Oct. ASSOMPTION IV

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Oct. ASSOMPTION

LE XVIII AOUT. QUATRIÈME  JOUR DANS L'OCTAVE DE L'ASSOMPTION.

 

Inséparable de Jésus dans les décrets éternels, Marie fut avec lui le type de toute beauté pour l'Auteur du monde. Quand la Toute-Puissance préparait la terre et les cieux (1), la Sagesse se jouait devant elle en son humanité future comme exemplaire premier, comme mesure et comme nombre (2), comme point de départ, centre et sommet de l'œuvre entreprise par l'Amour; mais avec elle aussi, la Mère prédestinée, la femme choisie pour donner de sa chair au Fils de Dieu sa qualité de Fils de l'homme, apparaissait, parmi les simples créatures, comme devant être le terme de toute excellence dans les divers ordres de la nature, de la grâce et de la gloire. Ne soyons donc pas étonnés si l'Eglise (3) met sur les lèvres de Marie la parole que l'éternelle Sagesse dit la première : J'ai été créée au commencement (4).

Dans tout son être, et jusqu'en son corps, fut réalisé pleinement l'idéal divin. Faire jaillir du néant le reflet des perfections infinies, c'est le but de toute création, la loi de la matière même. Or,

 

1. Prov. VIII, 22-31. — 2 Eccli. i, 9-10. — 3. Epître des Messes de Notre-Dame de la Pentecôte à l'Avent. — 4. Eccli.  XXIV, 14.

 

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après la face du plus beau des enfants des hommes (1), rien n'exprima Dieu ici-bas comme le visage de la Vierge. On connaît l'exclamation ad-mirative prêtée à saint Denys voyant pour la première fois Notre-Dame : « Si la foi ne m'eût révélé votre Fils, je vous aurais prise pour la Divinité! » Authentique ou non dans la bouche de l'Aréopagite (2), ce cri du cœur rend bien pourtant la pensée des anciens. L'on devra d'autant moins en être surpris, que nul fils ne ressembla comme Jésus à sa mère. N'ayant point de père ici-bas, c'était deux fois pour lui la loi de nature. C'est aujourd'hui la complaisance des cieux, où Marie et Jésus montrent aux Anges, dans leurs corps glorifiés, des aspects nouveaux de l'éternelle beauté que ces substances immatérielles n'eussent point su traduire.

Or, l'ineffable perfection du corps de Marie résulta de l'union de ce corps avec l'âme la plus parfaite elle-même qui fut jamais, si, comme il se doit toujours faire, on excepte l'âme du Seigneur son Fils. Chez nous, la déchéance originelle a brisé l'harmonie qui devait subsister entre les deux éléments si divers de notre être humain, rompu aussi, le plus souvent, et parfois renversé les proportions de la nature et de la grâce. Il en est autrement là où l'œuvre divine ne fut point de la sorte viciée dans son principe; c'est ainsi que, pour chacun des bienheureux esprits des neuf chœurs, le degré de la grâce est en rapport direct avec ses dons de nature (3). L'exemption du péché laissa l'âme de l'Immaculée informer dans un empire  absolu son corps à son image, tandis

 

1. Psalm. XLIV, 3. — 2. Ex pseudo-epistola Dionys. ad Paulum. — 3. Thom. Aqu. Ia P. qu. LXII, art. 6.

 

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qu'elle-même, se prêtant à la grâce selon l'étendue de ses aptitudes exquises, permit à Dieu de l'élever surnaturellement par delà tous les Séraphins jusqu'aux degrés de son propre trône.

Car au royaume de la grâce, non moins qu'en celui de la  nature, la suréminence de Marie fut celle qui convenait aune Reine. Son éveil au sein de la bienheureuse Anne nous la fait voir plus élevée déjà que les plus hauts monts (1) ; Dieu, qui n'aime que ce  qu'il  fait  digne de son  amour, chérit cette entrée, ces portes de la vraie Sion, par-dessus toutes les tentes de Jacob (2). Se pouvait-il en effet qu'un seul instant le Verbe, qui l'avait élue pour Mère, dût aimer plus, comme plus parfaite, une autre créature ? Aussi nulle parité possible en ces origines mêmes, nulle infériorité surtout qui de la Mère eût atteint jusqu'au Fils. Egalement pour la suite, en la bien-aimée, nul défaut de correspondance aux prévenances  divines;  à perfection si grande eussent répugné toute défaillance, toute lacune, tout arrêt. Depuis le moment de sa Conception très sainte jusqu'à celui de la mort glorieuse qui lui  ouvrit les cieux, la grâce agit en Marie sans nulle trêve dans la totalité de sa force divine. C'est ainsi que partie de sommets encore inconnus, doublant à chaque coup d'aile son  énergie,  son vol  puissant l'a portée jusqu'à ce voisinage de Dieu où notre admiration la suit en ces jours.

Cependant Notre-Dame n'est point seulement la première-née (3), la plus parfaite, la plus belle, la plus sainte des créatures et leur Reine ; ou plutôt elle n'est tout cela, que parce qu'elle est la Mère du Fils de  Dieu. Ne fût-ce que pour constater

 

1. Psalm. LXXXVI, 1. — 2. Ibid. 2. — 3. Eccli. XXIV, 5.

 

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qu'elle dépasse à elle seule tous les sujets réunis de son vaste empire, il nous est possible encore de la comparer avec l'homme, avec l'ange, sur le terrain de la nature et celui de la grâce. Où le rapprochement cesse, où toute transition fait défaut, c'est pour la suivre à la retraite inaccessible où, quoique toujours la servante du Seigneur (1), elle entre en part des éternelles relations qui constituent la Trinité  sainte. Quel est, en une créature, ce mode de la divine charité où Dieu est aimé comme fils ? Mais écoutons ici l'évêque de Meaux, dont le moindre mérite n'est pas d'avoir compris comme il l'a fait les grandeurs de Marie :

« Pour former l'amour de la sainte Vierge il a fallu y mêler ensemble tout ce que la nature a de plus tendre, et la grâce de plus efficace. La nature a dû s'v trouver, parce que cet amour embrassait un fils ; la grâce a dû y agir, parce que cet amour regardait un Dieu. Mais ce qui passe l'imagination, c'est que la nature et la grâce n'y suffisent pas,  parce qu'il n'appartient pas à la nature de trouver un fils dans un Dieu ; et que la grâce, du moins ordinaire, ne peut faire aimer un Dieu dans un fils : il faut donc nécessairement s'élever plus haut. Permettez-moi, chrétiens, de porter aujourd'hui mes pensées au-dessus de la nature et de la grâce, et de chercher la source de cet amour dans le sein même du Père éternel. Le divin Fils dont Marie est mère, lui est commun avec Dieu. Elle est unie avec Dieu  le Père, en devenant la Mère de son Fils unique, qui ne lui est commun qu'avec le Père éternel  dans la manière dont elle  l'engendre (2). Mais pour la rendre capable d'engendrer un Dieu, il a fallu que le Très-Haut la couvrît de

 

1. Luc. I, 38. — 2. Bern. Sermo II in Annuntiat.

 

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sa vertu (1), c'est-à-dire, qu'il étendît sur elle sa fécondité. C'est en cette sorte que Marie est associée à la génération éternelle.

« Mais ce Dieu qui a bien voulu lui donner son Fils, pour achever son ouvrage, a dû aussi faire couler dans son chaste sein quelque étincelle de l'amour qu'il a pour ce Fils unique, qui est la splendeur de sa gloire et la vive image de sa substance (2). C'est de là qu'est né l'amour de Marie : il s'est fait une effusion du cœur de Dieu dans le sien ; et l'amour qu'elle a pour son Fils lui est donné de la même source qui lui a donné son Fils même. Après cette mystérieuse communication, que direz-vous, ô raison humaine ? Prétendrez-vous pouvoir comprendre l'union de Marie avec Jésus-Christ? Car elle tient quelque chose de cette parfaite unité qui est entre le Père et le Fils. N'entreprenez pas non plus d'expliquer quel est cet amour maternel qui vient d'une source si haute, et qui n'est qu'un écoulement de l'amour du Père pour son Fils unique (3). »

Palestrina, l'ancienne Préneste, députe à la cour de Marie son valeureux et doux martyr Agapit. Par son jeune âge et sa fidélité, il nous rappelle cet autre gracieux athlète, l'acolythe Tarcisius, dont la victoire accompagne de si près au 15 août le triomphe de la Reine du monde, qu'elle s'éclipse en la gloire de celle-ci. Au temps où Valérien persécutait l'Eglise, à la veille des combats de Sixte et de Laurent, Tarcisius, portant le Corps du Seigneur, est rencontré par des païens

 

1. Luc. I, 35. — 2. Heb.  I, 3. — 3. Bossuet,  Premier Sermon pour l'Assomption.

 

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qui prétendent le contraindre à leur montrer ce qu'il porte; mais, serrant sur son cœur le trésor du ciel, il se laisse broyer sous leurs coups « plutôt que de livrer à ces chiens enragés les membres divins (1). » Agapit, à quinze ans, parcourt au milieu des tourments et des prodiges l'arène que vient de rouvrir à l'ambition des disciples de Jésus le césar Aurélien. Si jeune qu'il fût, le martyr avait pu voir la fin honteuse de Valérien ; or, l'édit nouveau qui lui valut de rejoindre Tarcisius aux pieds de Marie n'était pas encore promulgué dans tout l'empire, qu'Aurélien à son tour était foudroyé par ce Christ de qui seul tiennent leurs couronnes les empereurs et les rois.

 

ORAISON

 

Que votre Eglise, ô Dieu, se réjouisse, appuyée sur le suffrage du bienheureux Agapit; que les glorieuses prières de votre Martyr lui obtiennent fidélité persévérante et sécurité entière. Par Jésus-Christ.

 

En rentrant de Palestrina dans la Ville éternelle, saluons sur la gauche le cimetière des saints Marcellin et Pierre, où furent d'abord déposées les reliques saintes de la pieuse impératrice Hélène, qui s'éleva aujourd'hui de la terreau ciel. L'Eglise Romaine a cru ne pouvoir l'honorer mieux, qu'en confondant pour ainsi dire, au III Mai, sa mémoire avec celle du bois sacré rendu par elle à nos adorations. Nous ne reviendrons

 

1. Damas, in Callisti.

 

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donc pas aujourd'hui sur la glorieuse Invention qui, après trois siècles de combats, vint consacrer si heureusement l'ère du triomphe. Offrons pourtant notre hommage à celle qui déploya sur le monde délivré l'étendard du salut, et plaça la Croix sur le front des princes autrefois ses persécuteurs (1).

 

1. Ambr.  De obitu Theodosii.

 

ORAISON.

 

Seigneur Jésus-Christ, qui avez révélé à la bienheureuse Hélène le lieu où votre Croix était cachée, pour enrichir par elle votre Eglise de ce précieux trésor; accordez-nous par son intercession d'obtenir, grâce au prix soldé sur cet arbre de vie, les récompenses de la vie éternelle. Vous qui vivez.

 

Mais revenons à l'impératrice des cieux, dont Hélène est la fortunée suivante, dont les Martyrs forment l'armée. Pour la chanter et la prier du milieu de la mer orageuse, Adam de Saint-Victor nous donnera cette Séquence d'un accent si suave.

 

SEQUENCE.

 

Salut, Vierge sans pareille, Mère de notre salut, nommée l'Etoile de la mer, étoile nullement vagabonde : ne permettez pas que sur la merde cette vie nous fassions naufrage,mais que pour nous toujours votre prière s'adresse au Sauveur né de vous.

 

La mer s'irrite, les vents sont en furie, les flots soulevés se bouleversent ; le navire court, mais au-devant que de périls ! Là les sirènes du plaisir, là le dragon, les chiens de mer et les pirates concourent ensemble à nous faire désespérer de la vie.

Au fond de l'abîme, puis jusqu'au ciel l'onde en colère porte l'esquif ; le mât chancelle, la voile est arrachée, le nautonier cesse la lutte ; chez nous, en de tels maux, l'homme animal succombe : ô mère toute spirituelle, délivrez-nous de la mort.

 

Par la rosée du ciel en vous répandue, sans perdre la fleur de pureté, vous donnâtes au monde, prodige nouveau, une fleur nouvelle : le Verbe égal à son Père entre au sein de la Vierge ; pour nous il prend un corps dans le secret de vos chastes entrailles.

 

Celui dont la puissance gouverne toutes choses vous élut et prédestina ; sans rompre le sceau virginal, il vous remplit de lui-même ; dans l'enfantement, sans déchirement, sans douleur, au rebours de la première mère, vous mîtes au jour le Sauveur.

 

O Marie, l'excellence de vos mérites vous élève incomparablement par delà les chœurs angéliques ; jour fortuné que celui-ci, où vous gagnez les cieux ! dans votre piété maternelle, regardez-nous en nos bas-fonds.

 

Vous êtes la sainte et vive racine, la fleur, la vigne et l'olivier qu'aucune greffe ne féconde ; vous êtes le flambeau de la terre, la splendeur du ciel ; vous l'emportez sur le soleil en éclat : recommandez-nous à votre fils, pour qu'il nous juge en miséricorde.

 

Devant la face du Roi suprême, ayez souvenir du petit troupeau ; il a transgressé la loi qui lui fut donnée, et pourtant il espère sa grâce : propice et doux, digne d'une louange éternelle, le juge a donné aux coupables un gage d'espérance, en se faisant hostie sur la croix.

 

Jésus, fruit des entrailles de votre sainte Mère, soyez-nous, sur les flots de ce monde, guide, chemin et libre accès au ciel ; tenez le gouvernail, dirigez le navire ; si violente qu'elle puisse être, apaisez la tempête ; dans votre clémence, donnez-nous d'aborder heureusement au port. Amen.

 

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