LETTRE LXII
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LETTRE LXII. (A la fin de l'année 394.)

 

Sur une question de serment.

 

ALYPE, AUGUSTIN ET SAMSUCIUS (2), ET LES FRÈRES QUI SONT AVEC NOUS, AU BIENHEUREUX SEIGNEUR, AU TRÈS-CHER ET VÉNÉRABLE FRÈRE SÉVÈRE  (3), NOTRE COLLÈGUE DANS L'ÉPISCOPAT , ET AUX FRÈRES QUI SONT AVEC VOUS.

 

1. Lorsque nous sommes allés à Sousane pour nous y informer de ce qu'on y a fait en notre absence et contre notre volonté, nous avons reconnu que certaines choses s'étaient passées comme nous l'avions entendu dire, et que d'autres s'étaient passées autrement; mais tout ce que nous avons appris nous a paru déplorable : nous avons, dans la mesure du secours divin, remédié à ces misères en employant tour à tour les reproches, les avertissements, les prières. Ce qui nous a le plus contristés après le départ de votre sainteté, c'est qu'on ait laissé partir nos frères sans leur donner un guide pour leur retour; veuillez le pardonner et sachez que cela a été fait plus par crainte que par mauvaise intention. Comme on croyait que notre fils Timothée les avait surtout envoyés pour vous exciter contre nous, on ne voulait rien entamer jusqu'à notre arrivée qu'on espérait en même temps que la vôtre, et on ne pensait pas qu'ils partiraient sans guide. Mais cela est mal, qui en doute? Il avait été même dit à Fossor que Timothée était déjà parti avec ces mêmes frères, et c'était faux; cela pourtant n'a pas été dit par le prêtre; et il nous a été manifestement déclaré, autant que ces choses puissent l'être, que notre frère Carcédonius a tout ignoré.

2. Mais pourquoi tous ces détails ? notre fils Timothée,bouleversé de cette situation douteuse où il se trouvait malgré lui, nous fit savoir que,

 

 

2. Samsucius, évêque de Tours en Numidie , assista au concile de Carthage, en 407.

3. Nous avons parlé, dans l'Histoire de saint Augustin, de la tendre et profonde amitié qui unissait l'évêque d'Hippone et Sévère, évêque de Milève.

 

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pendant que vous le pressiez de servir Dieu à Sousane, il éclata et jura qu'il ne se séparerait jamais de vous. Comme nous lui demandions ce qu'il voulait, il répondit que ce serment l'empêchait d'être là où nous désirions qu'il fût auparavant, surtout lorsqu'il pouvait en sûreté faire usage de sa liberté. Nous lui expliquâmes qu'il ne serait point coupable de parjure si, pour éviter un scandale, il arrivait, non par son fait, mais par le vôtre, qu'il ne pût pas être avec nous, car son serment regarde sa volonté et non la vôtre, et il a avoué que vous ne lui aviez rien juré vous-même; il finit par dire, comme il convenait à un serviteur de Dieu, à un fils de l'Eglise, qu'il se conformerait sans hésitation à ce que nous aurions décidé sur son compte avec votre sainteté. C'est pourquoi nous vous demandons, nous conjurons votre sagesse, par la charité, du Christ de vous souvenir de tout ce que nous avons dit et de nous réjouir par votre réponse; car nous qui sommes plus forts, si toutefois on peut oser prononcer un tel mot au milieu de tant de tentations qui nous assiégent, nous devons, comme dit l'Apôtre : « supporter les faiblesses des infirmes (1). » Notre frère Timothée n'a point écrit à votre sainteté parce que votre saint frère a dû vous dire tout ce qui s'est passé. Souvenez-vous de nous, glorifiez-vous dans le Seigneur, bienheureux, vénérable et cher seigneur et frère.

 

1. Rom. XV, 1.

 

 

 

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