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DEUXIÈME SERMON POUR LES FÊTES DE PAQUES (a). AUX ABBÉS. Sur ces paroles de l’Évangile : « Marie Madeleine et Marie mère de Jacques et Salomé achetèrent des parfums pour venir embaumer Jésus (Marc. XVI, 1). »

1. Nous avons appris de l'Apôtre que c'est par la foi que le Christ habite dans nos cœurs (Ephes. III, 17) : d'où je crois qu'il est permis de conclure que le Christ vit en nous aussi longtemps que la foi y demeure, et que, dès que notre foi est morte, on peut dire en quelque sorte que le Christ y est mort aussi. Or, ce qui prouve une foi vivante, ce sont les œuvres, selon ces paroles: « Les œuvres que mon Père m'a donné de faire rendent témoignage de moi (Joan. V, 36), » qui ne me semblent pas s'éloigner beaucoup de la pensée qu'un autre apôtre exprimait en disant (pie la foi sans les œuvres est une foi morte (Jacob. II, 20). De même que nous connaissons que le corps est en vie à ses mouvements, ainsi est-ce à ses œuvres que nous voyons que la foi est vivante. Mais la vie même de la foi c'est la charité, attendu que c'est par elle qu'elle opère, suivant ces paroles de l'Apôtre : «La foi qui opère par la charité, (Galat. V, 6), » aussi voyons-nous la foi mourir quand la charité se refroidit, de même que le corps périt quand l'âme s'en éloigne. Si donc vous voyez un homme, appliqué à des bonnes œuvres, mener gaiement une vie pleine de ferveur, soyez sûr que la foi vit en lui, car vous en avez la preuve tout à fait irrécusable. Mais il y en a qui commencent d'une manière spirituelle et qui finissent par la chair; or, nous savons que dans ceux-là l'esprit de vie ne demeure plus selon ce mot de l'Ecriture : « Mon esprit ne demeurera point pour toujours dans l'homme, parce qu'il est charnel (Gen. VI, 3). » Or, si l'esprit de Dieu ne reste plus dans un homme, il est clair que la charité ne s'y trouve plus non plus, puisqu'elle n'est répandue dans nos cœurs que par le Saint-Esprit qui nous a été donné (Rom. V, 5).

2. Or, comme je l'ai déjà dit c'est donner à la foi la vie de la charité que de lui faire produire des œuvres par cette même charité (Gal. V, 6), d'où je conclus que, dès que l'Esprit Saint s'éloigne d'une âme, c'est la mort de la foi en cette âme, car, selon l'Evangéliste, il n'y a que l'esprit

a. Nous avons rétabli d'après les anciens manuscrits et les premières éditions de saint Bernard, le titre de ses Sermons pour les fêtes de Pâques, tel qu'il était autrefois, et renvoyé aux sermons divers, celui. qui se trouvait après le troisième sermon pour les fêtes de Pâques. C'est, maintenant le quarante-quatrième des Sermons divers. Voir aussi la cinquante-huitième des mêmes sermons.

qui vivifie (Joan, VI, 6); d'ailleurs, s'il est vrai que la sagesse de la chair est une véritable mort (Rom. VIII, 13), nous ne saurions douter que ceux que nous nous réjouissions de voir vivants, parce qu'ils mortifiaient la chair par l'esprit, sont morts et dignes de nos larmes maintenant qu'ils vivent selon la chair. Aussi lisons-nous encore dans le même apôtre : « Si vous vivez selon la chair, vous mourrez : Si, au contraire, vous faites mourir par l'esprit les actions de la chair, vous vivrez (Rom. VIII, 13). Malheur donc à vous, qui que vous soyez, qui revenez à vos péchés comme un chien retourne à ce qu'il a vomi, ou comme le pourceau revient à sa bauge dans la fange. Je ne parle pas seulement de ceux qui retournent de corps en Egypte, mais de ceux qui y rentrent de cœur, de ceux qui aiment encore les plaisirs du monde, et en qui, par conséquent, la foi est morte, puisqu'ils n'ont plus la charité, car quiconque aime le monde n'a pas la charité du Père en lui (I Joan. II, 16). Qui peut être réputé mort à plus juste titre que celui qui nourrit un incendie dans son sein, le péché dans sa conscience, et ne le sent même pas, n'en est pas effrayé ne cherche point à s'en débarrasser?

3. Ainsi donc le Christ au tombeau c'est la foi morte dans une âme. Comment en agirons-nous avec lui? Que firent les saintes femme qui avaient seules conservé pour le Seigneur un amour plus ardent que tous ses autres disciples? « Elles ont acheté des aromates, pour venir embaumer Jésus ? » Etait-ce pour le ressusciter? Non, mes frères, nous savons bien qu'il ne nous est pas donné de le ressusciter; tout ce que nous pouvons faire c'est de l'embaumer. Pourquoi cela, mes frères? Pour que celui qui est mort comme lui, ne répande point une mauvaise odeur, une odeur de mort pour les autres qu'elle ne s'exhale de tous côtés et qu'il ne tombe lui même en pourriture. Que nos trois saintes femmes, l'esprit, la langue et les mains, achètent donc des parfums, car je crois que c'est à cause de ces trois femmes que Pierre reçut trois fois l'ordre de paître le troupeau du Seigneur (Joan. XXI, 16). Comme s'il lui avait été dit : Faites-le paître de l'esprit, de la bouche et des œuvres; c'est-à-dire paissez-le par la prière qui vient de l’esprit, par l’exhortation qui tombe des lèvres, et par l'exemple qui vient des œuvres.

4. L'esprit ira donc chercher es aromates, c'est-à-dire, au premier rang, le sentiment de la compassion, puis le zèle de la droiture, sans omettre, dans le nombre, l'esprit de discrétion. En effet, toutes les fois que vous voyez un de vos frères pécher, votre premier sentiment doit être un sentiment de compassion, comme étant d'ailleurs le plus naturel à l'homme, puisque nous en trouvons le motif au fond de nous-mêmes. L'Apôtre ne nous dit-il point : « Pour vous qui êtes spirituels, ayez soin de relever ce frère dans un esprit de douceur, en faisant réflexion sur vous-mêmes et en craignant d'être tentés aussi bien que lui (Gal. VI, 1). » Et le Seigneur, lorsqu'il sortait de Jérusalem, en portant sa croix, et qu'il rencontra, non pas encore toutes les nations du monde, mais quelques flemmes seulement qui pleuraient sur lui, il se tourna vers elles et leur dit : « Filles de Jérusalem, ne pleurez point sur moi; mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants (Luc. XXIII, 18.) » Remarquez, mes frères, la gradation : « sur vous » d'abord, dit-il, puis « sur vos enfants. » C'est donc sur vous, mon frère, que vous devez d'abord arrêter votre attention si vous voulez apprendre à compatir aux maux des autres, et le reprendre ensuite en esprit de douceur. Faites réflexion sur vous-mêmes, dit-il, et craignez d'être tentés à votre tour. Mais comme les exemples nous touchent toujours bien plus que les paroles et se gravent plus profondément dans nos cœurs, laissez-moi vous renvoyer à ce saint vieillard qui, en apprenant qu'un. de ses frères était tombé dans une faute, se mit à pleurer amèrement et à s'écrier : Lui aujourd'hui, et moi demain. Pensez-vous, nies frères, que celui qui pleurait ainsi sur lui-même ne sût point compatir au malheur de son frère? D'ailleurs ce sentiment de compassion sert à beaucoup à la fois, attendu qu'un esprit généreux se reprocherait de contrister quelqu'un qu'il voit inquiet pour lui.

5. Mais que faisons-nous, car il y en a plusieurs qui ont la tête dure et le cou habitué au joug, au point que, plus nous compatissons à leurs maux, plus ils abusent de notre patience et de notre compassion. Ne devons-nous point compatir. aux souffrances de la justice, comme nous compatissions au malheur de notre frère, surtout quand nous la voyons si impudemment rejetée, et provoquée avec tant d'imprudence? Je sais que si nous avons l'ombre de charité, nous ne pourrons supporter avec une âme impassible ce mépris de Dieu. C'est dans cette impatience que consiste le zèle de la justice, dont nous nous sentons transportés contre les prévaricateurs, comme si nous étions touchés d'un sentiment de pitié envers cette justice de Dieu que nous voyons foulée aux pieds.. Toutefois, il faut que la compassion ait le pas sur le zèle de la justice, autrement, dans un mouvement d'indignation, nous briserions les vaisseaux de Tharsis, nous achèverions le roseau à demi rompu, et nous éteindrions tout à fait la mèche qui fume encore.

6. Mais quand nous aurons réuni ces deux aromates, le sentiment de la compassion et le zèle de la justice, il faudra nous procurer l'esprit de discernement, de peur que lorsqu'il y a lieu à faire preuve de compassion, ce soit le zèle de la justice qui se montre, et que, faute de discernement, nous ne confondions toutes choses, au lieu de tenir prudemment compte des temps, et de montrer du zèle quand il le faut, et de savoir aussi pardonner dans l'occasion. Il n'y a que le Samaritain, pour savoir à propos tantôt verser l'huile sur les plaies, et tantôt y verser du vin. D'ailleurs, pour que vous ne pensiez pas que cette pensée est de moi seulement, écoutez le Psalmiste; il ne demande que ce que je vous demande, et dans le même ordre, quand il dit : « Enseignez-moi, Seigneur, la bonté, la discipline et la science (Psal. CXVIII, 66). »

7. Mais où pourrons-nous nous procurer ces aromates? Car la terre de notre cœur ne saurait produire de pareilles vertus, elle nous donnerait plutôt des ronces et des épines. Il nous faut donc les acheter quelque part. Mais qui nous les vendra? Ce sera celui qui a dit : « Venez, achetez sans argent et sans aucun échange, du lait et du vin. (Is. LV, 1). » Or, vous savez ce que désigne la douceur du lait, et ce que rappelle l'âpreté du vin. Mais que faut-il entendre par ces mots, acheter sans argent et sans aucun échange ? Car ce n'est pas ainsi qu'on fait dans le monde; il ne peut y avoir une autre manière d'acheter que chez l'auteur même du monde; aussi le Prophète dit-il au Seigneur : « Vous êtes mon Dieu, car vous n'avez pas besoin de nos biens (Psal. XV, 2). » Qu'est-ce donc que l'homme lui donnera en échange de la grâce, puisque, étant le maître de tout, il n'a besoin de rien? Sa grâce, il la donne gratuitement, et lors même qu'il la vend, celui qui l'achète ne la paie point, attendu que le prix que nous la payons nous reste entre les mains.

8. C'est donc avec notre volonté propre que nous devons acheter les trois aromates de l'esprit, car remarquons qu'en payant avec cette monnaie, non-seulement nous ne nous appauvrissons point, mais même nous faisons un profit considérable, puisque nous l'échangeons pour quelque chose de mieux, et que nous donnons Une volonté propre, pour en avoir une commune. Or la volonté commune, c'est la charité. Voilà donc comment nous achetons sans rien échanger, puisque nous acquérons ce que nous n'avions point, et que ce que nous avions nous le conservons en mieux. Mais comment compatir au sort de notre frère, qui ne sait compatir lui-même qu'à ses propres malheurs, dans sa volonté propre? Et comment celui qui n'aime que soi aimera-t-il la justice, et haïra-t-il l'iniquité? Il peut, il est vrai, feindre aux yeux des hommes, et même se séduire lui-même, au point de se figurer, quand il n'est conduit que par l'égoïsme et par la haine, qu'il ne cède qu'au sentiment de la compassion, et au zèle pour la justice; mais il est bien facile de voir combien sont éloignées de la volonté propre, les choses qui sont propres à la vraie charité que la volonté propre attaque de front. En effet, la charité est bienveillante et ne se réjouit pour du mal (Cor. XIII, 4). Quant à l'esprit de discernement, nous savons qu'il n'y a rien qui l'éloigne comme la volonté propre, car elle met la confusion dans le cœur de l'homme, et place un voile épais devant les yeux de la raison. Par conséquent, c'est avec la monnaie de notre volonté propre, comme je vous le disais tout à l'heure, que nous devons acheter les trois sortes d'aromates de l'esprit, c'est-à-dire les sentiments de compassion, le zèle de la justice, et l'esprit de discernement.

9. Il y a aussi trois sortes d'aromates, que la langue apporte, ce sont la modération dans la réprimande, l'abondance dans l'exhortation et l'efficacité dans la persuasion. Voulez-vous vous procurer ces aromates? Achetez-les dans le Seigneur lui-même, oui, achetez-les là, vous dis-je, et procurez-les-vous de la même manière que les premières, c'est-à-dire sans aucun échange, il ne faut pas que vous dépensiez quoi que ce soit pour vous les procurer. Achetez donc au Seigneur la modération dans la réprimande, c'est un bien, un don aussi grand que rare, car il y en a bien peu qui le possèdent : « Il y en a si peu, dit saint Jacques, qui sachent dompter leur langue (Jac. III, 8) ! » On voit bien des gens, en effet, dont l'intention est droite, et la pensée bienveillante, qui disent légèrement ce qu'on ne saurait écouter trop sérieusement. Leur parole part comme un trait qui ne saurait revenir sur ses pas, et ce mot qui aurait dû guérir, parce qu'il semble un peu trop acerbe, exaspère et envenime le mal davantage. Si l'impudence s'ajoute à la négligence, alors elle met le comble à l'impatience, en sorte que celui qui est déjà tombé dans le bourbier, s'y enfonce davantage ; il n'ouvre plus la bouche que pour apporter des excuses, mais de mauvaises excuses à ses torts, et, semblable à un fou furieux, non-seulement il repousse, mais même il va jusqu'à vouloir mordre la main du médecin qui le panse. Il y en a beaucoup aussi qui ne savent trouver presque rien à dire, à court de paroles, il leur semble que leur langue est attachée à leur palais, ce qui, quelquefois, ne nuit pas peu, même à ceux qui les écoutent. Il y en a d'autres, au contraire, qui ne manquent pas de quoi dire, mais, ce qu'ils disent est peu goûté, et n'entre guère dans les âmes, et, comme leurs paroles manquent de grâce, tout ce qu'ils disent est presque sans résultat. Vous voyez donc combien il est nécessaire encore que vous alliez acheter ces aromates chez celui où on trouve toute sorte de bonnes choses, et toute la science nécessaire pour reprendre avec mesure, exhorter avec abondance et persuader avec efficacité.

10. Achetez donc encore ces aromates, mais avec la monnaie de la confession, c'est-à-dire en commençant par reconnaître et avouer vos propres fautes, avant de songer à reprendre les autres des leurs. Ce n'est pas un petit sacrement, c'en est au contraire un admirable, que celui de la résurrection d'une âme, n'y touchez donc point si vous n'êtes pur, et s'il se trouve que vous ne pouvez, ou plutôt puisque vous ne pouvez vous en approcher l'âme innocente, commencez par vous laver les mains parmi les hommes innocents, avant de vous approcher du sépulcre du Seigneur. Or, c'est dans la confession que toutes nos fautes sont lavées. Une fois purifié dans ses eaux, vous serez réputé innocent, et vous pourrez vous compter parmi les hommes innocents. On ne monte point à l'autel avec un vêtement ordinaire, on a soin de se revêtir d'une robe blanche avant de s'en approcher; ainsi doit-il en être de vous, lorsque vous vous approchez du sépulcre du Seigneur; il faut vous purifier, vous blanchir et prendre ensuite des vêtements de gloire, en sorte qu'on puisse vous dire : « vous vous êtes revêtu de confession et de gloire (Psal. CIII, 1). » Car là où il y a confession, il y a gloire et beauté aux yeux du Seigneur. Tels sont les aromates de la langue, dont j'avais à vous parler, la mesure dans la réprimande, l'abondance dans l'exhortation, l'efficacité dans la persuasion, tous aromates qu'il faut acheter au prix de la confession.

11. Toutefois, nous lisons (dans le Pastoral de Grégoire le Grand.) et nous apprenons par une expérience quotidienne que celui dont la vie n'est pas honorable ne peut guère s'attendre qu'à voir ses discours accueillis avec mépris. Il faut donc que la main se procure aussi ses aromates et que nous ne ressemblions point au paresseux pour qui le sage dit avec mépris, que c'est une fatigue trop grande de porter sa main même à la bouche (Prov. XIX, 24), si nous ne voulons point que celui que nous reprenons puisse nous dire : Mais vous qui instruisez si bien les autres, vous ne vous instruisez point vous-même (Rom. II, 21), vous liez, en effet, des fardeaux pesants et qu'on ne saurait porter, et vous les mettez sur les épaules des autres, tandis que vous ne voulez pas vous-même les remuer du bout du doigt (Matt. XXIII, 14). Or, je vous dis, que le discours le plus vif et le plus efficace, c'est l'exemple; il persuade facilement aux autres ce dont nous voulons les convaincre, en leur montrant que ce que nous leur demandons est praticable. Voilà pourquoi je vous dis qu'il faut que la main ait aussi ses aromates, je veux dire la continence de la chair; la miséricorde pour nos frères, la patience dans la piété. C'est ce qui a fait dire à l'Apôtre : « Vivons dans le siècle présent avec tempérance, avec justice et avec piété (Tit. II, 12). » Ce sont, en effet, les trois choses les plus nécessaires dans le genre de vie que nous avons embrassé; car nous devons la première de ces choses à nous, la seconde au prochain et la troisième à Dieu. Celui qui se livre à la fornication pèche contre son propre corps, qu'il dépouille d'une grande gloire et qu'il condamne à une honte redoutable et terrible, car il prend les membres de Jésus-Christ pour en faire ceux d'une prostituée. Mais pour moi, c'est peu de vous dire que nous devons nous abstenir de toute volupté charnelle en ce qu'il y a de honteux, j'ajoute que nous devons nous sevrer en général de toute espèce de plaisirs de la chair. Cherchez donc avant tout, mon frère, cette continence parfaite que vous vous devez à vous-même, car nous n'avons personne qui nous touche de plus près que nous-mêmes : Puis ajoutez à la continence, la miséricorde pour vos frères, attendu que vous devez vous sauver avec eux, et enfin, ayez avec les deux premiers aromates, la patience que Dieu qui doit vous sauver réclame de vous, car selon l'Apôtre : « Tous ceux qui veulent vivre avec piété en Jésus-Christ seront persécutés (II Tim. III, 12), et ce n'est qu'en passant par une foule de tribulations que nous pourrons entrer dans le royaume de Dieu (Act. XIV, 21). » Prenez donc garde de ne pas périr faute de patience, supportez tout, au contraire, pour celui qui le premier a tant souffert pour vous et auprès de qui nulle patience ne demeurera sans sa récompense, selon ce mot du Prophète « . La patience du pauvre ne sera point frustrée pour toujours (Psal. IX, 19).»

12. Or, c'est avec l'argent de la soumission qu'on doit acheter ces trois sortes d'aromates de la main, c'est elle en effet, qui dirige nos pas, et nous procure la grâce d'une sainte vie. Car, si la loi contraire, qui lutte dans nos membres est née de la désobéissance, qui ne sait que c'est par l'obéissance que la continence nous est donnée? C'est encore la soumission qui nous apprend à régler la miséricorde, elle aussi qui nous enseigne et nous donne la patience. Quand vous aurez tous ces aromates, approchez-vous alors de celui en qui la foi est morte. Mais si nous considérons quelle œuvre c'est pour nous de réveiller de son sommeil de mort celui qui en est là, combien même il est difficile de s'approcher seulement de son cœur qu'une obstination aussi dure que la pierre, et que l'impudence nous ont fermé, je crois que nous serons amenés à nous écrier aussi avec les saintes femmes : « Qui est-ce qui nous enlèvera la pierre qui ferme le sépulcre (Marc. XVI, 3) ? » Mais, pendant que dans nos préoccupations craintives nous n'osons nous approcher, nous hésitons à marcher vers unetelle merveille, il arrive bien souvent que l'oreille du Seigneur a entendu les dispositions pieuses de notre cœur et que, à un mot de sa bouche, on voit se lever, plein de vie de son sépulcre celui qui y était étendu mort. Et alors c'est l'ange même (le Dieu qui nous apparaît, la joie et le bonheur sur le visage, comme à la porte même du sépulcre, un certain éclat lumineux indique qu'il est ressuscité, on voit à sa figure le changement qui s'est opéré, l'accès nous est ouvert à son cœur; que dis-je, il nous appelle lui-même, lui-même il écarte de ses mains la pierre de son obstination, et, s'asseyant dessus, il nous montre les bandelettes dont sa foi s'était trouvée chargée, car elle est maintenant ressuscitée. Et en même temps qu'il découvre tout ce qui s'est passé dans son cœur auparavant, et confesse comment il s'était lui-même enseveli dans ce tombeau de l'âme, en dénonçant sa tiédeur et sa négligence, il dit comme l'Ange : « Venez voir le lieu où le Seigneur avait été mis (Matt. XXVIII, 6). »

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