AMBROISE
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SAINT AMBROISE *

 

Ambroise vient de ambre, qui est une substance odoriférante et précieuse. Or, saint Ambroise fut précieux à l’Eglise et il répandit une bonne odeur par ses paroles et ses actions. Ou bien Ambroise vient de ambre et de sios, qui veut dire Dieu, comme l’ambre de Dieu; car Dieu par Ambroise répand partout une odeur semblable à celle de l’ambre. Il fut et il est la bonne odeur de J.-C. en tout lieu. Ambroise peut venir encore de ambor, qui signifie père des lumières et de sior, qui veut dire petit; parce qu'il fut le père de beaucoup de fils par la génération spirituelle, parce, qu'il fut lumineux dans l’exposition de la sainte Ecriture, et parce qu'il fut petit dans ses, habitudes humbles. Le glossaire dit : ambrosius signifie odeur ou saveur de J.-C. ; ambroisie céleste, nourriture des anges; ambroise, rayon céleste de miel. Car saint Ambroise fut une odeur céleste par une réputation odoriférante; une saveur, par la contemplation intérieure; il fut un rayon céleste de miel par son agréable interprétation des Ecritures; et une nourriture angélique, parce qu'il mérita de jouir de la gloire. Sa vie fut écrite à saint Augustin par saint Paulin, évêque de Nole.

 

Ambroise était fils d'Ambroise, préfet de Rome. Il avait été mis en son berceau dans la salle du prétoire; il y dormait, quand un essaim d'abeilles survint tout a coup et couvrit de telle sorte sa figure et sa bouche qu'il semblait entrer dans sa ruche et en sortir. Les abeilles prirent ensuite leur vol et s'élevèrent en l’air

 

* Tiré de la vie du saint, par Paulin, son secrétaire.

 

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à une telle hauteur que oeil humain n'était capable de les distinguer. Son père fut frappé de ce fait et dit : «Si ce petit enfant vit, ce sera quelque chose de grand. n Parvenu à l’adolescence, en voyant sa mère, et sa sueur, qui avait consacré à Dieu sa virginité, embrasser la main des prêtres, il offrit en se jouant sa droite à sa soeur en l’assurant qu'elle devait en faire autant. Mais elle le lui refusa comme à un enfant et à quelqu'un qui ne sait ce qu'il dit. Après avoir appris les belles lettres à Rome, il plaida avec éclat des causes devant le tribunal, et fut envoyé par l’empereur Valentinien pour prendre le gouvernement des provinces de la Ligurie et de l’Emilie. Il vint à Milan alors que le siège épiscopal était vacant ; le peuple s'assembla pour choisir un évêque : mais une grande sédition s'éleva entre les ariens et les catholiques sur le choix du candidat ; Ambroise y vint pour apaiser la sédition, quand tout à coup se fit entendre la voix d'un enfant qui s'écria : « Ambroise évêque. » Alors à l’unanimité; tous s'accordèrent à acclamer Ambroise évêque. Quand il eut vu cela, afin de détourner l’assemblée de ce choix qu'elle avait fait de lui, il sortit de l’église, monta sur son tribunal et, contre sa coutume, il condamna à des tourments ceux qui étaient accusés. En le voyant agir ainsi, le peuple criait néanmoins : « Que ton péché retombe sur nous. » Alors il fut bouleversé et rentra chez lui. Il voulut faire profession de philosophe : mais afin qu'il ne réussît pas on le fit révoquer. Il fit entrer chez lui publiquement des femmes de mauvaise vie, afin qu'en les voyant le peuple revînt sur son élection; mais considérant qu'il ne venait pas à ses fins, (437) et que le peuple criait toujours : « Que ton péché retombe sur nous, » il conçut la pensée de prendre la fuite au milieu de la nuit. Et au moment où il se croyait sur le bord du Tésin, il se trouva, le matin, à une porte de Milan, appelée la porte de Rome. Quand on l’eut rencontré, il fut gardé à vue par le peuple. On adressa un rapport au très clément empereur Valentimen, qui apprit avec la plus grande joie qu'on choisissait pour remplir les fonctions du sacerdoce ceux qu'il avait envoyés pour être juges. Le préfet Probus était dans l’allégresse de voir accomplir en saint Ambroise là parole qu'il lui avait dite alors qu'il lui donnait ses pouvoirs lors de son départ : « Allez, agissez comme un évêque plutôt que comme un juge. » Le rapport était encore chez l’empereur, quand Ambroise se cacha de rechef, mais on le trouva. Comme il n'était que catéchumène, il fut baptisé et huit jours après il fut installé sur la chaire épiscopale. Quatre ans après, il alla à Rome, et comme sa sueur, qui était religieuse, lui baisait la main, il lui dit en souriant : « Voilà ce que je te disais ; tu baises la main du prêtre. »

Etant allé dans une ville pour ordonner un évêque, à l’élection duquel l’impératrice Justine et d'autres hérétiques s'opposaient, en voulant que quelqu'un de leur secte fût promu, une vierge du parti des Ariens, plus insolente que les autres, monta au tribunal et saisit saint Ambroise par son vêtement, dans l’intention de l’entraîner du côté où étaient les femmes, afin que, saisi par elles, il fût chassé de l’église honteusement. Ambroise lui dit: «Encore que je, sois (438) indigne d'être revêtu de la dignité sacerdotale, il ne vous appartient cependant point de porter les mains sur tel prêtre que ce soit. Et, vous devez craindre le jugement de Dieu de peur :qu'il né vous en arrive malheur. » Ce mot se trouva vérifié, car, le jour suivant, cette fille mourut. Saint Ambroise accompagna son corps jusqu'au lieu de la sépulture, rendant ainsi un bienfait pour un affront. Cet événement jeta l’épouvante partout. Après cela, il revint à Milan oit l’impératrice Justine lui tendit une foule d'embûches, en excitant le peuple contre le saint par ses largesses et par les honneurs qu'elle accordait. On cherchait tous les moyens de l’envoyer en exil, au point qu'un homme plus malheureux que les autres s'était laissé emporter à un degré de fureur telle qu'il avait loué une maison auprès de l’église et y tenait un char tout prêt pour, sur l’ordre de Justine, le traîner plus rapidement en exil. Mais, par un jugement de Dieu, le jour même qu'il pensait se saisir de lui, il fut emmené de la même maison lui-même en exil avec le même char. Ce qui n'empêcha pas saint Ambroise de lui fournir tout ce qui était nécessaire à sa subsistance, rendant ainsi le bien pour le mal. Il composa le chant et' l’office de l’église de Milan. En ce temps-là il y avait à Milan un grand nombre de personnes obsédées par le démon, criant à haute voix qu'elles, étaient tourmentées par saint Ambroise. Justine et bon nombre d'Ariens qui vivaient ensemble disaient qu'Ambroise se procurait des hommes à prix d'argent pour dire faussement qu'ils étaient maltraités par des esprits immondes, et qu'ils étaient tourmentés par Ambroise. (439) Alors tout à coup, un arien qui se trouvait là fut saisi par le démon et se jeta au milieu de l’assemblée en criant: « Puissent-ils être tourmentés comme je le suis, ceux qui ne croient pas à Ambroise. » Mais les ariens confus tuèrent cet homme en le noyant dans une piscine. Un hérétique, homme très subtil dans la dispute, dur, et qu'on ne pouvait convertir à la foi, entendant prêcher saint Ambroise, vit un ange qui disait à l’oreille du saint les paroles qu'il adressait au peuple. A cette vue, il se mit à défendre la foi qu'il persécutait. Un aruspice conjurait les démons et les envoyait pour nuire à saint Ambroise; mais les démons revenaient en disant qu'ils ne pouvaient approcher de sa personne, ni même avancer auprès des portes de sa maison, parce qu'un feu infranchissable entourait l’édifice entier en sorte qu'ils étaient brûlés quoiqu'ils se plaçassent au loin. Il arriva que ce même devin étant condamné aux tourments par le juge pour divers maléfices, criait qu'il était tourmenté davantage encore par Ambroise. Le démon sortit d'un démoniaque qui entrait dans Milan, mais il rentra en lui quand il quitta la ville. On en demanda la cause au démon: il répondit qu'il craignait Ambroise. Un autre, entra une nuit dans la chambre du saint pour le tuer avec une épée : c'était Justine qui l’y avait poussé par ses prières et par son argent ; mais au moment qu'il levait l’épée pour le frapper, sa main se sécha. Les habitants de Thessalonique avaient insulté l’empereur Théodose, celui-ci leur pardonna à la prière de saint Ambroise; mais la malignité des courtisans s'emparant de l’affaire, beaucoup de personnes furent tuées par l’ordre du (440) prince, à l’insu du saint. Aussitôt qu'Ambroise en eut eu connaissance, il refusa à Théodose l’entrée de l’église. Comme celui-ci lui disait que David avait commis un adultère et un homicide, le saint répondit : « Vous l’avez imité dans ses. fautes, imitez-le dans son repentir. » Ces paroles furent reçues de si bonne grâce par le très clément empereur qu'il ne refusa pas de se soumettre à une sincère pénitence. Un démoniaque se mit à crier qu'il était tourmenté par Ambroise. Le saint lui dit: «Tais-toi, diable, car ce n'est pas Ambroise qui te tourmente, c'est ton envie, tu vois des hommes monter d'où tu as été précipité honteusement mais Ambroise ne sait point prendre d'orgueil. » Et le possédé se tut à l’instant.

Une fois que saint Ambroise allait par la ville, quelqu'un tomba et resta étendu par terre ; un homme qui le vit se mit à rire. Ambroise lui dit: « Vous qui êtes debout, prenez garde' de tomber aussi. » A ces mets cet homme fit une chute et regretta bien de s'être moqué de l’autre. Une fois, saint Ambroise vint intercéder en faveur de quelqu'un, Macédonius, maître dis offices; mais ayant trouvé fermées les portes de son palais et ne pouvant entrer, il dit: « Tu viendras à ton tour à l’église et tu ne pourras y entrer, quoique les portes n'en soient pas fermées, et qu'elles soient toutes grandes ouvertes. » Après un certain laps de temps, Macédonius, par crainte de ses ennemis, s'enfuit à l’église, mais il ne put en trouver l’entrée, quoique les portes fussent ouvertes. L'abstinence du saint évêque était si rigoureuse qu'il jeûnait tous les jours, excepté le samedi, le dimanche et les (441) principales fêtes. Il faisait de si abondantes largesses qu'il donnait tout ce qu'il pouvait avoir aux églises et aux pauvres, et ne gardait rien pour lui. Il était rempli d'une telle compassion que si quelqu'un venait lui confesser ses péchés, il pleurait avec une amertume telle, que le pécheur était forcé lui-même de pleurer. Son humilité et son amour du travail allaient au point de lui faire écrire lui-même de sa propre main les livres qu'il composait, à moins qu'il n'eût été malade gravement. Sa piété et sa douceur étaient si grandes que quand on lui annonçait la mort d'un saint prêtre ou d'un évêque, il versait des larmes tellement amères qu'il était presque inconsolable. Or, comme on lui demandait pourquoi il pleurait ainsi les saints personnages qui allaient au ciel, il disait: «Ne croyez pas que je pleure de les voir partir, mais de les voir me prévenir: en outre, il est difficile de trouver quelqu'un digne de remplir de pareilles fonctions. » Sa constance et sa force d'âme étaient telles qu'il ne flattait ni l’empereur, ni les princes, dans leurs désordres, mais qu'il les reprenait hautement et sans relâche. Un homme avait commis un crime énorme et avait, été amené à saint Ambroise qui dit: « Il faut le livrer à Satan pour mortifier sa chair, de peur qu'il n'ait l’audace de, commettre encore de pareils crimes. » Au même moment, comme il avait encore ces mots à la bouche l’esprit immonde le déchira. On rapporte qu'une fois saint Ambroise allant à Rome reçut l’hospitalité dans une maison de campagne en Toscane, chez un homme excessivement riche, auprès duquel il s'informa avec intérêt de sa position. « Ma position, lui répondit cet (442) homme, a toujours été accompagnée de bonheur et de gloire. Voyez en effet, je regorge de richesses, j'ai des esclaves et des domestiques en grand nombre, je possède une nombreuse famille de fils et de neveux, tout  m’a toujours réussi à souhait; jamais d'adversité, jamais de tristesse. » En entendant cela Ambroise fut saisi de stupeur et dit à ceux qui l’accompagnaient: «Levons-nous, fuyons d'ici au plus vite; car e Seigneur n'est pas dans cette maison. Hâtez-vous, mes . enfants, hâtez-vous; n'apportez aucun retard dans votre fuite; de crainte que la vengeance divine ne nous saisisse ici et qu'elle ne nous enveloppe tous dans leurs péchés. » Ils sortirent et ils n'étaient pas encore éloignés que la terre s'entr'ouvrit subitement, et engloutit cet homme avec tout ce qui lui appartenait, jusqu'à n'en laisser autan vestige. A cette vue saint Ambroise dit: « Voyez, mes frères, comme Dieu traite avec miséricorde quand il donne ici-bas des adversités, et comme il est sévère et menaçant quand il accorde une suite ininterrompue de prospérités. » On raconte qu'en ce même lieu, il reste une fosse très profonde existant encore aujourd'hui comme témoignage de ce fait.

Saint Ambroise voyant l’avarice, qui est la racine de tous les maux, s'accroître de plus en plus dans les hommes et surtout dans ceux qui étaient constitués en dignité, chez lesquels tout était vénal, comme aussi dans ceux qui exerçaient les fonctions du saint ministère, il pleura beaucoup et pria avec les plus grandes instances d'être délivré des embarras du siècle:. Dans la joie,qu'il ressentit d'avoir obtenu ce qu'il demandait, (443) il révéla à ses frères qu'il serait avec eux jusqu'au dimanche de la Résurrection. Peu de jours avant d'être forcé à garder le lit, comme il dictait à son secrétaire l’explication du Psaume XLIIIe, tout à coup à la vue de ce secrétaire, une manière de feu léger couvrit sa tête et peu à peu entra dans sa bouche comme un propriétaire entre dans sa maison. Alors sa figure devint blanche comme la neige ; mais bientôt après elle reprit son teint accoutumé. Ce jour-là même il cessa d'écrire et de dicter, en sorte qu'il ne put terminer le Psaume. Or, peu de jours après, sa faiblesse augmenta ; alors le comte d'Italie, qui se trouvait à Milan, convoqua tous les nobles en disant qu'après la mort d'un si grand homme, il y avait lieu de craindre que l’Italie ne vînt à déchoir, et il pria l’assemblée de se transporter auprès du saint pour le conjurer d'obtenir du Seigneur de vivre encore l’espace d'une année. Quand saint Ambroise les eut entendus, il leur répondit : « Je n'ai point vécu parmi vous de telle sorte que j'aie honte de vivre, ni ne crains point de mourir, car nous avons un bon maître. » Dans le même temps quatre de ses diacres, qui s'étaient réunis ensemble, se demandaient l’un à l’autre quel serait celui qui mériterait d'être évêque après sa mort: ils se trouvaient assez loin du lit ou le saint était couché, et ils avaient prononcé tout bas le nom de Simplicien; c'était à peine s'ils pouvaient s'entendre eux-mêmes. Ambroise tout éloigné qu'il fût cria par trois fois : « Il est vieux, mais il est bon. » En entendant cela les diacres effrayés prirent la fuite, et après la mort d'Ambroise ils n'en choisirent pas d'autre que Simplicien. Il vit, auprès du lieu (444) où il était couché, J.-C. venir à lui et lui sourire d'un regard agréable. Honoré, évêque de Verceil, qui s'attendait à la mort de saint Ambroise, entendit, pendant son sommeil, une voix lui criant par trois fois : « Lève-toi, car il va trépasser. » Il se leva aussitôt, vint à Milan et administra à saint Ambroise le sacrement du corps de Notre-Seigneur; un instant après, le saint étendit, les bras en formé de croix et rendit lc dernier soupir: il proférait encore une prière. Il mourut l’an du Seigneur 399. Ce fut dans la nuit de Pâques que son corps fut porté à l’église et beaucoup d'enfants qui venaient d'être baptisés le virent les uns dans la chaire, les autres le montraient du doigt à leurs parents, montant dans la chaire; quelques autres enfin racontaient qu'ils voyaient une étoile sur son corps. Un prêtre, qui assistait à un repas avec beaucoup de convives, se mit à parler mal de saint Ambroise ; il fut à l’instant frappé d'une maladie mortelle, et il passa de la table à son lit pour y mourir bientôt après. En la ville de Carthage, trois évêques étaient à tablé et l’un d'eux ayant dit du mal de saint Ambroise, on lui rapporta ce qui était arrivé au prêtre qui l’avait calomnié ; cet évêque se moqua de cela; mais aussitôt il fut frappé à mort et expira à l’instant.

Saint Ambroise fut recommandable en bien des points. 1° Dans sa libéralité, car tout ce qu'il avait appartenait aux pauvres; aussi rapporte-t-il en parlant de soi-même que l’empereur lui demandant une basilique il lui répondit ainsi (et cette réponse se trouve dans le Décret Convenior, XXIII question 8) : «S'il me demandait quelque chose qui fût à moi, comme mes biens-fonds, mon argent, et choses semblables qui sont ma propriété, je ne ferais pas de résistance, quoique tout ce qui est à. moi appartienne aux pauvres. » 2° Dans la pureté et l’innocence de sa vie, car il fut vierge. Et saint Jérôme rapporté qu'il disait : « Non seulement nous louons la virginité, mais aussi nous la conservons. » 3° Dans la fermeté de sa foi, qui lui titi dire, alors que l’empereur lui demandait une basilique (ces mots se trouvent au chapitre cité plus haut) : « Il  m’arrachera plutôt l’âme que la foi. » 4° Par son désir du martyre. On lit à ce propos, dans sa lettre, De basilica non tradenda, que le ministre de l’empereur Valentinien lui fit dire : « Tu méprises Valentinien, je te coupe la tête. » Ambroise lui répondit : « Que Dieu vous laisse faire ce dont vous me menacez, et plaise encore à Dieu qu'il daigne détourner les fléaux dont l’Eglise est menacée afin que ses ennemis tournent tous leurs traits contre moi et qu'ils étanchent leur soif dans mon sang. » 5° Par ses prières assidues. On lit sur ce point au XIe livre de l’Histoire ecclésiastique : Ambroise, dans ses démêlés avec une reine furieuse, ne se défendait ni avec la main; ni avec des armes, mais avec des jeûnes, des, veilles continuelles, à l’abri sous l’autel, par ses obsécrations, il se donnait Dieu pour défenseur de sa cause à lui et de son Eglise. 6° Par ses larmes abondantes : il en eut pour trois causes. a) Il eut des larmes de compassion pour les fautes des autres, et saint Pantin rapporte de lui, dans sa légende, que quand quelqu'un venait lui confesser sa faute, il pleurait si amèrement qu'il faisait pleurer son pénitent ; b) il eut des larmes de (446) dévotion dans la vue. des biens éternels. On a vu plus haut qu'il dit à saint Paulin quand celui-ci lui demandait pourquoi il pleurait de la sorte la mort des saints : « Je ne pleure pas, répondit-il, parce qu'ils sont décédés; mais parce qu'ils  m’ont précédé à la gloire. » c) Il eut des larmes de compassion pour les injures qu'il recevait d'autrui. Voici comme il s'ex prime en parlant de lui-même, et ces paroles sont encore rapportées dans le décret mentionné plus haut « Mes armes contre les soldats goths, ce sont mes larmes. C'est le seul rempart derrière lequel peuvent s'abriter des prêtres, je ne puis ni ne dois résister autrement.

7° Il fut recommandable pour sa constance à toute épreuve. Cette vertu brille eu lui : 1° Dans la défense de la vérité catholique. On lit à ce sujet, dans le Livre XIe de l’Histoire ecclésiastique que Justine, mère de l’empereur Valentinien, disciple des Ariens, entreprit de jeter le trouble dans l’Église, menaçant les prêtres de les chasser en exil, s'ils ne voulaient consentir à révoquer les décrets du concile de Rimini ; par ce moyen elle se débarrassait d'Ambroise qui était le mur, et la tour de l’Église. Voici les paroles que l’on chante dans la Préface de la messe de ce saint: « Vous avez (le Seigneur) affermi Ambroise dans une si grande vertu, vous l’avez orné du haut du ciel d'une si admirable constance, que par lui les démons étaient tourmentés et chassés, que l’impiété arienne était confondue, et que la tête des princes séculiers s'abaissait humblement pour porter votre joug. » 2° Dans la défense de la liberté de l’Église. L'empereur voulant (447) s'emparer d'une basilique, Ambroise résista à l’empereur, ainsi qu'il l’atteste lui-même, et ses paroles sont rapportées dans le Décret XXIII, quest. 6 : « Je suis, dit-il, circonvenu parles comtes, afin de faire un abandon libre de la basilique; ils me disaient que c'était l’ordre de l’empereur, et que je devais la livrer, car il v avait droit. J'ai répondu : Si c'est mon patrimoine qu'il demande, emparez-vous-en; si c'est mon corps, j'irai le lui offrir. Me voulez-vous dans les chaînes? Qu'on  m’y mette. Voulez-vous ma mort? Je le veux encore. Je ne me ferai pas un rempart de la multitude, je n'irai pas me réfugier à l’autel, ni le tenir de mes mains pour demander la vie, mais je me laisserai immoler de bon coeur pour les autels. On  m’envoie l’ordre de livrer la basilique. D'un côté, ce sont des ordres royaux qui nous pressent, mais d'un autre côté, nous avons pour défense les paroles de l’Écriture qui nous disent : Vous avez parlé comme une insensée. Empereur, ne vous avantagez pas d'avoir, ainsi que vous le pensez, aucun droit sur les choses divines; à l’empereur les palais, aux prêtres les églises. Saint Naboth défendit sa vigne de son sang ; et s'il ne céda pas sa vigne, comment nous, céderons-nous l’église de J.-C. ? Le tribut appartient à César: qu'on ne le lui refuse pas; l’église appartient à Dieu, par la même raison qu'elle pie soit pas livrée à César. Si on me forçait; si on me demandait, soit terres, soit maison, soit or, ou argent, enfin quelque chose qui  m’appartînt, volontiers je l’offrirais, je ne puis rien détacher, rien ôter du temple de Dieu; puisque je l’ai reçu pour le conserver, et non pour le dilapider. » 3° Il fit preuve de (448) constance en reprenant le vice et toute espèce d'iniquité. En effet on lit cette chronique dans l’Histoire tripartite * : Une sédition s'étant élevée à Thessalonique, quelques-uns des juges avaient été lapidés par le peuple. L'empereur Théodose indigné fit tuer tout le monde, sans distinguer les coupables des innocents. Le nombre des victimes s'éleva à cinq mille. Or, l’empereur vint à Milan et voulut entrer dans l’église, mais Ambroise alla à sa rencontre jusqu'à la porte, et lui en refusa l’entrée en disant : « Pourquoi, empereur, après un pareil acte de fureur, ne pas comprendre l’énormité de votre présomption ? Peut-être que la puissance impériale vous empêche de reconnaître vos fautes. Il est de votre dignité due la raison l’emporte sur la puissance. Vous êtes prince, ô empereur, mais vous commandez à des hommes comme vous. De quel oeil donc regarderez-vous le temple de notre commun maître? avec quels pieds foulerez-vous son sanctuaire? comment laverez-vous des mains teintes encore d'un sang injustement répandu? Oseriez-vous recevoir son sang adorable en cette bouche qui, dans l’excès de votre colère, a commandé tant de meurtres? Relevez-vous donc, retirez-vous, et n'ajoutez pas un nouveau crime à celui que vous avez déjà commis. Recevez le joug que le Seigneur vous impose aujourd'hui est la guérison assurée et le salut pour vous. » L'empereur obit et retourna à son palais en gémissant et en pleurant. Or, après avoir longtemps versé des larmes, Rufin, l’un de ses généraux, lui demanda le motif d'une

 

* Liv. IX, ch. XXX.

 

si profonde tristesse. L'empereur lui dit : « Pour toi, tu ne sens pas mon mal; aux esclaves et aux mendiants les temples sont ouverts mais à moi l’entrée en est interdite. » En parlant ainsi chacun de ses mots était entrecoupé par des sanglots. « Je cours, lui dit Rufin, si vous le voulez, auprès d'Ambroise, afin qu'il vous délie des liens dans lesquels il vous a enlacé. » « Tu ne pourras persuader Ambroise, repartit Théodose, car la puissance impériale ne saurait l’effrayer au point de lui faire violer la loi divine. » Mais Rufin lui promettant de fléchir l’évêque, l’empereur lui donna l’ordre d'aller le trouver. et quelques instants après il le suivit. Ambroise n'eut pas plutôt aperçu Rufin, qu'il lui dit : « Tu imites les chiens dans leur impudence, Rufin, toi, l’exécuteur d'un pareil carnage; il ne te. reste donc aucune honte, et tu ne rougis pas d'aboyer contre la majesté divine. » Comme Rufin suppliait, pour l’empereur et disait que celui-ci allait venir lui-même, Ambroise enflammé d'un zèle surhumain : « Je te déclare, lui dit-il, que je l’empêcherai d'entrer dans les saints parvis; s'il vent employer la force et agir en tyran, je suis prêt à souffrir la mort. » Rufin ayant rapporté ces paroles à l’empereur : « J'irai, lui dit celui-ci, j'irai le trouver, pour recevoir moi-même les reproches que je mérite. » Arrivé près d'Ambroise, Théodose lui demanda d'être délié de son interdit, alors Ambroise alla à sa rencontre, et lui refusa l’entrée de l’église en disant : « Quelle pénitence avez-vous faite après avoir commis de si grandes iniquités ? » Il répondit : « C'est à vous à me l’imposer et à moi à me soumettre. » Alors comme l’empereur alléguait (450) que David aussi avait commis un adultère et un homicide, Ambroise lui dit : « Vous l’avez imité dans sa faute, imitez-le dans son repentir. » L'empereur reçut ces avis avec une telle gratitude qu'il ne se refusa pas à faire une pénitence publique. Quand il fut réconcilié, il vint à l’église et resta debout au chancel; Ambroise lui demanda ce qu'il attendait là : l’empereur lui ayant répondu qu'il attendait pour participer aux, saints mystères, Ambroise lui dit : « Empereur, l’intérieur de l’église est réservé aux prêtres seulement; sortez donc, et attendez les mystères avec les autres; la pourpre vous fait empereur et non pas prêtre. » A l’instant Théodose lui obéit. Revenu à Constantinople, il se tenait hors du chancel, l’évêque alors lui commanda d'entrer, et Théodose répondit : «J'ai été longtemps à savoir la différence qu'il y a entre un empereur et un évêque; c'est à peine si j'ai trouvé un maître qui  m’ait enseigné la vérité, je ne connais au monde de véritable évêque qu'Ambroise. »

Il fut recommandable, 8° par sa saille doctrine qui atteint à une grande profondeur. Saint Jérôme dans son livre sur les Douze Docteurs dit: « Ambroise plane au-dessus des profondeurs comme un oiseau qui s élance dans les airs; c'est dans le ciel qu'il cueille ses fruits. » En parlant de sa fermeté: il ajouta : «Toutes ses sentences sont des colonnes sur lesquelles s'appuient la foi, l’Eglise et toutes les vertus. » Saint Augustin dit en parlant de la beauté de son style, en son livre des Noces et des Contrats : « L'hérésiarque Pélage donne ces éloges à saint Ambroise : Le saint évêque Ambroise, dont les livres contiennent la (451) doctrine romaine, brilla comme une fleur au milieu des écrivains latins. » Saint Augustin ajoute : « Sa foi et ses explications très exactes de l’Ecriture n'ont même pas été attaquées par un seul ennemi. » Sa doctrine jouit d'une grande autorité, puisque les écrivains anciens, comme saint Augustin, tenaient grand cas de ses paroles.

A ce propos saint Augustin rapporte à Janvier que sa mère s'étonnait de ce qu'on ne jeunât pas le samedi à Milan, saint Augustin en demanda la raison à saint Ambroise qui lui répondit : « Quand je vais à Rome, je jeûne le samedi. Eh bien! quand vous vous trouvez dans une église, suivez ses pratiques, si vous ne voulez scandaliser, ni être scandalisé. » Saint Augustin dit à ce propos : « Plus je réfléchis sur cet avis, plus je trouve que c'est pour moi comme un oracle du ciel. »

 

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