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REMARQUES  HISTORIQUES.

 

Comme l'annonce le titre même de cet ouvrage, l'Histoire des Variations relève les perpétuelles fluctuations des églises protestantes dans la foi ; elle raconte comment les réformateurs, sans autre règle que la passion du jour et l'emportement du lendemain, juraient le oui et le non sur toutes les questions ; elle montre l'évangile du XVIe siècle formé successivement pièces par pièces, puis abattu cent fois de fond en comble, puis cent fois reconstruit d'après un plan nouveau sur de nouvelles bases. Devant ce portrait, la Réforme, se reconnaissant elle-même, recula de frayeur ; elle craignit que sa fidèle image ne lui ravît, avec la confiance des peuples, le pouvoir absolu dans la doctrine, dans la morale et dans la spoliation des monastères ; elle s'arma tout entière pour combattre le livre qui la représentait au naturel. Trois hommes se distinguèrent dans cette prise d'armes générale : Jurieu, Basnage et Burnet.

 

I.

 

Dès les premières pages de sa réfutation, Jurieu (1) ne révolta pas moins les protestants que les catholiques. Le principe fondamental du

 

1 Né à Mer près de Blois, en 1637, Jurieu fréquenta les universités de Hollande et celles d'Angleterre, remplit quelque temps les fonctions de ministre dans sa ville natale, et fut appelé comme professeur de théologie à l'université de Sedan. Après la suppression de cette université, se voyant poursuivi pour un libelle diffamatoire, il alla chercher un refuge en Hollande, et retrouva une chaire de théologie à Rotterdam. De ce moment il se mit à composer une foule d'ouvrages, qui paraissaient plus vite qu'on ne pouvait les lire, disaient ses admirateurs. On a distingué parmi ces ouvrages : le Préservatif contre le changement de religion, réponse à l’Exposition de la doctrine catholique; la Politique du clergé de France pour détruire la religion protestante ; Les derniers efforts de l'innocence affligée; Histoire du calvinisme et du papisme mis en parallèle; L'Esprit de M. Arnauld ; L'accomplissement des prophéties, ou la Délivrance prochaine de l'Eglise.; l'Histoire critique des dogmes et des cultes bons et mauvais depuis Adam jusqu'à Jésus-Christ. Ces ouvrages sont remplis de paradoxes et de faussetés, d'invectives et d'injures, de rêves et d'hallucinations prophétiques; ils ne vivent plus que par le souvenir des querelles qu'ils ont suscitées et par le mérite des réponses qu'ils ont provoquées. Nous n'avons  garde   d'oublier les Lettres pastorales adressées aux fidèles de France; c'est l'ouvrage que la zélé professeur opposa au livre des Variations.

 

II

 

livre des Variations, c'est que « la foi ne varie pas dans la vraie Eglise, » parce que « la vérité venue de Dieu a d'abord sa perfection. » Jurieu, qui pourrait le croire ? contesta ce principe incontestable ; il dit : La religion chrétienne s'est formée « pièce à pièce, » et « la vérité de Dieu ne s'est établie que par parcelles. » En effet dans les trois premiers siècles, les chrétiens tombaient dans de graves erreurs, et sur la Trinité, parce qu'ils ne croyaient pas le Fils égal au Père ; et sur Dieu même, parce qu'ils le revêtaient d'un corps et détruisaient par là même son immensité. Ils ne connaissaient pas mieux la grâce divine : c'est saint Augustin qui, le premier, a mis en lumière ce point de dogme; avant lui, les Pères étaient, les uns stoïciens et manichéens, les autres pélagiens ou du moins semi-pélagiens.

Quoi ! la Sagesse éternelle, venue du plus haut des cieux, n'a pu dissiper sur la terre les ténèbres de l'erreur ! Le Tout-Puissant, celui «par qui toutes choses ont été faites,» n'a pu terminer son œuvre, c'est une main mortelle qui a mis le comble à son édifice ! Bossuet a bientôt fait justice de cette folie. Il cite d'après Jurieu, bien qu'on pût le mieux traduire, dit-il, un des plus beaux monuments de l'antiquité chrétienne : « L'Eglise de Jésus-Christ, soigneuse gardienne des dogmes qui lui ont été donnés en dépôt, n'y change jamais rien : elle ne diminue point, elle n'ajoute point; elle ne retranche point les choses nécessaires, elle n'ajoute point les superflues (1). » Mais s'il en est de cette sorte, si l'Eglise se contente de garder le dépôt, si elle n'ajoute ni ne retranche aux dogmes révélés, à quoi bon les décisions dogmatiques ? à quoi bon les conciles ? Bossuet répond encore avec Vincent de Lérins « que les conciles, à l'aide de leurs décisions, donnent par écrit à la postérité ce que les anciens avaient cru par la seule tradition ; qu'ils expriment en peu de mots le principe et la substance de la foi ; que pour en faciliter l'intelligence, ils expriment par quelque terme nouveau

 

1 Vinc. Lirin. Comm. 1.

 

 

III

 

mais précis, la doctrine qui n'avait jamais été nouvelle : » Dicunt nové, non nova (1). Voilà le sujet du Premier avertissement.

Après avoir attaqué les Pères des trois premiers siècles, Jurieu défend les apôtres du XVIe. Je n'ai jamais reconnu, dit-il, que les réformateurs aient rejeté sur Dieu la cause du mal, j'appelle devant le souverain Juge l'imposteur qui n'a pas craint de m'imputer cet aveu. Mais qu'on me dise si la doctrine des thomistes ne fait pas Dieu auteur de toutes choses, et par conséquent du péché ; ou qu'on m'explique comment la grâce efficace s'accorde avec la liberté morale.

Sur le premier point, cité « devant le tribunal de Dieu comme un insigne calomniateur, » Bossuet répond qu'on y récitera l'aveu de Jurieu ; car le ministre avait adressé ces paroles aux luthériens : « Ce n'est pas seulement par leur silence ou par l'approbation que vos réformateurs ont été de durs prédestinateurs, et ont enseigné en paroles expresses, et encore les plus dures,... la prédestination et la réprobation avec une nécessité qui provient des décrets. Que Mélanchthon paroisse le premier : c'est de lui qu'est cette parole que nos calomniateurs ont tant relevée, que l'adultère de David et la trahison de Judas n'est pas moins l'œuvre de Dieu que la conversion de saint Paul (2). » Voilà comment le guerroyeur évangélique s'enveloppait dans ses propres manœuvres ; emporté de son naturel et donnant tête baissée contre une foule d'ennemis, il se jetait à l'endroit menacé sans se rappeler ses premières évolutions. — Venant au second défi de, son adversaire , Bossuet développe une savante et profonde théorie, qui met en lumière toute l'économie de la foi: « Jurieu voudrait, dit-il , que je lui apprisse comment j'accorde le libre arbitre, ou le pouvoir de faire ou ne faire pas, avec la grâce efficace et les décrets éternels. Faible théologien qui fait semblant de ne savoir pas combien de vérités il nous faut croire, quoique nous ne sachions pas toujours le moyen de les concilier ensemble !... Qu'est-ce en tout et partout que notre foi, qu'un recueil de vérités saintes qui surpassent notre intelligence, et que nous aurions non pas crues, mais entendues parfaitement et évidemment, si nous pouvions les concilier ensemble par une méthode manifeste?... Mais cela n'est pas ainsi : et quand cela sera, ce ne sera plus cette vie, mais la future; ce ne sera plus la foi, mais la vision. » Telles sont les idées fondamentales du Second avertissement.

Jurieu poursuit son apologie sur le terrain de l'Eglise. Quand les réformateurs se levèrent sur le monde , comme ils retrouvèrent partout l'ancienne croyance, ils sentirent qu'ils ne pourraient sans une  cruauté ridicule   condamner aux flammes  éternelles  la foule

 

1 Vinc. Lirin., Com. 1.— 2 Consult. de ineund. pace, p. 209.

 

IV

 

innombrable des fidèles qui avaient professé durant quinze siècles, et dans tout l'Occident et dans tout l'Orient, la foi catholique; ils accordèrent qu'on pouvait se sauver dans l'Eglise romaine. Cette concession nécessaire, commandée par l'instinct de la conservation personnelle, devint funeste à la Réforme; sitôt que l'enthousiasme eut fait place à la réflexion, les protestants capables d'unir deux idées raisonnèrent ainsi : Puisque, d'une part, les maîtres de la Réforme reconnaissent qu'on peut se sauver dans l'Eglise romaine; puisque, de l'autre côté, les chefs de l'Eglise romaine enseignent qu'on ne peut faire son salut dans la Réforme, prenons le parti le plus sûr ; et les hommes droits, et les magistrats intègres, et les princes libres de convoitise et de cupidité, tous imitant l'exemple de Henri IV, retournaient à la religion de leurs pères. Que fit-on pour arrêter cette défection générale ? Un docteur rétrécit le chemin du ciel sur le terrain catholique : On peut à la vérité se sauver dans l'Eglise romaine, dit Claude; on le peut, mais à condition de professer sa doctrine sans y croire. Cette invention du plus habile des protestants n'eut pas de succès ; peu voulurent, même dans la Réforme, faire du salut le privilège exceptionnel des hypocrites. C'est alors que Jurieu produisit son fameux système sur l'Eglise; il dit qu'on pouvait gagner le ciel, non-seulement dans l'Eglise romaine, mais dans toutes les sectes chrétiennes, parce qu'elles reconnaissaient toutes les dogmes fondamentaux de l'Evangile.

Bossuet lui demanda sur quelle règle il distinguait, parmi les vérités révélées, des dogmes obligatoires et des dogmes libres ; de quel droit il assignait, dans l'enseignement de la Sagesse éternelle, des oracles qu'il faut croire et des oracles qu'on peut rejeter; enfin quels sont les articles fondamentaux, et quels les non fondamentaux. Jurieu répondit qu'il n'entendait pas s'engager dans cette question délicate. Bossuet n'eut pas de peine à le forcer dans ce retranchement; il le poussa de conséquence en conséquence jusqu'à la tolérance absolue de toutes les religions. A cela si l’on ajoute une profonde discussion sur la canonicité des Ecritures, on aura le fonds du Troisième avertissement. Jurieu passe du dogme à la morale. On sait comment les premiers réformateurs, Luther, Mélanchthon, Bucer et d'autres, légitimèrent la polygamie païenne dans le christianisme, en permettant au landgrave de Hess de garder comme légitimes épouses deux femmes à la fois. Au lieu de condamner cette honteuse et criminelle forfaiture, Jurieu s'efforça de la justifier par des distinctions peu sérieuses, à l'aide des subtilités les plus grossières; il dit que les lois du mariage sont purement humaines, qu'ainsi la nécessité peut en suspendre l'obligation : cela est si vrai, continue-t-il, que les enfants de Noé, comme ceux d'Adam, se marièrent frères et sœurs.

 

V

 

Avant toutes choses Bossuet retranche la dernière assertion. Où Jurieu a-t-il rêvé ses prétendus mariages pendant le déluge ? L'Ecriture dit expressément, en plusieurs endroits, que les trois fils de Noé avaient choisi leurs femmes avant d'entrer dans l'arche, lorsque la terre était toute pleine d'habitants (1). Ensuite le mariage repose sur les lois de la nature. Dès l'origine Dieu dit au premier couple de notre race, et plus tard aux enfants de Noé : « Croissez et multipliez, et remplissez la terre (2). » Qui n'entend dans ce précepte divin la voix de la nature, qui ne veut pas périr, parce que son Auteur l'a faite pour durer? C'est pour cela qu'il a créé les deux sexes, qu'il les a bénis, qu'il leur a donné la fécondité et comme une image de l'éternelle génération de son Fils; en sorte que leur union n'est pas moins d'institution naturelle que leur distinction. « Et quand il bénit l'amour conjugal comme la source du genre humain, il ne lui permit pas de s'épancher sur plusieurs objets, comme il arriva dans la suite lorsqu'un même homme eut plusieurs femmes; mais réduit à l'unité de part et d'autre, il en fit le lien sacré de deux cœurs unis..... C'est sur cette idée primitive que Jésus-Christ réforma le mariage ; et, comme disent les Pères, il se montra le digne Fils du Créateur, en rappelant les choses au point où elles étaient à la création. » Ce lien sacré qui entoure la famille, cette unité divine qui fait un seul cœur de deux cœurs, cette mystérieuse image de l'union de Jésus-Christ avec son Eglise, Jurieu la détruit au nom d'une nécessité qui n'a jamais été invoquée que parmi les païens, les Turcs et les réformés. Partout et toujours la parole protestante conspire à la débauche. Voilà pour le Quatrième avertissement.

Jurieu aborde le champ de la politique. A l'origine, encore enveloppée de ses langes, la Réforme prêchait la douceur, la patience, la fidélité ; elle voulait à l'exemple de la Victime adorable se laisser traîner à la boucherie, et lasser comme les premiers chrétiens la hache des bourreaux. Mélanchthon disait : « Il vaut mieux souffrir les dernières extrémités que de prendre les armes pour l'évangile (réformé); » et Luther lui-même : « Les abus doivent être ôtés, non par la main, mais par la parole; » le papisme allait tomber par le souffle de sa doctrine, « pendant qu'il boirait sa bière et tiendrait de doux propos au coin de son feu avec ses amis. » Les réformés d'en deçà du Rhin n'étaient ni moins doux ni moins pacifiques : Calvin faisait à François Ier, au nom des siens, des protestations d'une inébranlable fidélité, et Bèze comparait la Réforme à une enclume faite uniquement pour recevoir les coups. Ainsi le lionceau se jouait dans son antre, mais il poussera bientôt d'affreux rugissements : bientôt Luther appellera

 

1 Gen. VI-X. — 2 Gen. I, 28; IX, 1.

 

VI

 

le Pape « un loup enragé, » qu'il faut traquer comme une bête fauve, ses premiers apôtres agiteront les torches de la discorde, les ministres du saint évangile sonneront le tocsin ; et les peuples se soulèveront comme les flots de la mer à la voix des synodes, par décisions dogmatiques, pour obéir à la bienheureuse religion réformée ; et des bandes indisciplinées, portant partout le fer et la flamme, couvriront l'Europe de ruines et [de sang. Jamais docteur ne se contredit plus formellement; jamais variation dans la doctrine ne fut plus désastreuse. Jurieu ne conteste ni ce changement de front ni ces forfaits; il tâche de justifier ses maîtres par le droit d'insurrection, « le plus saint des devoirs.» Reprenant la doctrine des donatistes, des manichéens, de tous les hérétiques, pour placer le pouvoir dans la multitude, il pose les trois principes que voici : 1° « C'est le peuple qui donne la souveraineté : donc il la possède; » 2° « Il est contre la raison qu'un peuple se livre à un souverain sans quelque pacte; » 3° « Le peuple n'a pas besoin d'avoir raison pour valider ses actes. » Le professeur calviniste développe ces principes avec une force de logique peu commune; il pourrait en remontrer aux disciples de Lamennais, à tous les jacobins du jour.

Bossuet renverse tout cela de fond en comble. « Le peuple donne la souveraineté; donc il la possède? » N'est-ce pas le contraire qu'il faut conclure : donc il ne la possède pas, puisqu'il l'a donnée ? Et si l'on considère le peuple dans l'état social, la souveraineté est dans la main du chef et ne se donne pas ; si on le prend dans l'état d'indépendance et d'anarchie, la souveraineté n'est nulle part et personne ne peut la déléguer. Ensuite à quoi bon les conventions sociales ? Si le pouvoir veut observer la justice, elles sont inutiles; s'il ne le veut pas, elles seront éludées par la ruse ou brisées parla force. En affaiblissant l'autorité pour le mal, vous l'affaiblissez d'autant pour le bien. Enfin si le peuple n'afpas besoin d'avoir raison pour valider ses actes, il crée lui-même le juste et l'injuste, ou plutôt le juste et l'injuste sont de vains mots. Au reste Bossuet ne connaît point, à Dieu ne plaise ! le pouvoir illimité ; il place les princes sous la domination de la justice divine, qui leur impose des obligations d'autant plus impérieuses , qu'ils sont plus indépendants de la justice humaine. « Les monarchies les plus absolues, dit-il, ne laissent pas d'avoir des bornes inébranlables dans certaines lois fondamentales , contre lesquelles on ne peut rien faire qui ne soit nul de soi... On n'a pas besoin d'armer l'oppressé contre l'oppresseur : le temps combat pour lui, la violence réclame contre elle-même.....»

Ni le souverain ne décide tout dans un état monarchique, ni le peuple ne gouverne dans un état démocratique ; je pose en fait qu'un démagogue exerce autant de pouvoir dans les républiques helvétiques, que l'autocrate dans la monarchie moscovite. Ce qu'on

 

VII

 

vient de lire peut donner une idée générale du Cinquième avertissement.

Jurieu va finir par où il a commencé. Nous avons vu que, pour justifier les variations de la Réforme, il soutient que l'Eglise elle-même a varié dans la foi : si nous l'en croyons, les Pères des trois premiers siècles ont méconnu l'immutabilité de l'Etre divin, puisqu'ils plaçaient la génération du Fils dans le temps ; méconnu la Trinité, puisqu'ils n'admettaient pas la distinction, la coexistence et l'égalité des Personnes adorables; méconnu aussi la vraie notion du culte chrétien, attendu qu'ils ont rétabli le paganisme par l'invocation des Saints. Et ce que je dis là, continue le ministre réformé, plusieurs théologiens catholiques le disent aussi ; Pétau et Huet, par exemple, trouvent dans les écrits des premiers Pères toutes les erreurs que j'y trouve moi-même : erreurs, toutefois, qui n'empêchaient point le salut, parce que la vraie doctrine n'avait pas encore été nettement formulée.

Avant tout Bossuet, dans une sorte de confrontation, met en présence le fait et l'assertion, l'accusé et l'accusateur : il montre comme dans un tableau, d'un côté, les Pères développant sur l'Etre ineffable et sur la Trinité les conceptions les plus sublimes et tout ensemble les plus conformes à la foi; de l'autre côté, Jurieu pratiquant mille manœuvres frauduleuses, torturant les textes les plus clairs pour leur faire méconnaître, tantôt l'éternelle génération du Fils, tantôt la consubstantialité des Personnes divines. Quant aux théologiens modernes, si le P. Pétau, dans le IIe volume des Dogmes théologiques, juge sévèrement quelques passages des Pères, il explique sa pensée dans le IIIe volume. Il en faut dire autant du docte Huet; à peine a-t-il prononcé une parole de blâme contre les témoins de la tradition, qu'il l'adoucit bientôt après.

Ensuite le prélat catholique contraint le ministre protestant de tolérer une secte qu'il  a vivement combattue , le socinianisme. Vous accordez, lui dit-il, qu'on pouvait indifféremment, dans la primitive Eglise, admettre ou rejeter le dogme de la Trinité : pourquoi ne pourrait-on plus aujourd'hui, sans préjudice du salut, croire ou ne croire pas ce profond mystère ? Pourquoi déployez-vous, contre les chrétiens du XVIIe siècle, une rigueur que vous n'avez pas contre les chrétiens des trois premiers siècles ?

Enfin notre auteur signale la cause des variations qui font du protestantisme un flux et reflux continuel de contradictions. Le principe fondamental de la Réforme, c'est que l'Ecriture sainte est la seule règle de foi. Dans ce système, tout le monde le voit, plus d'autorité doctrinale, plus de corps enseignant, plus de pasteur revêtu d'une mission divine. Qui donc instruira l'enfance, les simples, les hommes livrés aux choses du siècle, c'est-à-dire les dix-neuf vingtièmes du genre humain? Disons mieux : qui discernera les livres canoniques ? qui les

 

VIII

 

traduira dans les langues vulgaires ? qui dévoilera les obscurités mystérieuses qui les enveloppent? qui démêlera les différents sens qu'ils offrent à l'esprit? Donner aux hommes un livre muet pour toute règle de croyance, c'est consacrer du même coup toutes les erreurs de l'ignorance, toutes les illusions du fanatisme et toutes les révoltes de l'orgueil; c'est livrer la vérité divine à tous les vents des opinions humaines; c'est vouloir qu'il n'y ait plus de religion, ou qu'il y en ait autant que de têtes. Voyez plutôt la Réforme : qu'est-elle aujourd'hui, qu'un assemblage informe de mille assertions contradictoires, ou qu'une négation perpétuelle de tous les dogmes révélés ? Elle est tout au plus, comme Jurieu le disait du socinianisme, « une religion de plein pied, qui lève les difficultés et aplanit les hauteurs du christianisme. »

On a pu remarquer comme trois parties dans la discussion qu'on. vient d'esquisser; elles forment le Sixième avertissement, qui est le dernier.

 

II.

 

Depuis longtemps la Réforme était lasse, comme le remarque notre auteur, « de Jurieu et de ses discours emportés; » elle ne songeait nullement à lui confier sa cause; il s'arrogea lui-même la mission de la défendre. L'Histoire des Variations démantelait ses révélations prophétiques, en montrant dans les fastes du passé les faits qu'il annonçait dans les événements de l'avenir ; il voulut punir le téméraire audacieux qui n'avait pas craint de révoquer en doute l'infaillibilité de ses visions, et couvrit sa vengeance sous le manteau du zèle évangélique. Cependant le protestantisme attendait le salut d'une plume plus habile et moins inconsidérée ; il annonçait par un de ses organes, Burnet, « qu'on préparait une rude réponse à M. de Meaux. » Cette réponse parut avec ses duretés ; « mais les injures et les calomnies, dit Bossuet, sont des couronnes à un évêque et à des chrétiens. »

Nous sommes ramenés, dans la discussion qui s'ouvre en ce moment, aux révoltes des protestants contre l'autorité légitime, aux guerres parricides qu'ils firent à leur patrie, aux meurtres dans lesquels ils versèrent par torrents le sang de leurs frères. Pour justifier ces troubles et ces crimes, le nouveau défenseur de la Réforme,  Basnage (1) ne

 

1 Né à Rouen le 8 août 1653, Basnage de Beauval (Jacques) fit ses études à Saumur, à Genève, puis à Sedan sous Jurieu. Devenu pasteur du saint évangile dans sa ville natale, il épousa la petite-fille du fameux ministre Pierre Dumoulin. Pendant les troubles de religion, retiré en Hollande, il servit utilement son pays dans une négociation conduite par le cardinal Dubois. Tout le monde reconnaît sa droiture, sa franchise, sa véracité, de même que sa vaste et profonde érudition. Souvent aux prises avec Jurieu, pour flétrir ses nombreuses évolutions dans la doctrine, il répandit un catalogue de librairie, qui annonçait deux livres supposés, sous ces titres : Variations et contradictions de M. Jurieu, 10 vol.; Rétractations du même, 6 vol. Basnage a composé plusieurs ouvrages : Histoire de l'Eglise, 2 vol. in-folio; Histoire des Juifs, depuis Jésus-Christ jusqu'à présent, 5 vol. in-12 ; Antiquités judaïques, 2 vol. in-8° ; Histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament, in-folio, gravures en taille douce; Instructions pastorales aux réformés de France sur l'obéissance au souverain, etc. Le livre qu'il opposa à l'Histoire des Variations a pour titre : Histoire de la religion des églises réformées , dans laquelle on voit la succession de leur église, la perpétuité de leur foi depuis le huitième siècle : l'établissement de la réformation, et la persévérance dans les mêmes dogmes jusqu'à présent, avec une Histoire de l'origine et des principales erreurs de l'Eglise romaine,pour servir de réponse à l'Histoire des Variations des églises protestantes, de M. de Meaux. Rotterdam 1690, 2 vol. in-8°.

 

IX

 

recourt pas aux raisonnements de la métaphysique, comme Jurieu ; il invoque les faits de l'histoire. Il dit d'abord : N'est-il pas vrai que les catholiques persécutaient les protestants ?

Bossuet lui demanda à son tour, dans la Défense de l’Histoire des Variations, « si la Suède a révoqué la peine de mort qu'elle a décernée contre les catholiques; si le bannissement, la confiscation et les autres peines ont cessé en Suisse, en Allemagne et dans les autres pays protestants ; si l'Angleterre a renoncé à ses lois pénales contre les non-conformistes; si la Hollande elle-même a abrogé les décrets du synode de Dordrecht contre les arminiens. » On peut demander encore aujourd'hui : Les protestants ne sont-ils pas à l'état d'injustice et de spoliation permanente à l'endroit des minorités catholiques? Pour qui connaît l'histoire et l'état social de la Suisse, de la Prusse, de la Suède et du Danemark, de l'Angleterre et de l'Irlande, la réponse ne peut être douteuse.

Après ses vaines récriminations contre les catholiques, Basnage cite plusieurs exemples qui prouvent, selon lui, la légitimité de l'insurrection contre les persécuteurs de la foi; il assure qu'un soldat chrétien tua Julien l'Apostat, que le patriarche de Constantinople souleva le peuple contre l'empereur Anastase, et que les Arméniens chrétiens secouèrent le joug du roi de Perse pour se donner aux Romains.

Que conclure de tout cela ? Une chose sera-t-elle juste, par cela seul qu'elle a été faite par un chrétien ? En déclarant l'Eglise infaillible, dit Bossuet, nous ne déclarons pas les catholiques impeccables. Les faits allégués ne prouvent rien, et ils prouvent trop : ils ne prouvent rien, parce que l'Eglise n'a jamais approuvé la révolte, comme la Réforme l'a sanctionnée par les décisions les plus formelles ; ils prouvent trop, car ils vont à établir le droit non-seulement de se soulever contre l'autorité légitime, mais encore d'appeler l'étranger dans sa patrie et de porter une main violente sur la personne sacrée du souverain. Cette réponse générale doit suffire pour le moment, on trouvera l'examen des faits particuliers dans la Défense ; mais voici une observation qui mérite de fixer ici l'attention du lecteur. Parlant de l'Arménie,

 

X

 

Bossuet dit : « Il faudrait savoir à quelles conditions ce royaume était sujet à celui de la Perse. Car tous les peuples ne sont pas sujets à même titre, et il y en a dont la sujétion tient autant de l'alliance et de

la confédération que de la parfaite et véritable dépendance.....On ne sait pas si l'Arménie, en s'unissant à la Perse, n'avait pas fait ses conditions sur la religion chrétienne. » Ces paroles nous semblent caractéristiques dans la doctrine de Bossuet. Sans doute il enseigne, avec tous les Pères, que les premiers chrétiens gardèrent l'obéissance aux persécuteurs les plus féroces par devoir de conscience et non par prudence politique, pour observer les préceptes de la religion et non pour suivre les conseils évangéliques : mais il paraît admettre aussi qu'un peuple a le droit de pourvoir comme peuple à la conservation de sa foi, lorsqu'il est allié plutôt que sujet, lorsqu'il échappe à la souveraineté par quelque côté d'indépendance, quand sa religion a pour sauvegarde des garanties politiques, surtout quand elle forme une des bases de l'ordre social.

Il nous reste à caractériser, par quelques traits rapides, les attaques de Burnet (1). On sait que Bossuet a puisé dans un de ses ouvrages, l'Histoire de la Réforme en Angleterre. Que lui reproche le protestant d'outre-Manche ? Il fait un pompeux étalage de longues phrases et de grands mots, il répand l'injure et le sarcasme, il tonne contre les calomnies et les falsifications du papiste ; mais « il passe, comme le remarque Bossuet, tous les faits rapportés sur sa Réforme anglicane et sur son Cranmer, aussi bien que sur ses autres héros, sans en contrarier aucun; et comment aurait-il pu les contredire, puisqu'ils sont

 

1 Né à Edimbourg en 1643, Burnet fit ses études à l'université d'Aberdeen sous la direction de son père, habile jurisconsulte. Dans un de ses premiers ouvrages, il soutint la légitimité du divorce pour cause de stérilité. Il s'agissait pour le moment d'assurer le trône d'Angleterre au protestantisme, en procurant un héritier à Charles II par le moyen d'un second mariage ; mais le vent du lendemain changeant les intérêts de la secte, le canoniste changea le même jour de principes, et réfuta son propre ouvrage. Il parcourut ensuite l'Italie, la Suisse et l'Allemagne, recueillant partout des traits empoisonnés, qu'il décochait dans des pamphlets contre l'Eglise. Son rire sardonique et son habileté à se renier lui-même en firent un homme précieux pour la diplomatie; plusieurs grands politiques de ce temps-là réclamèrent ses services. Attaché particulièrement au prince d'Orange, il conspira contre son pays, et obtint l'évêché de Salisbury après l'usurpation. C'est alors qu'il composa l'Histoire de la Réformation d'Angleterre. Dans cet écrit, il proclame la vérité et l'erreur, distribue le blâme et l'éloge, fait du bien le mal et du mal le bien, selon les besoins de sa secte et de son ambition. En dépit ou plutôt à cause de ces jugements passionnés, le parlement lui vota des remerciements. Traduit par Rosemond, son ouvrage parut en français à Londres en 1683 et 1685, puis à Genève en 1683, 4 vol. in-12. C'est de cette traduction que Bossuet a tiré le récit déjà réformation en Angleterre. — La réponse de Burnet à l'Histoire des Variations n'a pas plus de 36 pages. 

 

XI

 

pris de lui-même? » L'évêque catholique avait mis en lumière, dans l'Histoire des Variations, la grossière ignorance du prélat réformé sur le droit public de la France ; il lui avait fait comprendre qu'il convient d'apprendre les choses avant d'en parler à la face du monde : dans la Défense du précédent ouvrage, il montre pour la seconde fois, par des faits nouveaux, qu'il n'a étudié nos lois qu'en passant dans les plus mauvais ouvrages des réformés les plus ignorants et les plus emportés; il prouve qu'il ne justifie ni les troubles et les révoltes que le protestantisme a fait éclater en France, ni les vols et les assassinats qu'elle a fait commettre en Angleterre.

Tels sont, dans leurs idées fondamentales, les Avertissements aux protestants et la Défense de l’Histoire des Variations. Dans le premier de ces ouvrages, Bossuet prouve que Jurieu, par ses calomnies contre les Pères, abaisse le christianisme et élève le socinianisme ; qu'il convainc la Réforme d'erreur et d'impiété, en montrant comment ses fondateurs rejettent sur Dieu la cause du mal moral ; qu'il reconnaît dans l'Eglise romaine, malgré ses déclamations, la justice et l'innocence qui produit le salut ; qu'il ne détruit point l'accusation, portée contre les premiers réformateurs, d'avoir violé la concorde et la sainteté du mariage chrétien ; enfin que le protestantisme, flottant sans point de repos à tout vent de doctrine, livre la vérité divine à tous les flots des opinions humaines. Le grand écrivain ne combat pas l'erreur moins victorieusement dans la Défense de l’Histoire des Variations; il fait voir que Basnage s'efforce vainement de justifier les révoltes de la Réforme, et que Burnet ne parvient pas à cacher ses crimes aux yeux les plus aveugles.

A toutes ces erreurs il faudrait ajouter, pour compléter le tableau, les injures que les défenseurs de la Réforme prodiguent à Bossuet : injures d'autant plus curieuses qu'elles sont répétées dans un autre camp, car l'ambition vulgaire et la prudence intéressée se range toujours du côté de l'ennemi pour condamner le courage et le dévouement qui sauve ses places et ses bénéfices.»Jurieu dit : « J'avertis l'évêque de Meaux qu'un évêque de Cour comme lui, et les autres dont le métier n'est pas d'étudier, devraient un peu ménager ceux qui n'ont pas d'autre profession. » Quoi ! Bossuet un évêque de Cour, lui qui vivait dans la solitude au milieu des splendeurs de Versailles ! Quoi! Bossuet invité à l'étude !... Passons. — Mais cet évêque, reprend Jurieu, c'était « le flatteur des rois. » Bossuet répond : « Tout flatteur, quel qu'il soit, est toujours un animal traître et odieux. Mais s'il fallait comparer les flatteurs des rois avec ceux qui vont flatter dans le cœur des peuples ce secret principe d'indocilité et cette liberté farouche qui est la cause des révoltes, je ne sais lequel serait le plus honteux. Les gens d'un caractère si bas, sous prétexte de flatter les peuples, sont en

 

XII

 

effet les flatteurs des usurpateurs et des tyrans. Le peuple se laisse flatter et reçoit le joug. C'est à quoi aboutit toujours la souveraine puissance dont on le flatte, et il se trouve que ceux qui flattaient le peuple sont en effet les suppôts de la tyrannie... » Enfin, pour ne plus rapporter que cette insulte, le fanatique de Rotterdam accuse le saint évêque « d'incrédulité et de la plus insigne friponnerie. » La réponse est courte ; Bossuet dit : « Depuis vingt ans que je suis évêque quoiqu'indigne, et depuis trente ou trente-cinq ans que je prêche l'Evangile, ma foi n'a jamais souffert aucun reproche. Je suis dans la communion et la charité du Pape, de tous les évoques, des prêtres, des religieux, des docteurs, et enfin de tout le monde sans exception ; et jamais on n'a rien ouï dire de ma bouche, ni remarqué dans mes écrits une parole ambiguë ni un seul trait qui blessât la révérence des mystères. » Où est le détracteur de Bossuet qui pourrait en dire autant ? Mais il est temps, grand temps de finir.

Jurieu divisa son livre et ses diatribes en plusieurs morceaux détachés ; puis il les intitula, comment ? Qui pourrait le croire dans un assemblage d'hommes tous infaillibles, dans un troupeau dispersé, qui ne peut avoir de pasteur ? il les intitula Lettres pastorales. Quoi qu'il en soit de ce titre, le ministre soi-disant évangélique adressa l'attaque au troupeau réformé; le prélat catholique voulut donner la même adresse à la défense : il intitula sa réplique Avertissements aux protestants.

Bossuet avait publié l'Histoire des Variations dans le commencement de 1688. De son côté Jurieu fit paraître quelques-unes de ses Lettres à la fin de la même année 1688; d'autres, dans le courant de 1689; d'autres encore, après une suspension de deux ans, en 1691. Bossuet ne fit pas attendre longtemps la réponse : il donna les trois premiers Avertissements, l'un après l'autre, dans les trois derniers mois de 1689; le quatrième et le cinquième en 1690, et le sixième en 1691. Ces écrits parurent à Paris, chez la veuve de Sébastien Marbre-Cramoisy, dans le format in-4°. Ils furent réimprimés à Paris en 1717.

Les protestants reprochaient à Jurieu, aussi bien que Bossuet, de favoriser par la liberté de ses opinions le socinianisme. Voulant écarter Ce reproche, Jurieu suspendit comme on l'a vu, de 1689 à 1691, ses Lettres pastorales, et publia le Tableau du Socinianisme, à la Haye 1691. Pendant ce temps-là Basnage et Burnet mirent au jour, en 1690, leurs attaques contre le livre des Variations. Comme Bossuet n'avait pas encore les dernières lettres de Jurieu, pour réfuter sans délai ses nouveaux adversaires, il donna la Défense de l’Histoire des Variations dans un volume séparé au commencement de 1691, chez Anisson, directeur de l'imprimerie royale. Les éditeurs modernes placent cet ouvrage, les uns avant, les autres après les Avertissements. Cependant Bossuet lui

 

XIII

 

assigne une autre place. Après avoir dit qu'il réfutera les dernières Lettres de Jurieu dès qu'il les aura sous la main : « En attendant commençons, poursuit-il, à parler à M. Basnage, qui vient avec un air plus sérieux... La matière où nous a conduit le Cinquième avertissement, je veux dire celle des révoltes de la Réforme si souvent armée contre ses rois et sa patrie, mérite bien d'être épuisée pendant qu'on est en train de la traiter... » En conséquence nous donnons la Défense après le Cinquième avertissement.

Dans un avertissement particulier, Bossuet examinoit une accusation non moins souvent répétée que souvent réfutée, l'accusation d'idolâtrie reprochée par les novateurs à l'Eglise catholique ; il avait fait entrer dans cette admirable discussion, comme nous l'avons dit ailleurs, plusieurs pages d'un morceau relatif à l'Exposition, traitant du culte des images. Quoique cet avertissement soit peut-être un des plus beaux, l'auteur ne le donna pas au public ; c'est l'abbé Leroi qui le mit au jour pour la première fois, en 1753, dans le IIIe volume des Œuvres posthumes. Le manuscrit lui fut remis par le fameux évêque de Troyes, mais il n'était pas complet ; le légataire universel du grand homme en avait égaré des cahiers entiers : nouveau service que nous devons à cet ami de luxe, de la table et du jansénisme, et de «son cousin germain le gallicanisme. » L'important fragment qui nous reste, nous le donnons, sous le titre d'Eclaircissement, à la place que lui assigne l'ordre des matières, après le Troisième avertissement.

Les éditions qu'on a données des avertissemens aux protestants dans le commencement du XVIIe siècle, même celle de Liège qui date de 1766, reproduisent avec une fidélité remarquable l'édition princeps; mais les éditeurs de 1772, les bénédictins des Blancs-Manteaux ont fait à l'œuvre originale une foule de corrections maladroites, et tous les éditeurs venus plus tard ont joint à celles-là de nouvelles altérations. Si l'espace nous permettait d'apporter des preuves, nous ne serions embarrassé que du choix.

 

 

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