Accueil Remonter I Vendredi Saint II Vendredi Saint III Vendredi Saint IV Vendredi Saint I Pâques Jour II Pâques Jour III Pâques Jour IV Pâques Jour Pâques Jour abrg Quasimodo Pâques IIIe Dim. Pâques IIIe Dim. abr. Pâques Ve Dim. Ascension Pentecôte I Pentecôte II Pentecôte III Pentecôte abr. Trinité III Pentecôte V Pentecôte IX Pentecôte XXI Pentecôte abr. Sainte Croix I Sainte Croix II Précis Ste Croix Exh. Nvles Catholiques Vie Xtienne Ursulines Meaux I Ursulines Meaux II Ord. Ursul. Meaux Ursulines Meaux III Ursulines Meaux IV Conf. Ursul. Meaux Instr. Ursul. Meaux Profess. Ursuline Disc. Visitandines Disc. Union J-C / Epouse Pensées Xtiennes Pensées Détachées
| |
SECOND SERMON
POUR
LE JOUR DE L'EXALTATION
DE LA SAINTE CROIX (a).
Exaltari oportet Filium hominis.
Il faut que le Fils de l'homme soit exalté. Joan.,
III, 14.
Christo confixus sum cruci.
Je suis attaché à la croix avec Jésus-Christ. Galat.,
II, 19.
Toute l'Ecriture nous prêche que
la gloire du Fils de Dieu est dans les souffrances, et que c'est à la croix
qu'il est exalté : il n'est rien de plus véritable. Jésus est exalté à la croix
par les peines qu'il a endurées ; Jésus est exalté à la croix par les peines que
nous endurons. C'est, mes Frères, sur ce dernier point que je m'arrêterai
aujourd'hui, comme sur celui qui me semble le plus fructueux ; et je me propose
de vous faire voir combien le Fils de Dieu est glorifié dans les souffrances
qu'il nous envoie. Mais, chrétiens, ne nous trompons pas ; dans la gloire qu'il
tire de nos afflictions, il y est glorifié en deux manières, dont l'une
certainement n'est pas moins terrible que l'autre est salutaire et glorieuse.
Voici une doctrine importante,
voici un grand mystère que je vous propose ; et afin de le bien entendre, venez
le méditer au Calvaire, au pied de la croix de notre Sauveur : vous y verrez
deux actions opposées que le Père y exerce dans le même temps. Il y exerce sa
miséricorde et sa justice ; il punit et remet les crimes ;
(a) Prêché a Paris; aux nouveaux Catholiques, en
1661.
Le lecteur trouvera, dans le style et le ton du discours,
les caractères qui révèlent cette date ; et le lieu est clairement désigné par
ces paroles du second point : « Vous particulièrement, mes chers Frères, sainte
et bienheureuse conquête, nouveaux enfants de l'Eglise, qu'elle se glorifie
d'avoir retirés au centre de sou unité et au sein de sa charité, » etc.
Les protestants ont dit, et des enfants de l'Eglise ont
répété, que jamais Bossuet n'a prononcé une parole en faveur des pauvres et des
malheureux. On comprendra tout à l'heure jusqu'où les hérétiques peuvent pousser
la calomnie, et certains catholiques la crédulité.
452
il se venge et se réconcilie tout ensemble : il frappe son
Fils innocent pour l'amour des hommes criminels, et en même temps il pardonne
aux hommes criminels pour l'amour de son Fils innocent. O justice ! ô
miséricorde ! qui vous a ainsi assemblées? C'est le mystère de Jésus-Christ,
c'est le fondement de sa gloire et de son exaltation à la croix, d'avoir
concilié en sa personne ces deux divins attributs, je veux dire, la miséricorde
et la justice.
Mais cette union admirable nous
doit faire considérer que comme en la croix de notre Sauveur la vengeance et le
pardon se trouvent ensemble, aussi pouvons-nous participer à la croix en ces
deux manières différentes, ou selon la rigueur qui s'y exerce, ou selon la grâce
qui s'y accorde. Et c'est ce qu'il a plu à Notre-Seigneur de nous faire voir (a)
au Calvaire. Nous y voyons, dit saint Augustin, « trois hommes en croix, un qui
donne le salut, un qui le reçoit (b), un qui le méprise : » Tres erant
in cruce, unus Salvator, alius salvandus, alius damnandus (1). Au milieu,
l'auteur de la grâce ; d'un côté un qui en profite, de l'autre côté un qui la
rejette. Discernement terrible et diversité surprenante ! Tous deux sont à la
croix avec Jésus-Christ, tous deux compagnons de son supplice ; mais hélas ! il
n'y en a qu'un qui soit compagnon de sa gloire. Ce que le Sauveur avait réuni,
je veux dire la miséricorde et la vengeance, ces deux hommes l'ont divisé.
Jésus-Christ est au milieu d'eux, et chacun a pris son partage de la croix de
Notre-Seigneur. L'un y a trouvé la miséricorde, l'autre les rigueurs de la
justice : l'un y a opéré son salut, l'autre y a commencé sa damnation : la croix
a élevé jusqu'au paradis la patience de l'un ; la croix a précipité au fond de
l'enfer l'impénitence de l'autre. Ils ont donc participé à la croix en deux
manières (c) bien différentes ; mais cette diversité n'empêchera pas que
Jésus ne soit exalté en l'un et en l'autre, ou par sa miséricorde, ou par sa
justice : Exaltari oportet Filium hominis.
Apprenez de là, chrétiens, de
quelle sorte et en quel esprit vous devez recevoir la croix. Ce n'est pas assez
de souffrir; car qui ne souffre pas dans la vie ? Ce n'est pas assez d'être sur
la croix ; car
1 Enar. II in Psal. XXXIV, n. 1.
(a) Var. : Faire paraître. — (b) Un
qui doit le recevoir. — (c) D'une manière.
453
plusieurs y sont, comme ce voleur impénitent, qui sont bien
éloignés du Crucifié. La croix dans les uns est une grâce; la croix dans les
autres est une vengeance ; et toute cette diversité dépend de l'usage que nous
en faisons. Avisez donc sérieusement, ô vous, âmes que Jésus afflige, ô vous que
ce divin Sauveur a mis sur la croix ; avisez sérieusement dans lequel de ces
deux états vous y voulez être attachés (a) ; et afin que vous fassiez un
bon choix (b), voyez ici en peu de paroles la peinture de Fun et de
l'autre, qui fera le partage de ce discours.
PREMIER POINT.
Pour parler solidement des
afflictions, connaissons (c) premièrement quelle est leur nature; et
disons (d), s'il vous plaît, Messieurs, avant toutes choses, que la cause
générale de toutes nos peines, c'est le trouble qu'on nous apporte dans les
choses que nous aimons. Or il me semble que nous voyons par expérience que notre
âme y peut être troublée (e) en trois différentes façons : ou lorsqu'on
lui refuse ce qu'elle désire, ou lorsqu'on lui ôte ce qu'elle possède, ou
lorsque lui en laissant la possession, on l'empêche de le goûter.
Premièrement on nous inquiète
quand on nous refuse ce que nous aimons. Car il n'est rien de plus misérable que
cette soif qui jamais n'est rassasiée; que ces désirs toujours suspendus, qui
s'avancent (f) éternellement sans rien prendre ; que cette fâcheuse
agitation d'une âme toujours frustrée de ce qu'elle espère : on ne peut assez
exprimer combien elle est travaillée par ce mouvement. Toutefois on l'afflige
beaucoup davantage quand on la trouble dans la possession du bien qu'elle tient
déjà entre ses mains, parce que, dit saint Augustin, « quand elle possède ce
qu'elle a aimé, comme les honneurs, les richesses ou quelque autre chose
semblable, elle se l'attache à elle-même par le contentement (g) qu'elle
a de l'avoir (1), » l'aise qu'elle sent d'en jouir; elle se l'incorpore en
quelque façon, si je puis parler de la sorte; cela devient comme
1 S. August., De lib. Arbit., lib. I, n. 33.
(a) Var. : Lui appartenir. — (b) Pour
faire ce choix avec connaissance. —(c) Il faut connaître. — (d)
Remarquez. — (e) Nous pouvons y être troubles. (f) Courent. — (g)
La joie.
454
une partie de nous-mêmes ou, pour dire le mot de saint
Augustin, comme un membre de notre cœur, » velut membra animi : de sorte
que si Ton vient à nous l'arracher, aussitôt le cœur en gémit; il est comme
déchiré et ensanglanté par la violence qu'il souffre.
La troisième espèce d'affliction
qui est si ordinaire dans la vie humaine, ne nous ôte pas entièrement le bien
qui nous plaît ; mais elle nous traverse de tant de côtés, elle nous presse
tellement d'ailleurs, qu'elle ne nous permet pas d'en jouir. Par exemple, vous
avez acquis de grands biens, il semble que vous devez être heureux; mais vos
continuelles infirmités vous empêchent de goûter le fruit de votre bonne fortune
: est-il rien de plus importun? C'est être au milieu d'un jardin sans avoir la
liberté d'en goûter les fruits, non pas même d'en cueillir les fleurs : c'est
avoir pour ainsi dire la coupe à la main et n'en pouvoir pas rafraîchir sa
bouche, bien que vous soyez pressé d'une soif ardente; et cela vous cause un
chagrin extrême. Voilà, Messieurs, comme les trois sources qui produisent toutes
nos plaintes; voilà ce qui fait murmurer les enfants des hommes.
Mais le fidèle serviteur de Dieu
ne perd pas sa tranquillité parmi ces disgrâces, de laquelle de ces trois
sources que puissent naître ses afflictions; et quand même elles se joindraient
toutes trois ensemble pour remplir son âme d'amertume, il bénit toujours la
bonté divine, et il connaît que Dieu ne le frappe que pour exalter en lui sa
miséricorde : Oportet exaltari Filium hominis. En effet il est véritable;
et afin de nous en convaincre, parcourons, je vous prie, en peu de paroles ces
trois sources d'afflictions ; sans doute nous y trouverons trois sources de
grâces.
Et premièrement, chrétiens, il
n'est rien ordinairement de plus salutaire que de nous refuser ce que nous
désirons avec ardeur, et je dis même dans les désirs les plus innocents : car
pour les désirs criminels, qui pourrait révoquer en doute que ce ne soit un
effet de miséricorde que d'en empêcher le succès ? Tu es enflammé de sales
désirs, et tu crois qu'on te favorise quand on te laisse le moyen de les
satisfaire. Malheureux, c'est une vengeance par laquelle Dieu punit tes premiers
désordres, en te livrant justement
455
au sens réprouvé. Car si tu étais si heureux qu'il s'élevât
de toutes parts des difficultés contre tes prétentions honteuses, peut-être
qu'au milieu de tant de traverses tes ardeurs insensées se ralentiraient; au
lieu que ces ouvertures commodes, et cette malheureuse facilité que tu trouves,
précipitent ton intempérance aux derniers excès : tellement qu'à force de
t'abandonner à ces funestes appétits que la fièvre excite, de fou tu deviens
furieux , et une maladie dangereuse se tourne en une maladie désespérée.
Reconnaissez donc, ô enfants de
Dieu, avec quelle miséricorde Dieu nous laisse dans la faiblesse et dans
l'impuissance : c'est que ce souverain Médecin sait guérir nos maladies de plus
d'une sorte. Quelquefois il nous laisse dans un grand pouvoir, qu'il réduit à
ses justes bornes par une droite volonté; en sorte que celui qui a été maître de
transgresser le commandement ne l'a point transgressé : Qui potuit transgredi,
et non est transgressus (1). Quelquefois il se sert d'une autre méthode, et
il réduit la volonté en restreignant le pouvoir : Froenatur potestas, ut
sanetur voluntas, dit saint Augustin (2). Sa miséricorde, qui nous veut
guérir, oppose à nos désirs emportés des difficultés insurmontables : ainsi il
nous dompte par la résistance ; et fatiguant notre esprit, il nous accoutume à
ne vouloir plus ce que nous trouvons impossible.
Mais, Messieurs, si vous trouvez
juste qu'il s'oppose aux volontés criminelles, peut-être aussi vous semble-t-il
rude qu'il étende cette rigueur jusqu'aux désirs innocents (a) :
toutefois ne vous plaignez pas de cette conduite. Un sage jardinier n'arrache
pas seulement d'un arbre les branches gâtées (b) ; mais il en retranche
aussi quelquefois les accroissements superflus. Ainsi Dieu n'arrache pas
seulement en nous les désirs qui sont corrompus, mais il coupe quelquefois
jusqu'aux inutiles; et la raison de cette conduite est bien digne de sa bonté et
de sa sagesse : c'est que celui qui nous a formés, qui connaît les secrets
ressorts qui font mouvoir nos inclinations, sait qu'en nous abandonnant sans
réserve à toutes les choses qui nous sont permises, nous nous laissons
1 Eccli., XXXI, 10. — 2 Ad
Maced., ep. CLIII, n. 16.
(a) Var. : Qu'il refuse souvent les
innocentes. — (b) Pourries.
456
aisément tomber à celles qui sont défendues. Et n'est-ce
pas ce que sentait saint Paulin, lorsqu'il se plaint familièrement au plus
intime de ses amis? « Je fais, dit-il, plus que je ne dois, pendant que je ne
prends aucun soin de me modérer en ce que je puis (a) : » Quod non
expediebat admisi, dùm non tempero quod licebat (1). La vertu en elle-même
est infiniment éloignée du vice ; mais telle est la faiblesse de notre nature,
que les limites s'en touchent de près dans nos esprits, et la chute en est bien
aisée. Il importe que notre âme ne jouisse pas de toute la liberté qui lui est
permise, de peur qu'elle ne s'emporte jusqu'à la licence; et que s'étant
épanchée à l'extrémité, elle ne passe aisément au delà des bornes. C'est donc un
effet de miséricorde de ne contenter pas toujours nos désirs, non pas même les
innocents : cette croix nous est salutaire.
Mais notre Sauveur va beaucoup
plus loin; et cette même miséricorde qui dénie (b) à notre âme ce qu'elle
poursuit, lui arrache quelquefois ce qu'elle possède. Chrétien, n'en murmure pas
: il le fait par une bonté paternelle; et nous le comprendrions aisément, si
nous nous savions connaître nous-mêmes. Ne me dis pas, âme chrétienne : Pourquoi
m'ôte-t-on cet ami intime? pourquoi un fils, pourquoi un époux, qui faisait
toute la douceur de ma vie? Quel mal faisais-je en les aimant, puisque cette
amitié est si légitime? Non, je ne veux pas entendre ces plaintes dans la bouche
d'un chrétien, parce qu'un chrétien ne peut ignorer combien la chair et le sang
se mêlent dans les affections les plus légitimes, combien les intérêts
temporels, combien de sortes d'inclinations qui naissent en nous de l'amour du
monde. Et toutes ces inclinations ne sont-ce pas, si nous l'entendons, comme
autant de petites parties de nous-mêmes qui se détachent du Créateur pour
s'attacher à la créature, et que la perte que nous faisons des personnes chères
nous apprend à réunir en Dieu seul, comme des lignes écartées du centre? Mais
les hommes n'entendent pas combien cette perte (c) leur est salutaire,
parce qu'ils n'entendent pas
1 Ad Sever., ep. XXX, n. 3.
(a) Var. : Et n'est-ce pas ce que sentait
saint Paulin, lorsqu'il se plaint familièrement au plus intime de ses amis, que
son cœur s'est laissé aller à ce qu'il ne fallait pas faire, pendant qu'il ne
prenait aucun soin de modérer ce qui était permis?— (b) Refuse. — (c)
Cette médecine.
457
combien ces attachements sont dangereux : ils ne se
connaissent pas eux-mêmes, ni la pente qu'ils ont aux biens périssables.
O cœur humain, si tu connaissais
combien le monde te prend aisément, avec quelle facilité tu t'y attaches,
combien tu louerais la main charitable qui vient rompre violemment ces liens, en
te troublant dans la possession des biens de la terre ! Il se fait en nous, en
les possédant, certains nœuds secrets qui nous engagent insensiblement dans
l'amour des choses présentes; et cet engagement est plus dangereux, en ce qu'il
est ordinairement plus imperceptible. Oui, le désir se fait mieux sentir, parce
qu'il a de l'agitation et du mouvement; mais la possession assurée, c'est un
repos, c'est comme un sommeil ; on s'y endort, on ne le sent pas. C'est pourquoi
le divin Apôtre dit que ceux qui amassent de grandes richesses, « tombent dans
de certains lacets invisibles, incidunt in laqueum (1), où le cœur se
prend aisément. Il se détache du Créateur par l'amour désordonné de la créature,
et à peine s'aperçoit-il de cet attachement excessif. Il faut, chrétiens, le
mettre à l'épreuve ; il faut que le feu des tribulations lui montre à se
connaître lui-même (a) ; « il faut, dit saint Augustin, qu'il apprenne en
perdant ces biens combien il péchait en les aimant : » Quantum hœc amando
peccaverint, perdendo senserunt (2).
Et cela de quelle manière? Qu'on
lui dise que cette maison est brûlée, que cette somme est perdue sans ressource
par la banqueroute de ce marchand, aussitôt le cœur saignera, la douleur de la
plaie lui fera sentir par combien de fibres secrètes ces richesses tenaient au
fond de son cœur, et combien il s'écartait de la droite voie par cet engagement
vicieux : Quantum hœc amando peccaverint, perdendo senserunt. Il
connaîtra mieux par expérience la fragilité des biens de la terre, dont il ne se
voulait laisser convaincre par aucuns discours : dans le débris des choses
humaines il tournera les yeux vers les biens éternels, qu'il commencent
peut-être à oublier ; ainsi ce petit mal guérira les grands, et sa blessure sera
son salut.
Mais si Dieu laisse à ses
serviteurs la jouissance des biens du
1 I Timoth., VI, 9. — 2 De
Civit. Dei, lib. I, cap. X.
(a) Var. : Il faut que le coup des
afflictions lui vienne faire sentir son mal.
458
siècle (a), ce qu'il peut faire de meilleur pour
eux, c'est de leur en donner du dégoût, de répandre mille amertumes sur tous
leurs plaisirs, de ne leur permettre pas de s'y reposer, de secouer et d'abattre
cette fleur du monde qui leur rit trop agréablement ; de leur faire naître des
difficultés, de peur que cet exil ne leur plaise et qu'ils ne le prennent pour
la patrie. Vous voyez donc, ô enfants de Dieu, qu'en quelque partie de sa croix
qu'il plaise au Sauveur de vous attacher, soit qu'il vous refuse ce que vous
aimiez, soit qu'il vous ôte ce que vous possédiez, soit qu'il ne vous permette
pas de goûter les biens dont il vous laisse la jouissance, c'est toujours pour
exercer en vous sa miséricorde et exalter sa bonté dans vos afflictions.
O Dieu, si je pouvais vous faire
comprendre combien elle est glorifiée par vos souffrances, que ce discours
serait fructueux, et ma peine utilement employée ! Mais si mes paroles ne le
peuvent pas, venez l'apprendre de ce voleur pénitent, dont je vous ai d'abord
proposé l'exemple. Pendant que tout le monde trahit Jésus-Christ, pendant que
tous les siens l'abandonnent, il s'est réservé cet heureux larron pour le
glorifier à la croix : « Sa foi a commencé de fleurir, où la foi des disciples a
été flétrie : » Tunc fides ejus de ligno floruit, quandù discipulorum marcuit
(1). Jésus déshonoré par tout le monde, n'est plus exalté que par lui seul :
venez profiter d'un si bel exemple; voici un modèle accompli.
Il n'oublie
rien, mes Frères, de ce qu'il faut faire dans l'affliction ; il glorifie
Jésus-Christ en autant de sortes qu'il veut être glorifié sur la croix. Car
voyez premièrement comme il s'humilie par la confession de ses crimes. « Pour
nous, dit-il, c'est avec justice, puisque nous souffrons la peine que nos crimes
ont méritée : » Et nos quidem justè, nam digna factis recipimus (2) :
comme il baise la main qui le frappe, comme il honore la justice qui le punit :
c'est là, mes Frères, l'unique moyen de la tourner en miséricorde. Mais ce saint
larron (b) ne finit pas là : après s'être considéré comme criminel, il se
tourne au Juste qui souffre avec lui : « Mais celui-ci, ajoute-t-il, n'a fait
aucun mal : » Hic vero nihil
1 S. August., lib. I De Animâ et ejus orig., n. 11.
— 2 Luc, XXIII, 41.
(a) Var. : Des biens temporels de ce monde. —
(b) Cet heureux criminel.
459
mali gessit (1). Cette pensée adoucit ses maux : il
s'estime heureux dans ses peines de se voir uni avec l'innocent ; et cette
société de souffrances lui donnant avec Jésus-Christ une sainte familiarité, il
lui demande avec foi part en son royaume, comme il lui en a donné en sa croix :
Domine, memento mei, cùm veneris in regnum tuum (2).
Je triomphe de joie, mes Frères,
mon cœur est rempli de ravissement en voyant la foi de ce saint voleur. Un
mourant voit Jésus mourant, et il lui demande la vie ; un crucifié voit Jésus
crucifié, et il lui parle de son royaume ; ses yeux n'aperçoivent que des croix,
et sa foi ne se représente qu'un trône. Quelle foi et quelle espérance ! Si nous
mourons, mes Frères, nous savons que Jésus-Christ est vivant, et notre foi
chancelante a peine toutefois à s'y confier : celui-ci voit mourir Jésus avec
lui, et il espère, et il se console, et il se réjouit même dans un si cruel
supplice. Imitons un si saint exemple ; et si nous ne sommes animés par celui de
tant de martyrs et de tant de saints, rougissons du moins, chrétiens, de nous
laisser surpasser par un voleur. Confessons nos péchés avec lui, reconnaissons
avec lui l'innocence de Jésus-Christ : si nous imitons sa patience, la
consolation ne manquera pas. Aujourd'hui, aujourd'hui, dira le Sauveur, tu seras
avec moi dans mon paradis. Ne crains pas, ce sera bientôt; cette vie se passe
bien vite, elle s'écoulera comme un jour d'hiver, le matin et le soir s'y
touchent de près : ce n'est qu'un jour, ce n'est qu'un moment, que la seule
infirmité fait paraître long : quand il sera écoulé, tu t'apercevras combien il
est court (3). Aie donc patience avec ce larron, exalte cette rigueur salutaire
qui te frappe par miséricorde. Mais si cet exemple ne te touche pas, voici
quelque chose de plus terrible qui me reste maintenant à te proposer ; c'est la
justice, c'est la vengeance qui brise sur la croix les impénitents : c'est par
où je m'en vais conclure.
SECOND POINT.
Nous apprenons par les saintes
Lettres que la prospérité des impies est un effet de la vengeance de Dieu, et de
sa colère qui les
1 Luc., XXIII, 41. — 2 Ibid.,
42. — 3 S. August., tract, CI, in Joan., n. 6.
460
poursuit. Oui, lorsqu'ils nagent dans les plaisirs, que
tout leur rit, que tout leur succède, cette paix que nous admirons, qui selon
l'expression du Prophète « fait sortir l'iniquité de leur graisse, » Prodiit
quasi ex adipe iniquitas eorum (1), qui les enfle, qui les enivre jusqu'à
leur faire oublier la mort, c'est un commencement de vengeance que Dieu exerce
sur eux : cette impunité, c'est une peine qui les livrant aux désirs de leur
cœur, leur amasse un trésor de haine en ce jour d'indignation et de fureur
implacable.
Si nous voyons dans l'Ecriture
que Dieu sait quelquefois punir les impies par une félicité apparente, cette
même Ecriture, qui ne ment jamais, nous enseigne qu'il ne les punit pas toujours
en cette manière, et qu'il leur fait quelquefois sentir son bras par des misères
temporelles. Cet endurci Pharaon, cette prostituée Jézabel, ce maudit meurtrier
Achab ; et sans sortir de notre sujet, ce larron impénitent et blasphémateur,
rendent témoignage à ce que je dis et nous font bien voir, chrétiens, que ce
n'est pas assez d'être sur la croix pour être uni au Crucifié. Ainsi cette
croix, que vous avez vue comme une marque de miséricorde, vous va maintenant
être présentée comme un instrument de vengeance : et afin que vous entendiez
comme elle a pu sitôt changer de nature, remarquez, s'il vous plaît, Messieurs,
qu'encore que toutes les peines soient nées du péché, il y en a néanmoins qui
lui peuvent servir de remède.
Je dis que toutes les peines
sont nées du péché et en punissent les dérèglements. Car sous un Dieu si bon que
le nôtre, l'innocence n'a rien à craindre et elle ne peut jamais espérer qu'un
traitement favorable : il est si naturel à Dieu d'être bienfaisant à ses
créatures, qu'il ne ferait jamais de mal à personne, s'il n'y était forcé par
les crimes. Toutefois il faut remarquer deux sortes de peines : il y a la peine
suprême, qui est la damnation éternelle; il y a les peines de moindre
importance, comme les afflictions de cette vie : « Toutes deux, dit saint
Augustin, sont venues du crime, toutes deux en doivent venger les excès. » Mais
il y a cette différence, que la damnation éternelle est un effet de pure
vengeance, et ne peut jamais nous tourner à bien ; au lieu que les afflictions
1 Psal. LXXII, 7.
461
temporelles sont mêlées de miséricorde, et peuvent être
employées à notre salut, suivant l'usage que nous en faisons: « C'est pourquoi
dit le même Saint, toutes les croix que Dieu nous envoie peuvent aisément
changer de nature, selon la manière dont on les reçoit : il faut considérer, non
ce que l'on souffre, mais dans quel esprit on le souffre : » Non qualia, sed
qualis quisque patiatur (1). Ce qui était la peine du péché, étant sanctifié
par la patience, est tourné à l'usage de la vertu; « et le supplice du criminel
devient le mérite de l'homme de bien : » Fit justi meritum etiam supplicium
peccatoris (2).
S'il est ainsi, chrétiens,
permettez que je m'adresse à l'impie qui souffre sans se convertir, et que je
lui fasse sentir, s'il se peut, qu'il commence son enfer dès ce monde, afin
qu'ayant horreur de lui-même, il retourne à Dieu par la pénitence. Et afin de le
presser par de vives raisons (car il faut, si nous le pouvons, convaincre
aujourd'hui sa dureté), disons en peu de mots : Qu'est-ce que l'enfer ? L'enfer,
chrétiens, si nous l'entendons, c'est la peine sans la pénitence. Ne vous
imaginez pas, chrétiens, que l'enfer soit seulement ces ardeurs brûlantes. Il y
a deux feux dans l'Ecriture : un feu qui purge, opus prubabit ignis (3) ;
« un feu qui consume et qui dévore, » cum igne devorante, ignis non
extinguetur (4). La peine avec la pénitence, c'est un feu qui purge ; la
peine sans la pénitence, c'est un feu qui consume ; et tel est proprement le feu
de l'enfer. C'est pourquoi les afflictions de la vie sont un feu où se purgent
les âmes pénitentes : Salvus erit, sic tamen quasi per ignem (5) : il en
est ainsi des âmes du purgatoire. Elles se nettoient dans ce feu, parce que la
peine est jointe aux sentiments de la pénitence qu'elles ont emportée en sortant
du monde, quasi per ignem. Par conséquent concluons que la peine
sanctifiée par la pénitence nous est un gage de miséricorde ; et concluons aussi
au contraire que le caractère propre de l'enfer, c'est la peine sans la
pénitence.
Si vous voulez voir, chrétiens,
des peintures de ces gouffres éternels, n'allez pas rechercher bien loin ni ces
fourneaux ardents,
1 De Civit. Dei, lib. I, cap.
VIII. — 2 Ibid., lib. XIII, cap. IV. — 3 I Cor., III, 12. — 4
Isa., XXXIII, 14; LXVI, 24. — 5 I Cor., III, 15.
462
ni ces montagnes ensoufrées qui vomissent des tourbillons
de flammes, et qu'un ancien appelle « des cheminées de l'enfer, » Ignis
inferni fumariola (1). Voulez-vous voir une vive image de l'enfer et d'une
âme damnée, regardez un pécheur qui souffre et qui ne se convertit pas. Tels
étaient ceux dont David parle comme d'un prodige, « que Dieu avait dissipés,
nous dit ce Prophète, et qui n'étaient pas touchés de componction : »
Dissipati sunt, nec compuncti (2) : serviteurs rebelles et opiniâtres, qui
se révoltent même sous la verge ; abattus (a) et non corrigés, atterrés
et non humiliés, châtiés et non convertis. Tel était le déloyal Pharaon, dont le
cœur s'endurcissait tous les jours sous les coups incessamment redoublés de la
vengeance divine. Tels sont ceux dont il est écrit dans l'Apocalypse (3),
que Dieu les ayant frappés d'une plaie horrible, de rage ils mordaient leurs
langues, blasphémaient le Dieu du ciel, et ne faisaient point pénitence. Tels
hommes ne sont-ils pas des damnés qui commencent leur enfer dès ce monde ?
Et il ne faut pas dire : Nous
souffrons. Il y en a que la croix précipite à la damnation avec ce larron
endurci : au lieu de se corriger par la pénitence et de s'irriter contre
eux-mêmes, et de faire la guerre à leurs crimes (b), ils s'irritent
contre le Dieu du ciel; ils se privent des biens de l'autre vie, on leur arrache
ceux de celle-ci : si bien qu'étant frustrés de toutes parts, pleins de rage et
de désespoir et ne sachant à qui s'en prendre, ils élèvent contre Dieu leur
langue insolente par leurs murmures et par leurs blasphèmes; « et il semble, dit
Salvien, que leurs fautes se multipliant avec leurs supplices, la peine même de
leurs péchés soit la mère de nouveaux crimes : » Ut putares pœnam ipsorum
criminum quasi matrem esse vitiorum (4).
Ah! mes Frères, ils vous font
horreur ces damnés vivants sur la terre ; vous ne les pouvez supporter, vous
détournez vos yeux de dessus leurs crimes; mais détournez-en plutôt votre cœur,
et recourez à Dieu par la pénitence. Eveillez-vous enfin, ô pécheurs, du moins
quand Dieu vous frappe par des maladies, par la perte
1 Tertull., De Pœnit., n. 12. — 2 Psal.
XXXIV, 16. — 3 Apoc, XVI, 10, 11. — 4 De Gubernat. Dei, lib. VI, n. 13.
(a) Var. ; Frappés. — (b) Et de
s'irriter contre eux-mêmes et contre leurs crimes.
463
de vos biens ou de vos amis : joignez aux peines que vous
endurez la conversion de vos âmes ; et cette croix que Dieu vous envoie qui
maintenant vous est un supplice, vous deviendra un salutaire avertissement et un
gage infaillible de miséricorde. Jusqu'à quand fermerez-vous vos oreilles,
jusqu'à quand endurcirez-vous vos cœurs contre la voix de Dieu qui vous parle,
et contre sa main qui vous frappe? Abaissez-vous sous son bras puissant ; et
portez la croix qu'il vous met dessus les épaules (a), avec l'humilité et
dans les sentiments de la pénitence.
Vous particulièrement, mes chers
Frères, sainte et bienheureuse conquête, nouveaux enfants de l'Eglise, qu'elle
se glorifie d'avoir retirés au centre de son unité et au sein de sa charité : je
n'ignore pas les tourments que la haine irréconciliable de vos adversaires, que
le cruel abandonnement et l'injuste persécution de vos proches vous font
endurer. Mais soutenez tout par la patience : c'est une espèce de martyre que
vous souffrez pour la foi que vous avez embrassée. Dieu veut épurer votre
charité par l'épreuve des afflictions : ce ne lui est pas assez, mes chers
Frères, de vous avoir arrachés au diable par la foi, s'il ne vous en faisait
triompher (b) parla constance : il ne veut pas seulement que vous
échappiez, mais encore que vous surmontiez vos ennemis. Non content de vous
appeler au salut par la profession de la foi, il vous invite encore à la gloire
par le combat ; et il veut apporter le comble au bonheur d'être délivrés, par
l'honneur d'être couronnés. C'est votre gloire devant Dieu, mes Frères, de
sceller votre foi par vos souffrances ; et la pauvreté où vous êtes, rend un
témoignage honorable à l'amour que vous avez pour l'Eglise.
Mais, chrétiens, ce qui fait
leur gloire, c'est cela même qui fait notre honte. Il leur est glorieux de
souffrir ; mais il nous est honteux de le permettre. Leur pauvreté rend
témoignage pour eux et contre nous : l'honneur de leur foi, c'est la conviction
de notre dureté. Sera-t-il dit, mes Frères, qu'ils seront venus à notre unité, y
chercher leurs véritables frères dans les véritables enfants de l'Eglise, pour
être abandonnés de leur secours ; et que nos adversaires nous reprocheront qu'on
a soin assez
(a) Var. : Qu'il vous impose. — (b)
Les victorieux.
464
d'attirer les leurs, mais qu'on les laisse en proie à la
misère? D'où jugeant de la vérité de notre foi par notre charité, ô jugement
injuste, mais trop ordinaire parmi eux ! ils blasphémeront contre l'Eglise, et
notre insensibilité en sera la cause. Mes Frères, qu'il n'en soit pas de la
sorte : pendant qu'ils souffrent pour notre foi, soutenons-les par nos charités.
Ceux qui ont souffert pour la
foi, ce sont ceux que la sainte Eglise a toujours recommandés avec plus de soin.
Les martyrs étant dans les prisons, les chrétiens y accouraient en foule :
quelques gardes que l'on posât devant les prisons, la charité des fidèles
pénétrait partout. Toute l'Eglise travaillait pour eux ; et croyait que leurs
souffrances honorant l'Eglise en sa foi, il n'y avait rien de plus nécessaire
que les autres qui étaient libres les honorassent par la charité. Ailleurs on
leur prêchait une discipline sévère; il semblait qu'il n'y eût que dans les
prisons où il fût permis de les traiter délicatement, ou du moins de relâcher
quelque chose de l'austérité ordinaire. Il s'y coulait même des païens, et nous
en avons des exemples dans l'antiquité : ainsi la charité des fidèles rendait
les prisons délicieuses. Pourquoi tant de zèle ? Ils croyaient par ce moyen
professer la foi et participer au martyre, « se ressouvenant de ceux qui étaient
dans les chaînes, comme s'ils eussent été eux-mêmes enchaînés : » Vinctorum
tanquam simul vincti (1) ; ils croyaient s'enchaîner avec les martyrs.
C'est par la croix et par les
souffrances que la confession de foi doit être scellée. C'est ce qui fait dire à
Tertullien que « la foi est obligée au martyre, » debitricem martyrii fidem
(2) ; par où il veut dire, si je ne me trompe, que cette grande soumission à
croire les choses incroyables ne peut être mieux confirmée qu'en se soumettant
aussi à en souffrir de pénibles et de difficiles, et qu'en captivant son corps
pour rendre un témoignage ferme et vigoureux à ces bienheureuses chaînes par
lesquelles la foi captive l'esprit. C'est pourquoi après avoir fait faire aux
nouveaux catholiques leur profession de foi, on les met dans une maison dédiée à
la croix.
Mes Frères, accourez donc en ce
lieu; ceux qui y sont retirés
1 Hebr., XIII, 3. — 2 Scorp., n. 8.
465
ne se comparent pas aux martyrs, mais néanmoins c'est pour
la foi qu'ils endurent. Ils ne sont pas liés dans des prisons ; mais néanmoins
ils portent leurs chaînes: Vinctos in mendicitate et ferro (1) ; non
chargés de fer, mais bien par la pauvreté. Venez leur aider à porter leur croix
: car qu'attendez-vous, chrétiens? Quoi? que la misère et le désespoir les
contraignent à jeter les yeux du côté du lieu d'où ils sont sortis, et à se
souvenir de l'Egypte? O Dieu, détournez de nous un si grand malheur. Ils ne le
feront pas, chrétiens, ils sont trop fermes, ils sont trop fidèles : mais
combien toutefois sommes-nous coupables de les exposer à ce péril!
Ouvrez donc vos cœurs, je vous
en conjure par la croix que vous adorez ; ouvrez vos cœurs, et ouvrez vos mains
sur les nécessités de cette maison et sur la pauvreté extrême de ceux qui
l'habitent : abandonnés des leurs qu'ils ont quittés pour le Fils de Dieu, ils
n'ont plus de secours qu'en vous. Recevez-les, mes Frères, avec des entrailles
de miséricorde; honorez en eux la croix de Jésus : ils la portent avec patience,
je leur rends aujourd'hui ce témoignage ; mais ils ne la portent pas néanmoins
sans peine : rendez-la-leur du moins supportable par l'assistance de vos
charités; et que j'apprenne en sortant d'ici que les paroles que je vous
adresse, ou plutôt que toute l'Eglise et Jésus-Christ même vous adressent en
leur faveur par mon ministère, n'auront pas été un son inutile.
O joie, ô consolation de mon
cœur î Si vous me donnez cette joie et cette sensible consolation, je prierai ce
divin Sauveur, qui souffre avec eux et qui souffre en eux, qu'il répande sur
vous les siennes, qu'il vous aide à porter vos croix, comme vous aurez prêté vos
mains charitables pour aider ces nouveaux enfants de l'Eglise à porter la leur
plus facilement; et enfin que pour les aumônes que vous aurez semées en ce
monde, il vous rende en la vie future la moisson abondante qu'il nous a promise.
Amen.
1 Psal. CVI, 10.
|