Bienheureux Pie IX
– Jean
Marie MASTAI FERRETTI
Nom:
MASTAI FERRETTI
Prénom:
Jean Marie (Giovanni Maria)
Pape
Pie IX
Pays: Italie
Naissance:
13.05.1792 à Senigallia
Mort: 07.02.1878 à Rome
Etat: Pape
Note: Prêtre en 1819. Evêque de Spolète en 1827, d'Imola en 1832.
Cardinal en 1840. Pape le 16 juin 1846. Exilé 17 mois à Gaète (1848-49). Dogme
de l'Immaculée Conception en 1854. Syllabus en 1864. Il convoque en 1870 le
Concile Vatican I qui proclame le dogme de l'infaillibilité pontificale. 32 ans
de pontificat, le plus long de l'histoire de l'Eglise.
Béatification:
03.09.2000 à Rome par Jean Paul II
Canonisation:
Fête: 7 février
Réf.
dans l’Osservatore Romano: 2000 n.36 p.1.6
- n.37 p.5
Réf. dans la Documentation Catholique: 2000 n.17 p.801-803
Notice brève:
Giovanni Maria Mastaï Ferretti naît en
1792 près de Rimini dans les Etats Pontificaux d'une famille d'origine
lombarde. Ordonné prêtre en 1819, il s'occupe avec charité d'un orphelinat puis
il accompagne un Nonce apostolique en Amérique Latine, ce qui constitue pour
lui une expérience missionnaire. Evêque de Spolète, puis d'Imola, il trouve le
moyen d'apaiser un climat politique tendu. Il passe pour libéral quand il est
élu Pape en 1846, à l'âge de 54 ans. Sa popularité est immense, mais l'Italie
cherche à faire son unité et un mouvement révolutionnaire l'oblige à s'exiler
17 mois à Gaète (1848-49). Contre les erreurs modernes, il publie en 1864
l'Encyclique "Quanta cura" et surtout le "Syllabus" qui
dresse l'opinion anticléricale contre lui. En cette époque où l'Eglise est
battue en brèche, il sait en revanche assurer son expansion missionnaire. En
1854, il proclame le dogme de l'Immaculée Conception, et en 1870, celui de
l'Infaillibilité pontificale, lors du Concile du Vatican. Mais Rome est
attaquée en 1870 et Pie IX cède à la violence pour éviter une effusion de sang.
Confiné dans la Cité du Vatican, il se considère désormais comme prisonnier,
mais la piété catholique entoure d'une affection grandissante ce pontife en
butte à l'adversité. Il meurt en 1878, après un pontificat de 32 ans, le plus
long de l'histoire de l'Eglise.
Notice développée
Giovanni Maria Mastaï Ferretti naît du
comte Jérôme, du même nom, et de Catherine Solazzi, le 13 mai 1792 à Senigallia
près de Rimini (Etats pontificaux). Sa famille d'origine lombarde, a la
réputation d'être 'libérale'. Lui aussi héritera de cette réputation. Il reçoit
une éducation très pieuse et studieuse, traversée par une maladie qu'on dit
être l'épilepsie, mal qui le fait renvoyer de la garde noble pontificale où il
était entré. En 1816, une mission dans sa ville à laquelle il participe éveille
en lui la vocation, mais sa maladie constitue un obstacle canonique. Pourtant
saint Vincent Pallotti lui prédit qu'il sera Pape et Pie VII intervient
personnellement pour lever l'empêchement au sacerdoce. Guéri à Notre-Dame de
Lorette, il est ordonné en 1819.
Il est d'abord recteur de l'Institut
Tata Giovanni, pour les orphelins. Il y déploie une grande charité. En 1825, il
accompagne le Nonce Apostolique au Chili et il y fait merveille. De même en
Argentine. C'est dans ces fonctions qu'il puise son amour des missions. A 35
ans, en 1827, il est archevêque de Spolète en Ombrie. La situation politique
est déjà tendue, mais il calme le jeu et déploie un zèle pastoral merveilleux,
non sans souffrir personnellement. En 1832 il est nommé au siège d'Imola qui
fut occupé jadis par Pie VII (dont il prendra le nom comme Pape). Sa
prédication est simple et belle. Il veille au bien surnaturel et matériel de
son diocèse. Il est proche du clergé et des séminaristes, s'intéresse aux
jeunes mais aussi à la vie contemplative. Lui-même est enflammé de dévotion
pour le Sacré-Cœur et la Vierge Marie. Il se montre bienveillant, mais ferme
sur les principes.
Cardinal à 48 ans, il est élu Pape à
54 ans, le 16 juin 1846. Il est précédé par sa réputation de 'libéral' et il
est accueilli triomphalement avec des 'Hosanna'. Tout est sympathique dans sa
personne, même physiquement. Il est affable, il a un sens aigu de l'humour, ce
qui lui permet de relativiser les drames, et surtout c'est un père plein de
bonté. Il commence par une amnistie pour tous les délits politiques (contre
l'avis de ses cardinaux). On ne remarque guère que dans sa première encyclique,
il condamne déjà le socialisme. Très populaire, il accorde plus de liberté à la
presse et donne un plus grand rôle aux laïcs dans ses Etats. (Rappelons qu'à
l'époque le Pape était aussi un souverain temporel; ses Etats, donnés au cours
des âges par des princes chrétiens, occupaient toute l'Italie centrale.) Mais,
s'il est pour la libération de la tutelle autrichienne en Italie, il n'est pas
pour la République, et les ultra-libéraux se retournent contre lui. Son chef de
gouvernement, le jeune comte Pellegrino Rossi, qui a eu le courage d'accepter
le poste de premier ministre alors que la révolte grondait, est assassiné le 15
novembre 1848 tandis qu'il se rendait à la chambre des députés pour y présenter
un train de réformes libérales modérées. Très choqué, le Pape capitule pour
arrêter l'effusion de sang et se réfugie à Gaète où il prolongera son exil 17
mois. En 1849 le insurgés proclament la "République romaine". En
juillet une expédition française leur reprend Rome où le Pape ne consent à
rentrer qu'en avril 1850. Il est acclamé par le peuple mais son pouvoir
affaibli ne se maintient que grâce à la présence française. Pourtant Napoléon
III, ondoyant, est un allié peu sûr.
Pie IX est attentif à tous les
secteurs de la vie de l'Église universelle. Ainsi il rétablit la hiérarchie
catholique en Angleterre et en Hollande - et plus tard en Ecosse - malgré le
tollé des Anglicans et des protestants. Il rétablit aussi le Patriarcat latin
de Jérusalem. En 1853, alors que les Catacombes sont soumises à des
déprédations inconsidérées, il crée la Commission d'archéologie chrétienne qui
arrête le massacre. Le 8 décembre 1854, il proclame le dogme de l'Immaculée
Conception. Il est ouvert à la science et à la technique (création d'une voie
ferrée aboutissant à Rome, ce à quoi s'était opposé son prédécesseur). En 1857,
malgré l'agitation créée par le 'Risorgimento', il décide de visiter ses États:
c'est la liesse, mais les problèmes politiques demeurent. Il envoie des
missionnaires en Inde, en Birmanie, en Chine et au Japon. Les oblats de Marie
Immaculée vont jusqu'au Grand Nord Canadien.
En 1863, Renan publie "La vie de
Jésus" qui obtient un grand succès. Le Pape en est très affecté. L'année
suivante, c'est l'encyclique "Quanta cura" accompagnée du Syllabus.
Les catholiques libéraux sont embarrassés, les anticléricaux triomphent. En
1869, son Jubilé sacerdotal (50 ans) lui vaut de multiples témoignages
d'affection et le 8 décembre s'ouvre le Concile du Vatican (Vatican I). Le 18
juillet 1870 est votée la Constitution "Pastor Æternus" dont le
chapitre IV définit l'infaillibilité pontificale. Le lendemain 19 juillet,
c'est la déclaration de guerre de la France à la Prusse. Pie IX doit ajourner
le Concile. Privés de la protection des troupes françaises, les États
pontificaux sont envahis. Rome est attaquée le 20 septembre. Après un petit
combat, Pie IX désireux d'éviter l'effusion de sang ordonne de hisser le
drapeau blanc. Désormais il se considère comme prisonnier au Vatican, refusant
les concessions que lui propose le gouvernement spoliateur de Victor Emmanuel,
Roi du nouvel État Italien (Loi des garanties du 13 mai 1871). En 1875, Pie IX
consacre l'Église au Sacré-Cœur. Les catholiques italiens peuvent-ils
participer à la vie politique? La réponse en 1877 est "Non expedit"
(Il ne convient pas).
Le Pape meurt le 7 février 1878. Ainsi
s'achève le plus long pontificat de l'histoire de l'Église: presque 32 ans.
Le dimanche 3 septembre de l'Année
Sainte 2000, Jean Paul II béatifie Pie IX en même temps que Jean XXIII, le
"bon Pape Jean". On a voulu opposer ces deux Papes, mais c'est mal
connaître la profonde vénération de Jean XXIII pour son prédécesseur dont il
avait continué l'œuvre avec Vatican II. Au cours d'une retraite spirituelle, en
1959, il écrivait dans son "Journal de l'âme": "Je pense toujours
à Pie IX de sainte et glorieuse mémoire, et l'imitant dans ses sacrifices, je
voudrais être digne d'en célébrer la canonisation".
"Profondément aimé", Pie IX
fut également "haï et calomnié". Pourtant lui-même fit toujours
preuve d'indulgence envers ses ennemis, mais dans sa politique, il accordait
"le primat absolu à Dieu et aux valeurs spirituelles". Il disait:
"Ma politique est: Notre Père qui es aux cieux". Il avait aussi le
sens relatif des choses de ce monde: IL aimait dire à ceux qui étaient proches
de lui: "Dans les choses humaines, il faut se contenter de faire du mieux
que l'on peut et pour le reste, s'abandonner à la Providence qui palliera aux
défauts et aux insuffisances de l'homme". Il eut à guider la barque de
Pierre parmi de violentes tempêtes. Au milieu de ces contradictions, il trouva
un réconfort dans l'abandon filial à la Vierge Marie et à la Providence, s'en
remettant à Dieu avec une confiance totale. Qui dit mieux?
Note sur le Syllabus
On reproche souvent à Pie IX ce
catalogue des erreurs modernes. Il faut cependant remarquer que ce document
n'avait pas été prévu pour être divulgué. D'autre part, parmi les erreurs
condamnées, on a pu voir quels furent les effets néfastes engendrés dans le
siècle suivant par certaines d'entre elles: le libéralisme, le nationalisme, le
scientisme et le communisme, par exemple. Enfin, à propos de la liberté de
conscience, visée elle aussi, il faut reconnaître le progrès réalisé par
Vatican II. Du temps de Pie IX, le thèse était: l'erreur n'a pas de droit. Avec
la Déclaration "Dignitatis humanæ" de Vatican II, on rappelle que la
foi procède d'un acte libre et qu'on ne peut forcer la conscience, même si elle
est dans l'erreur; tous cependant ont le devoir de rechercher la vérité et
l'ayant découverte, de s'y soumettre.
Note sur l'affaire Mortara
Ce cas est également reproché à Pie
IX. Il s'agit d'un petit bébé juif en danger de mort, baptisé par une servante
catholique et qui survit. A l'âge de sept ans, les parents veulent initier
l'enfant aux rites israélites. La servante en parle à un prêtre qui avertit le
Saint-Office, lequel fait enlever l'enfant pour assurer son éducation
chrétienne. Ceci est conforme à la législation des Etats pontificaux et au
droit canon de l'époque, mais, en pareil cas, Benoît XIV, au 18e
siècle, avait dit qu'il convenait de laisser l'enfant à la famille si celle-ci
promettait de n'exercer aucune pression sur lui. Le Saint-Office n'eut pas
cette sagesse, d'où une grande émotion chez les juifs et dans le monde, et de la
gêne chez les catholiques. Napoléon III demande au Pape de rendre le petit
Edgar Mortara à ses parents. Pie IX, tout en déclarant qu'il regrette la mesure
prise par le Saint-Office, se refuse à la rapporter. Quant à l'enfant,
lorsqu'il arrive à l'âge de choisir lui-même, il décide de rester catholique et
devient même prêtre. Reconnaissons toutefois qu'on n'agirait plus de la sorte
actuellement: La déclaration "Dignitatis humanae" de Vatican II dit:
"Aux parents revient le droit de décider, dans la ligne de leur propre
conviction religieuse, la formation religieuse à donner à leurs enfants…. Les
droits des parents sont violés lorsque les enfants sont contraints de
fréquenter des cours scolaires ne répondant pas à la conviction religieuse des
parents" (N.5)
Réponse de Jean Paul II
Faisant une allusion implicite à ces
difficultés et aux critiques face à la béatification de Pie IX, Jean Paul II
dit dans son homélie de béatification: "La sainteté se vit dans l'histoire
et aucun saint n'échappe aux limites et aux conditionnements propres à notre
humanité. En béatifiant l'un de ses fils, l'Église ne célèbre pas les choix
historiques particuliers qu'il a pris, mais elle le montre plutôt comme devant
être imité et vénéré pour ses vertus comme une louange à la grâce divine qui
resplendit en celles-ci".