Explication de textes:
6 - LES APOPHTEGMES
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On voit en effet, que la réponse à cette demande "Comment me sauver ? " est un conseil qui vise la perfection. Car le support des injures, l'amour des ennemis est le sommet de la charité.
12
Ces moines qui venaient visiter abba Félix avaient des laïcs avec eux. On peut penser que c'est pour cela qu'abba Félix ne veut pas répondre à leur question : ils ne vivent pas la vie retirée du moine.
15
Le chameau, animal du désert, est habitué à porter de lourdes charges. On le tient par la bride pour l'empêcher de faire ses caprices. Le moine doit porter le lourd fardeau de ses péchés et se soumettre à un guide. Cet apophtegme est une illustration du précédent.
16
Cet apophtegme, célèbre, ne peut pas être vrai, car il aurait fallu que durant trois ans, Jean ne dorme pas une seule nuit !
Cassien en donnera une autre version, plus plausible : le disciple peut dormir, et il n'y a pas de miracle, le bois sec reste bois sec (Inst. 4, 23-26). En tout cas, cet apophtegme est vrai par la leçon qu'il veut nous donner : obéissance inconditionnée.
19
L'ouverture de coeur est donc nécessaire même pour les parfaits, ceux qui ont retrouvé le Paradis, c'est-à-dire un état d'harmonie parfaite avec la création.
21
L'orgueil, pour les Pères était le vice le plus dur à déraciner, la grande maladie. L'humilité, c'est la guérison. On l'obtient en manifestant ses pensées.
22
Encore l'idée que la volonté propre est une maladie. Elle est en effet capable de résister à Dieu. Ceci se retrouvera chez Basile qui demande de mettre le désobéissant à l'infirmerie !
23
Ce sont des frères de Scété, ceux qui avaient opté pour la plus grande séparation du monde. Ils sont habillés de peaux de bêtes, ce sont donc de grands ascètes. Et pourtant, la leçon que nous donne cet apophtegme est que la soumission à un ancien est encore supérieure à tout cela et aux vertus des trois autres.
À souligner aussi la fin du texte qui montre que le monachisme bien vécu était pour les anciens analogue au martyre. La volonté propre, c'est ce à quoi l'homme tient le plus.
24
"Je préfère la maladie". Pour abba Joseph, il y a pourtant encore quelque chose de supérieur à l'obéissance inconditionnée : accepter les épreuves en disant : "merci". Car ces épreuves ne sont pas voulues, et elles sont pénibles ; et donc avec elles aussi, "on dit non à tous ses désirs égoïstes", et de plus on les reçoit avec action de grâces, comme venant de Dieu.
25
On s'étonne parfois des miracles qu'ont faits les saints. En trois mots, abba Mios en donne l'explication : Dieu donne tout ce qu'ils veulent à ceux qui ne lui refusent rien. On peut admirer à la fois cette merveilleuse tendresse du Créateur envers sa créature, et comment abba Mios l'explique d'une façon très simple.
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Chez les Pères du désert, les livres étaient rares et, comme chez les pacômiens, on les rangeait dans l'embrasure d'une fenêtre ou une étagère creusée dans un mur. C'est comme cela qu'il faut comprendre le mot "placard". Ce n'était pas un meuble fermé, et c'est pourquoi abba Sérapion a pu voir que la bibliothèque du frère était bien garnie. Or ces livres qui étaient rares, parce que copiés à la main, étaient surtout des copies de la Bible. Rares, ils étaient chers. Le frère se fait reprendre par abba Sérapion, parce qu'il en avait acheté beaucoup, alors que le superflu de ce que les frères gagnaient par leur travail devait être distribué aux pauvres, spécialement aux veuves et aux orphelins.
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Ce "vrai chemin" qu'a trouvé abba Joseph, c'est sa grande humilité qui lui a fait tout à la fois reconnaître que la Bible dépasse l'intelligence de l'homme, et avouer devant tous qu'il ne savait pas. Ce que nous n'aimons guère ! Son humilité était vraiment profonde.
Nous avons ici la preuve que ces anciens aimaient, vénéraient la Bible et cherchaient à en découvrir le sens profond. Ils jeûnaient même pour mieux la comprendre.
Une actrice, on dirait aujourd'hui une star, avait alors très mauvaise réputation. Et il en fut encore ainsi durant très longtemps : jusqu'au dix-huitième siècle, on ne les enterrait pas à l'église : ils étaient considérés comme des pécheurs publics, en état de péché mortel. Ou encore le terme "actrice" est-il un euphémisme pour désigner une prostituée. C'est pourquoi abba Pambo juge que cette actrice est damnée.
Ses larmes ont donc deux motifs : la perte supposée de cette femme, et le fait qu'il constate qu'il n'aime pas assez Dieu.
Les larmes sont un don. Elles sont le signe de l'union à Dieu, de la charité que l'on a pour Dieu. C'est en ce sens qu'entrer dans les larmes peut être dit : entrer dans la Terre promise.
"Canon", en grec, veut dire : décret, règle concernant une discipline. La réponse au disciple intrigué - ou agacé - par les pleurs de Longin, est que les pleurs sont transitoires. Le "canon" érigé par Dieu est la joie.
Court apophtegme, mais difficile à comprendre. Il fait référence à Genèse 1, 15 : "Yahvé prit l'homme et l'établit dans le jardin d'Eden pour le cultiver et le garder. C'est encore le thème du retour au Paradis qui est sous-jacent. Le deuil travaille le coeur : il le purifie, et le garde des mauvaises pensées, comme le disait l'apophtegme 36.
La joie ne vient pas de la peine, mais du feu de Dieu que les larmes et la peine aident à allumer. Car la peine établit l'âme dans l'humilité et attire l'Esprit-Saint, le feu divin.
Réponse humble et ferme. Arsène sait comme le suggérait la "Vie d'Antoine" qu'il retrouvera les hommes qu'il aime dans le coeur de Dieu.
Ceci se trouve aussi dans la "Vie d'Antoine" : N° 85.
"Ayant peur de lui répondre :"Des Cellules", nous avons dit : "De la montagne de Nitrie". Sans doute parce que les moines des Cellules dont beaucoup étaient origéniens, avaient mauvaise réputation près des Scétiotes. Le mensonge n'est pas gros car les Cellules étaient une annexe de Nitrie. Par ailleurs, il faut se souvenir de la géographie, et de la place respective des trois centres monastiques. L'abbé Achille était à Scétée, donc à quarante kilomètres des Cellules, et à soixante de Nitrie. C'est pour cela que l'abbé Achille leur dit "Vous venez de loin".
"Défends-moi contre ma langue" : c'est le "Tais-toi" d'Arsène. Et cela rappelle aussi l'épître de saint Jacques : 3, 2-12.
Au second paragraphe, on a un exemple de mélétè qui nous montre comment ces moines priaient durant leur travail : c'était une prière du coeur, toute simple, qui laissait l'esprit libre pour le travail. Remarquez l'expression : "Je m'assois avec Dieu" !
L'on voit ici que cette prière du coeur, prière profonde qui dans ce texte, ne se traduit pas par une mélétè, laisse l'esprit libre pour suivre une conversation.
Les Pères du désert vivaient de l'Evangile, et dès que l'occasion se présentait de mettre en pratique un conseil qu'ils n'avaient pas encore eu l'occasion de suivre, ils la saisissait avec joie. C'est en se rappelant Matth. 5, 40 : "Si quelqu'un veut te prendre ta tunique, laisse-lui aussi ton manteau", que le frère disait : "Fais vite avant que les frères n'arrivent".
Evidemment, ce n'est pas à prendre à la lettre, mais c'est une leçon de détachement.
"A l'office" ; comme chez les pacômiens, l'office devait être assez long, mais simple : psaumes, oraisons, prières silencieuses . Ce qui explique ce sommeil !