre ta face ( Psal. XLIX, 21). » Tant que nous vivions sur la terre, nous avons placé nos péchés derrière nos épaules, comme si nos actions ne devaient pas être examinées au tribunal de Jésus-Christ ; par suite de notre négligence, nous avons oublié plusieurs de nos iniquités. Mais que dit le Seigneur? « je t'établirai en ta propre présence, » c'est-à-dire, je ramènerai sous les yeux de ton esprit, ta vie dans son ensemble, toutes tes pensées et tes actions coupables et, en te les montrant dans leur ensemble, je te dirai : «Voilà ce que tu as fait, et je me suis tû. » C'est ainsi, à mon avis, que la chose se passera à cette heure, ainsi que le jugement se fera quand la Vérité qui est le Christ, jugera dans le cœur de chaque homme. Hélas ! que de points se présenteront à nous, que nous laissons actuellement. sans les confesser et sans les purifier, parce que nous les croyons misère et néant. Dans la crainte d'un tel malheur, le saint et prudent roi Ezéchias s'écriait : « Je repasserai dans l'amertume de mon âme, toutes les années de ma vie (Isa. XXXVIII, 1.5). » Je repasserai, c'est-à-dire je penserai encore, dans la crainte d'avoir oublié quelque chose, et afin que aucun détail n'échappe à l'examen et à la censure.

8. Les vierges prudentes garnissent donc leurs lampes, de l'huile qu'elles avaient mise à part dans leurs vases; mais les lampes des vierges folles s'éteignent, et comme elles avaient fait des œuvres de ténèbres, elles demeurèrent dans les ténèbres. « Donnez-nous de votre huile, disent-elles. » Demande insensée. » Le juste ne se sauvera qu'avec peine (I Petr. IV, 18), et les saints auront juste leur provision suffisante d'huile de justice; ils ne sauraient donc en avoir assez pour eux et pour le prochain en même temps. Noé, Daniel et Job, ne sauveront pas leur, fils, mais, de même que l'âme qui aura péché, mourra, ainsi l'âme qui aura accompli la justice sera seule sauvée (Ezec. XVIII, 20). «Les vierges prudentes répondirent : dans la crainte qu'il n'y en ait point assez pour vous et pour nous, allez plutôt chez les marchands et procurez-vous-en. » Il est trop tard, car on ne vend plus d'huile de justice nulle part. Désormais les prophètes, les apôtres, et les autres docteurs qui avaient coutume de la tirer et de la vendre, suspendent ce saint commerce, et ne disent plus : « prenez le psaume et faites sonner le tambour (Psal. LXXX, 3). » Mais qu'y a-t-il encore ? Celles qui étaient prêtes entrèrent avec l'Époux aux noces. » Les vierges sont admises aux noces, le roi les introduira dans ses appartements, parce qu'il a désiré leur beauté. En ce séjour heureux, du cellier des vins célestes, on sert et on fait servir ce vin nouveau que boira et montrera en même temps le Fils de l'homme.

9. « Et la porte fut fermée. » Quelle porte ? Celle qui est maintenant ouverte à ceux qui viennent de l'Orient et de l'Occident, pour se reposer avec Abraham, Isaac et Jacob, dans le royaume des cieux, la Porte qui a dit : « Qui vient à moi, je ne le mettrai pas dehors (Joan. VI, 37). » Elle est ouverte à présent, mais, alors elle sera fermée pour l'éternité. Les homicides viennent à présent, et ils sont reçus, les publicains et les prostituées se présentent, et ils sont admis; les sodomites, les impudiques, les adultères, les voleurs et les autres pécheurs de ce genre, s'y rendent, la porte ne leur est point fermée. Car le Seigneur est inépuisable dans les pardons qu'il accorde, et toute misère lui touche le cœur. Mais en ce dernier moment que dit-il? « La porte fut fermée. » La porte de la pitié et de la miséricorde du Christ, cette porte qui à présent s'ouvre aisément aux larmes, aux gémissements, aux soupirs et aux prières des pénitents, cette porte est fermée. Nulle pénitence, nulle prière, nulle plainte, ne sera plus reçue à l'avenir. Elle est formée cette porte qui a reçu Aaron après son idolâtrie, David après son adultère et son homicide, cette porte qui ne repoussa point Pierre, après son triple renoncement, et qui tout au contraire lui confia la garde de ses clefs. « Veillez donc, parce que vous ne savez ni le jour ni l'heure.» C'est à ceux qui veillent et qui prient, et non à ceux qui dorment et sont engourdis, qu'est donné le royaume des cieux, par Notre-Seigneur-Jésus-Christ, à qui est honneur et gloire dans les siècles des siècles. Amen.

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