PSAUME CXXIX

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EXPLICATION DU PSAUME CXXIX. 1. « DES PROFONDEURS J'AI CRIÉ VERS VOUS, SEIGNEUR. SEIGNEUR, EXAUCEZ MA PRIÈRE. »

 

ANALYSE.

 

1. Les prières, pour être bonnes, doivent partir du fond du coeur. Dieu exauce la prière ardente.

2. Nul homme; si Dieu voulait le juger à la rigueur, ne serait trouvé juste.

3. De la confiance en Dieu.

 

1. Que signifient ces mots : « Des profondeurs? » Ce n'est pas simplement la bouche, ni simplement la langue qui prononce ces mots, tandis que la pensée est errante; non, ils sortent du fond le plus intime du coeur, c'est avec un grand zèle, une grande ferveur, que la pensée les tire de ses profondeurs. Telle est, en effet, l'âme des affligés; elle remue en même temps qu'elle le couur tout entier, en invoquant Dieu avec une grande componction, et c'est pour cela qu'elle se fait écouter. Oui, de telles prières ont une grande force, et rien ne les abat ni ne les ébranle, quand même le démon viendrait à la charge avec une grande violence. De même qu'un arbre vigoureux, qui envoie de toutes parts ses racines sous terre à une grande profondeur, et en étreint rigoureusement tous les replis, résiste ainsi à toute la violence des vents, tandis que celui qui ne tient qu'à la surface du sol est ébranlé au moindre souffle qui arrive, et bientôt, arraché avec sa racine, s'en va joncher la terre; de même les prières, lorsqu'elles partent du coeur, qu'elles ont des racines profondes, alors taille et mille pensées ont. beau survenir, et le démon déployer tous ses armements, elles demeurent fermes et invincibles, rien ne peut les abattre; celles au contraire qui ne partent que de la bouche, que des lèvres, qui ne viennent pas du coeur, ne peuvent pas non plus monter jusqu'à Dieu, à cause de la tiédeur de celui qui les profère. Un tel homme, au moindre bruit le voilà renversé; le moindre tumulte l'arrache à son oraison ; la bouche retentit, mais le cœur est vide et la pensée au dépourvu. Ah ! ce n'est pas ainsi que priaient les saints, eux dont la contention d'esprit allait jusqu'à ployer le corps tout entier. Ainsi le bienheureux Elie, voulant prier, chercha d'abord la solitude; puis, s'étant mis la tête entre les genoux, il embrasa son cœur d'une grande ferveur, et donna cours alors à ses prières. (III Rois, XVIII, 42.) Voulez-vous maintenant le voir prier debout? Contemplez-le une autre fois dressé vers le ciel, et avec une telle contention qu'il fait descendre le feu d'en-haut. (ibid. V, 36-38.) De même lorsqu'il voulut ressusciter le fils de la veuve, c'est en se raidissant tout entier qu'il opéra cette résurrection, et cela sans en être brisé, sans bâiller (202) comme nous autres, mais réchauffé au contraire par l'ardeur de sa prière. (III Rois, XVII, 19-22.) Mais pourquoi parler d'Elie et de ces saints illustres?

            J'ai souvent vu des femmes prier tellement du fond du coeur pour un mari en voyage ou un enfant malade, et verser de tels torrents de larmes, qu'elles obtenaient enfin ce qu'elles demandaient par leur prière. Eh bien! si pour la santé d'un enfant, si pour un mari qui est à l'étranger, des femmes s'enflamment à ce point dans leurs prières, quelle excuse aura l'homme qui n'a que de la tiédeur lorsque son âme est morte ? C'est bien pour cela que souvent, après avoir prié , nous nous retirons vides comme auparavant. Ecoutez comment Anne priait du fond du coeur, quels torrents de larmes elle versait, et comment elle était transportée au sortir de sa prière! (I Rois, I, 10-11.) C'est que celui qui prie ainsi, recueille de grands avantages de sa prière, même avant d'obtenir ce qu'il demande, car il fait taire toutes ses passions, il apaise sa colère, se dépouille de sa jalousie, mortifie sa concupiscence, dompte son amour pour les choses de la vie, établit son âme dans un grand calme, enfin s'élève jusqu'au ciel. Car de même que la pluie, en tombant sur la terre desséchée, la fait devenir molle, ou de même que le feu assouplit le fer, ainsi une telle prière amollit et attendrit plus énergiquement que le feu, plus efficacement que la pluie, la sécheresse que les passions ont communiquée à l'âme. L'âme est chose tendre et impressionnable; mais, semblable à l'Ister, dont l'eau devient souvent dure comme la pierre sous l'influence du froid, ainsi notre âme, sous l'influence du péché et d'une grande tiédeur, s'endurcit et se pétrifie. Nous avons donc besoin d'une forte chaleur pour amollir cette dureté. Or, c'est principalement la prière qui en vient à bout. Lors donc que vous y avez recours, ne cherchez pas seulement à obtenir ce que vous demandez , cherchez aussi comment vous pourrez, en priant, rendre votre âme meilleure. Car c'est là l'œuvre de la prière. L'homme qui prie ainsi s'élève au-dessus des choses de ce monde, il s'envole par la pensée, il donne de l'agilité à son intelligence et n'est plus emprisonné par aucune passion. «Des profondeurs j'ai crié vers vous, Seigneur.» Le Psalmiste met ici deux choses : « Des profondeurs, » et : « J'ai crié vers vous. » Par ces cris, il ne veut pas dire le son de la voix, mais la disposition de notre esprit. « Seigneur, écoutez ma voix. » Il y a deux enseignements à tirer de là : le premier, c'est que nous ne pouvons absolument rien obtenir de Dieu, si nous n'y apportons ce qui dépend de nous; c'est pour cela qu'il commence par dire : « Des profondeurs , j'ai crié, » et qu'il ne dit qu'ensuite : « Ecoutez ma voix. » Le second point, c'est qu'une prière énergique, à laquelle se joignent les flots de larmes de la componction, a un grand pouvoir auprès de Dieu pour le faire accéder à ce que nous implorons. Et en effet, c'est en homme qui a accompli quelqu'oeuvre très-méritoire, et qui a fait ce qui dépendait de lui, que le Psalmiste ajoute : « Seigneur, écoutez ma voix (1). Que vos oreilles deviennent attentives à la voix de rua prière (2). » Il appelle « oreilles » la faculté que Dieu a d'entendre ; et par le mot de « voix, » il fait allusion non pas au son produit par notre souffle, ni à nos cris, mais à notre tension d'esprit. « Si vous considérez les iniquités, Seigneur, « Seigneur, qui pourra résister ? » Ceci, c'est afin que personne ne vienne dire : Pécheur comme je suis, et sous le poids de misères sans nombre, je ne puis m'approcher de Dieu, le prier ni l'invoquer ; pour détruire ce prétexte, le Psalmiste s'exprime ainsi : « Si vous considérez les iniquités, Seigneur, Seigneur, qui pourra résister ? » Car cette question : « Qui  pourra? » revient à dire : Il n'y a personne qui puisse. Non en effet, cela ne se peut, il n'y a personne au monde qui, s'il rendait un compte exact de ses actions, fût jamais en état d'obtenir indulgence et miséricorde.

2. Et si je vous parle ainsi, ce n'est pas afin de porter les âmes à la tiédeur, c'est pour consoler ceux qui tombent dans le découragement. Car qui pourra se vanter d'avoir le coeur pur, « ou dire avec assurance qu'il est exempt de péché? » (Prov, XX, 9.) Sans aller chercher d'autres exemples, je n'ai qu'à vous citer saint Paul; et si je voulais lui faire passer rigoureusement en revue sa conduite, il n'y résisterait pas non plus. En effet, qu'aurait-il à dire? Il avait lu les Prophètes avec soin, en observateur zélé de la loi de ses pères, il voyait les prodiges qui s'accomplissaient, et pourtant il restait persécuteur; et il ne changea pas avant d'avoir été favorisé de cette merveilleuse vision, et d'avoir entendu cette voix terrible ; jusque-là il avait continué à jeter partout le (203) trouble et le désordre. Néanmoins, Dieu oublia tout cela, il l'appela, et daigna le combler de sa grâce. Et que dirons-nous de Pierre, lui qui occupe le premier rang? Après des miracles et des prodiges sans nombre, après tant d'exhortations et d'avertissements Dieu ne le convainquit-il point d'avoir gravement failli ? Pourtant, Dieu oublia cela aussi, et il établit Pierre le prince des apôtres. Aussi lui dit-il : « Simon, Simon, voilà que Satan a cherché à te passer au crible comme le blé; et moi j'ai prié pour toi afin que ta foi ne vienne pas à manquer. » (Luc, XXII, 31, 32.) Vous le voyez, si après tout cela Dieu n'usait de miséricorde et d'indulgence, s'il venait juger les hommes d'après un examen rigoureux, il les trouverait coupables tous absolument. C'est ce qui fait dire à saint Paul : « Ma conscience ne me reproche rien, mais je ne suis pas justifié pour cela (I Cor. IV, 4) ; » et au Psalmiste : « Si vous considérez les iniquités, Seigneur, Seigneur ! » La répétition de ce dernier mot n'est pas l'effet du hasard : elle montre un homme saisi d'étonnement et d'admiration devant l'extrême miséricorde , l’immense majesté de Dieu, devant l'océan sans bornes de sa bonté. « Qui pourra résister? » Le Psalmiste ne dit pas : Qui pourra échapper? mais: «Qui pourra résister ? » On ne pourra même , veut-il dire, rester en la présence de Dieu. « Parce que c'est de vous que vient la propitiation (11). » Que signifient ces mots? En voici le sens : Ce n'est pas en vertu de nôs propres mérites, mais c'est grâce à votre bonté, qu il nous est possible d'échapper au châtiment. En effet, si votre justice nous épargne, cela dépend de votre miséricorde. Si cette dernière nous est refusée; nos propres actions ne suffiront pas pour nous soustraire à la colère à venir.

3. C'est ce que Dieu nous enseigne encore lorsqu'il dit par son Prophète: « C'est moi qui efface tes iniquités. » (Isaïe, XLIII, 25.) C'est-à-dire, cela n'appartient qu'à moi , c'est le fait de ma bonté, de mon amour pour toi. De sorte que tes actions ne sauraient jamais suffire pour te mettre à l'abri du châtiment, si ma miséricorde n'y venait ajouter son œuvre. Et plus loin: « Je vous supporte (Isaïe, XLVI, 4), » dit-il encore. « A cause de votre nom, je vous ai a attendu, Seigneur. Mon âme a attendu l'effet de votre parole. » (Ps. CXXIX, 4.) « Mon âme a espéré dans le Seigneur. » (Ibid. 5.) Une autre version porte: « A cause de votre loi, » et une troisième: « Afin que votre parole fût connue. » Dans tous les cas, voici le sens: à cause de votre miséricorde, à cause de votre loi , j'ai attendu mon salut ; car si je considérais ce qui dépend de moi, il y a. longtemps que j'aurais perdu tout courage et tout espoir; mais comme je songe à votre loi et à votre parole , j'en conçois de bonnes espérances. A quelle parole songe-t-il? A la parole de la miséricorde divine. Car c'est ce Dieu qui dit: « Autant le ciel est distant de la terre , autant mes résolutions sont distantes des vôtres, et mes voies de vos voies. » (Isaïe, LIX, 9.) Et autre part: « Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre , autant le Seigneur a affermi sa miséricorde sur ceux qui le craignent. » (Ps. CII, 11.) Et ensuite : « Autant l'orient est distant de l'occident, autant il a éloigné de nous nos iniquités. » (Ibid. 12.) C'est-à-dire, je n'ai pas seulement sauvé ceux qui avaient fait de bonnes couvres , mais j'ai épargné les pécheurs, et au milieu de tes prévarications j'ai fait paraître ma protection et ma sollicitude. Un autre interprète traduit: « Afin que vous soyez redouté, je vous ai attendu , Seigneur. » Redouté de qui? de mes ennemis , de ceux qui me tendent des embûches et qui me baissent. Maintenant, que signifie: « A cause de votre nom? » C'est-à-dire : Quoique je sois un pécheur, et sous le poids de misères sans nombre, cependant, je le savais, de peur que votre nom ne fût profané, vous ne nous auriez pas laissés périr. C'est ce que Dieu dit aussi dans Ezéchiel: « Ce n'est pas à cause de vous que je le fais, mais à cause de mon nom, afin qu'il ne soit pas profané parmi les nations. » (Ezéch. XXXVI, 22. ) Ce qui veut dire : par nous-mêmes, nous ne méritions pas d'être sauvés, et nous ne pouvions fonder aucune espérance sur nos actions; mais nous attendons notre salut à cause de votre nom, et cet espoir nous est laissé. Dans une autre version nous lisons: « A cause de la crainte j'ai attendu le Seigneur. » Dans une autre : « A cause de la loi j'ai attendu le Seigneur. Mon âme a attendu l'effet de ta parole. » Dans une autre : « Mon âme a espéré en sa parole. » Et dans une autre : « Mon âme a attendu , et j'ai prêté l'oreille pour entendre sa parole. » C'est-à-dire, j'avais une ancre sainte qui m'était fournie par les déclarations et les promesses continuelles attestant sa miséricorde et sa (204) bonté, et je ne désespérais pas de mes propres intérêts. « Depuis la première heure du matin jusqu'à la nuit, qu'Israël espère dans le Seigneur (6). » Il veut dire par là: toute la vie, puisque c'est: le jour et la nuit durant. Car il n'est rien de tel pour le salut, que de l'avoir toujours en vue, et de rester attaché à cette espérance, malgré les mille événements qui peuvent survenir et nous porter au découragement. Cette idée est un rempart indestructible , un abri inviolable , une forteresse inattaquable. Ainsi , quand même les circonstances vous menaceraient de la mort, de quelque danger, d'une ruine totale , ne renoncez pas à espérer en Dieu, à attendre de lui votre salut. Tout est pour lui facile et aisé, et il saura bien trouver une issue pour vous tirer d'une position inextricable. Ce n'est donc pas seulement lorsque les événements suivent leur cours naturel, que vous devez vous attendre à ce que Dieu vous accorde ses secours, c'est encore et surtout quand survient la tempête, quand se gonflent les flots, et que nous courons les derniers dangers. Car c'est surtout alors que Dieu déploie sa puissance. Tel est donc le sens de ce passage: il faut espérer continuellement dans le Seigneur, tout le temps de notre existence , durant toute notre vie. « Parce qu'auprès du Seigneur est la miséricorde, et que la rédemption abonde auprès de lui. Et lui-même rachètera Israël de toutes ses iniquités (7). » Que signifie: « Parce qu'auprès du Seigneur est la miséricorde (8) ? »  C'est-à-dire,    il y a en lui une source, un trésor d'amour pour les hommes, qui se répand continuellement sur eux. Où est la miséricorde, est aussi la rédemption : et une rédemption non pas ordinaire , mais considérable , un océan immense d'amour pour nous. Ainsi, même quand nous sommes compromis par nos péchés, il ne faut ni perdre courage ni désespérer. Car là où il y a miséricorde et monté, on n'exige pas un compte rigoureux des fautes commises, attendu que le juge, dans sa grande compassion, et entraîné par son penchant à nous aimer, néglige la plupart des griefs. Tel est Dieu en effet. il est porté, il est enclin à faire continuellement miséricorde et à nous accorder notre pardon: « Et lui-même rachètera Israël de toutes ses iniquités. » Si donc Dieu est ainsi, si la grandeur de son amour pour nous se déverse de toutes parts , il est aisé de voir qu'il sauvera aussi son peuple, et qu'il l'affranchira non-seulement du châtiment, mais encore des péchés. Instruits de cette vérité , persévérons dans l'invocation et dans la prière, et n'y renonçons jamais, soit que nous obtenions, soit que nous n'obtenions pas. Car s'il est le maître de donner, il l'est aussi de donner quand il veut, et c'est lui également qui connaît à point le moment favorable. Persévérons donc dans nos supplications , dans nos invocations , dans notre confiance en sa miséricorde et en sa bonté, et ne désespérons jamais de notre salut, mais contribuons-y selon notre pouvoir, et alors ce qui dépend de lui ne pourra manquer de venir à la suite, puisqu'il y a chez lui miséricorde ineffable et amour illimité pour les hommes. Puissions-nous tous en ressentir les effets, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec lequel gloire au Père et au Saint-Esprit, dans les siècles des siècles ! Ainsi soit-il.

 

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