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CHAPITRE VI. PRATIQUE DE LA SAINTE COMMUNION AU TEMPS DE NOËL.La sainte Communion, au temps de l'Avent, préparait les âmes fidèles à l'avènement visible de leur céleste Epoux. Il daignait les admettre à ses faveurs mystérieuses, en attendant la nuit fortunée dans laquelle il se révélerait enfin sous les charmes ineffables de son enfance, qui ravirent à la fois les Anges, les bergers et les rois. Elles goûtaient alors quelque chose de la félicité de Marie portant en elle, sentant vivre et se développer en son chaste sein Celui que ses yeux n'avaient pas vu encore. Mais au temps de Noël, maintenant qu'un petit enfant nous est né, qu'il repose à Bethléhem, dans la Maison du Pain, que les Anges ont invité les bergers, que l'étoile a convié les Mages avenir le reconnaître et l'adorer, la sainte Communion doit initier les âmes plus avant à la connaissance du Verbe de Dieu, les illuminer d'une vive splendeur, et produire en elles un plus ardent désir de posséder Celui dont la douceur et l'amour se révèlent déjà d'une manière si victorieuse, à travers l'humilité des langes et de la crèche. Ce n'est donc plus ce Jésus invisible, préludant par le silence et l'immobilité à sa laborieuse mission de la conquête des âmes ; c'est le libérateur du genre humain parti déjà pour courir la carrière ; c'est le Soleil de justice lançant ses premiers rayons sur le monde; c'est l'hôte céleste demandant asile à notre cœur; c'est le Dieu qui a fait les âmes et qui les aime (1) s'offrant à notre tendresse. Allons à lui afin de le connaître, connaissons-le afin de l'aimer, aimons-le afin de lui devenir semblables. Or, il veut, dans ce mystère de Noël, que nous devenions enfants comme lui : c'est maintenant l'unique moyen de le posséder, l'unique voie pour aller à son Père. Approchez donc, âmes fidèles, et soyez illuminées (2). Pour vous aider dans l'œuvre de préparation à cette heureuse visite que vous désirez faire à l'Enfant de Bethléhem, nous avons osé formuler les Actes suivants; puissiez-vous en tirer quelque profit, et aussi vous souvenir alors de Celui qui ne les a écrits que pour vous ! 1. Sap. XI, 27. — 2. Psalm. XXXIII, 6. AVANT LA COMMUNION.ACTE DE FOI.Vous vous apprêtez à
descendre en moi, ô Dieu éternel, et rien n'annonce l'approche de votre divine
majesté. De même que dans la nuit sacrée de Bethléhem votre entrée fut humble
et silencieuse, aucun bruit, aucun éclat n'annoncera la visite que vous allez
me faire. Un petit enfant enveloppé des langes eucharistiques va venir en moi
sous l'apparence d'un pain léger et vil aux yeux de la chair, et je posséderai
en moi-même Celui qui a tiré toutes choses du néant, le Juge suprême des
vivants et des morts ! Oh ! combien je dois anéantir ma raison en présence d'un
si haut mystère! Mais combien aussi j'aime à contempler ces abaissements
incompréhensibles d'un Dieu qui ne s'humilie que pour me relever ! Ma raison ne
l'eût jamais pressenti, je le sais ; mais, bien loin de savoir ce que peut
l'amour infini d'un Dieu pour ses créatures, sais-je seulement ce que c'est que
mon néant et mon péché, cet autre abîme, au fond duquel vous descendez, ô mon
Sauveur, pour me chercher? O Dieu-Enfant, mon cœur touché et reconnaissant
croit à votre amour, et votre amour lui révèle votre puissance. Je viens à vous
sans raisonner, comme vinrent les bergers à la parole de l'Ange. Il leur fut
dit : Il vous est né un Sauveur qui est le Christ du Seigneur ; vous le
reconnaîtrez à la faiblesse de l'enfance, à l'humilité des langes, à la
pauvreté de la crèche. Aussitôt ils partirent, et étant arrivés ils
trouvèrent ce qui leur avait été annoncé, et ils crurent en lui. Ainsi je veux
faire moi-même, ô Jésus ! C'est votre enfance, ce sont vos langes, c'est votre
crèche que je cherche. Agréez donc, sous les voiles qui vous couvrent,
l'hommage de ma foi, et recevez-moi comme l'un de ces humbles bergers à qui
leur simplicité mérita la première place au céleste festin de Bethléhem. ACTE D'HUMILITÉ.Mais, ô Dieu enfant, les
bergers de Bethléhem ne vous furent pas seulement agréables par la simplicité
de leur foi ; ils vous plurent aussi par l'humilité de leur cœur. Vous aimez
les petits, ô mon souverain Roi ! et c'est pour cela même que ces heureux
pasteurs obtinrent l'insigne gloire d être préférés à tout le genre humain,
dans l'honneur qu'ils eurent de saluer les premiers votre berceau. Ainsi
l'humilité de Marie a été l'aimant qui vous attira du ciel dans ses chastes
flancs, et l'humilité des bergers vous porta à les appeler d'abord pour former,
avec Marie et Joseph, avec les saints Anges, votre auguste cour, dans cette
étable devenue un vrai paradis. Quelle admirable leçon vous me donnez, ô mon
Sauveur, à moi qui dois marcher à leur suite ; bien plus, qui vais vous
recevoir en moi-même ! Abaissez donc, ô Jésus, toutes les hauteurs de mon
esprit; humiliez toutes les répugnances de mon cœur. Abattez-moi au pied de
votre crèche, afin que je ne m'élève plus dans mon orgueil. Mais, ô mon Jésus,
non seulement vous aimez les petits ; vous
daignez encore vous faire petit pour
vous unir à ma bassesse. C'est comme un faible enfant que vous venez à moi, c
Dieu suprême ! A votre approche, je me confonds, je m'abîme dans mon néant,
moi, jusqu'ici si éloigné de l'humilité et de la simplicité de l'enfance. Dans
votre sagesse souveraine, vous cherchez l'étable et la crèche pour y naître :
entrez dans mon cœur. Bethléhem ne vous offrit rien d'aussi digne de cette
grandeur qui aime à descendre dans ce qu'il y a de plus infime, de cette
lumière qui se plaît à illuminer les plus profondes ténèbres. ACTE DE CONTRITION.Mais, ô Dieu de sainteté,
l'étable et la crèche, tout indignes qu'elles fussent de votre majesté, n'avaient du moins rien qui blessât
vos regards. Dans ce monde, ouvrage de vos mains, quel lieu, quel objet eussent
été dignes de vous servir de berceau ou de palais ? Votre grandeur, votre divinité que vous portez partout, suffiraient à changer en habitation digne de vous tout recoin de ce monde que vous eussiez daigné choisir pour y naître. Il n'y avait qu'un lieu indigne de vous, et dans
lequel votre gloire pût refuser de descendre : le
cœur de l'homme pécheur. C'est là l'étable vraiment infecte, la crèche
avilissante pour votre majesté. Pourquoi
faut-il, ô mon Sauveur, que les restes du péché que je sens en moi, les cicatrices encore saignantes des blessures qu'il m'a faites, m'avertissent que mon cœur a été cette
étable, cette crèche honteuse que vous ne pouviez visiter qu'après les avoir purifiées
par votre grâce? Je déplore, ô mon Sauveur, l'état dans lequel le péché m'avait
mis par ma faute. A vous voir ainsi humilié sous les livrées de l'enfance, je comprends tout à la fois la
grandeur de ma malice qui demandait de tels remèdes, et l'immensité de votre
amour qui n'a pas dédaigné de me les apporter. Oh ! combien je renonce de
tout mon cœur au péché ! Combien je veux le poursuivre désormais en moi,
jusqu'à ce que j'en aie extirpé les dernières racines ! O Jésus ! je me
souviens de cette parole : Heureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu'ils
verront Dieu. Le moment est venu où je vais
vous voir et approcher de votre berceau ; purifiez donc mon cœur, et chassez-en à jamais le péché et l'attache
au péché. ACTE D'AMOUR.Puisse donc, ô Dieu-Enfant,
ce cri de mon cœur qui déteste son péché, arriver jusqu'à vous et m'obtenir
votre clémence ! Quand du fond de votre crèche vous vous pencherez vers moi,
quand vous arrêterez sur ma misère vos yeux si doux et si pleins de pardon, mon
âme tressaillira, et je sentirai alors que tout est oublié, ô Dieu de
miséricorde ! Mais je ne veux pas seulement vous apporter un cœur qui cric
merci. Je sais, ô Jésus, que si vous exigez en moi la componction de mes
fautes, vous voulez surtout l'amour de mon cœur. Ce mystère de votre enfance,
qu'est-il autre chose qu'un mystère d'amour? Vous venez à moi parce que vous
m'aimez : vous venez avec la faiblesse de l'enfance pour encourager mon amour,
en bannissant toutes mes craintes. C'est donc l'amour que je dois vous offrir
en ce moment. Mais, ô Jésus, où le prendrai-je, cet amour qui soit digne d'être
mis en rapport avec le vôtre, si généreux, si immense, si tendre surtout :
l'amour d'un Dieu-Enfant qui daigne traiter l'homme comme un frère bien-aimé?
J'oserai pourtant vous le dire en présence de cette crèche et de ces langes,
magnifiques trophées d'un amour jusqu'alors inconnu : Je vous aime, ô
Jésus-Enfant ! Je m'approche de vous pour vous aimer davantage. Je ne veux plus
vous fuir ; vous désirez vous unir à moi par l'amour: je ne cesserai de
soupirer pour vous, jusqu'à ce que je vous aie reçu dans mon cœur; jusqu'à ce
que, consommé dans l'unité avec vous, je ne fasse plus qu'une même chose avec
vous, suivant votre parole : Celui qui mange ma chair demeure en moi, et moi
en lui. O Jésus, échauffez mon cœur, comme celui des bergers aux approches
de l'étable ; comme celui des Mages à la vue de l'étoile, au moment où elle
fixe le terme de leur voyage en s'arrêtant sur Bethléhem, la Maison du Pain ;
comme celui du vieillard Siméon quand il aperçoit le Christ du Seigneur entre
les bras de Marie sa mère, et qu'il voit enfin s'accomplir toutes les promesses
qu'il avait reçues de l'Esprit-Saint. Mon cœur vous présente, ô Jésus, en ce
moment, tout l'amour de ces saints, et aussi tout l'amour de Marie elle-même,
tout l'amour des saints Anges et de tous les élus ; agréez donc, ô Sauveur si
riche en amour, ce supplément à la pauvreté de mon coeur, et daignez venir en
lui pour l'enrichir de l'or précieux de la charité. ACTE DE DÉSIR.Je vous aime, ô Dieu-Enfant !
et c'est pour cela que je vous désire et que je vous appelle. Et comment ne
vous désirerais-je pas, vous le désiré des collines éternelles ?
N'est-ce pas vous quiètes la lumière et la vie ? Oh ! venez, divin Soleil de
justice, illuminer mes ténèbres, rendre la vie à mon âme qui défaille sans
vous. Les nations vous attendent comme leur libérateur. L'Eglise votre Epouse
languit d'amour, jusqu'à ce que vous veniez la visiter. Abraham, dans les
limbes, et tous les Patriarches soupirent après votre jour. Joseph, l'heureux
époux de Marie, tressaille de voir enfin venue l'heure sacrée où les chastes flancs
delà Vierge ne cacheront plus le Fils de l'Eternel. Les bergers disent : Hâtons-nous
de passer jusqu'à Bethléhem, et voyons Celui que le Seigneur nous a manifesté.
Les Mages ont à peine vu l'étoile, qu'ils s'élancent vers Celui qui est l'Etoile
de Jacob. Siméon, poussé par l'Esprit divin, s'avance, malgré les années,
au-devant du Sauveur que Dieu a préparé. Anne la prophétesse survient
tout à coup avec une ardeur inconnue à sa vieillesse, et vient contempler Celui
qui est la consolation d'Israël. Tout s'ébranle, ô Jésus ! toute la création
court au-devant de vous ; les Anges eux-mêmes descendent du ciel pour vous
voir, vous adorer dans la crèche et sous les langes. Daignez donc permettre
que, moi aussi, je m'empresse vers vous ; que mon coeur vous appelle et vous
désire avec une ardeur sinon égale, du moins aussi vive qu'il la peut
concevoir. Je vous appelle donc, ô divin Enfant ! je vous offre tous ces vœux,
tous ces désirs de tant de Saints ; j'y joins les miens, tout faibles qu'ils
sont. Venez donc, descendez vers moi ; que mon cœur enfin vous rencontre et
s'unisse à vous. O Marie, Vierge Mère du Messie, aidez-moi en ce moment à
l'aimer comme vous l'avez aimé : introduisez-moi en Bethléhem dont vous êtes la
Reine. Saints Anges, recevez-moi dans vos chœurs, entourez-moi de vos célestes
influences, couvrez ma nudité de vos
ailes sacrées. Saints et Saintes de Dieu, par les délices que vous avez goûtées
dans le Dieu de Bethléhem, ne me délaissez pas à cette heure ; soyez près de
moi, au moment où le souverain Seigneur qui vous remplit de son amour et de sa
lumière, va daigner descendre au milieu de mes ténèbres et de ma misère. Pour compléter cette préparation, suivez avec foi et avec une religieuse attention tous les mystères de la Messe à laquelle vous devez communier, produisant les actes que nous avons exposés au Chapitre V; et quand vous aurez reçu la visite du Seigneur, vous pourrez vous aider des prières suivantes, dans l'Action de grâces qui vous reste à faire. APRÈS LA COMMUNION.ACTE D'ADORATION.Vous êtes donc descendu en
moi, ô mon souverain Seigneur ! vous reposez donc en mon cœur comme dans le
berceau que vous avez choisi, Enfant divin ! Mon cœur est donc en ce moment
comme une nouvelle Bethléhem, ô Pain des Anges ! Je m'anéantis dans mes
adorations, à la vue d'une si haute majesté qui a daigné descendre jusque dans
de si abjectes profondeurs. Gloire à vous, ô Jésus, dans les hauteurs
du ciel, disent les saints Anges ; j'ajouterai : Gloire à vous, ô
Jésus, dans les abîmes de misère et de faiblesse que vous visitez avec tant de
clémence ! Qui me donnera en ce moment, ô céleste Enfant, de vous présenter un
hommage digne de vous ? Marie, votre très pure et très heureuse Mère, vous
ayant glorieusement enfanté, vous plaça dans la crèche avec ses mains
virginales, puis celle qui était votre Mère se prosterna comme votre servante,
et elle vous adora profondément. Vous daignâtes, ô Jésus, agréer cet hommage,
le plus glorieux que votre majesté eût jamais reçu sur cette terre coupable.
Souffrez que je l'imite, cette Mère si chérie de vous, que je vous adore en ce moment avec elle, ô mon souverain Roi ! Ne
voyez que son hommage dans le mien: elle est aussi ma Mère ; tous ses biens,
tous ses mérites m'appartiennent. Je vous offre encore les adorations de cet
homme juste, le chaste époux de la Vierge, l'admirable Joseph, confident des
mystères de Nazareth, témoin aussi de la touchante merveille de Bethléhem. Que
ne puis-je arriver à la grandeur des sentiments de cet homme simple et fort,
choisi entre les mortels pour veiller sur votre enfance ! Enfin, ô Jésus, je
vous adore avec les Anges, avec les Bergers, avec les Mages, avec Siméon, avec
Anne, avec toute l'Eglise de la terre et du ciel qui contemple dans son
admiration le sublime miracle de vos abaissements. ACTE DE REMERCIEMENT.Mais ce n'est point assez, ô
divin Enfant, de vous adorer dans ma bassesse ; il me faut encore vous
remercier dans ma reconnaissance. Quel honneur ne me faites-vous pas? quelles
délices ne me procurez-vous pas ? Voici que par votre bonté je suis devenu, moi
pécheur, une Bethléhem vivante, qui possède en soi le Pain de vie ; mon cœur a
été choisi non plus pour trône, mais pour berceau, par votre insigne Majesté
descendue jusqu'à moi. Les saints Anges vous adorent et vous louent ; mais vous
ne reposez pas dans leurs bras. Les bergers vous contemplent avec simplesse et
amour; mais vous ne vous laissez pas toucher par leurs mains. Les Mages
déposent à vos pieds leurs présents ; mais, suivant la prophétie, ils ne font
que baiser la terre autour de votre berceau. Heureux donc le vieillard Siméon
qui vous reçoit dans ses bras ; mais plus heureux moi-même qui vous ai reçu
dans ma bouche, ô Pain de vie, et qui vous garde présentement dans mon cœur!
Soyez donc béni et exalté, ô Dieu, si accessible à la plus indigne de vos
créatures ! Je vous rends grâces, je vous glorifie avec les bergers qui, venus
en toute hâte à Bethléhem, s'en retournèrent glorifiant et louant Dieu de tout
ce qu'ils avaient vu et entendu ; à quoi l'Evangéliste ajoute que tous ceux qui
les entendirent furent ravis d'admiration. Moi aussi, j'ouvrirai la bouche, et,
empruntant la parole du fils de Bethléhem, David votre aïeul, je dirai dans ma
joie : O vous tous qui craignez le Seigneur, venez, et je vous raconterai
quels biens il a faits à mon âme. ACTE D'AMOUR.Vous m'avez donc aimé, ô mon
Hôte divin, puisque vous m'avez ainsi comblé des dons de votre amour ! Comment
ne vous aimerais-je pas moi-même de toute l'étendue de ce cœur que vous habitez
? Soyez donc aimé, ô divin Enfant ! C est dans ce but que vous avez déposé tout
votre éclat, anéanti toute votre grandeur ; que vous êtes amoindri jusqu'à
cette forme d'esclave, et d'esclave enfant. Non, je ne tremble plus à votre
aspect ; je vous approche sans être ému d'autre sentiment que celui de la
confiance et de l'amour. O vous qui deviez être mon juge terrible, vous reposez
maintenant dans mon cœur, comme dans le berceau que vous avez choisi ; vous
vous êtes mis à ma discrétion ; vous êtes à moi, et je suis à vous, suivant
votre parole. Ah 1 ne me quittez jamais, Sauveur si aimable ! Vivez, croissez
dans mon cœur ; régnez-y par l'amour. Je vous offre, comme supplément à mon ime
puissance, l'amour avec lequel Marie votre très pur-Mère vous pressait sur son
sein virginal dans ces premiers jours de votre vie mortelle ; l'amour avec
lequel Joseph, son chaste époux, et votre père nourricier, vous prodiguait tous
les soins de sa tendresse; l'amour avec lequel les pasteurs de Bethléhem
contemplaient, sous les langes et dans la crèche, la merveille d'un Sauveur né
pour eux ; l'amour avec lequel les Mages déposaient à vos pieds leurs
trésors, et oubliaient, à la vue de votre berceau, les fatigues d'une longue
course à la suite de l'étoile ; l'amour avec lequel l'heureux Siméon, vous
prenant dans ses bras, sentait défaillir sa vie mortelle et poindre pour lui le
four de l'éternité ; enfin l'amour des saints Anges, dont la félicité, comme
nous l'apprend le saint Apôtre, est de reposer éternellement leurs regards sur
votre immortelle beauté, devenue ici-bas, sous les doux traits de l'enfance,
accessible aux yeux mêmes des pécheurs. Recevez donc, ô mon divin trésor,
recevez mon cœur avec tous ces cœurs qui vous aiment, et demeurez à jamais en
moi et moi en vous. ACTE D'OFFRANDE.Mais ce n'est pas assez de
vous aimer, ô céleste Enfant ! Il faut encore que je me donne à vous. Vous
m'êtes venu chercher, si bas que je fusse descendu ; et afin que je ne vous
fuie plus, vous êtes venu prendre votre habitation dans mon coeur, dont vous
avez fait votre Bethléhem, ô Pain de vie ! Vous voulez que je devienne enfant
comme vous, que j'abaisse toutes mes hauteurs, toutes mes révoltes au pied de
votre berceau ; que ma fausse sagesse s'anéantisse devant les leçons de votre
crèche; que mes yeux accoutumés à une lumière trompeuse se renouvellent en
contemplant la simplicité de vos langes. O Jésus ! vous êtes le Roi des
enfants, comme le dit un grand génie chrétien : je me donne donc à vous
pour être enfant à votre suite. Agréez l'hommage de ma docilité ; faites
qu'elle soit constante, et qu'elle procède toujours de l'amour. J'abjure, ô mon
Sauveur, tout ce qui, dans ma vie passée, dans mes idées et mes affections, a
été contraire à vos vues : vous m'avez introduit trop près de vous pour que je
ne sois pas désormais tout à vous. Je veux donc imiter les Mages qui, après
vous avoir adoré, s'en retournèrent par une autre voie dans leur patrie.
Puisse cette enfance que j'ai commencée près de vous, devenir en moi le
principe d'une vie nouvelle, qui n'aura plus rien de commun avec l'ancienne !
Siméon, vous ayant reçu dans ses bras, ne voulut plus vivre que pour l'éternité
; moi qui vous possède dans mon cœur, je vous demande de vivre avec vous dans
le temps : je m'offre à vous servir toute ma vie, pour mériter de vous être uni
à jamais dans la gloire et la félicité de votre paradis. O Mère de Dieu, Marie !
conservez en moi les fruits de la visite qu'a daigné me faire votre divin Fils.
Anges de Dieu, qui l'adorez en moi, veillez à la sainteté et à la pureté de
cette demeure qu'il s'est choisie. Saints et Saintes, priez, afin que je sois
fidèle à Celui que vous avez aimé sur la terre, et que vous aimerez
éternellement au ciel. |