MARTHE

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LE XXIX  JUILLET. SAINTE MARTHE, VIERGE.

 

Madeleine, cette fois, avait été la première au-devant du Seigneur. Huit jours à peine étaient écoulés depuis son glorieux passage, que rendant à sa sœur le bon office qu'elle en reçut autrefois (1), elle venait lui dire à son tour : « Le bien-aimé est là, et il t'appelle. » Et Jésus, prenant les devants, paraissait lui-même : « Viens, disait-il, « mon hôtesse; viens de l'exil, tu seras couronnée (2). » Hôtesse du Seigneur, tel sera donc au ciel comme ici-bas le nom de Marthe et son titre de noblesse éternel.

« En quelque ville ou village que vous entriez, disait l'Homme-Dieu à ses disciples, informez-vous qui en est digne, et demeurez chez lui (3) ». Or, raconte saint Luc, il arriva que comme ils marchaient, lui-même entra en un certain village, et une femme nommée Marthe le reçut dans sa maison (4), Où chercher plus bel éloge, où trouver plus sûre louange de la sœur de Madeleine, que dans le rapprochement de ces deux textes du saint Evangile ?

Ce certain lieu où elle fut, comme en étant digne, élue par Jésus pour lui donner asile, ce village, dit  saint Bernard (5), est  notre humble

 

1. Johan. XI, 28. — 2. Raban. De vita B. M. Magd. et S. Marthae, XLVII. — 3. Matth. X, 11. — 4. Luc. X, 38. — 5. Bern. Sermo II in Assumpt. B. M. V.

 

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terre, perdue comme une bourgade obscure dans l'immensité  des  possessions  du  Seigneur (1). Le Fils de Dieu, parti  des  deux,  faisait route à la recherche de la brebis perdue, guidé par l'amour (2). Sous le déguisement de notre chair de péché (3), il était venu dans ce monde qui était son oeuvre, et le monde ne l'avait point connu  (4) ; Israël, son peuple, n'avait pas eu pour lui, même une pierre où il pût reposer sa tête (5), et  l'avait laissé dans sa soif mendier l'eau des Samaritains (6). Nous, ses rachetés de la gentilité, qu'à  travers reniements et fatigues il poursuivait ainsi, n'est-il pas vrai que sa gratitude doit être aussi la nôtre pour celle qui, bravant l'impopularité du moment, la persécution de l'avenir, voulut solder envers lui notre dette à tous ?

Gloire donc à la fille de Sion, descendante des rois, qui, fidèle  aux traditions d'hospitalité des patriarches  ses  premiers  pères, fut  bénie  plus qu'eux dans l'exercice de cette noble vertu ! Plus ou moins obscurément encore, ils savaient pourtant, ces ancêtres de notre foi, que le désiré d'Israël et l'attente  des nations  devait paraître en voyageur et en étranger sur la terre (7). Aussi, eux-mêmes pèlerins d'une patrie meilleure, sans demeure fixe (8), ils honoraient le Sauveur futur en tout  inconnu  se  présentant sous  leur tente (9); comme nous leurs fils dans la foi des mêmes promesses, accomplies maintenant, vénérons le Christ dans l'hôte que sa bonté nous envoie (10). Pour eux comme pour nous,  cette relation qui  leur était

 

1. Baruch III, 24-2.S. — 2. Psalm. XVIII; Matth. XVIII, 12. — 3. Rom. VIII, 3. — 4. Johan. I, 10. — 5. Matth., VIII, 20.— 6. Johan. IV, 6, 7. — 7. Jerem. XIV, 8, 9. — 8. Heb. XI, 8-16.— 9. Gen. XVIII, 1-5; XXIII, 6; XXVI, 28.— 10. Matth. XXV, 35, 40; Reg. S. P. Benedicti, LIII.

 

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montrée entre Celui qui devait venir et l'étranger cherchant un asile, faisait de l'hospitalité, fille du ciel, une des plus augustes suivantes de la divine charité. Plus d'une fois, la visite d'Anges se prêtant sous des traits humains aux bons offices de leur zèle, manifesta en effet la complaisance qu'y prenaient les cieux (1). Mais s'il convient d'estimer à leur prix ces célestes prévenances dont notre terre n'était point digne, combien pourtant s'élève plus haut le privilège de Marthe, vraie dame et princesse de la sainte hospitalité, depuis qu'elle en a placé l'étendard au sommet vers lequel convergèrent tous les siècles de l'attente et ceux qui suivirent !

S'il fut grand d'honorer le Christ, avant sa venue, dans ceux qui de près ou de loin étaient ses figures ; si Jésus promet l'éternelle récompense à quiconque, depuis qu'il n'est plus avec nous (2), l'abrite et le sert en ses membres mystiques : celle-là est plus grande et mérita plus, qui reçut en personne Celui dont le simple souvenir ou la pensée donne à la vertu dans tous les temps mérite et grandeur. Et de même que Jean l'emporte sur tous les Prophètes (3), pour avoir montré présent le Messie qu'ils annonçaient à distance; ainsi le privilège de Marthe, tirant son excellence de la propre et directe excellence du Verbe de Dieu qu'elle secourut dans la chair même qu'il avait prise pour nous sauver, établit la sœur de Madeleine au-dessus de tous ceux qui pratiquèrent jamais les œuvres de miséricorde.

Si donc Madeleine aux pieds du Seigneur garde pour elle la meilleure part 4,  ne croyons pas que

 

1. Heb. XIII, 2. — 2. Marc, XIV, 7. — 3. Luc. VII, 28. — 4. Ibid. X, 42.

 

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celle de Marthe doive être méprisée. Le corps est un,  mais il a plusieurs  membres, et tous ces membres n'ont pas le même rôle;  ainsi l'emploi de chacun dans le Christ  est différent selon la grâce qu'il a reçue,  soit  pour prophétiser, soit pour servir (1). Et l'Apôtre, exposant  cette  diversité de l'appel divin : « Par la grâce qui m'a été donnée, disait-il, je recommande à tous ceux qui sont parmi vous de ne point être sage plus qu'il ne convient d'être  sage,  mais  de  se tenir  à  la mesure du don que Dieu départit à chacun dans la foi (2) ». O discrétion, gardienne de la doctrine autant que mère des vertus (3), que de pertes dans les âmes, que  de  naufrages parfois, vous feriez éviter !

« Quiconque, dit saint Grégoire avec son sens si juste toujours, quiconque  s'est donné entièrement à Dieu, doit avoir soin de ne pas se répandre seulement dans les œuvres,  et tendre aussi aux sommets de la contemplation. Cependant il importe extrêmement ici de savoir qu'il y a une grande variété de tempéraments spirituels.  Tel qui pouvait  vaquer  paisible à la contemplation de Dieu, tombera écrasé sous les oeuvres ; tel que l'usuelle occupation des humains eût gardé dans une vie honnête, se blesse mortellement au glaive d'une contemplation qui dépasse ses forces : ou faute de l'amour qui empêche le repos de tourner en torpeur, ou faute de  la crainte qui garde des illusions de l'orgueil et des sens.  L'homme qui désire être parfait doit à cause  de cela s'exercer dans la plaine d'abord, à la  pratique des vertus, pour monter plus sûrement aux hauteurs, laissant

 

1. Rom. XII, 4-7. —  2. Ibid. 3. —  3. Reg. S. P. Benedicti, LXIV.

 

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en bas toute impulsion des sens qui ne peuvent qu'égarer les recherches de l'esprit, toute image dont les contours ne sauraient s'adapter à la lumière sans contours qu'il désire voir. A l'action donc le premier temps, à la contemplation le dernier. L'Evangile loue Marie, mais Marthe n'y est point blâmée, parce que grands sont les mérites de la vie active, quoique meilleurs ceux de la contemplation (1). »

Et si nous voulons pénétrer plus avant le mystère des deux sœurs, observons que, bien que Marie soit la préférée, ce n'est pourtant point dans sa maison, ni dans celle de Lazare leur frère , mais dans la maison de Marthe , que l'Homme-Dieu nous est montré faisant séjour ici-bas avec ceux qu'il aime. Jésus, dit saint Jean, aimait Marthe, et sa sœur Marie, et Lazare (2) : Lazare, figure des pénitents que sa miséricordieuse toute-puissance appelle chaque jour de la mort du péché à la vie divine; Marie, s'adonnant dès ce monde aux mœurs de l'éternité; Marthe enfin, nommée ici la première comme l'aînée de son frère et de sa sœur, la première en date mystiquement selon ce que disait saint Grégoire, mais aussi comme celle de qui l'un et l'autre dépendent en cette demeure dont l'administration est remise à ses soins. Qui ne reconnaîtrait là le type parfait de l'Eglise, où, dans le dévouement d'un fraternel amour sous l'œil du Père qui est aux cieux, le ministère actif tient la préséance de gouvernement sur tous ceux que la grâce amène à Jésus ? Qui ne comprendrait aussi les préférences du Fils de Dieu pour cette maison bénie ? l'hospitalité qu'il y recevait, toute dévouée qu'elle

 

1. Moral, in Job. V, 26, passim. — 2. Johan. XI, 5.

 

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fût, le reposait moins de sa route laborieuse que la vue si achevée déjà des traits de cette Eglise qui l'avait attiré du ciel en terre.

Marthe par avance avait donc compris que quiconque  a  la primauté  doit être le  serviteur : comme le Fils de l'homme  est venu  non  pour être servi, mais pour servir (1) ; comme  plus tard le Vicaire de Jésus, le prince des prélats de la sainte Eglise, s'appellera Serviteur des serviteurs de Dieu. Mais en servant Jésus, comme elle servait avec lui et pour lui son frère et sa sœur, qui pourrait douter que plus que personne elle entrait en part des promesses de cet Homme-Dieu, lorsqu'il disait : « Qui me sert me suit ; et où je serai, là aussi sera mon serviteur ; et mon Père l'honorera (2). » Et  cette  règle si belle de l'hospitalité antique, qui créait entre l'hôte et l'étranger admis une fois à son foyer des liens égaux à ceux du sang ,  croyons-nous  que  dans la  circonstance l'Emmanuel ait pu n'en pas tenir compte, lorsqu'au contraire  son Evangéliste nous dit qu'« à tous ceux qui le reçurent il a donné le pouvoir d'être faits enfants de Dieu (3) ».  C'est qu'en effet « quiconque le reçoit, déclare-t-il lui-même, ne reçoit pas lui  seulement,  mais le Père qui l'envoie (4) ».

La paix promise à toute maison qui se montrerait digne de recevoir les envoyés du ciel (5), la paix qui ne va point sans l'Esprit d'adoption des enfants (6), s'était reposée sur Marthe avec une incomparable abondance. L'exubérance trop humaine qui d'abord s'était laissée voir dans sa sollicitude empressée, avait été pour l'Homme-

 

1. Matth. XX, 26-28. — 2. Johan. XII, 26. — 3. Ibid. 1, 12. — 4. Marc, IX, 36. — 5. Matth. X, 12, 13. — 6. Rom. VIII,  15.

 

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Dieu l'occasion de montrer sa divine jalousie pour la perfection de cette âme si dévouée et si pure (1). Au contact sacré, la vive nature de l'hôtesse du Roi pacifique dépouilla ce qu'il lui restait de fébrile inquiétude ; et servante plus active que jamais, plus agréée qu'aucune autre (2), elle puisa dans sa foi ardente au Christ Fils du Dieu vivant (3) l'intelligence de l'unique nécessaire et de la meilleure part (4) qui devait un jour être aussi la sienne. Oh ! quel maître de la vie spirituelle, quel modèle ici Jésus n'est il pas de discrète fermeté, de patiente douceur, de sagesse du ciel dans la conduite des âmes aux sommets (5) !

Jusqu'à la fin de sa carrière mortelle, selon le conseil de stabilité que lui-même il donnait aux siens (6), l'Homme-Dieu resta fidèle à l'hospitalité de Béthanie : c'est de là qu'il partit pour sauver le monde en sa douloureuse Passion ; c'est de Béthanie encore que, quittant le monde, il voulut remonter dans les cieux (7). Alors cette demeure, paradis de la terre, qui avait abrité Dieu, la divine Mère, le collège entier des Apôtres, parut bien vide à ceux qui l'habitaient. L'Eglise tout à l'heure nous dira par quelles voies, toutes d'amour pour nous Gentils, l'Esprit de la Pentecôte transporta dans la terre des Gaules la famille bénie des amis de l'Homme-Dieu.

Sur les rives du Rhône, Marthe restée la même apparut comme une mère, compatissant à toutes misères, s'épuisant en bienfaits Jamais sans pauvres, dit l'ancien historien des deux sœurs, elle les nourrissait avec une tendre sollicitude des mets que le ciel  fournissait  abondamment  à  sa

 

1. Luc. X, 41. — 2. Cf. Matth. XXVI, 6; Johan. XII. 2.— 3. Johan. XI, 27. — 4. Luc. X, 42. — 5. Johan. XI. — 6. Luc. X, 7. — 7. Ibid. XXIV, 5o.

 

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charité, n'oubliant qu'elle-même,  ne se réservant que des herbes ; et en mémoire du glorieux passé, comme elle avait servi le Chef de l'Eglise en sa propre personne, elle le servait maintenant dans ses membres, toujours aimable pour tous, affable à chacun. Cependant les pratiques d'une effrayante pénitence étaient ses délices. Mille  fois martyre, de toutes les puissances de son  âme  Marthe  la très sainte aspirait aux deux. Son esprit, perdu en Dieu, s'absorbait dans la prière et y passait les nuits. Infatigablement  prosternée, elle adorait régnant au ciel Celui qu'elle avait vu sans gloire en sa maison. Souvent aussi elle parcourait les villes et les  bourgs, annonçant aux peuples le Christ Sauveur (1).

Avignon et d'autres villes de la province Viennoise l'eurent pour apôtre. Tarascon fut par elle délivré de l'ancien serpent (2), qui sous une forme monstrueuse perdait les corps comme au dedans il tyrannisait  les  âmes. Ce fut là  qu'au milieu d'une communauté de  vierges  qu'elle avait fondée, elle entendit le Seigneur l'appeler en retour de  son  hospitalité  d'autrefois à celle des cieux. C'est là qu'aujourd'hui encore elle repose, protégeant  son peuple de Provence, accueillant en souvenir de Jésus l'étranger. La paix des bienheureux qui respire  en sa noble image,  pénètre le pèlerin admis  à baiser ses pieds apostoliques; et en remontant les degrés de la crypte sacrée pour reprendre  sa  route  dans  cette  vallée d'exil,  il garde, comme un parfum de la patrie, le souvenir de l'unique et touchante épitaphe : SOLLICITA NON TURBATUR ; zélée toujours, elle n'est plus troublée.

 

1. Raban. De vita  B.  M.  Magd. et  S.  Marthae, XLI. — 2. Apoc. XX, 2.

 

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Marthe, née de parents nobles et riches, fut plus illustre encore par l'hospitalité du Christ Seigneur. Après son ascension au ciel, elle fut saisie par les Juifs avec son frère, sa sœur, Marcelle sa suivante, Maximin l'un des soixante-douze disciples, qui avait baptisé toute cette maison. En leur compagnie et celle de beaucoup d'autres chrétiens, elle fut jetée sur la vaste mer, dans un vaisseau sans voiles et sans rames, au-devant d'un naufrage certain ; mais sous la conduite de Dieu, tous sains et saufs, le navire aborda à Marseille.

 

Ce miracle et leur prédication amenèrent à croire au Christ les Marseillais d'abord, puis les habitants d'Aix et les nations limitrophes. Lazare fut fait évoque de Marseille, Maximin d'Aix. Madeleine, habituée à l'oraison et aux pieds du Seigneur, se retira dans la grotte déserte d'une montagne très élevée, pour y jouir de la meilleure part qu'elle avait choisie, dans la contemplation de la céleste béatitude ; là elle vécut trente ans, séparée de tout commerce des hommes, et tous les jours durant ce temps transportée par les Anges dans les hauteurs pour y entendre les chants des habitants des cieux.

 

Pour Marthe, son admirable charité et sainteté de vie lui gagna l'admiration et l'amour de tous les habitants de Marseille. Elle se retira avec plusieurs vertueuses femmes dans un lieu éloigné des hommes, où elle vécut longtemps en grande renommée de piété et de prudence. Enfin, glorifiée par ses miracles, ayant longtemps à l'avance prédit sa mort, elle passa au Seigneur le quatre des calendes d'août. Son corps repose à Tarascon en grande vénération.

 

Entrée pour jamais comme Madeleine en possession de la meilleure part, votre place, ô Marthe, est belle dans les cieux. Car celui qui sert dignement s'acquiert un rang élevé, dit saint Paul, et sa confiance est grande à juste titre dans la foi du Christ Jésus (1) : le service que les diacres dont parlait l'Apôtre accomplissent pour l'Eglise, vous l'avez accompli pour son Chef et son Epoux ; vous avez bien gouverné votre maison (2), qui était la figure de cette Eglise aimée du Fils de Dieu. Or, assure encore le Docteur des nations, « Dieu n'est point injuste, pour oublier vos œuvres et l'amour que vous avez témoigné pour son nom, vous qui avez servi les saints (3). » Et le Saint des saints, devenu lui-même votre hôte et votre obligé, ne nous laisse-t-il pas déjà entrevoir assez vos grandeurs, lorsque parlant seulement du serviteur fidèle établi sur sa famille pour distribuer à

 

1.  I Tim. II, 13. — 2. Ibid. 4. — 3. Heb. VI, 10.

 

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chacun la nourriture au temps voulu, il s'écrie : « Heureux ce serviteur que le Maître, quand il viendra, trouvera agissant de la sorte ! en vérité, je vous le dis, il l'établira sur tous ses biens (1). » O Marthe, l'Eglise tressaille en ce jour où le Seigneur vous trouva, sur notre terre des Gaules, continuant de l'accueillir en ces plus petits où il déclare que nous devons maintenant le chercher (2). Il est donc venu le moment de la rencontre éternelle ! Assise désormais, dans la maison de cet hôte fidèle plus qu'aucun aux lois de l'hospitalité, vous le voyez faire de sa table votre table (3), et se ceignant à son tour, vous servir comme vous l'avez servi (4).

Du sein de votre repos, protégez ceux qui continuent de gérer les intérêts du Christ ici-bas, dans son corps mystique qui est toute l'Eglise, dans ses membres fatigués ou souffrants qui sont les pauvres et les affligés de toutes sortes. Multipliez et bénissez les œuvres de la sainte hospitalité ; que le vaste champ de la miséricorde et de la charité voie ses prodigieuses moissons s'accroître encore en nos jours. Puisse rien ne se perdre de l'activité si louable où se dépense le zèle de tant d'âmes généreuses ! et dans ce but, ô sœur de Madeleine, apprenez à tous, comme vous-même l'avez appris du Seigneur, à mettre au-dessus de tout l'unique nécessaire, à estimer à son prix la meilleure part (5). Après la parole qui vous fut dite moins pour vous que pour tous, quiconque voudrait troubler Madeleine aux pieds de Jésus, ou l'empêcher de s'y rendre, verrait à bon droit le ciel froissé stériliser ses œuvres.

 

1. Matth. XXIV, 46, 47. — 2. Ibid. X, 42; XVIII, 5 ; XXV, 40. — 3 Luc. XXII, 3o. — 4. Ibid. XII, 37. — 5. Ibid. X, 38-42.

 

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Comme l'Eglise, faisons mémoire des  martyrs Simplicius et Faustinus, que la persécution de Dioclétien  moissonna pour le ciel  avec leur sœur Viatrice, nommée gracieusement Béatrice après son arrivée aux cieux. La sœur avait eu le temps d'ensevelir ses frères ;  après son propre combat, elle fut placée près d'eux par la dernière des célèbres Lucines. L'heure du triomphe n'avait pas sonné encore ;  et déjà  pourtant, la sépulture de ce groupe illustre sous le bois même de la Dea Dia des Arvales, annonçait la victoire du Christ sur les plus antiques superstitions delà ville aux sept collines.  Le  saint Pontife  Félix, qui  tient aussi la  palme en cette glorieuse compagnie, souffrit au temps des Ariens.

 

ORAISON.

 

Faites, Seigneur, nous vous en supplions, que de même que le peuple chrétien célèbre dans une fête qui passe vos martyrs Félix, Simplicius, Faustinus et Béatrice, il se réjouisse aussi avec eux dans la fête éternelle, et que ce qu'il honore en ses vœux lui devienne propre à lui-même. Par Jésus-Christ.

 

 

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