II TIMOTHÉE III

Précédente Accueil Remonter Suivante

Accueil
Remonter
PRÉFACE
I TIMOTHÉE I
I TIMOTHÉE II
I TIMOTHÉE III
I TIMOTHÉE IV
I TIMOTHÉE V
I TIMOTHÉE VI
I TIMOTHÉE VII
I TIMOTHÉE VIII
I TIMOTHÉE IX
I TIMOTHÉE X
I TIMOTHÉE XI
I TIMOTHÉE XII
I TIMOTHÉE XIII
I TIMOTHÉE XIV
I TIMOTHÉE XV
I TIMOTHÉE XVI
I TIMOTHÉE XVII
I TIMOTHÉE XVIII
II TIMOTHÉE I
II TIMOTHÉE II
II TIMOTHÉE III
II TIMOTHÉE IV
II TIMOTHÉE V
II TIMOTHÉE VI
II TIMOTHÉE VII
II TIMOTHÉE VIII
II TIMOTHÉE IX
II TIMOTHÉE X

HOMÉLIE III. PROPOSEZ-VOUS POUR MODÈLE LES SAINES INSTRUCTIONS QUE VOUS AVEZ ENTENDUES DE MOI SUR LA FOI ET LA CHARITÉ QUI EST EN JÉSUS-CHRIST. GARDEZ, PAR LE SAINT-ESPRIT QUI HABITE EN NOUS, LE PRÉCIEUX DÉPOT QUI VOUS A ÉTÉ CONFIÉ. VOUS SAVEZ QUE TOUS CEUX QUI SONT EN ASIE SE SONT SÉPARÉS DE MOI : PHIGÉLE ET HERMOGENE SONT DE CE NOMBRE. QUE DIEU DONNE MISÉRICORDE A LA MAISON D'ONÉSIPHORE, PARCE QU'IL M'A SOUVENT SOULAGÉ ET QU'IL N'A PAS ROUGI DE MES CHAÎNES; MAIS QU'ÉTANT VENU A ROME, IL M'A CHERCHÉ AVEC GRAND SOIN ET IL M'A TROUVÉ. QUE LE SEIGNEUR LUI FASSE LA GRACE DE TROUVER MISÉRICORDE DEVANT LE SEIGNEUR EN CE JOUR. CAR VOUS MIEUX QUE PERSONNE COMBIEN D'ASSISTANCES IL M'A RENDUES A ÉPHÈSE. (I, 13-18.)

 

363

 

Analyse.

 

1. Que signifie : « Formam habe sanorum verborum ? »

2. Que nous avons besoin de miséricorde pour obtenir le salut.

3. Que les jugements de Dieu sont à craindre.

 

1. Ce n'était pas seulement par lettres qu'il prescrivait à son disciple ce qu'il devait faire, mais encore par l'enseignement oral. On en voit la preuve dans beaucoup d'autres passages, tel que celui-ci : « Soit de bouche, soit par lettres » ; mais ce passage-ci le démontre encore mieux que tout autre. Il ne lui a donc pas légué un enseignement incomplet, ne le croyez pas; il lui a communiqué beaucoup d'instructions de vive voix; ce sont ces instructions qu'il lui rappelle par ces mots : « Proposez-vous pour modèle les saines instructions que vous avez entendues de moi ». Que veut-il dire par là? Je vous ai tracé, comme ferait un peintre, un portrait de la vertu et de tout ce qui plaît à Dieu ; c'est comme une règle, un archétype, une définition exacte que j'ai déposés dans votre âme. Conservez cela; et quand vous aurez à décider quelque chose concernant soit la foi, soit la charité, soit la chasteté, tirez de là vos exemples. — Vous aurez en vous-même tout ce qui vous sera nécessaire, et vous n'aurez pas besoin de consulter les autres.

« Gardez le précieux dépôt ». Comment? « Par le Saint-Esprit qui habite en nous ». Abandonnée à ses seules forces, l'âme humaine serait incapable, après avoir reçu un tel dépôt, de pouvoir le conserver. Pourquoi ? Parce que les voleurs sont nombreux et la nuit profonde. Le diable est toujours là qui nous tend des piéges; nous ne savons ni l'heure ni l'instant auquel il doit fondre sur nous. Comment donc réussirons-nous à garder ce trésor? Par le Saint-Esprit; c'est-à-dire, si nous avons le Saint-Esprit avec nous. Si nous ne repoussons pas la grâce, elle ne nous manquera point. « Si le Seigneur ne bâtit la maison, c'est en vain que travaillent ceux qui la bâtissent. « Si le Seigneur ne garde la cité, c'est en vain que veillent ceux qui la gardent ». (Ps. CXXVI, 1.) Voilà notre rempart, voilà notre garde, voilà notre refuge. — Si le Saint-Esprit habite en nous, s'il garde lui-même le dépôt, qu'est-il besoin de préceptes? C'est afin que nous conservions le Saint-Esprit, que nous le gardions, et que nous ne le fassions pas  par nos mauvaises actions. Ensuite, il énumère ses épreuves, non pour décourager disciple, mais pour affermir son coeur, que, si un jour il était lui-même aux prises avec les mêmes épreuves, il n'en fût pas surpris, en considérant son maître, et en se souvenant de tout ce qui lui était arrivé.

Il est vraisemblable qu'aussitôt après arrestation il se vit abandonné et privé toute marque de bienveillance de la part hommes, de tout appui, de tout secours, et qu'il fût trahi par les fidèles eux-mêmes et par ses amis; c'est ce qu'il veut dire par mots . « Vous savez que tous ceux d'Asie sont éloignés de moi ». Il est probable qu’il y avait à Rome beaucoup d'Asiatiques. Au d'eux, dit-il, ne m'a assisté; aucun ne m reconnu, tous se sont détournés de moi, admirez l'élévation de son âme, il se contente de marquer le fait, il n'ajoute pas une parole de blâme. Pour celui qui l'a assisté, il le loue et lui souhaite mille biens. Quant aux autres il ne les maudit pas, il dit simplement : « Phigèle et Hermogène sont de ce nombre. Que le Seigneur fasse miséricorde à la maison d'Onésiphore, parce qu'il m'a souvent soulagé, et qu'il n'a pas eu honte de me chaînes; mais qu'étant venu à Rome, il m’a cherché avec grand soin, et il m'a trouvé ». Voyez comme partout il parle de honte et nulle part de danger, pour ne pas effrayer Timothée, quoique sa situation fût pleine de périls. Il avait offensé Néron par la conversion de quelques-uns de ses familiers. A son arrivée à Rome, dit-il, Onésiphore n'a pas évité la rencontre, mais il m'a cherché avec empressement et m'a trouvé.

« Que le Seigneur lui donne de trouver miséricorde devant le Seigneur en ce jour-là. Vous savez mieux que personne combien d'assistances il m'a rendues à Ephèse ». Tels (363) doivent être les fidèles: ils ne doivent se laisser arrêter, ni par la crainte, ni par la honte, ni par la menace, mais s'entr'aider, s'assister, se secourir entre eux, comme font à la guerre les soldats d'une même armée: Car ce n'est pas tant à ceux qui sont dans le péril qu'ils sont utiles qu'à eux-mêmes, puisqu'en participant à leurs maux, ils méritent aussi de participer à leurs couronnes. Par exemple, un ami de Dieu est dans la tribulation; il souffre toutes sortes de peines avec beaucoup de fermeté ; il lutte comme un athlète courageux; pour vous, vous restez à l'abri de toute persécution, vous pouvez cependant, si vous voulez; sans mettre le pied dans le stade, partager la couronne avec l'athlète de Dieu : il vous suffit de l'assister, de lui procurer l'huile de la consolation, de l'encourager, de l'exciter. Et pour vous prouver que je dis vrai, écoutez ce que l'apôtre dit dans une autre épître : « Vous avez bien fait de vous unir à moi dans la tribulation » ; et encore : « Vous m'avez envoyé à Thessalonique une et deux fois de quoi satisfaire à mes besoins ». (Philip. IV, 14, 16.) Et comment, quoique absents, pouvaient-ils partager ses tribulations? Saint Paul le dit lui-même : « Vous m'avez envoyé une et deux fois de quoi satisfaire à mes besoins ». Il dit encore au sujet d'Epaphrodite : « Il s'est vu tout proche de la mort, exposant sa vie, afin de suppléer, par son assistance, à celle que vous ne pouviez me rendre vous-mêmes ». (Ibid. II, 30.) De même qu'auprès des rois de la terre, ceux qui combattent ne sont pas les seuls qui soient honorés, mais que ceux qui gardent les bagages ont aussi part aux récompenses, et quelquefois une part égale aux autres, bien qu'ils n'aient pas ensanglanté leurs mains, pas pris l'épée, pas même vu les rangs ennemis; de même en est-il, et à plus forte raison, dans le service de Dieu. Celui qui porte secours au combattant mourant de faim, celui qui l'assiste, qui l'encourage par ses paroles, qui prodigue tous les soins qu'on peut donner en pareille rencontre, celui-là obtient la même récompense que le combattant.

2. En m'entendant parler d'athlète, n'allez pas vous représenter un saint Paul, un homme invincible, mais quelqu'un du commun qui, s'il n'était grandement soutenu et encouragé, ne demeurerait peut-être pas ferme, et n'en gagerait peut-être pas même la lutte. De cette manière ceux qui, sans combattre eux-mêmes, sont cause de la victoire remportée, méritent bien de partager la couronne. Faut-il s'étonner si parmi les vivants celui qui prend part aux combats est appelé à partager les récompenses des combattants, lorsque cette sorte de communion n'est pas même interdite avec ceux qui sont morts, couchés dans la tombe, déjà couronnés et qui n'ont plus besoin de rien? C'est saint Paul lui-même qui le dit : « Communiquant avec les mémoires des saints ». — Comment cela est-il possible, direz-vous ? — Lorsque vous admirez un saint, lorsque vous imitez quelqu'une des belles actions qui l'ont fait couronner, vous participez à ses combats et à ses couronnes.

« Que le Seigneur lui accorde de trouver miséricorde devant le Seigneur en ce jour-là ». Il a eu pitié de moi, veut-il dire, donc il recevra à son tour miséricorde en ce jour terrible et redoutable, où nous aurons tant besoin de miséricorde. « Que le Seigneur », dit-il, « lui accorde de trouver miséricorde devant le Seigneur ». Quoi donc, y a-t-il deux Seigneurs? Nullement, nous n'avons qu'un seul Seigneur qui est Jésus-Christ, et qu'un seul Dieu. C'est un des passages dont abusent les marcionites. Mais qu'ils sachent que c'est une manière de parler familière à la sainte Ecriture et qu'elle en use fréquemment. Par exemple elle dit: « Le Seigneur a dit à mon Seigneur», et encore: «J'ai dit au Seigneur: Vous êtes mon Seigneur ». (Ps. CIX, 1, et XV, 2); et ailleurs encore : « Le Seigneur fit pleuvoir de la part du Seigneur». (Gen. XIX, 24.) Cette manière de parler indique des personnes consubstantielles, et non une différence de nature. L'Ecriture parle ainsi non pour nous faire entendre deux substances différentes l'une de l'autre, mais deux personnes de la même substance l'une et l'autre. Remarquez encore ce que dit l'apôtre : « Que le Seigneur lui accorde.... » Quoi? Rien autre chose que la miséricorde. Comme Onésiphore avait eu pitié de lui , il souhaite que Dieu ait aussi pitié d'Onésiphore. Si Onésiphore, qui s'était exposé aux dangers, avait besoin de miséricorde pour être sauvé, nous en aurons aussi besoin à bien plus forte raison.

Car il sera terrible, deux fois terrible le compte à rendre au Seigneur. — Nous aurons besoin de beaucoup d'indulgence pour ne pas nous entendre dire : « Retirez-vous de moi , je ne vous connais pas, vous qui opérez (364) l'iniquité ».; et encore : « Allez, maudits, au feu éternel, qui a été préparé pour1e diable et pour ses anges» (Matth. VII, 23 et XXV, 41); et encore : « Il y a un abîme entre vous et nous» (Luc, XVI, 26); et encore ce mot plein de terreur : « Prenez-le, et le jetez dans les ténèbres extérieures » ; et encore celui-ci qui n'est pas moins affreux : « Serviteur méchant et paresseux». ( Matth. XXII, 13 et XXV, 26.) Rien de plus terrible et de plus épouvantable que ce tribunal.; et cependant Dieu est doux et clément. Il se nomme le Dieu des miséricordes et se Dieu de la consolation , et il est bon comme personne n'est bon, il est plein de bénignité, de mansuétude et de compassion, et il ne veut pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. (Ezéch. XIII, 23.) D'où vient donc, d'où vient que ce jour est rempli de tant d'épouvante ? Un fleuve de feu coule devant sa face; les livres où nos actions se trouvent écrites, sont ouverts; ce jour est comme une fournaise ardente; les anges parcourent l'univers on tout sens, partout les feux s'embrasent. — Comment donc peut-on dire que le Seigneur est clément, qu'il est miséricordieux, qu'il est bon? — Il est bon même ainsi; c'est cela même qui montre la grandeur de sa bonté. Car par ce moyeu il nous inspire une grande terreur, afin qu'excités par cette raison nous concevions enfin le désir du céleste royaume.

Remarquez comme le témoignage qu'il rend à Onésiphore n'est pas un témoignage ordinaire et tel quel. « Souvent il m'a soulagé », dit-il. d'étais comme un athlète que la fatigue et la chaleur accablent, et il m'a rafraîchi, réconforté. — « Vous savez mieux que personne toutes les assistances qu'il m'a rendues à Ephèse ». Il m'a consolé non-seulement à Ephèse, mais aussi à Rome. Tel doit être l'homme vigilant et sobre, ce n'est pas une fois, ni deux, ni trois, qu'il doit travailler, mais toute sa vie. De même que ce n’est pas assez pour notre corps de se nourrir une fois pour subsister ensuite le reste du temps de notre vie, mais qu'il a besoin d'une nourriture quotidienne; de même notre piété veut être chaque jour entretenue par la pratique des bonnes oeuvres. Nous avons un grand besoin de miséricorde. C'est pour nous guérir de nos péchés que le bon Dieu a fait tout ce qu'il a fait; pour lui il n'a besoin de rien, c’est pour nous qu'il agit. C'est pourquoi il nous a tout révélé et expliqué, et non-seulement expliqué par des paroles mais confirmé par des oeuvres. Certes on pouvait en croire sa parole; mais pour que personne ne s'imagine que l'enfer ne soit qu'une exagération de langage et un vain épouvantail, il ajoute à sa parole l'a preuve par les faits. Comment cela? en infligeant des châtiments aux particuliers et aux nations. Cette preuve par les faits, il vous la donne tantôt en châtiant Pharaon, tantôt en versant sur la terre les eaux du déluge pour la destruction du genre humain, tantôt en répandant des torrents de feu sur des villes coupables. Et aujourd'hui  même que de méchants ne voyons-nous pas punis et châtiés? Ce sont là autant de preuves de l’existence de l'enfer.

3. Pour nous empêcher de nous endormir du sommeil de la négligence, et d'oublier ses paroles , Dieu nous donne des faits pour raviver notre souvenir et nous faire ouvrir les yeux; ainsi il nous montre ici-bas des jugements , des tribunaux, des peines. Quoi ! les hommes prendraient tant de souci du juste de l'injuste, et Dieu le souverain législateurs serait indifférent? Cela n'est pas admissible; Danses maisons des particuliers, sur la place publique; nous voyons partout des tribunaux. Un père de famille, dans sa maison, juge chaque jour ses serviteurs, il leur demande compte de leurs fautes , punit les uns et pardonne aux autres. Dans les champs, le fermier et sa femme sont jugés tous les jours. Sur son navire le capitaine exerce la justice comme le général d'armée dans son camp. Enfin on voit des tribunaux partout, on en trouverait jusque dans            les écoles où le maître juge ses disciples. Dans leur particulier comme en public. partout les hommes exercent la justice les uns envers les autres; nulle part on ne voit la justice négligée, partout au contraire il faut que l'on compte avec elle. Quoi donc, encore une fois ! parmi inclus la justice portera de tous côtés ses investigations dans les villes, dans les maisons, nul ne sera oublié; et en ce jour-là, lorsque la main de Dieu sera pleine de justice, que sa justice sera comme les montagnes de Dieu, en ce jour-là il ne serait pas tenu compte de la justice !

Et comment ce Dieu qui juge, ce Dieu juste et fort supporte-t-il le mal avec tant de longanimité, et ne le punit-il pas tout de suite? Tant que nous sommes ici-bas, il a raison d'être patient. Il use de patience pour vous attirer à (365) la pénitence ; mais si vous persistez dans votre malice, « vous amassez un trésor de colère par votre coeur dur et impénitent. (Rom. II, 5.) Si Dieu est injuste, il rend à chacun son mérite ; et il ne laisse pas sans vengeance les victimes de l'injustice; car c'est là même, une oeuvre de justice. S’il est puissant, il exerce sa justice même après la mort , et au jour de la résurrection, car c'est là l'oeuvre de la puissance. Que s'il est patient et tolérant, ne nous en troublons pas, ne disons pas : Pourquoi ne punit-il pas dès maintenant? Il y a longtemps, que l'espèce humaine n'existerait plus, si les choses se passaient de la, sorte, s'il nous faisait chaque jour, expier nos péchés, il n'y a pas un de nos jours, pas un seul qui ne soit souillé de quelque péché ; peu ou beaucoup, nous péchons tous les jours. Nul, homme n'atteindrait sa vingtième année, si la patiente bonté de Dieu était moins grande, s'il ne nous accordait pas le délai suffisant pour effacer nos péchés. Que chacun de nous donc examine avec une conscience droite tout ce qu'il a fait,qu'il passe en revue toute sa vie, et qu'il juge lui-même s'il n'a pas mérité mille châtiments et mille peines; et lorsqu'il, se, sentira porté à s'indigner de ce qu'un tel qui fait beaucoup de mal n'en est pas puni sur-le-champ, qu'il songe à ce qu'il a fait lui-même et il ne s'indignera plus. Il y a de certaines, injustices qui vous paraissent grandes, parce qu'elles, se commettent en des, choses importantes et exposées: aux regards, de tous; mais si vous examiniez bien vos propres injustices, vous arriveriez peut-être à les trouver plus graves. Ravir le bien d'autrui est toujours la même chose, que l'objet ravi soit de l’or, ou, de l'argent. C'est. la même disposition, la même intention dans les deux cas; et celui qui ravit peu, n'hésitera. pas à ravir beaucoup. S'il n’en trouve pas l'occasion, cela ne dépend pas de lui, mais uniquement du hasard des choses. Le pauvre qui en lèse un plus pauvre que lui, n'hésiterait pas à s'attaquer à un plus riche, s'il le pouvait, s'il ne le fait pas, cela, dépend de sa faiblesse et non de sa volonté.

Un tel, dites-vous, gouverne et il prend le bien de ceux qui sont soumis à son pouvoir. Et vous, dites-moi , ne prenez-vous rien ? Ne me dites pas que celui-là ravit des talents d',or, et vous seulement des oboles. Souvenez-vous qu'il est dit dans l'Evangile que les autres donnaient de l'or , et que la veuve qui ne donnait que deux oboles ne faisait pas une moindre; aumône que ceux-là. Pourquoi cela? Parce que c'est la volonté, que Dieu juge, et non le don. Et si, à propos de l'aumône, Dieu juge que deux oboles données par la pauvreté valent autant que des milliers de talents d'or offerts par l’opulence, pensez-vous qu'il juge différemment quand il s'agit du bien d'autrui que l'on dérobe? Cela serait-il conforme à la raison? De même que la veuve en donnant deux oboles égala l'aumône des autres par sa bonne volonté; de même vous, en prenant deux oboles, vous n'êtes pas moins coupable que, ceux qui prennent  des talents, et s'il faut dire quelque chose d'étonnant, vous l'êtes davantage. L'adultère est également coupable, qu'il corrompe la femme d'un roi où celle d'un pauvre homme, ou même celle d'un esclave, parce que la gravité du péché ne se juge point par la différence des personnes, mais par la méchanceté de celui qui le commet. Or, il en est de même en la matière dont nous traitons. Je trouve même plus adultère celui qui va à la première venue, que celui qui s'adresse à la reine. Car ici la richesse et la beauté, et beaucoup choses attirent mais là rien de semblable, de sorte que celui qui commet l'adultère dans le premier cas est plus adultère que l'autre.

                Autre exemple : De même que le  pire ivrogne est celui qui s'enivre de mauvais vin, de même le pire ravisseur du bien d'autrui est celui qui ne dédaigne pas de prendre même les, plus petites choses. On peut croire que celui qui prend beaucoup, dédaignerait de prendre peu; mais comment penser que celui qui prend peu s'abstiendrait de prendre beaucoup ? Il est donc plus voleur que l'autre. Celui qui ne dédaigne pas l'argent; dédaignera-t-il l'or? Donc lorsque nous accusons nos pasteurs, faisons un retour sur nous-mêmes, et nous trouverons que nous sommes plus voleurs et plus ravisseurs qu'eux, sinon par le fait; du moins par l'intention : or c'est par là qu'il faut juger de ces choses. Dites-moi, si deux, hommes étaient amenés devant les juges pour avoir volé, l'un le bien d'un pauvre, l'autre celui d'un riche, ne seraient-ils pas condamnés tous les deux- à la même peine? Et1e meurtrier, n'est-il pas également meurtrier soit qu'il ait tué,un pauvre et un estropié, soit, qu'il ait tué un homme riche et beau ? Lors donc que nous dirons : Un tel s'est (366) emparé par fraude du champ d'un tel, songeons à ce que nous faisons nous-mêmes et nous ne condamnerons pas les autres, et nous admirerons Dieu pour sa patience, et nous ne nous indignerons pas de ce que le jugement de Dieu ne fond pas sur eux aussitôt, et nous-mêmes nous serons moins prompts à faire le mal. Nous voyant sujets aux mêmes péchés que les autres, au lieu de nous indigner de leur conduite, nous nous éloignerons nous mêmes des péchés et nous obtiendrons let biens futurs en Jésus-Christ Notre-Seigneur, à qui, en même temps qu'au Père et au Saint-Esprit, gloire, empire, honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il .

 

 

Haut du document

 

 

 Précédente Accueil Remonter Suivante