|
|
DISCOURS SUR LE PSAUME LIII.SERMON AU PEUPLE.MÉPRIS DU MONDE.Daprès le titre de ce psaume, David
sétait réfugié chez les Ziphéens pour y trouver un
abri contre les poursuites de Saül; mais il fut trahi par ceux-là mêmes an milieu
desquels il avait espéré trouver un toit hospitalier. David représentait, en cette
circonstance, le Sauveur et ses disciples, comme les Ziphéens
figuraient les mondains, dont léclat nest que passager. La prière adressée à Dieu par le roi fugitif du sein de sa retraite, convient donc parfaitement à Jésus-Christ et à lEglise, dont les membres sincères sont cachés aux yeux du monde. Lhumilité du chrétien et léclat du mondain ne dureront pas; de là, pour le premier, le désir de ne point briller ici-bas, de ne pas mettre ses espérances dans les éphémères futilités de la terre, mais de les placer en Dieu et de le servir pour lui-même. 1. Si nous saisissons bien le sens du titre de ce psaume, sa longueur même nous sera avantageuse ; et, puisque le Psaume est court, nous emploierons, à expliquer le titre, le temps que lexplication du psaume laissera à notre disposition. Du sens de ce titre bien compris dépend lintelligence du psaume dont nous venons de chanter les versets: car lhomme qui lit bien linscription placée au frontispice dune maison, y pénètre sans crainte, et ne ségare pas quand il y est entré, parce que linscription a été mise au seuil de lédifice, dans lunique but dindiquer les moyens de ne point sy égarer. Ce psaume est ainsi conçu: « Pour la fin, dans les hymnes, intelligence à David, lorsque les habitants de Ziph vinrent trouver Saül pour lui dire: David nest-il pas caché chez nous 1? » Nous savons que Saül persécutait le saint homme David: il était la figure du royaume de ce monde, prédestiné non pas à la vie, mais à la mort. Nous nous souvenons de lavoir déjà expliqué à votre charité. Vous devez le savoir aussi; et, si vous le saviez déjà, vous le rappeler. David préfigurait le Christ ou le corps du Christ. Quétait-ce donc que les Ziphéens? Il y avait un bourg du nom de Ziph, dont les habitants sappelaient Ziphéens: David sétait retiré sur leur territoire pour échapper aux poursuites de Saül, qui le recherchait et voulait le faire mourir. A peine eurent-ils connaissance de ce fait, quils allèrent indiquer à Saül la retraite de sa 1. PS. LIII, 1, 2. 576 victime, et lui dire: « Est-ce que David nest point caché chez nous 1? »Cet acte de lâcheté ne leur fut daucun profit, comme il ne fut pour David la cause daucun mal: il ne servit quà manifester clairement la méchanceté de leurs dispositions. Pas plus après leur trahison quauparavant, Saül ne réussit à semparer de David; et même, comme il se trouvait dans une caverne de ce pays, et, à vrai dire, sous la main de David, celui-ci ne voulut point en profiter pour le faire mourir: il renonça à loccasion favorable qui se présentait, et lui fit grâce de la vie 2. Pour Saül, il lui fut impossible de mettre à exécution ses projets homicides. 2. Peu nous importe de connaître la valeur morale des Ziphéens; occupons-nous de ceux que le Psalmiste veut nous désigner sous ce nom. Si nous cherchons la signification de ce mot, nous trouverons quil veut dire: florissants, éclatants. Les ennemis du saint roi David brillaient de je ne sais quel éclat: ils paraissaient au grand jour, tandis que David se cachait. Si nous voulons bien comprendre ce psaume, il nous faut savoir quelles sont, parmi les hommes, ces personnes brillantes. Voyons dabord celles que David préfigurait en se dérobant aux regards dautrui: il nous sera ensuite plus facile de connaître celles que ses ennemis représentaient en paraissant au grand jour. Saint Paul nous apprend quel est ce David quon naperçoit pas, lorsque, sadressant aux membres du Christ, il leur dit: « Vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Jésus-Christ en Dieu ». Et quand fleuriront ces fidèles cachés aujourdhui? « Lorsque Jésus-Christ, qui est votre vie, paraîtra », ajoute-t-il, « vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire 3 ». Quand ces membres du Christ fleuriront, les Ziphéens ressembleront à une herbe qui se dessèche; car, voyez à quelle fleur lEcriture compare leur gloire. « Toute chair nest que de lherbe, et tout léclat de la chair est comme la fleur de lherbe ». En fin de compte, « lherbe se dessèche, et sa fleur fanée tombe à terre ». Et quel sera le sort de David? Ecoute ce qui suit: « Mais la parole de Dieu demeure éternellement 4 ». Il y a donc ici-bas deux classes dhommes, quil nous faut bien distinguer lune de lautre, et entre lesquelles nous devons 1. Rois, XXIII, 14, 15, 19. 2. nécessairement choisir. A quoi te servirait-il, en effet, de les connaître, si tu devais être indifférent à faire un choix? Tu as aujourdhui le pouvoir de choisir; le temps viendra où ce pouvoir ne tappartiendra plus, car alors Dieu se hâtera de rendre à chacun selon ses oeuvres. Qui sont donc ces Ziphéens si brillants, sinon ce corps de Doëch lIduméen, dont nous avons déjà, il y a quelques jours, entretenu votre charité? Cest deux quil a été dit: « Voilà lhomme qui na pas pris Dieu pour son appui, mais qui a mis son espérance dans la multitude « de ses richesses, et placé sa force dans la vanité ». Voilà bien ces enfants du siècle, dont lEvangile a voulu notas parler, quand il nous a dit quils sont dans leurs affaires plus rusés que les enfants de la lumière; car on les voit supputer toutes les chances dun avenir qui ne leur appartiendra peut-être pas. Vous savez quelle conduite léconome infidèle tint à légard de son maître: il travailla pour lui-même aux dépens de celui-ci, en remettant à ses créanciers une partie de leur dette, afin de trouver chez eux un asile lorsquil serait privé de sa charge. Il avait agi de mauvaise foi, et, pourtant, son maître lui donna des louanges, non pas sans doute à cause de linjustice quil avait commise, mais en raison de ladresse quil avait montrée. A plus juste titre devons-nous, surtout après la recommandation expresse de Notre-Seigneur Jésus-Christ, nous préparer des amis avec le Mammon diniquité 1. Par Mammon on entend les richesses. Nous ne devons avoir de trésor que dans le ciel, où nous habiterons éternellement. Cest pourquoi ceux-là seuls donnent à largent le nom de richesses, qui ne savent jeter de léclat que sur la terre, et qui ne veulent point sen servir de manière à se préparer des amis pour léternité. La raison en est quils ne connaissent pas les véritables richesses. Les pécheurs, qui brillent comme lherbe pour un temps, sont seuls à leur donner le nom de richesses: et voilà les Ziphéens, les adversaires de David, les hommes qui jettent en ce monde un si vif éclat. 3. Parfois il arrive que des enfants de lumière, entraînés par la faiblesse humaine, portent leur attention sur de pareils hommes, et quand ils voient le bonheur sourire aux méchants, ils chancellent dans leur route, et ils 1. Luc, XVI, 8, 9. 577 se disent: Quel avantage retiré-je de mon innocence? A quoi me sert dêtre fidèle lieu, dobserver ses commandements, d nêtre à charge à personne, de ne rien dérober à qui que ce soit, de ne jamais nuire à autrui, dêtre, autant que possible utile à prochain?Je remplis tous mes devoirs: les mécréants sont heureux, et moi, je souffre ! Eh quoi! voudrais-tu être aussi un Ziphéen? Ils sont tous brillants en ce monde; mais, au jugement de Dieu, ils se dessécheront, puis ils seront jetés dans le feu éternel. Est-ce cela que tu désires pour toi? As-tu mis en oubli les promesses de celui qui est descendu du ciel vers toi? Ne connais-tu pas lexempte quil ta lui-même donné? Si léclat des Ziphéens méritait dexciter tes désirs, ton Sauveur ne sen serait-il pas revêtu pour les jours de sa vie mortelle? Ou bien, la puissance de le faire lui a-t-elle manqué? Il a préféré ne pas se faire connaître; il a mieux aimé dissiper les soupçons que Ponce Pilate élevait sur la nature de sa puissance, et répondre à ses questions, comme sil adressait la parole à ces orgueilleux Ziphéens eux-mêmes: « Mon royaume nest pas de ce monde 1 ». Il se cachait donc ici-bas, et tous les hommes vertueux sy cachent, à son exemple, parce que leur véritable bien est au dedans deux: il est caché dans leur coeur, dans ce coeur où se trouvent leur foi, leur charité, leur espérance, leur trésor. De tels biens paraissent-ils au regard du monde? Non, ils sy dérobent, et la récompense que lieu leur réserve ne paraît pas davantage. Comment donc se fait-il que léclat des mondains soit si vif? Il éblouit les yeux, mais il ne les éblouira pas toujours. Pareil à la beauté de ces herbes qui naissent et gardent leur verdeur en hiver, pour se flétrir aux premières ardeurs du soleil dété, il ne durera quun moment. Ne nous livrons donc pas à ces pensées que le Prophète développe dans un autre psaume. Il avoue quil a failli tomber de défaillance et quil a marché dun pas chancelant dans la voie de Dieu, parce quil a vu léclat et le bonheur des méchants. Néanmoins, dès quil a connu ce que Dieu, souverainement ennemi du mensonge, réserve pour lavenir aux pécheurs, ce quil promet aux justes malheureux, il sécrie, dans les transports de sa joie et de sa reconnaissance: 1. Jean, XVIII, 36. « Que le Dieu dIsraël est bon pour ceux qui ont le coeur droit ! mes pas ont chancelé je me suis vu sur le point de tomber ». Et pourquoi? « Parce quà la vue du tranquille bonheur des méchants, la jalousie sest emparée de mon cur ». Mais sa démarche sest raffermie, lorsquil a pénétré les mystères de lavenir. Il ajoute dans un autre verset du même psaume: « Jai trouvé en cela une grande obscurité »; cest-à-dire, une grande difficulté sest présentée à mon esprit. Pourquoi les hommes qui font le mal en cette vie, y sont-ils néanmoins si heureux? Pourquoi ceux qui pratiquent la vertu, y sont-ils, au contraire, sujets à tant de peines? Cette difficulté me semblait singulièrement grave, et presque impossible à résoudre. « Je ne vois quobscurité devant moi, jusquà ce que jentre dans le sanctuaire de Dieu, et que je pénètre les mystères de lavenir 1 ». Quels mystères lavenir doit nous révéler? LEvangile nous les a déjà fait connaître : « Lorsque le Fils de lhomme viendra, tous les peuples de la terre seront rassemblés devant lui, et il les séparera, comme un pasteur sépare les agneaux davec les boucs : il mettra les brebis à la droite, elles boucs à la gauche 2 ». Les Ziphéens seront dabord mis de côté, puis ils seront jetés au feu. Verra-t-on briller ceux qui seront placés à la gauche? car alors ils gémiront : alors leur âme sera saisie de repentir, mais dun repentir hors de saison alors ils sécrieront: « De quoi nous a servi notre orgueil ? Quel avantage retirons-nous du faste de nos richesses? Tout cela a passé comme lombre 3 ». O Ziphéens, qui êtes maintenant à la gauches il est trop tard pour vous repentir davoir brillé dans lombre. Au lieu de reconnaître David, quand il se cachait au milieu de vous, pourquoi le trahissiez-vous? Si alors vous vous étiez corrigés, votre douleur présente ne vous serait point inutile. Il y a un repentir utile, et un repentir qui ne lest pas. Tu te repens utilement, lorsque tu taccuses, lorsque tu te reproches ta conduite désordonnée, lorsquà la suite de ces secrets reproches, tu combats tes mauvaises habitudes, lorsque, après leur avoir fait la guerre, tu ten corriges, lorsque tu te convertis, et que, te dépouillant du vieil homme et te revêtant du nouveau, tu préfères les ignominies du Christ à la gloire des Ziphéens. 1. Ps. LXXII, l-17. 2. Matt. XXV, 31-33. 3. Sag. V, 8, 9. 578 Pendant que tu renfermes ton trésor dans ton coeur, et que tu es caché parmi les Ziphéens, pendant que tu conserves aussi en secret lespoir de ton éternelle récompense, sil tarrive doccuper dans le monde un poste élevé, nen conçois aucun orgueil, car lorgueil que tu en ressentirais , te précipiterait dans léphémère vanité des Ziphéens. Imite plutôt lexemple dEsther, de cette sainte femme quadmira autrefois le peuple juif. Mariée à un roi étranger, elle apprit à quel péril se trouvait exposée toute sa nation, et la nécessité urgente dintercéder auprès du souverain en faveur dIsraël : elle se mit donc en prière, et, pendant son oraison, elle confessa à Dieu que tous ses ornements royaux navaient pas à ses yeux plus de prix quun vêtement de femme souillé par la menstruation 1. Des hommes ne pourraient-ils pas faire ce que font des femmes, et lEglise chrétienne aurait-elle moins de force que cette femme juive ? Je dirai donc à votre charité: « Si les richesses vous surviennent en abondance, ny arrêtez point votre coeur 2 ». Si abondantes quelles soient, si grande que soit ici-bas ta prospérité, ne te fie pas à cette mer, ne te fie point à ses apparences séduisantes. Si tu deviens riche, et que ta fortune saccroisse sans cesse, foule aux pieds les biens de la terre, attache ton coeur à Dieu. En télevant au-dessus deux, et donnant à Dieu tes affections, tu ne seras pas exposé à tomber lorsquils manqueront sous tes pieds. Ainsi il ne tarrivera point, par Je fait dune pensée déréglée et peu chrétienne, ce qui est marqué en un autre psaume. Après avoir parlé de léclat des Ziphéens, le Prophète ajoute: « Vos pensées sont étrangement profondes ». Oui, je le répète: « Vos pensées sont étrangement profondes: limprudent ne les comprendra pas ; linsensé nen saisira pas le sens ». Quest-ce quil ne comprendra pas? le voici : « Les méchants sélèveront comme lherbe, et tous ceux qui commettent liniquité paraîtront;et, finalement, ils périront à jamais dans la suite de tous les siècles ». Léclat des méchants les a fascinés, et ils ont dit en eux-mêmes: Les méchants sont en honneur; à ce trait, il me semble que Dieu les aime. Entraînés alors par le désir de partager la gloire temporelle des méchants, ils se sont précipités dans le mal, et leur perte ne sera 1. Esth. XIV, 16. 2. Ps. LXI, 11. 3. Id. XCI, 68. point de quelques instants, comme leur éclat, mais elle durera autant que les siècles des siècles. En voici la raison : Limprudent ne comprendra pas, et linsensé ne pénétrera pas les secrets de lavenir, parce quil nentre pas dans le sanctuaire du Seigneur pour en avoir lintelligence; et, parce que cette intelligence est difficile à acquérir, ce psaume commence par nous faire voir David caché au milieu des Ziphéens, ne désirant nullement leur éclat, mais surtout pratiquant lhumilité, afin de posséder en Dieu une beauté secrète et cachée, Quel est donc le titre de ce psaume ? Quy est-il dit de David? : « Pour la fin, dans les hymnes, » cest-à-dire, dans les louanges. Et quelles louanges? « Le Seigneur me la donné, le Seigneur me la ôté; il a été fait selon son bon plaisir: que son saint nom soit béni 1! » La perte de tous ses biens était-elle une preuve que Job était desséché ? Non ; les feuilles étaient tombées, mais la racine restait toujours vigoureuse. Donc, « pour la fin, dans les hymnes ». Et ensuite? « Intelligence à David ». Intelligence, par opposition à ces autres paroles: «Limprudent ne connaîtra pas ces choses, et linsensé ne les comprendra point. Intelligence à David, lorsque les Ziphéens vinrent trouver Saül, et lui dirent: Est-ce que David ne sest point retiré chez nous? » Que David soit caché chez vous, si vous le voulez; mais que, du moins, votre gloire ne soit pas la sienne. Ecoute donc sa prière. 4. « Dieu, sauvez-moi par votre nom, et jugez-moi par votre puissance 2». Que lEglise, cachée parmi les Ziphéens, redise ces paroles. Quelles se retrouvent aussi sur les lèvres de ce corps chrétien, qui renferme dans son coeur le trésor de ses bonnes oeuvres, et y conserve lespérance de la récompense immortelle promise à ses mérites. Que lEglise dise donc : « O Dieu, sauvez-moi par votre nom, et jugez-moi par votre puissance ». O Christ, vous êtes venu sur la terre; vous y êtes apparu dans lhumilité: vous avez été méprisé, flagellé, crucifié, mis à mort ; mais, trois jours après, vous êtes ressuscité : le quarantième jour vous êtes monté aux cieux; vous êtes assis à la droite de votre Père, et personne ne vous y voit. Puis, vous on avez fait descendre le Saint-Esprit, et ceux qui en étaient dignes lont reçu. Brûlant du feu 1. Job, I,
21. 2. Ps. LIII, 3. 579 de votre amour, ils se sont répandus au milieu des nations pour annoncer au monde la gloire de votre humilité : je vois votre nom placé au-dessus de tous les noms, le genre humain en connaît la grandeur; et pourtant, lon ne nous a annoncé que votre faiblesse. LApôtre des nations, saint Paul, a déclaré ne savoir rien autre chose, parmi nous, que Jésus et Jésus crucifié 1 : par là il voulait nous exciter à préférer les ignominies du Sauveur à la gloire et à léclat des Ziphéens. cependant le même apôtre ajoute, en parlant du Christ: « Quoiquil soit mort à cause de sa faiblesse, il vit néanmoins par la puissance de Dieu 2 ». Il est donc venu mourir par infirmité, et il viendra juger par la puissance de Dieu : mais la faiblesse même de sa croix a environné son nom dune brillante auréole de gloire. Quiconque ne croira pas à ce nom, que la faiblesse a illustré, sera saisi dépouvante, quand Jésus-Christ viendra juger le monde dans léclat de sa puissance. Faible autrefois, mais revêtu de force au jour du jugement, puisse-t-il ne point nous jeter à la gauche, quand il viendra vanner son grain; et, pour cela, puisse-t-il nous sauver par son nom, et nous juger par sa puissance ! Quel est lhomme assez téméraire pour oser dire à Dieu: « Jugez-moi? » Quand on veut maudire un homme, ne lui dit-on pas: « Que Dieu te juge? » Oui, ce serait une véritable malédiction, sil te jugeait dans sa puissance, sans te sauver par son nom; mais sil te sauve dabord par son nom, il te jugera ensuite favorablement; sois tranquille : un pareil jugement naboutira point pour toi à la punition éternelle, il ne servira quà te séparer des méchants. Le Psalmiste sexprime ainsi en un autre endroit: « O Dieu , jugez-moi et séparez ma cause de celle du peuple qui nest pas saint 3 ». Quest-ce à dire : « Jugez-moi? » Distinguez-moi des Ziphéens, au milieu desquels je me trouve caché ; je supporte aujourdhui leur éclat mais vienne bientôt pour moi le moment de briller. Léclat de la leur na duré quun instant; elle a disparu dès que lherbe sest desséchée. De quel éclat brillerai-je à mon tour? « Ils seront plantés dans la maison du Seigneur: ils fleuriront dans les palais de notre Dieu 4 ». Nous fleurirons donc aussi, mais notre beauté ne se flétrira pas : elle sera pareille à la beauté des 1. I Cor. II, 2. 2. II Cor. XIII, 4. 3. Ps. XLII, 1. 4. Id. XCI, 14. feuilles de cet arbre planté sur le bord de leau, et dont il est écrit : « Et ses feuilles ne tomberont pas 1 ». Donc: « O Dieu, sauvez-moi par votre nom ; jugez-moi dans votre puissance ». 5. « O Dieu, écoutez ma prière: prêtez loreille aux paroles de ma bouche ». Que les paroles de ma bouche parviennent jusquà vos oreilles, parce que je ne vous demande point léclat des Ziphéens. « Prêtez loreille aux paroles de ma bouche». Prêtez loreille, car ma prière a beau retentir à loreille des Ziphéens, ils ne lécoutent pas, parce quils ne la comprennent pas. La possession des biens temporels est pour eux un sujet de joie, mais ils ne savent nullement désirer les biens éternels. Que ma prière arrive jusquà vous, poussée hors de moi et portée vers vous par le désir de jouir de vos éternels bienfaits: je la dirige vers vous; aidez-la à y parvenir, à ne pas sarrêter au milieu de sa course, à ne point retomber à terre. Lors même que vous ne maccorderiez point ce que je sollicite de votre miséricorde, je ne me troublerai pas; car, jen suis sûr, je lobtiendrai de vous un jour. Il est dit quun homme, se trouvant dans le péché, a prié Dieu, et que, pour son plus grand bien, il na pas été exaucé. Le désir des biens temporels lavait porté à prier Dieu; et parce quil se trouvait plongé dans les tribulations de cette vie, il aurait souhaité voir le terme de ses peines et le retour de sa passagère prospérité : cest pourquoi il sécria « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi mavez-vous abandonné? » Ce sont les propres paroles du Christ, paroles adressées par lui à Dieu en faveur de ses membres. « Le cri de mes péchés », dit-il encore, « éloigne de moi le salut: je crie pendant le jour, et vous ne mécoutez pas; je crie pendant la nuit, et vous ne mexaucez pas, afin de minspirer la sagesse 2 ». Cest-à-dire: Je crie vers vous la nuit; et, si vous ne mexaucez pas, ce nest point pour me laisser dans mon imprudence, cest au contraire pour menseigner la sagesse ; cest pour mapprendre ce que je devais vous demander, Je vous demandais, en effet, des choses qui auraient pu contribuer à me rendre malheureux. O homme, tu demandes des richesses. Tu ne sais donc pas combien dautres hommes les richesses ont rendus 1. Ps. I, 3 2. 580 malheureux? Te seraient-elles plus profitables ? Des pauvres nombreux ont trouvé leur sécurité à rester inconnus; à peine étaient-ils devenus riches, à peine avaient-ils brillé aux regards du monde, que déjà des hommes, plus puissants queux, en faisaient leur victime et leur proie, Sils avaient compris le réel avantage de demeurer dans la solitude et loubli du monde, ils ne se seraient point trouvés exposés aux dangereuses convoitises de gens qui les recherchaient, non pour ce quils étaient, mais pour ce quils possédaient. En fait de biens temporels, nous vous avertissons et nous vous prions dans le Seigneur de ne rien demander en particulier, mais dattendre de la bonté de Dieu ce quil sait vous être utile. Car vous ignorez absolument ce qui vous convient le mieux. Ce qui vous plairait davantage vous serait souvent nuisible, et vous trouverez parfois votre profit en ce qui vous sourit le moins. Vous êtes malades; ne prescrivez pas vous-mêmes au médecin les remèdes quil doit vous appliquer. Le docteur des nations, lapôtre saint Paul lui-même a dit: « Nous ne savons ce que nous devons demander ». A plus forte raison lignorons-nous nous-mêmes. Il lui semblait quil priait dune manière convenable, quand il conjurait le Seigneur de lui ôter laiguillon de la chair, cet ange à qui Dieu avait permis de le souffleter, afin quil ne pût senorgueillir de la grandeur de ses révélations. Comment le Tout-Puissant répondit-il à sa prière? Lui accorda-t-il ce quil demandait? Non; il ne fit que ce qui était le plus avantageux pour lApôtre. Voici sa réponse : « Jai prié par trois fois le Seigneur de léloigner de moi, et il ma répondu: Ma grâce te suffit, car linfirmité sert à perfectionner la vertu 2 ».Jai appliqué le remède sur le mal: je sais quand je lai appliqué, cest à moi de savoir quand il faudra lôter. Le malade ne doit ni se retirer dentre les mains du médecin, ni lui donner des conseils. Ainsi faut-il raisonner et agir dans toutes les circonstances de la vie. Les tribulations taccablent? si tu sers bien Dieu, tu te rappelleras quil sait ce qui convient à chacun. Tu nages dans les eaux de la prospérité? prends surtout soin quelle ne gâte pas ton coeur, et ne téloigne pas de celui qui ta rendu heureux. David, comprenant ces choses, dit à Dieu : « Seigneur, 1. « écoutez ma prière: rendez-vous attentif aux paroles de ma bouche ». 6. « Car les étrangers se sont élevés contre moi 1 ». Quels étrangers? Est-ce que David nétait pas juif, et de la tribu de Juda? Ziph appartenait à la même tribu et à la même nation. Comment les Ziphéens pouvaient-ils être des étrangers? Par rapport au pays, à la tribu, à la parenté, ils ne létaient pas ; mais ils létaient quant à léclat. En veux-tu la preuve? Dans un autre psaume, on désigne sous le nom denfants étrangers « ceux dont la bouche est remplie de paroles vaines, et dont la droite est une droite diniquité ». Le Psalmiste rend ensuite compte de léclat des Ziphéens. « Dans leur jeunesse, leurs enfants sont comme de nouveaux plants darbres; leurs filles sont ornées et parées comme un temple ; leurs celliers sont pleins et regorgent de lun dans lautre; leurs brebis sont fécondes et fertiles ; leurs vaches sont grasses ; il ny a dans leurs haies ni passage, ni lacune, et lon nentend aucun cri dans leurs places publiques».Voilà bien les Ziphéens : voilà bien ceux qui brillent pour un temps. « Ils ont proclamé bienheureux le peuple qui possède toutes ces choses ». Nest-ce point à juste titre quon leur donne le nom détrangers? Et toi, qui es caché au milieu des Ziphéens, que dis-tu? « Bienheureux le peuple qui a pour Dieu le Seigneur 2 ». Cest cette pensée qui a dicté et porté vers le trône de lEternel la prière du Prophète : « O Dieu, rendez-vous attentif à ma voix, parce que les étrangers se sont élevés contre moi, et que les puissants ont cherché mon âme ». 7. Mes frères, tous ceux qui bornent leurs espérances à ce bas monde, travaillent dune nouvelle manière à la perte des saints qui ne partagent point leurs folles illusions. Maintenant, rien ne les sépare les uns des autres: ils vivent tous ensemble, mais ils sont singulièrement opposés les uns aux autres: ceux-ci ne recherchent que les biens temporels et les joies fugitives de la terre ; ceux-là placent leur plus ferme espérance dans le Seigneur Dieu. Les Ziphéens semblent être daccord avec toi, mais ne te fie pas trop à leurs pacifiques apparences : le temps de se montrer tels quils sont réellement nest pas venu : quune occasion se présente, quon blâme quelquun dentre eux de son éclat 1. Ps. LIII, 5. 2. Id. CXLIII, 7, 15. 581 mondain, je ne dis pas que celui-là offensera lévêque, mais jaffirme quil ne sapprochera pas même de lEglise, dans la crainte de perdre un peu de cet éclat passager. Pourquoi vous parlé-je ainsi, mes frères? Parce quau nom de Jésus-Christ vous mécoutez tous aujourdhui volontiers; et, parce que vous comprenez mes paroles, vous y donnez votre approbation : vous napplaudiriez pas à mon discours si vous nen saisissiez point parfaitement le sens. Mais cette intelligente disposition desprit doit porter des fruits : en portera-t-elle? on le verra dans loccasion. Lon dit que vous êtes des nôtres : néanmoins, sil survient une tentation, ne passerez-vous pas subitement dans les rangs des étrangers, et ne pourra-t-on pas dire de vous : « Les étrangers se sont élevés contre moi, et les puissants ont cherché mon âme? » Ne devra-t-on pas vous appliquer encore ces autres paroles : « Ils nont point eu Dieu en vue? n Peut-il vraiment avoir Dieu en vue, celui qui ne porte ses regards que vers les choses de la terre, qui cherche à entasser trésor sur trésor, à multiplier ses troupeaux, à remplir ses celliers, à dire à son âme : « Tu as des biens en abondance, réjouis-toi, fais bonne chère, rassasie-toi? » Peut-il avoir Dieu en vue, celui qui se glorifie de la sorte, et qui brille ainsi de léclat des Ziphéens, celui qui mérite par là de sentendre dire: « Insensé », cest-à-dire homme dépourvu dintelligence, homme imprudent; cette nuit même on te redemandera ton âme : à qui passeront tous les biens que tu avais amassés pour elle 1? Ils mont point eu Dieu en vue ». 8. « Car voilà que Dieu vient à mon secours 2 ». Et ceux au milieu desquels je suis caché ne le savent pas. Sils avaient Dieu en vue, ils comprendraient comment le Seigneur me vient en aide, car il vient au secours de tous les saints ; mais ce secours est intérieur, et les hommes ne laperçoivent pas. Comme les impies trouvent, dans leur conscience, la source des plus grandes peines, ainsi les justes trouvent, dans la leur, la source des plus grandes joies. «Notre gloire », dit lApôtre, est dans le témoignage de notre conscience 3 ». Cest dans lintérieur de sa conscience, et non dans léclat extérieur des Ziphéens, que se glorifie celui qui dit: « Car le Seigneur vient à mon secours ». 1. Luc, XII, 20. 2. Ps. LIII, 6. 3. II Cor. I, 12. Si éloigné de moi que soit lobjet de mes espérances, le secours, dont je suis aujourdhui favorisé de sa part, me comble de joie, et ces délices, qui surabondent maintenant en moi, me font comprendre combien sont injustes ces paroles de certains hommes : « Qui est-ce qui nous a montré des biens? Seigneur, la lumière de votre visage est imprimée sur nous. Vous avez répandu la joie dans mon coeur 1 ». « Vous avez répandu la joie », non sur ma vigne, ou mes troupeaux, ou mon aire, ou ma table, mais « dans mon coeur : car le Seigneur vient à mon secours » Comment vient-il à ton secours? « Et le Seigneur est le protecteur de mon âme ». 9. « Faites retomber sur mes ennemis le mal quils veulent me faire 2 ». Si brillants quils soient, si vif éclat quils projettent aujourdhui, ils seront plus tard jetés au feu. « Et dispersez-les par votre puissance n. Pour le moment, tu les vois florissants, tu les vois sélever de terre comme lherbe verdoyante ne sois ni assez imprudent ni assez insensé pour te laisser éblouir par de telles apparences; tu périrais éternellement 3 ». Car : « Faites retomber sur mes ennemis le mal quils veulent me faire ». Si, en effet, tu appartiens au corps de David, il les dispersera par sa puissance. Le bonheur de ce monde leur sourit, mais Dieu emploiera son pouvoir à les faire périr. Toutefois, leur joie et leur perte seront dinégale durée lune nest que passagère, lautre sera éternelle : lune provient de la possession de biens trompeurs; lautre les condamnera à de véritables tourments. « Seigneur, dispersez par votre puissance » tous ces hommes que vous avez tolérés dans votre faiblesse. 10. « Je vous offrirai des sacrifices volontaires 4 ». Peut-on comprendre, sur le dire dun autre, quel est ce bien du coeur de lhomme, si ou ne le connaît par une expérience personnelle? Quel sens donner à ces paroles: « Je vous offrirai des sacrifices volontaires? » Je vais vous le dire : comprenez-moi, si vous le pouvez et comme vous le pourrez; et, si vous ne le pouvez, du moins croyez-moi, et priez Dieu de vous accorder la grâce de saisir ma pensée. Devons-nous passer outre sans vous avoir expliqué ce verset? Je lavoue à votre charité, le goût que jy trouve minvite assez de lui-même à vous en parler, 1. Ps. IV, 6, 7. 2. Id. LIII, 7. 3. Id. XCI, 7, 8. 4. Id. LIII, 8. 582 et je rends grâces à Dieu de ce que vous prêtez à mes paroles une si grande attention. Si je mapercevais que vous éprouvez de lennui à mentendre, je me tairais : néanmoins, et autant que Dieu men ferait lai grâce, je men entretiendrais dans le secret de mon âme. Vienne donc sur mes lèvres lexpression des pensées de mon coeur; que ma parole les manifeste au grand jour! Expliquons, comme nous le pourrons, ces quelques mots : « Je vous offrirai des sacrifices volontaires ». De quel sacrifice est-il ici question, mes frères? Quelle offrande digne de lui ferai-je au Seigneur pour le remercier de ses bienfaits? Irai-je chercher comme victime la brebis la plus grasse du troupeau? Choisirai-je un bélier? Aviserai-je le plus beau boeuf de létable ou rapporterai-je des parfums du pays de Saba? Que faire? Que lui offrir, sinon ce quil dit lui-même: « Le sacrifice de louanges mhonorera 1 ». Quest-ce à dire: « Volontaire? » Jaime gratuitement lobjet de mes louanges. Je loue Dieu, et je mets mon bonheur dans laccomplissement de ce devoir : jy trouve ma joie, car celui que je loue est le sujet de ma gloire. Mais, en cela, je ne ressemble aucunement à ces amateurs de farces théâtrales, qui saluent de leurs acclamations un cocher, un chasseur, le premier histrion venu, qui invitent les autres témoins de ces farces à les imiter et à crier comme eux, et qui, à la fin, sont trop souvent réduits à rougir de la défaite de leurs coryphées. Il ne doit pas en être ainsi quand nous louons Dieu : que notre louange soit volontaire : aimons-le sincèrement: aimons-le, louons-le gratuitement. En parlant de la sorte, nous voulons dire : pour lui-même, et non pour autre chose. Si tu loues Dieu pour obtenir de lui quelque autre chose, tu ne laimes pas gratuitement. Ne rougirais-tu pas de ne devoir quà tes richesses laffection de ta femme? Naurais-tu pas lieu de craindre quelle se rende coupable dadultère dans le cas où tu deviendrais indigent? Si tu exiges dune épouse un amour gratuit, seras-tu admis à aimer Dieu dune manière intéressée? O avare, quelle récompense le Seigneur te réserve! Il ne te donne pas la terre; mais, en se donnant lui-même à toi, il te donne celui qui a fait le ciel et la terre. «Je vous offrirai des sacrifices volontaires n. Ne lui en offre point de forcés; car si ta louange 1. Ps. XLIX, 25. est intéressée, elle est par là même forcée. Si, en effet, tu possédais ce qui charme ton coeur, tu ne louerais pas Dieu. Ecoute bien ce que je dis. Tu loues Dieu, par exemple, pour obtenir de lui une fortune considérable : si tu connaissais un autre moyen de te la procurer, la demanderais-tu à Dieu? Lui offrirais-tu le tribut de tes hommages? Donc, en louant Dieu à propos de la fortune que tu veux acquérir, tu le loues forcément et non pas dun plein gré, car alors tu aimes autre chose que lui. Voilà pourquoi le Prophète a dit: « Je vous offrirai des sacrifices volontaires . Méprise toutes choses, considère Dieu avant tout. Les bienfaits tirent leur prix de celui-là même qui nous les distribue, car tous les biens temporels nous viennent de sa main généreuse : aux uns, il les accorde pour leur bonheur; aux autres, pour leur malheur : à tous il les accorde suivant la hauteur et la profondeur de ses jugements. En présence de ces impénétrables jugements de Dieu, lApôtre se sentait saisi dépouvante et sécriait: « O profondeur de la sagesse et de la science de Dieu ! Que ses jugements sont incompréhensibles! Que ses voies sont impénétrables! Qui est-ce qui peut sonder toutes ses voies ou comprendre tous ses desseins 1 ! » Il sait donc quand il enrichit et qui il enrichit, quand il appauvrit et qui il appauvrit. Demande-lui aujourdhui ce qui plus tard te sera utile, ce qui te sera éternellement avantageux. Pour lui, aime-le gratuitement. Pourrait-il te donner quelque chose de meilleur que lui-même? Si, parmi ses bienfaits, tu trouves mieux que lui, demande-le. « Je vous offrirai des offrandes volontaires ». Pourquoi, « volontaires? » Parce quelles seront gratuites. Quest-ce à dire : gratuites? « Et je confesserai votre nom, Seigneur, parce quil est bon » : pour nul autre motif que sa bonté même. Le Prophète dit-il : Seigneur, je rendrai hommage à votre nom, parce que vous maccordez des terres fertiles, de lor et de largent, dimmenses richesses, une fortune considérable, déclatantes dignités? Non. Que dit-il donc? « Jexalterai votre nom parce quil est bon ». Je ne trouve rien de meilleur que votre nom; « cest pourquoi, Seigneur, je lui rendrai hommage parce quil est bon ». 11. « Car vous mavez délivré de toute Rom. XI, 33, 34. 583 affliction 1 ». Par là, jai compris que votre nom est bon. Si javais pu le connaître avant dêtre éprouvé par la tribulation, elle ne maurait pas sans doute été nécessaire; mais Dieu la permise pour me donner un salutaire avertissement : une fois averti, jai loué votre saint nom. En effet, je naurais point su où je me trouve, si je navais appris à connaître ma faiblesse. Vous mavez donc délivré de toutes mes peines, « et jai porté mes regards sur mes ennemis ». Jai considéré ces Ziphéens : mon coeur sest élevé au-dessus de leur éphémère beauté; jai passé outre et je suis parvenu jusquà vous : de là, jai jeté les yeux sur ces Ziphéens, et jai vu que « toute chair est pareille à lherbe des champs », et que « tout léclat de lhomme ressemble à léclat de la fleur champêtre 2 » Cest ce que le Prophète avait déjà dit ailleurs : « Jai vu u limpie élevé comme les cèdres du Liban jai passé, et il nétait déjà plus ». « Il nétait déjà plus ». Pourquoi? Parce que tu étais passé : tu étais passé, parce que tu navais 1. Ps. LIII, 9. 2. Isa. XL, 6. pas inutilement entendu ces paroles : Elève ton coeur; parce que tu nétais pas resté sur la terre où tu pouvais te corrompre; parce que tu avais élevé ton âme jusquà Dieu; parce que tu tétais élevé au-dessus des cèdres du Liban. De la hauteur où tu tétais placé, tu avais jeté les yeux sur limpie, et il nétait déjà plus. Tu lavais cherché, et il était devenu impossible de le trouver 1. Tu nes plus désormais sujet à souffrir, parce que tu es entré dans le sanctuaire de Dieu, et que tu as pénétré les mystères de lavenir 2. Telle est la conclusion que tire le Psalmiste : « Et jai porté mes regards sur mes ennemis ». Efforcez-vous donc, mes frères, dentrer dans les mêmes dispositions desprit : ouvrez vos coeurs, rendez plus clairvoyants les yeux de votre âme, apprenez à aimer Dieu dune manière gratuite, à mépriser le temps présent, à offrir à Dieu un sacrifice volontaire de louanges, afin quaprès vous être placés au-dessus de léclat passager des mondains, vous puissiez dominer du regard tous vos ennemis.
|