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TROISIÈME SERMON
POUR
LE JOUR DE PAQUES,
SUR LA NÉCESSITÉ DE RENOUVELER, DE CONSACRER ET D'ENTRETENIR LE TEMPLE DE NOTRE COEUR (a).

 

In quo omnis aedificatio constructa crescit in templum sanctum in Domino.

 

Tout édifice construit en Jésus-Christ s'élève (b) comme un temple sacré en Notre-Seigneur. Ephes., II, 21, 22.

 

Il y a cette différence entre la mort des autres hommes et celle de Jésus-Christ (c), que celle des autres hommes est singulière, et

 

(a) Premier point. — Homme, temple de Dieu, grand monde dans le petit, monde, grand temple dans le petit temple.

Cœur, autel dédié à Dieu avec cette inscription : Au Dieu vivant.

Deux sortes de conversions fausses. Lacerata est lex, et non pervenit ad finem judicium (Habac, I, 14).

Second point.— C'est l'amour qui donne un Dieu à un cœur. Dédicace du temple.

Cantique de l'homme nouveau. Alléluia.

Sanctification et renouvellement du corps. Corps consacré à Dieu. Sequitur animam nubentem spiritui caro ut dotale mancipium (Tertull., De Anima,n. 14).

Pudicité, prêtresse et gardienne du temple.

Nous sommes un temple. Recueillons-nous en nous-mêmes. Silence Prières. In templo vis orare, in te ora (S. August., Tract, XV in Joan., n. 25).

Tempérance. Car nous sommes toujours dans un temple.

Troisième point. — Renouvellement perpétuel. Toujours réparer un temple.

Dans une ruine, quelques marques de la première institution; dans un renouvellement quelques marques de la ruine.

Virtus in infirmitate perficitur (II Cor., XII, 9).

Artifices de l'Epoux céleste pour se faire aimer.

 

Prêché en 1661, aux Carmélites du faubourg Saint-Jacques.

L'appellation « Mes sœurs, » et ce mot : « Qui ne doit pas être oublié dans cette église des vierges sacrées,» indiquent une communauté religieuse. D'une antre pari l'auteur dit : « Entrez dans l'esprit d'Elie, c'est le père de cette maison, pour renverser ces idoles; » or le prophète Elie est le patron, on a dit même le fondateur des Carmélites. Citons encore cette phrase : «Mes très-chères sœurs en Jésus-Christ, je finirai ce dernier discours avec ces maximes apostoliques; et je vous laisse, en vous disant adieu, ce présent précieux et inestimable. » Par où l'on voit que « ce dernier discours » a servi comme de clôture à la station quadragésimale.

A la fin du manuscrit se trouve une note détachée, dont l'écriture est plus récente que celle des autres feuilles; et cette note fera voir au lecteur que notre sermon a été prêché après 1661, avec les modifications convenables, devant le roi.

 

(b) Var. : Croit. — (c) Entre la mort de Jésus-Christ et celle des autres hommes.

 

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celle de Jésus-Christ est universelle; c'est-à-dire que chacun de nous est obligé à la mort, et qu'il ne paie en mourant que sa propre dette. Il n'y a que le Fils de Dieu qui soit mort véritablement pour les autres, parce qu'il ne devait rien pour lui-même ; et de là vient que sa mort nous regardant tous (a), est d'une étendue infinie. « Mais comme il est le seul, dit saint Léon, en qui tous les hommes sont crucifiés, en qui tous les hommes sont morts, ensevelis, il est aussi le seul en qui tous les hommes sont ressuscites : » Cùm inter filios hominum unus Dominas Jesus extiterit, in quo omnes mortui, omnes sepulti, omnes etiam sint suscitati (1). Si bien que, si nous sommes entrés avec lui dans l'obscurité de son tombeau, nous en devons aussi sortir avec lui avec une splendeur toute céleste ; et ce tombeau nous doit servir aussi bien qu'à lui comme d'une seconde mère, pour nous engendrer de nouveau à une vie immortelle.

C'est à cette sainte nouveauté de vie que j'ai à vous exhorter en ce jour que le Seigneur a fait : et il a même semblé à saint Grégoire de Nazianze que ce n'était pas sans providence que cette fête solennelle du renouvellement des chrétiens se rencontre dans une saison où tout l'univers se renouvelle, afin que non-seulement tous les mystères de la grâce, mais encore tout l'ordre même de la nature concourût à nous exciter à ce mystérieux renouvellement, (b) Dans ce concours universel de tant de causes à prêcher la nouveauté chrétienne, pour consommer un si grand ouvrage il ne nous reste plus, âmes saintes, que de demander à Dieu son Esprit nouveau par l'intercession de Marie. Ave, Maria.

 

Le Fils de Dieu toujours véritable accomplit aujourd'hui fidèlement,

 

1 Serm. XII De Passion. Domin., cap. III.

 

 

(a) Var. : Que sa mort nous regarde tous et a une étendue infinie. — (a) Note marg. : Èar kosmikon ear pneumatikon, ear psuchais, ear somasin, ear omnenon, ear aoraton. ( S. Greg. Nazianz. Orat. XLIII, n. 23).

 

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Messieurs, ce qu'il avait prédit autrefois aux Juifs infidèles en termes mystérieux, dont ils n'avaient pas entendu le sens, et qu'ils avaient pris pour un blasphème : « Renversez ce temple, leur avait-il dit, et je le redresserai en trois jours : » In tribus diebus excitabo illud (1). Il voulait parler, dit l'Evangéliste, du temple sacré de son corps (2) ; » temple vraiment saint et auguste, construit par le Saint-Esprit, consacré d'un huile céleste par la plénitude des grâces, et « dans lequel la Divinité habitait corporellement (3). » Les Juifs, violents et sacrilèges, avaient non-seulement profané, mais abattu et ruiné ce bel édifice ; et il n'était pas juste que l'ouvrage du Saint-Esprit fût détruit et aboli par des mains profanes. Aussi aujourd'hui ce temple sacré, qui tout abattu qu'il était dans un sépulcre, portait toujours en lui-même un principe de résurrection, se relève sur ses propres ruines plus auguste et plus magnifique qu'il ne fut jamais (a) ; si bien que nous lui pouvons appliquer ce qui fut dit autrefois du second temple de Jérusalem ; Magna erit gloria domùs istius novissimœ plus quàm primas (4) : « La gloire de cette seconde maison sera plus grande que celle de la première. »

Le renouvellement de ce temple, que l'Eglise célèbre aujourd'hui par toute la terre avec tant de joie, m'a fait penser, chrétiens, que nous avions aussi un temple à renouveler. C'est nous-mêmes qui sommes les temples du Saint-Esprit ; si bien que vous devant parler aujourd'hui de la nouveauté chrétienne par laquelle nous devons nous rendre semblables à Jésus-Christ ressuscité, j'ai cru vous la devoir proposer comme un saint renouvellement du temple de Dieu en nous-mêmes ; et il me semble que saint Augustin nous en donne une belle idée au sermon III des Paroles de l'Apôtre, lorsqu'il dit (b) que nous devons nous

 

1 Joan., II, 19. — 2 Ibid., 21. — 3 Coloss., II, 9. — 4 Agg., II, 10.

 

(a) Var. : Mais L'ouvrage du Saint-Esprit ne peut pas être aboli par des mains profanes : ce qu'il avait prédit aux Juifs infidèles et ce qu'ils avaient pris pour un blasphème. Aussi aujourd'hui ce temple sacré, qui tout gisant qu'il était dans un sépulcre, portait toujours en lui-même un principe de vie immortelle, se relève sur ses propres ruines plus auguste et plus majestueux,— et plus glorieux qu'il ne fut jamais — (b) J'ai cru vous la devoir proposer comme un saint renouvellement du temple de Dieu en nous-mêmes; et c'est pourquoi j'ai choisi pour texte les paroles du saint Apôtre, qui nous oblige à bâtir sur Jésus-Christ, pour faire de nous une maison sainte que Dieu consacre par sa présence : In quo et vos cœdificamini in habitaculum Dei in spiritu. Saint Augustin, mes sœurs, nous a donné une belle idée de ce renouvellement intérieur, lorsqu'il dit.....

 

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renouveler comme un vieux temple ruineux qui aurait autrefois servi aux idoles, et que l'on voudrait consacrer au Dieu véritable (a). Ce que saint Augustin a dit en passant, je prétends, chrétiens, si Dieu le permet, l'approfondir aujourd'hui et en faire tout le sujet de mon discours.

Pour le renouvellement de ce temple, il y aurait, ce me semble, trois choses à faire. Il faudrait avant toutes choses (b), chrétiens, non-seulement renverser toutes les idoles, mais abolir toutes les marques du culte profane; il faudrait ensuite (c) le sanctifier, et en faire la dédicace par quelque mystérieuse cérémonie par laquelle il fût consacré à un meilleur usage; enfin comme nous avons supposé qu'il est ruineux et caduc, il faudrait soutenir (d) avec soin ses bâtiments ébranlés et le visiter souvent pour y faire les réparations (e) nécessaires, afin que le mystère de Dieu s'y célèbre décemment et avec une religieuse révérence.

Cœur humain, vieux temple d'idoles, que nous voulons renouveler aujourd'hui pour le consacrer à notre Dieu, tu as été profané par le culte immonde des fausses divinités; autant de passions, autant d'idoles; il faut effacer tous les vestiges de ce culte irréligieux. Etant purgé saintement de toutes ces marques honteuses, nous consacrerons toutes tes pensées en les appliquant dorénavant à un plus beau culte, qui sera le culte de Dieu. Mais comme tu es un édifice antique et imparfait ; que la vieillesse du premier homme est attachée bien avant, pour ainsi parler, au comble, aux murailles (f), nous te visiterons avec soin pour le soutenir et réformer tous les jours ta vieillesse caduque et ruineuse , et même t'accroître jusqu'à ce que la main de ton architecte te donne enfin dans le ciel la dernière perfection. Voilà, Messieurs, trois choses importantes à quoi nous oblige le renouvellement intérieur que je vous prêche : il faut premièrement purger notre temple, ensuite le consacrer, et enfin le garder,

 

(a) Var. : Au Dieu vivant. — (b) En premier lieu. — (c) Secondement. — (d) Entretenir. — (e) Réfections. — (f) Que la vieillesse du premier homme, toujours inhérente à tes fondements, a rendue caduque.

 

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l'entretenir et le réparer tous les jours. C'est ce qui fera le partage de ce discours.

 

PREMIER POINT.

 

Si notre cœur, chrétiens, a été un temple d'idoles, il n'avait pas été bâti pour ce dessein par son premier fondateur. Dieu qui nous a construits de ses propres mains, l'avait formé pour lui-même (a). Car ayant bâti l'univers pour être le temple de sa majesté, il avait mis l'homme au milieu comme un petit monde dans le grand monde, comme un petit temple dans le grand temple, et il avait résolu d'y faire éternellement sa demeure. Mais je ne parle pas assez dignement de la grandeur de ce temple. Il est vrai que les philosophes ont appelé l'homme le petit monde ; mais le théologien d'Orient, le grand saint Grégoire de Nazianze, corrige cette pensée comme injurieuse à la dignité de la créature raisonnable. Au lieu que les philosophes ont dit que l'homme est un petit monde dans le grand monde , ce saint évêque, mieux instruit des desseins de Dieu pour celui qu'il a fait à son image, dit « qu'il est un grand monde dans le petit monde : » eteron kosmon en mikro megan (1) ; voulant nous faire comprendre que l'esprit de l'homme étant fait pour Dieu, capable de le connaître et de le posséder, était par conséquent plus grand et plus vaste que la terre, que les cieux et que toute la nature visible (b). Selon cette belle idée de saint Grégoire ne puis-je pas dire aussi, chrétiens, que l'homme était un grand temple dans le petit temple, parce qu'il est bien plus capable de contenir son Dieu que toute l'étendue de l'univers? Si le monde le contient comme le fondement qui le soutient et comme le moteur interne qui ranime, s'il y habite par son essence et par sa puissance, il est outre cela dans l'homme comme l'objet de sa connaissance et de son amour ; il y habite par la participation de ses dons, par la communication de ses attributs, et pour tout dire en un mot, comme sa véritable félicité (c).

 

1 Orat. XXXVIII, n. 17 : Alterum quemdam mundum in parvo magnum.

 

(a) Var. : Dieu qui l'avait formé de ses propres mains l'avait érigé pour lui-même. — (b) Que la terre ni que les cieux ni que toute la nature visible. — (c) Note marg. : Il habite dans L'homme par la connaissance et par la grâce; et pour tout dire en un mot, il est en lui comme son principe, comme sa véritable félicité, non comme une chose matérielle : Dieu est contenu en nous par la communication de ce qu’il est comme créateur, comme sanctificateur.

 

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L'homme est donc dans son origine le temple de Dieu, et il mérite beaucoup mieux ce nom que le monde. Il est le lieu d'assemblée où toutes les créatures semblent amassées (a), proskuneten miton (1) ; afin que tout l'univers loue Dieu en lui comme dans son temple. C'est pourquoi le même saint Grégoire de Nazianze l'appelle excellemment « adorateur mixte; » si bien qu'il n'est pas seulement le temple, il est l'adorateur de Dieu pour tout le reste des créatures, qui, « n'étant point capables de connaître, se présentent à lui pour l'inviter à rendre à Dieu l'hommage pour elle : » Pro eo quod nosse non possunt, quasi innotescere velle videntur (2) ; si bien qu'il n'est le contemplateur de la nature visible que pour être le prêtre et l'adorateur de la nature invisible et intellectuelle.

Qui pourrait vous dire combien la capacité de ce temple a été accrue dans le saint baptême, où nous étions devenus le temple de Dieu par une destination plus particulière? Jésus-Christ souverain pontife nous avait consacrés lui-même, et consacrés par son sang. (b) Dieu, qui nous remplissait comme créateur, comme sanctificateur, nous remplit maintenant comme sauveur par une union très-intime de chef et de membre.

Telle est la dignité naturelle de notre institution : Mais, ô prêtre et adorateur du Dieu vivant, faut-il que tu aies fléchi le genou devant Baal ! ô prêtre du sang de Lévi, faut-il que tu aies sacrifié aux faux dieux des incirconcis et des philistins! ô temple du Dieu du ciel, que tu sois devenu un temple d'idoles ; que ce cœur que Dieu a consacré pour être son autel, ait fumé de l'encens qui se présentait à tant de fausses divinités, et que cette abomination de désolation se soit trouvée dans le lieu saint! et toutefois il n'y a rien de plus véritable.

Ce temple baptisé s'est encore donné aux idoles à qui nous donnions de l'encens. Cet encens, ce sont les désirs (c). Cette idole, je

 

1 Orat. XXXVIII, n. 17. — 2 S. August., De Civit. Dei, lib. XI. cap. XXVII.

 

(a) Var. : Il est le temple, au contraire, où toute la nature s'assemble, afin que loin l'univers... — (b) Note marg. : Confirmation, huile sacrée. La croix sur le frontispice. L'Eucharistie dans le tabernacle. — (c) Var.: Le parfum que Dieu aime, c'est le désir.

 

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ne l'ose dire; mais je dirai seulement : Partout où se tourne le mouvement de nos cœurs, c'est là la divinité que nous adorons. « Je vis, dit le prophète , le temple et le sanctuaire, et je m'aperçus, chose abominable ! que chacun y érigeait son idole : » Idolum zeli......plangentes Adonidem (1) : « Ils tournaient le dos au sanctuaire, et adoraient le soleil levant, » la fortune : Dorsa habentes contra templum Domini et faciès ad orientem; et adorabant ad ortum solis (2). Ils courent au premier rayon, pour être les premiers à rendre leurs vœux à la fortune naissante. Parmi tant de profanations, on a effacé ce titre auguste gravé au-dessus de l'autel et du propre sang de Jésus-Christ : AU DIEU VIVANT. Et quels noms a-t-on mis en la place? Des noms profanes, desquels le Seigneur avait dit qu'ils ne devaient pas seulement paraître dans son sanctuaire. Entrer dans l'esprit d'Elie, c'est le Père de cette maison, pour renverser toutes ces idoles : Zelo zelatus sum pro Domino Deo exercituum (3). Quoi! sur son propre autel sacrifier aux idoles! Allons avec le feu du ciel consumer Baal; que Dagon tombe et se brise encore une fois devant la majesté du Dieu d'Israël (1).

Vous l'avez fait, chrétiens, en cette sainte journée. Quelqu'un aurait-il eu le cœur assez dur pour n'avoir pas renversé toutes ses idoles dans le tribunal de la pénitence? Je le présume ainsi de ceux qui m'écoutent : ils sont morts au péché avec Jésus-Christ pour ressusciter à la grâce. Ce tribunal de la pénitence était comme le tombeau. Je ne crois pas que vous n'êtes sortis du tombeau que comme des spectres et des fantômes, vains simulacres de vivants, qui n'ont que la mine et l'apparence ; mais qui n'ont ni la vie, ni le cœur...., mouvements artificiels et appliqués par le dehors (a).... Sortis comme Jésus-Christ, avec Jésus-Christ, tout pleins de la vie de la grâce. Mais achevez d'imiter la résurrection de Jésus. Il a quitté en ressuscitant toutes les marques de mortalité. Voyez son corps lumineux, etc. (b).

 

1 Ezech., VIII, 5, 14. — 2 Ibid., 16. — 3 III Reg., XIX, 10. — 4 I Reg., V, 4.

 

(a) Ce passage est ainsi terminé dans le sermon précédent :..... Qui n'ont ni la vie ni le cœur, qui font des mouvements et des actions qui sont tout artificiels et comme appliqués par le dehors. Vous êtes sortis comme Jésus-Christ..... — (b) Note marg. : Le péché détruit, la loi du péché vit encore.

 

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Pour achever le renouvellement de ce temple, il faut ôter toutes les marques et tous les vestiges de l'idolâtrie. J'ai souvent observé, Messieurs, en considérant en moi-même le principe et les suites des actions humaines, que dans toutes les inclinations vicieuses, outre l'attachement principal qui fait la consommation du, crime, il se fait encore dans nos cœurs certaines affections qui ne sont pas à la vérité si déréglées; mais qu'on voit bien néanmoins être du même ordre, et dans lesquelles on ne laisse pas de reconnaître la marque de l'inclination dominante. L’effet principal de l'ambition, c'est de nous faire penser nuit et jour à notre fortune, et trouver licite et honnête tout ce qui avance notre élévation. Mais ce même désir d'agrandissement, outre cet effet principal qui est l’accomplissement du crime, produit d'autres affections moins déréglées, mais qui portent néanmoins le caractère de ce principe corrompu ; un certain air de mondanité qui change et le visage et le ton de voix; un dédain fastueux non-seulement de ce qui est bas, mais de ce qui est médiocre. Et ce que je dis de l'ambition, il serait aisé, chrétiens, de l'observer dans les autres crimes.

Deux sortes de conversions défectueuses. Quelques-uns s'imaginent s'être convertis, quand ils ont retranché cette petite partie et comme cette écorce de leurs vices, et qu'ils ont fait dans leurs mœurs quelque réformation extérieure et superficielle. Ce n'est pas en vain que saint Paul nous dit que la conversion est une mort : ce n'est pas un changement médiocre (a). Le péché tient à nos entrailles, l'inclination au bien sensible est attachée jusqu'à nos moelles. Pour la modestie, retrancher quelque chose de la somptuosité des habits, un peu modérer ces douceurs affectées de vos discours et de vos regards, ce n'est pas encore la mort du péché. Donnez, donnez ce couteau, et que j'aille arracher jusqu'au fond de l’âme ce désir criminel de plaire trop, cette complaisance secrète que vous en ressentez au dedans, ce triomphe caché de votre cœur dans ces damnables victoires. Il faut sortir du tombeau comme Jésus-Christ, par une résurrection véritable et réelle (b).

 

(a) Note marg.: Ce n'est pas une conversion, parce que ce n'est pas une mort. — (b) Exhibete vos tanquam ex mortuis viventes (Rom., VI, 13). Les moindres fibres des inclinations corrompues, de ces intrigues dangereuses, de ces cabales de libertinage. Ex mortuis viventes. Une nouvelle naissance qui ne vous attache plus à rien sur la terre. Otez jusqu'aux moindres marques, comme Jésus-Christ a effacé la mortalité et en même temps toutes ses faiblesses. Si vous étiez sorti des abîmes éternels, quelle vie! Exhibete vos tanquam ex mortuis viventes, comme un homme venu de l'autre monde. Vide supra (c'est-à-dire sermon précédent, à la fin du premier point).,

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Autre conversion défectueuse. Vous vous êtes corrigés de cette avarice cruelle qui vous portait sans miséricorde à tant d'injustices. Prenez garde qu'elle n'ait laissé dans le cœur une certaine dureté et des entrailles fermées sur les misères des pauvres. C'est un reste d'inclination de rapines ; toutes deux viennent du principe de cette avarice impitoyable (a). Et vous, qui avez rompu, à ce que vous dites, cet attachement vicieux (b), pourquoi ce reste de commerce? pourquoi cette dangereuse complaisance, restes malheureux d'une flamme mal éteinte? Que je crains que le péché soit vivant encore, et que vous n'ayez pris pour la mort un assoupissement de quelques journées ! Mais quand vous auriez renoncé sincèrement et de bonne foi, vous n'avez pas achevé l'entier renouvellement de votre cœur, si vous ne détruisez pour toujours jusqu'aux moindres vestiges de l'idolâtrie.

Nous pouvons appliquer à de telles conversions ce mot du prophète : Lacerata est lex, et non pervenit ad fînem judicium (1) : La loi a été déchirée; il n'y en a qu'une partie en vos mains : la perfection des œuvres chrétiennes, une certaine plénitude, vous la déchirez; à la sainte nouveauté de la loi, à cette nouvelle tunique qui vous est rendue, vous cousez « un vieux lambeau » de mondanité, assumentum panni rudis (2) : de là comme une suite que le jugement n'est pas consommé. Mais d'où vient que ce jugement est si imparfait? La conversion est un jugement contre le péché en tous ses desseins; le jugement jusqu'à sa fin, c'est de condamner le péché jusqu'à ses dernières circonstances. Il a gagné quelque partie de sa cause (c) ; c'est assez pour lui donner la victoire, parce que le penchant du cœur qui paraît dans cette réserve, le fera bientôt revivre avec sa première autorité.

Faites donc une conversion sans réserve. Ne laissez pas un

 

1 Habac., I, 4. — 2 Marc., II, 21.

 

(a) Note marg. : Cette même dureté qui resserre vos entrailles sur les pauvres, quand elle va jusqu'au bout, fait les injustices et les rapines. — (b) Je l'ai fait, dites-tous, je ne peux exprimer avec quelle violence. — (c) il n'y en avait point de plus déplorée.

 

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germe secret qui fasse revivre cette mauvaise herbe ; ôtez à votre péché toute espérance de retour. Comme Jésus-Christ a détruit sans réserve la mortalité, arrachez l'arbre avec tous ses rejetons ; guérissez la maladie avec tous ses symptômes dangereux. Renversez les idoles avec toute leur dorure et leurs ornements. Commençons la consécration du temple.

 

SECOND POINT.

 

La consécration de notre temple (a), c'est une sincère destination de toutes les facultés de notre âme à un usage plus saint ; et c'est un effet de la charité qui est répandue en nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous est donné. C'est pourquoi saint Paul ayant dit que « nous sommes les temples de Dieu : » Nescitis quia templum Dei estis, ajoute aussitôt après : Et Spiritus Dei habitat in vobis (1) ; parce que nous ne sommes les temples de Dieu qu'en tant que cet esprit de charité règne en nous. Comme c'est un amour profane qui érige en nos cœurs toutes les idoles, ce doit être un saint amour qui rende aussi à Dieu ses autels. Entendez, ô chrétiens, quelle est la force de l'amour. C'est l'amour qui fait votre Dieu, parce que c'est lui qui donne l'empire du cœur.

D'ailleurs le nom de Dieu est un nom de roi et de père tout ensemble; et un roi doit régner par inclination, comme un tyran par force et par violence. La crainte forcée nous donne un tyran; l'espérance intéressée nous donne un maître et un patron, comme on parle présentement dans le siècle; l'amour soumis par devoir et par inclination, donne à notre cœur un roi légitime. David plein de son amour : Exaltabo te, Deus meus rex, et benedicam (2) : « Je vous exalterai, ô mon Dieu, mon roi; » mon amour vous élèvera un trône. En effet l'amour est le principe des inclinations.

Dieu est le premier principe et le moteur universel de toutes les créatures. C'est l'amour aussi qui fait remuer toutes les inclinations et les ressorts du cœur les plus secrets. Il est comme le Dieu du cœur. Mais afin d'empêcher cette usurpation, il faut qu'il se

 

1 I Cor., III, 16. — 2 Psal. CXLIV, 1.

 

(a) Note marg. : Cum complesset Salomon fundens preces, ignis descendit de caelo, et devoravit holocausta et victimas, et majestas Domini implevit domum (II Paral., VII, 1).

 

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soumette lui-même à Dieu, afin que notre grand Dieu étant lui-même le Dieu de notre amour, il soit en même temps le Dieu de nos cœurs, et que nous lui puissions dire avec David : Deus cordis mei et pars mea Deus in œternum (a).

C'est le seul fruit du renouvellement : Innovatus amet nova (1).

O  temple renouvelé ! il faut qu'un nouvel amour te donne aujourd'hui un nouveau Dieu. Il est le Dieu éternel de toutes les créatures; mais pour ton grand malheur, il ne commence que d'aujourd'hui à être le tien. Diliges Dominum Deum tuum (2). C'est la marque qu'il est notre Dieu, c'est le tribut qu'il demande, c'est la marque aussi de son abondance et de sa grandeur infinie. Car ceux qui n'ont besoin de rien, ils ne désirent autre chose sinon qu'on les aime. Aussi quand on ne peut rien donner, on tire de son cœur pour s'acquitter en aimant.

Venez donc, ô charité sainte ; venez, ô amour divin, pour consacrer notre temple. Mais par quelle sainte cérémonie fera-t-il cette mystérieuse consécration? En faisant résonner dans ce nouveau temple le cantique des louanges du Dieu vivant, c'est-à-dire en remplissant d'une sainte joie toutes les puissances de notre âme. « Le cantique de la joie du siècle, mes sœurs, c'est un langage étranger que nous avons appris dans notre exil : » Canticum dilectionis sœculi hujus, lingua barbara est quam in captivitate didicimus (3); c'est le cantique du vieil Adam, qui, chassé de son paradis (b), cherche une misérable consolation. Si vous avez en vous-mêmes l'esprit de Jésus, cet esprit de résurrection et de vie nouvelle , ne chantez plus le cantique des plaisirs du monde, en l'honneur de l'homme nouveau qui ressuscite aujourd'hui des morts, et qui nous ouvre le chemin à la nouveauté spirituelle, Cantate Domino canticum novum (4); chantez à Dieu un nouveau cantique ; chantez à Dieu le cantique de la nouvelle alliance, chantez le nouveau cantique que L'Eglise entonne aujourd'hui, cantique d'allégresse spirituelle et de liesse divine : Alleluia,

 

1  S. August., in Psal. XXXIX, n. 4. — 2 Matth., XXII, 37. —  3 In Psal. CXXXVI, n. 17. — 2 Psal. XCV, 1.

 

(a) Note marg. : Après lui avoir dit : Quid mihi est in cœlo? et à te quid volui super terram (Psal. LXXII, 25, 26)? A te, prœter te, defecit caro mea et cor meum; Deus cordis mei, et pars mea in œternum. — (b) Var. : Qui  ayant perdu le ciel.

 

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alleluia : « Louange à Dieu; » louange à Dieu dans les biens, louange à Dieu dans les maux ; louange à Dieu quand il nous frappe, louange à Dieu quand il nous console ; louange à Dieu quand il nous couronne, louange à Dieu quand il nous châtie. C'est le cantique de l'homme nouveau, c'est celui qui doit résonner au fond de nos cœurs dans la dédicace de notre temple (a).

J'ai appris dans l'Apocalypse, que ce cantique d'Alleluia (1) c'est le cantique des bienheureux et par conséquent le nôtre. Car la vie que nous menons doit être le commencement de la vie du ciel. Saint Paul, toujours admirable à expliquer le renouvellement de l'homme intérieur, nous dit que Dieu nous a engendrés par la vérité, afin que nous fussions les prémices de ses créatures : Ut simus initium aliquod creaturœ ejus (b). L'accomplissement delà création, j'entends de la création nouvelle qui a été faite en Jésus-Christ, c'est la vie des bienheureux : c'est nous qui en sommes le commencement; nous devons donc commencer ce qui s'accomplira dans la vie future. Nous devons chanter du fond de nos cœurs ce mystérieux Alléluia, que le ciel entendra résonner aux siècles des siècles.

En effet, dit saint Augustin, « chacun chante ce qu'il aime. Les bienheureux chantent les louanges de Dieu; ils l'aiment, parce qu'ils le voient; et ils le louent, parce qu'ils l'aiment (2). » Leur chant vient de la plénitude de leur joie, et la plénitude de leur joie de l'entière consommation de leur amour. Mais quoique notre amour soit bien éloigné de la perfection, c'est assez qu'il soit au commencement pour commencer aussi les louanges. Nunc cantat amor esuriens, tunc cantabit amor fruens ». Il y a l'amour qui jouit, il y a aussi l'amour qui désire ; et l'un et l'autre a son chant, paire que l'un et l'autre a sa joie. La joie des bienheureux, c'est leur jouissance ; l'espérance est la joie de ceux qui voyagent. Mais il faut chanter le nouveau cantique parmi nos désirs, pour le chanter dans la plénitude. « Celui-là ne se réjouira jamais comme

 

1 Apoc., XIX, 6.— 2 S. August., In Psal. CXLV, n. 3.— 3 Id. Serm. CCLV, n. 5.

 

(a) Note marg.: Ce doit être notre cantique : Amen, Alléluia; dans cette consommation, dans cette rédaction de toutes les lignes à leur centre, de toutes les créatures à leur principe. — (b) Le texte n'est pas de saint Paul, mais de saint Jacques, I, 18.

 

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citoyen dans la plénitude de la joie, (a) qui ne gémira comme voyageur dans la ferveur de ses désirs (1). »

Mais achevons de vous expliquer la consécration de ce temple. Ce n'est pas assez, chrétiens, que les puissances de l’âme soient sanctifiées ; (b) il faut que le corps avec tous ses membres soit aussi saintement consacré par un meilleur usage. Saint Paul : Humanum dico (2). Saint Augustin, après avoir détruit les idoles : Hœc in nobis tanquam idola frangenda sunt (c), in usus autem meliores vertenda sunt ipsa corporis nostri membra, ut quœ serviebant immunditiœ cupiditatis, serviant gratiœ charitatis (3).

Deux sortes de ministres dans le temple : les ministres principaux qui offrent le sacrifice, les ministres inférieurs qui préparent les victimes et qui font les fonctions moins importantes. Nos corps sont appelés de cette sorte à la société de ce saint et divin sacerdoce, qui est donné à tous les fidèles en Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour offrir des victimes spirituelles agréables à Dieu par son Fils.

Mais établissons ce nouvel usage par une raison plus solide. C'est que l'amour de Dieu dominant sur l’âme, qui est la partie principale, par le moyen du prince il se met en possession du sujet. Comme on voit dans les mariages la femme épousant son mari, lui transporte aussi ses droits et son domaine : ainsi l’âme s'unissant à l'Esprit de Dieu et se soumettant à lui comme à son époux, elle lui cède aussi son bien comme étant le chef et le maître

 

1 S. August., Serm. XXXIV, n. 6.—  2 Rom., VI, 19. — 3 S. August., Serm. CLXII, n. 21.

 

(a) Note marg. : Cantique de joie avec un mélange de gémissements. Ce sont des airs mélancoliques qui ne laissent pas que de toucher beaucoup. « Nous sommes lui-même sa louange. » Laus ejus in Ecclesià sanctorum. Laus cantandi est ipsius estis si bene vivatis  (S. August., in Psal. CXLVIII,

n. 4.— (b) Notre-Seigneur a changé l'usage de son corps, le premier tenait du péché. — (c) Ce texte est ainsi commenté dans le sermon précédent, au commencement du troisième point, p. 131 : « Il faut premièrement briser les idoles, c'est-à-dire ces passions impérieuses qui étaient autrefois les divinités qui présidaient dans ce temple : Hœc in nobis, dit saint Augustin, tanquam idola frangenda sunt ; c'est ce qu'il faut détruire connue les idoles. Ce qu'il ne faut pas détruire, mais changer seulement, dit ce grand docteur, à un usage plus saint, ce sont les membres de ce corps, afin qu'avant servi à l'impureté de la convoitise, ils servent maintenant à la grâce de la charité : In usus autem meliores, etc. C'est de cette sorte, mes frères, que nos corps, ces temples profanes, deviendront les temples de l'Esprit de Dieu et qu'il les remplira par sa présence.»

 

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de cette communauté bienheureuse. « La chair la suit, dit Terlullien, comme une partie de sa dot; et au lieu qu'elle était seulement servante de l’âme, elle devient aussi servante de Dieu : » Sequitur animam nubentem Spiritui caro, ut dotale mancipium et jam non animœ famula, sed Spiritûs (1), et c'est par là que se fait le renouvellement de notre corps. Ainsi il change de maître heureusement, et passe en de meilleures mains. Par la nature il était à l’âme, par la corruption il était au péché (a), par la religion il est à Dieu.

Viens donc, ô chair bienheureuse, accomplir maintenant ton ministère; viens servir au règne de la charité. Humanum dico, propter infirmitatem carnis (2). Voici une condition bien équitable : comme vous vous êtes fait violence (b)... Ne dites pas qu'il est impossible : on ne demande que ce que vous faites; encore la condition est-elle sans comparaison moins rigoureuse. Dieu exige, je l'ose dire, encore moins de vous pour les aumônes que vous n'avez prodigué à la profusion de votre luxe. Dieu exige moins de travail pour votre salut que vous n'en avez donné à votre ambition. Il exige moins de temps pour son service, j'ai honte de le dite, que vous n'en avez donné même à votre jeu. Voyez combien est doux son empire, s'il use de moins de rigueur que le jeu même, qui est inventé pour vous relâcher.

Que nous sommes heureux, Messieurs, que notre temple soit consacré à un si bon Maître! Mettons donc un gardien fidèle à ce temple de peur que nos ennemis ne l'usurpent, la crainte que saint Cyprien appelle si à propos « la gardienne de l'innocence : » Sit tantùm timor innocentiœ custos (3) : la crainte des occasions, les précautions salutaires de la pénitence. Elle a deux visages : le passé et l'avenir. Ne partagez pas son office; ne séparez pas ses fonctions par une distraction violente. Je ne suis pas établie pour flatter vos crimes : Vade, jam ampliùs noli peccare (4); ou prenez-moi toute, ou laissez-moi toute.

Ayez donc toujours en l'esprit cette crainte religieuse.

 

1 De Anima, n. 41.— 2 Rom., VI, 19.— 3 Ad Donat., epist. I.—  4 Joan., VIII, 11.

 

(a) Var. : Au vice. — (b) Bossuet termine ainsi le passage dans d autres endroits: Comme vous vous êtes fait violence pour servir l'iniquité , faites-vous aussi violence pour servir Dieu et la justice ( Rom. VI, 13 ).

 

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Respectez ce temple sacré si bien renouvelé en Notre-Seigneur. En l'état où il a mis notre corps, nous ne saurions plus le violer sans sacrilège; et vous savez que le Saint-Esprit a dit par saint Paul : « Si quelqu'un viole le temple de Dieu, Dieu le perdra sans miséricorde (1). » Que si nous apprenons par la foi que nos corps sont les temples du Saint-Esprit, « possédons en honneur ce vaisseau fragile, et non pas dans les passions d'intempérance, comme les gentils qui n'ont pas de Dieu. » Car, comme dit l'apôtre saint Paul, « Dieu ne nous appelle pas à l'impureté, mais à la sanctification par Jésus-Christ Notre-Seigneur (2). »

O sainte pudicité, venez donc aussi consacrer ce temple, pour en empêcher la profanation. Un beau mot de Tertullien, qui ne doit point être oublié dans cette Eglise des Vierges sacrées : Illato in nos et consecrato Spiritu sancto, hujus templi aeditua et antistita pudicitia est (3) : « Le Saint-Esprit étant descendu en nous pour y demeurer comme dans son temple, la prêtresse et la gardienne (a), c'est la chasteté. » C'est à elle de le tenir net; c'est à elle de l'orner dedans et dehors : dedans par la tempérance, et dehors par la modestie. C'est à elle de parer l'autel sur lequel doit fumer cet encens céleste ; je veux dire des saintes prières qui doivent sans cesse monter devant Dieu comme un parfum agréable. Car pouvons-nous oublier l'exercice de la prière, nous qui sommes toujours dans un temple, nous qui portons toujours notre temple ; ou plutôt, pour dire quelque chose de plus énergique et aussi de plus véritable, nous qui sommes nous-mêmes un temple portatif. N'allez pas chercher bien loin le lieu d'oraison. « Voulez-vous prier dans un temple, recueillez-vous en vous-mêmes, priez en vous-mêmes : » In templo vis orare, in te ora (4). Loin du repos de ce temple, les soins turbulents du siècle et ses pensées tumultueuses. Que le silence, que le respect, que la paix, que la religion y établissent leur domicile. O trop heureuses créatures, si nous savions comprendre notre bonheur d'être la maison de Dieu et la demeure de sa majesté!

 

1 I Cor., III, 17. — 2 I Thess., IV, 4, 5, 7. — 2 De Cult. Foem., lib. II, n. 1 . — 3 S. August., in Joan., tract. XV, n. 25.

 

(a) Var. : Sacristine.

 

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Immolons donc à Dieu dans ce temple toutes les affections de nos cœurs. Que les idoles ne paraissent plus devant le Dieu vivant et véritable, que la mémoire en soit abolie; ou bien, si nous en conservons le souvenir, que ce soit à la manière que David et ses braves capitaines réservaient les dépouilles de leurs ennemis, pour servir comme d'un trophée éternel de la victoire que Dieu leur avait donnée : Quœ sanctificavit rex et duces exercitûs, de bellis et manubiis praeliorum, ad instaurationem et supellectilem templi Domini. Appendere ad arcam (1). (a) Mais après avoir ainsi consacré ce temple, il nous reste encore un dernier devoir, qui est de nous appliquer à son entretien et même à son accroissement : Crescit in templum sanctum in Domino (2).

 

TROISIÈME POINT.

 

La nouveauté chrétienne n'est pas l'ouvrage d'un jour, mais le travail de toute la vie. Et il y a cette différence entre la vie que nous commençons dans le saint baptême, et celle qui nous est donnée par notre première naissance, que celle-ci va toujours en dépérissant, et celle-là au contraire va toujours en se renouvelant et pour parler de la sorte, se rajeunissant jusqu'à la mort : tellement que par une espèce de prodige le nombre de ses années ne fait que renouveler sa jeunesse, jusqu'à ce qu'elle l'ait conduite à la dernière perfection, qui est l'état de l'enfance chrétienne par la sainte simplicité et par l'entière innocence. L'Apôtre ne cesse de nous prêcher « à nous renouveler : » Renovamini (3). Il faut se renouveler tous les jours, parce qu'il y a toujours des vices à vaincre.

Mais il y a ici quelque raison plus profonde. Sera-t-il permis à des hommes de rechercher aujourd'hui la cause pour laquelle il a plu à Dieu de laisser ses plus fidèles serviteurs dans cette misérable nécessité de combattre toujours quelque vice (b)? Saint Paul s'en est plaint autrefois, et il lui a été répondu que tel était le

 

1 I Paral., XXVI, 26, 27. — 2 Ephes, II, 21. — 3 Ibid. IV, 23.

 

(a) Note marg. : Attacher à notre mémoire une écriture éternelle de la victoire de Jésus-Christ sur nos passions : des arcs brisés, des épées rompues, des passions arrachées, tout l'attirail de la vanité brisé pour toujours. Trophée au Dieu vivant. — (b) C'est le mystère du christianisme.

 

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conseil de Dieu, qu'en ce lieu de tentation « la force fût perfectionnée dans l'infirmité : » Virtus in infirmitate perficitur (1). Mais approfondissons plus avant encore, et demandons à Dieu humblement quel est ce dessein, quel est ce mystère : pourquoi a-t-il ordonné que la force se perfectionne dans l'infirmité ? Saint Augustin nous en dira la (a) raison admirable et nous expliquera le conseil de Dieu : « c'est que c'est ici un lieu de présomption (b), et que cet exercice nous est nécessaire pour nous entretenir dans l'humilité; » c'est que parmi (c) les tentations qui nous environnent, la plus dangereuse et la plus pressante, c'est celle qui nous porte à la présomption. C'est pourquoi Dieu, en nous donnant de la force, nous a aussi laissé de la faiblesse. Si nous n'avions que de la foi-blesse, nous serions toujours abattus; si nous n'avions que de la force, nous deviendrions bientôt superbes. Dieu a trouvé ce tempérament : de peur que nous ne succombions sous l'infirmité, il nous a donné de la force ; mais « de peur qu'elle ne nous enfle en ce lieu de tentation et d'orgueil, il veut qu'elle se perfectionne dans l'infirmité : « Virtus quâ hic, ubi superbiri potest, ne superbiatur, in infirmitate perficitur (2). C'est pour cela, chrétiens, qu'il y a toujours dans notre temple quelque muraille qui s'entr'ouvre, quelque chose (d) qui menace ruine si on ne l'appuie, il y a toujours quelque partie faible, et qui demande continuellement la main de l'ouvrier. Il faut visiter souvent, sinon vous serez accablés par une ruine imprévue.

Nous pouvons observer à ce propos une conduite particulière de Dieu sur notre nature. Lorsqu'elle a été précipitée par cette grande et terrible chute, quoiqu'elle ait été presque toute ruinée de fond en comble, il a plu à Dieu néanmoins que l'on vît, même parmi ses ruines, quelques marques de la grandeur de sa première institution. Comme dans ces grands édifices que l'effort d'une main ennemie ou le poids des années ont portés par terre, quoique tout y soit désolé, les ruines et les masures respirent quelque chose de grand; et au milieu des débris, vous remarquez

 

1 II Cor., XII, 9. — 2 S. August., lib. IV, Cont. Julian., cap. II, n. 11.

 

(a) Var. : Nous en a rendu cette. — (b) D'orgueil. — (c) Dans. — (d) Quelque partie.

 

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un je ne sais quoi qui fait comprendre (a) la beauté du plan, la hardiesse et l'ordre admirable de l'architecture : ainsi « le vice de notre nature n'avait pas tellement obscurci en nous l'image de Dieu, qu'il en ait effacé jusqu'aux moindres traits (b) : » Non usque adeo in anima humanà imago Dei terrenorum affectuum labe detrita est, ut nulla in eà velut lineamenta extrema remanserint (1). Mais comme dans les ruines de cet édifice il a paru quelques restes de sa première grandeur (c) et de sa première beauté, je ne sais quoi de noble et de grand, aussi quand il a été rétabli, il a plu à notre Architecte qu'il y eût quelques vieilles pierres (d) qui demandassent toujours la main de l'ouvrier. Le premier a été fait afin que nous connussions de quelle beauté nous étions déchus, et l'autre aussi pour nous faire entendre de quelle ruine nous avons été relevés. Le premier semblait donner à notre nature quelque lueur d'espérance et laisser en nous les traces sur lesquelles il avait dessein de nous rebâtir; mais le second assurément est laissé afin de (e) réprimer la présomption.

Connaissons donc, âmes saintes, combien l'orgueil est à craindre,, et combien nous est nécessaire cet antidote souverain de notre faiblesse. Saint Paul nous en est un grand exemple. Car écoutez comme il parle : « De peur que la grandeur de mes révélations ne m'enfle et ne me rende superbe (2). » Ecoutez et tremblez; «voyez quel est celui qui parle en ces termes : C'est celui, dit saint Augustin (3), qui nous a laissé de si beaux préceptes, des sentences si mémorables pour abaisser l'orgueil Je plus téméraire, pour l'arracher jusqu'à la racine. » Mais tout cela, chrétiens, était la nourriture dont il se nourrissait (f) ; c'est pourquoi saint Paul reconnaît qu'il a été nécessaire, pour réprimer en lui la tentation de l'orgueil, « qu'il fût tourmenté cruellement par un ange de Satan et longtemps inquiété par les infirmités de la nature : » Stimulus carnis meœ (4) : « tant ce poison est dangereux, dont on ne peut

 

1 S. August., Lib. de Spirit. et Litt., n. 48.— 2 II Cor., XII, 7. — 3 S. August.. Serm. CLXIII, n. 8. —  4 II Cor., XII, 7.

 

(a) Var. : Qui conserve, — qui marque. — (b) Qu'il n'en restât encore dans notre raison quelques traits. — (c) De sa première grâce. — (d) Qu'il y eut des restes de sa caducité ancienne qui demandassent.....— (e) Pour. — (f) La matière dont il s’entretenait.

 

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empêcher l'effet que par un autre poison (1) ; » tant cette maladie est à craindre, qui ne peut être guérie que par un remède si violent.

S'il est ainsi, soumettons-nous, mes sœurs, à cette méthode salutaire; ne nous lassons pas de combattre contre nos vices; entretenons notre édifice, soutenons soigneusement notre temple toujours caduc, et ne croyons pas que Dieu nous délaisse dans les tentations violentes. Car sur la foi du Médecin qui nous traite, nous devons croire que ce remède nous est nécessaire. « Mon âme, dit David, est troublée ; et vous, Seigneur, jusqu'à quand , jusqu'à quand me laisserez-vous dans ce trouble? » Et anima mea turbata est valde, sed tu, Domine, usquequo (2) ? Et le Seigneur lui répond (3) : « Jusqu'à ce que vous connaissiez par expérience que c'est moi seul qui suis capable de vous secourir. Car si je vous secourais sans remise aucune, vous ne sentiriez pas le combat; si vous ne sentiez pas le combat, vous présumeriez de vos forces et cet orgueil qui vous enflerait serait un obstacle invincible à votre victoire, (a) » « Mais quoi! n'avez-vous pas dit, ô Seigneur, continue admirablement saint Augustin, qu'aussitôt que nous parlerions, vous viendriez à notre secours? » Adhuc te loquente dicam : Ecce adsum (1). Il est vrai, il l'a dit ainsi et il est fidèle en ses promesses. « Car il nous assiste en différant (b), et le délai même est un secours : » Et cùm differt adest, et quod differt adest, et differendo adest (5). Il n'abandonne pas son Apôtre, lorsqu'il le laisse gémir si longtemps dans une épreuve si rude (c) sous la main de Satan qui le tourmente ; et « il vaut mieux pour notre salut qu'il n'accomplisse pas si précipitamment les désirs de son malade, afin qu'il assure mieux sa santé : » Ne prœproperam cùm implet voluntatem, perfectam non impleat sanitatem.

Voilà une instruction admirable, voilà une leçon d'humilité digne de saint Augustin, mais digne du saint Apôtre dont il l'a tirée. Humilions-nous profondément dans les tentations, mais aussi que notre force s'y perfectionne. L'humilité chrétienne n'est

 

1 S. August., Serm. CLXIII, n. 8. — 2 Psal. VI. 4. — 3 S. August., Serm. CLXIII, n, 7. — 4 Isa., LVIII, 9. — 5 S. August., loco mox citato.

 

(a) Note marg. : Ecoutez mea sœurs, vous entendrez facilement que cette leçon de saint Augustin vous regarde. — (b) Var. : Pendant qu'il diffère. — (c) Si violente.

 

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pas un abattement de courage : au contraire, les difficultés l'encouragent, les impossibilités l'animent (a) et la déterminent; elle nous rend plus fervents et plus appliqués au travail; elle a cela d'admirable, que plus elle est faible, plus elle est hardie et entreprenante , et les restes de sa vieillesse ne servent qu'à la presser à se renouveler de jour en jour (b).

Mes très-chères sœurs en Jésus-Christ, je finirai ce dernier discours avec ces maximes apostoliques ; et je vous laisse, en vous disant adieu, ce présent précieux et inestimable. Continuez, comme vous faites, à vous renouveler tous les jours; plus ce temple mortel semble menacer ruine, tâchez de plus en plus de l'affermir de tous côtés, selon ce qui est écrit : Suscitaverunt domum homini in statum pristinum, et firmiter eam stare fecerunt (1). Ne vous contentez pas d'affermir ce temple, en vous enracinant de plus en plus en la charité de Jésus-Christ, qui en est le fondement inébranlable ; mais donnez-lui tous les jours de nouveaux accroisse-mens; dilatez tous les jours en vous le règne de Jésus-Christ; qu'il gagne tous les jours de nouvelles places, qu'il pénètre de plus en plus votre cœur, qu'il devienne de plus en plus le maître de vos désirs. Vous avez un grand modèle : il n'y a point de petits défauts à des âmes qui tendent à la perfection. Que le monde s'étonne de votre vie pénitente, je rends grâces à Dieu; mais pour vous, étonnez-vous tous les jours d'être encore si éloignées de votre modèle, qui est Jésus-Christ. La véritable justice du christianisme, c'est de confesser humblement, en profitant tous les jours, qu'on est toujours bien peu avancé dans la perfection de la justice.

Surtout dans les épreuves que Dieu vous envoie, que jamais votre confiance ne se relâche (c). Mes sœurs, vous le savez, votre Epoux a des artifices secrets, incroyables, pour se faire aimer; il a des fuites mystérieuses pour nous engager davantage ; il a des éloignements qui nous approchent ; souvent lorsqu'il se dérobe, il se donne; c'est un maître incomparable en amour; nul n'a jamais su le pratiquer avec une libéralité plus entière, nul ne le sait

 

1 II Paral., XXIV, 13.

 

(a) Var. : L'échauffent. — (b) Note marg. : Dans l'accablement de ce corps de mort, elle ne médite que des pensées d’immortalité. — (c) Var. : Que jamais votre zèle ne ralentisse.

 

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attirer (a) avec des adresses plus délicates. Croissez donc toujours en son saint amour.

Et nous aussi, mes frères (b), profitons de ces instructions et de ces exemples. Elevons toujours en nous le temple de Dieu, et ne nous lassons jamais de croître en Notre-Seigneur. Viendra le temps bienheureux auquel, après qu'il aura habité en nous, nous habiterons en lui ; après que nous aurons été son temple, il sera aussi le nôtre. Dominus enim Deus omnipotens templum illius est et Agnus (1). Saint Jean n'a point vu de temple en la céleste Jérusalem , parce que Dieu lui-même est son temple, que nous habiterons en lui éternellement, lorsque « il sera tout à tous, » comme dit l'Apôtre (2). « Heureux ceux qui habiteront ce temple : » Beati qui habitant in domo tuâ, Domine (3). Quel épanchement de joie ! quelle dilatation de notre cœur! Etre en Dieu! habiter en Dieu (c) !

 

 

AUTRE EXORDE POUR LE MÊME  SERMON.

 

Solvite templum hoc, et in tribus diebus ejcitabo illud.

Détruisez ce temple, et je le rétablirai en trois jours. 

Paroles du Fils de Dieu, en saint Jean, chapitre II, 19, par lesquelles le Sauveur prédit sa glorieuse résurrection. 

Ille autem dicebat de templo corporis sui. Ibid., 21.

 

Ce n'a pas été sans mystère que la solennité de la pâque sainte, qui devait nous représenter en figure le renouvellement

 

1 Apoc., XXI, 22. — 2 1 Cor., XV, 28. — 3 Psal. LXXXIII, 5.

 

(a) Var. : Nul ne l'a jamais attiré.....(b) Note marg. : Et nous aussi, mes frères, quoique dans une vie mêlée dans le monde, songeons à nous discerner de sa confusion et des mœurs des mondains. Profitons de ces instructions... — (c) Je désire principalement votre entière conversion à celui qui vous l'ail régner. Car encore que tant d'actions que le monde admire vous attirent devant les hommes d'immortelles louanges, Dieu juge par d'autres règles; et il y aura beaucoup à diminuer, quand il faudra paraître à son tribunal et subir aussi la rigueur de son examen. Je souhaite donc, ô grand Roi.....

 

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spirituel (a) de l'homme, a été instituée (b) sous la loi et ensuite sous l'Evangile, dans cette belle (c) saison où le monde se renouvelle et où le soleil qui s'était éloigné de nous semble retourner sur ses pas (d), et ranime en se rapprochant toute la nature. C'est de cet agréable renouvellement de la nature visible, que saint Grégoire de Nazianze (1) prend occasion d'exciter tous les chrétiens à faire en eux-mêmes un printemps mystique et spirituel par le renouvellement de leurs âmes ; et c'est à quoi nous invite le divin Sauveur Jésus Fils de Dieu, ce divin soleil de justice qui revient à nous et nous paraît aujourd'hui plus glorieux que jamais avec toutes ses lumières. Ce divin soleil de justice s'était retiré bien loin dans ces derniers jours (e) ; et sa sainte âme descendue aux enfers était allée réjouir les limbes par sa lumière bénigne, et donner de plus beaux jours à un autre monde. Aujourd'hui qu'il se rapproche de nous avec de nouveaux rayons de gloire et de majesté, il faut aussi qu'il nous renouvelle par de favorables (f) influences en nous éclairant de plus près. Il faut nous renouveler avec lui. Assez et trop longtemps nous sommes demeurés (g) dans le tombeau, dans les ombres de la mort, dans les ténèbres du péché. Jésus-Christ ressuscite, ressuscitons. Jésus-Christ reprend une vie nouvelle, ne respirons, chrétiens, qu'une sainte nouveauté de vie.

O  Marie, qui ne viviez plus depuis que vous aviez vu mourir votre Fils, et que sa miraculeuse résurrection a tirée comme d'un sépulcre en dissipant aujourd'hui cette profonde tristesse où vous étiez pour ainsi dire toute ensevelie, obtenez-nous cette grâce de ressusciter avec lui. Nous nous jetons à vos pieds ; et pour honorer la joie infinie que ressentit votre cœur en voyant ce cher Fils sorti du tombeau, non plus grand mais plus glorieux qu'il n'était sorti autrefois de vos entrailles très-pures, nous vous disons avec l'Eglise : Regina cœli.

 

1 Orat XLIII, n. 23.

 

(a) Var. : Mystique. — (b) Etablie. — (c) Agréable. — (d) Semble nous ramener les beaux jours. — (e) S'était retiré bien loin par sa mort. — (f) Douces. — (3) Nous avons demeuré.

 

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