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PREMIER SERMON
POUR
LE IIe DIMANCHE DE CARÊME (a).

 

Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi bene complacui; ipsum audite.

Celui-ci est mon Fils bien-aimé dans lequel je me suis plu; écoutez-le. Matth., XVII, 5.

 

C'est une doctrine fondamentale de l'Evangile de Jésus-Christ, que le chrétien véritable ne se conduit point par les sens ni par la

 

(a) Premier point. — Dieu seul nous peut conduire à la vérité. Deux moyens pour y parvenir : intelligence, autorité : Tertullien. L'un et l'autre appartient à Dieu, non aux hommes : le dernier pour cette vie, l'autre pour la future. Mérite, récompense. Pourquoi Moïse et Elie disparaissent, quand on dit : Ipsum audite (Matth., XVII, 5). Deux manières de savoir : 1° par nous-mêmes; 2° scienti conjungi : yeux de la foi.

Second point. — La foi exige les œuvres. Fondement, donc édifice. Hic homo cœpit œdificare, et non potuit consummare (Luc, XIV, 30).

Le fondement a deux qualités : commencement, soutien.

L'exemple de Jésus-Christ lève les difficultés. Deux choses pour cela : inspirer du courage, donner de la force. Le premier, en marchant devant; le second, in eo enim in quo passus est ipse et tentatus, potens est et iis qui tentantur auxiliari (Hebr., II, 18).

Marche devant, nous tend la main. Incarnation, infirmité de notre Seigneur Jésus-Christ. Vérités diminuées parmi les enfants des hommes: Diminutœ sunt veritates ( Psal. XI, 1). Chacun retranche l'Evangile à sa mode.

Comment il faut entendre Jésus-Christ : Optimus minuter tuus est, qui non magis intuetur hoc à te audire quod ipse voluerit, sed potius hoc velle quod à te audierit (S. August., Confess., lib. X, cap. VI).

Troisième point. — Différence entre le commandement et la promesse : commandement, ce que nous devons faire à l'égard de Dieu ; promesse, ce que Dieu s'engage de faire à notre égard. La promesse est déjà une espèce de don. Pourquoi? Celui qui promet se dessaisit, en tant qu'il s'ôte la liberté de disposer autrement.

Dans la promesse, deux choses : ni douter, ni se lasser.

De toutes les paroles de Jésus-Christ, celle de la promesse est la moins entendue : Qui perseveraverit usque in finem, hic salvus erit (Matth., X, 22).

 

Prêché probablement dans le Carême de 1660, aux Minimes de la Place-Royale.

L'analyse de ce sermon est écrite, comme celle du sermon suivant, sur le dos d'une lettre imprimée. Pendant les premières années de son séjour à Paris, Bossuet s'était chargé de défendre les intérêts du chapitre de Metz, qui avait souvent des procès pour des affaires de fruits, de prébendes, «le bénéfices, de collation. Il avait fait imprimer comme une lettre circulaire, qu'il adressait aux chapitres du royaume, dans l'espoir d'en obtenir des renseignements utiles sur leur discipline et leurs coutumes. Cette lettre était ainsi conçue : « MM. du chapitre de Metz croient avec raison qu'il importe de ne permettre pas que l'on donne atteinte aux coutumes anciennes des églises, et que cela va au renversement de l'ordre et des statuts des chapitres. C’est pourquoi ils se promettent, Messieurs, de recevoir instruction de vous sur les pratiques de votre église qui peuvent favoriser les leurs. Ils ne doutent pas qu'ils ne puissent prendre un bon conseil sur vos exemples, et qu'il ne leur soit avantageux et même nécessaire d'en être informés. Accordez-leur donc, s'il vous plait, cette grâce, et à moi celle de recevoir avec mes très-humbles respects, » etc. La réponse devait être adressée « à M. l'abbé Bossuet, chanoine et grand archidiacre de l'église de Metz, logé au doyenné de Saint-Nicolas du Louvre, vis-à-vis de l'église collégiale de ce nom. » Bossuet écrivait quelquefois sur ces lettres, dans tout l'espace qui n'était pas occupé par l'impression, les analyses ou le commencement de ses sermons.

 

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raison naturelle; mais qu'il règle tous ses sentiments par l'autorité de la foi, suivant ce que dit le divin Apôtre : Justus autem meus ex fide vivit (1) : « Le juste vit par la foi (a). » C'est pourquoi, entre tous les sens que la nature nous a donnés, il a plu à Dieu de choisir l'ouïe pour la consacrer à son service. « Un peuple, dit-il, s'est donné à moi, il s'est soumis par la seule ouïe : » In auditu auris obedivit mihi (2). Et le Sauveur nous prêche dans son Evangile que

 

1 Hebr., X, 38; Habac, II, 4. — 2 Psal. XVII, 45.

 

(a) Var.: Mais qu'il règle tous ses sentiments par l'autorité de la toi: Justus autem meus ex fide vivit : « Le juste vit par la foi, » comme dit saint Paul après le Prophète.

 

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«  ses brebis écoutent sa voix et qu'elles le suivent » aussitôt qu'il parle : Oves meœ vocem meum audiunt..., et sequuntur me (1) afin, mes frères, que nous entendions que dans l'école du Fils de Dieu il ne faut point consulter les sens ni faire discourir la raison humaine, mais seulement écouter et croire.

Je ne m'étonne donc pas aujourd'hui si Dieu fait retentir, ainsi qu'un tonnerre, aux oreilles des saints apôtres, cette parole que j'ai rapportée : « C'est ici mon Fils bien-aimé dans lequel je me suis plu; écoutez-le : » Ipsum audite; c'est-à-dire qu'après Jésus-Christ il n'y a plus de recherche à faire : Nobis curiositate opus non est post Christum Jesum, nec inquisitione post Evangelium, dit le grave Tertullien (2). Ce divin Maître nous ayant parlé, toute la curiosité de l'esprit humain doit être à jamais arrêtée, et il ne faut plus songer qu'à l'obéissance : Ipsum audite : « Ecoutez-le. » Mais afin que vous sachiez mieux ce que signifie cet oracle, et pourquoi le Père céleste a voulu nous le prononcer dans la glorieuse transfiguration de notre Seigneur Jésus-Christ, remarquez s'il vous plaît, avant toutes choses, qu'il nous a envoyé son Fils pour nous apporter trois paroles qu'il est nécessaire que nous écoutions : la parole de sa doctrine pour nous enseigner ce qu'il faut croire, la parole de ses préceptes pour nous montrer comme il faut agir, la parole de ses promesses pour nous apprendre-ce qu'il faut attendre (a).

Le vieil homme a cinq sens, l'homme renouvelé n'a plus que l'ouïe; il ne juge point par la vue; Dieu lui a en quelque sorte arraché les yeux : Non contemplantibus nobis quœ videntur (3). Ni le toucher ni le goût ne le règlent; il lui est seulement permis d'écouter, et cette liberté est restreinte à écouter Jésus-Christ tout seul; et encore doit-il l'écouter non pour examiner sa doctrine, mais pour la croire simplement sur son témoignage. Car comme l'esprit humain s'égarait dans ses jugements par son ignorance, dans ses mœurs par ses désirs déréglés, dans la recherche de son bonheur par ses espérances mal fondées, pour donner remède à

 

1 Joan., X, 27. — 2 De Prœscript., advers. Hœres., n. 8. — 3 II Cor., IV, 18.

 

(a) Var. : La parole de sa doctrine qui nous enseigne ce qu'il faut croire, la parole de ses préceptes qui nous montre comme il faut agir, la parole de ses promesses qui nous apprend ce qu'il faut attendre.

 

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de si grands maux, il fallait que ce divin Maître entreprît de former notre jugement parla certitude de sa doctrine, de diriger nos mœurs dépravées par l'équité de ses préceptes, de régler nos prétentions par la fidélité de ses promesses. C'est ce qu'il a fait, chrétiens ; et il y a travaillé principalement dans sa glorieuse transfiguration. De quelle sorte et par quels moyens? C'est ce qu'il faut vous proposer en peu de mots.

Sachez donc et pesez attentivement que l'effet de ces trois paroles que le Fils de Dieu nous annonce, est traversé par trois grands obstacles. Vous nous enseignez, ô Maître céleste, et rien n'est plus assuré que votre doctrine ; mais elle est obscure et impénétrable, et l'esprit a peine à s'y soumettre. Divin Législateur, vous nous commandez, et tous vos préceptes sont justes; mais cette voie est rude et contraire aux sens, et il est malaisé de s'y ranger. Enfin vous nous promettez des biens éternels, et il n'y a rien de plus ferme que vos promesses ; mais que l'exécution en est éloignée ! vous nous remettez à la vie future, et notre âme est fatiguée par cette attente. Voilà, mes frères, trois grands obstacles qui nous empêchent d'écouter le Sauveur Jésus et de nous soumettre à sa parole. Sa doctrine est certaine, mais elle est obscure ; ses préceptes sont justes, mais difficiles ; ses promesses infaillibles, mais fort éloignées. Chrétiens, allons au Thabor pour y voir Jésus-Christ transfiguré ; considérons qui l'y accompagne, de quoi il y parle, comme il y paraît. Moïse et Elie sont à ses côtés; c'est-à-dire, si nous l'entendons, que la loi et les prophètes lui rendent hommage. Un maître en qui il paraît tant d'autorité, quoique sa doctrine soit obscure, mérite bien qu'on l'en croie sur sa parole : Ipsum audite. Mais de quoi s'entretient ce divin Sauveur avec ces deux hommes que Dieu lui envoie? « De sa mort, dit l'Evangéliste, et du supplice cruel qu'il devait souffrir en Jérusalem : » Dicebant excessum ejus, quem completurus erat in Jerusalem (1). Chrétiens, ne parlons plus des difficultés des choses qu'il nous a commandées, après que nous voyons les travaux pénibles de celles qu'il a lui-même accomplies. Enfin il paraît, nous dit l’Ecriture, plein de gloire et de majesté, et il nous donne comme un

 

1 Luc., IX, 31.

 

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avant-goût de la félicité qu'il nous prépare. Par conséquent ne nous plaignons pas que la gloire qu'il nous promet soit si éloignée, puisqu'il nous la rend déjà en quelque sorte présente. Que reste-t-il donc maintenant, sinon que nous entendions le Père éternel qui nous avertit d'écouter son Fils : Ipsum audite. Ecoutons humblement ce divin Maître; écoutons sa doctrine céleste, sans que l'obscurité nous arrête; écoutons ses commandements, sans que leur difficulté nous étonne; enfin écoutons ses promesses, sans que leur éloignement nous impatiente. C'est ce que je me propose de vous faire entendre avec le secours de la grâce.

 

PREMIER POINT.

 

La première chose, mes frères, que le Père éternel exige de nous lorsqu'il nous ordonne d'écouter son Fils, c'est que nous soyons convaincus que sur toutes les vérités qu'il est nécessaire que nous connaissions, il s'en faut rapporter à ce qu'il en dit et l'en croire sur sa parole sans examiner davantage. C'est ce qu'il nous faut établir comme le fondement immuable de toute la vie chrétienne, et pour cela supposons, Messieurs, une chose connue de tous, qui nous donnera de grandes lumières, si nous en savons comprendre les .suites ; que les hommes peuvent parvenir à la vérité en deux manières différentes, ou bien par leurs propres lumières lorsqu'ils la connaissent eux-mêmes, ou par la conduite des autres lorsqu'ils en croient un rapport fidèle. C'est une chose connue et qui n'a pas besoin d'explication, mais les suites en sont admirables, et je vous prie de les bien entendre.

Et pour commencer, chrétiens, à développer ce mystère, je dis qu'il n'appartient qu'à Dieu seul de nous conduire à la vérité par l'une et par l'autre de ces deux voies. Non, les hommes ne le peuvent pas; c'est folie de l'attendre d'eux. Celui qui entreprend de nous enseigner doit ou nous faire entendre (a) la vérité, ou du moins nous la faire croire. Pour nous la faire entendre, il faut nécessairement beaucoup de sagesse ; pour nous la faire croire, il

 

(a) Var. : Pour être capable d'enseigner les hommes, il faut ou leur faire entendre la vérité, ou du moins la leur faire croire; il faut pour l'un beaucoup de sagesse, et pour l'autre beaucoup d'autorité.

 

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faut beaucoup d'autorité; et c'est ce qui ne se trouve point parmi les hommes. C'est pourquoi Tertullien disait dans cet admirable Apologétique : Quanta est prudentia hominis ad demonstrandum quid verè bonum ? quanta auctoritas ad exigendum (1) ? « La prudence des hommes est trop imparfaite pour découvrir le vrai bien à notre raison, et leur autorité est trop faible pour pouvoir rien exiger de notre créance. » La première, c'est la prudence, est peu assurée; et la seconde, c'est l'autorité, peu considérable (a) : Tam illa falli facilis, quàm ista contemni. Par conséquent nous devons conclure qu'il ne faut pas attendre des hommes la connaissance certaine de la vérité, parce que leur autorité n'est pas assez grande pour nous la faire croire sur ce qu'ils en disent (b), et que leur sagesse est trop courte pour nous en donner l'intelligence.

Mais ce qui ne se trouve point parmi les hommes, il nous est aisé, chrétiens, de le rencontrer en notre Dieu; et vous le comprendrez aisément, si vous considérez avec attention comme il parle différemment dans son Ecriture. Il pratique, ce grand Dieu, l'un et l'autre. Quelquefois il se fait connaître manifestement; et alors il dit à son peuple : « Vous saurez que je suis le Seigneur:» Et scietis quia ego sum Dominus (2); quelquefois, sans se découvrir, il fait valoir son autorité, et il veut qu'on le croie sur sa parole; comme lorsqu'il prononce avec tant d'emphase, pour obliger tout le monde à se soumettre : Hœc dicit Dominis : « Voici ce que dit le Seigneur; » et ailleurs : « Il sera ainsi, parce que j'ai parlé, dit le Seigneur : » Quia verbum ego locutus tum , dicit Dominus (3). D'où vient, Messieurs, cette différence? C'est sans doute qu'il veut que nous comprenions qu'il a le moyen de se faire entendre, mais qu'il a le droit de se faire croire. Il peut par sa lumière infinie nous montrer, quand il lui plaira, sa vérité à découvert; et il peut par son autorité souveraine nous obliger à la révérer sans que nous en ayons l'intelligence. L'un et l'autre est digne de lui ; il est digne de sa grandeur de régner sur les esprits ou en les captivant

 

1 Apolog., n. 45. — 2 Ezech., VI, 7. — 3 Jerem., XXXIV, 5.

 

(a) Var. : La première est peu assurée, et la seconde est peu considérable. — (b) Sur parole.

 

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par la foi, ou en les contentant par la claire vue. L'un et l'autre est digne de lui, il fera aussi l'un et l'autre ; mais chaque chose doit avoir son temps. Tous deux néanmoins sont incompatibles, je veux dire l'obscurité de la foi et la netteté de la vue. Qu'a-t-il fait? Ecoutez, mes frères; voici le mystère du christianisme. Il a partagé ces deux choses entre la vie présente et la vie future : l'évidence dans la patrie, la foi et la soumission durant le voyage. Un jour la vérité sera découverte; en attendant, pour s'y préparer, il faut que l'autorité soit révérée : le dernier fera le mérite, et l'autre est réservé pour la récompense. Là, sicut audivimus, sic vidimus (1) ; ici il ne se parle point de voir, et on nous ordonne seulement de prêter l'oreille et d'être attentifs à sa parole : Ipsum audite.

Venez donc au Thabor, mes frères, et accourez tous ensemble à ce divin Maître que vous montre le Père céleste. Vous pouvez reconnaître son autorité en considérant les respects que lui rendent Moïse et Elie, c'est-à-dire la loi et les prophètes, comme je l'ai déjà expliqué. Mais j'ajouterai maintenant une remarque sur notre évangile, que peut-être vous n'avez pas faite et qui néanmoins est très-importante pour connaître l'autorité du Sauveur Jésus. C'est, Messieurs, qu'il est remarqué qu'en même temps que fut entendue cette voix du Père éternel qui nous commande d'écouter son Fils, Moïse et Elie disparurent, et que Jésus se trouva tout seul : Et dum fient vox, inventus est Jesus solus (2). Dites-moi, quel est ce mystère ? d'où vient que Moïse et Elie se retirent à cette parole ? Chrétiens, voici le secret développé par le grand Apôtre. « Autrefois, dit-il, Dieu ayant parlé en différentes manières par la bouche de ses prophètes (3) ; » écoutez et comprenez ce discours : Vous avez parlé, ô prophètes, mais vous avez parlé autrefois : « maintenant en ces derniers temps il nous a parlé par son propre Fils : » Novissimè locutus est nobis in Filio suo (4). C'est pourquoi, dans le même temps que Jésus-Christ paraît comme maître, Moïse et Elie se retirent; la loi, toute impérieuse qu'elle est, tient à gloire de lui céder; les prophètes, tout clairvoyants qu'ils sont, se vont néanmoins cacher dans la nue : Intrantibus illis in

 

1 Psal. XLVII, 9.— 2 Luc, IX, 36. — 3 Hebr., I, 1. — 4 Ibid., 2.

 

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nubem (1)... Nubes obumbravit eos (2). Comme s'ils disaient au divin Sauveur tacitement par cette action : Nous avons parlé autrefois au nom et par l'ordre de votre Père : Olim loquens patribus in prophetis; maintenant que vous ouvrez votre bouche pour expliquer vous-même les secrets du ciel, notre commission est expirée ; notre autorité se confond dans l'autorité supérieure; et n'étant que les serviteurs, nous cédons humblement la parole au Fils. Par conséquent soyons attentifs, et écoutons ce Fils bien-aimé : Hic est Filius meus dilectus. Ne recherchons pas les raisons des vérités qu'il nous enseigne. Toute la raison, c'est qu'il a parlé.

Ecoutez comme il vous parle dans son Evangile : « Jamais personne n'a vu Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est venu lui-même pour vous en instruire : » Deum, nemo vidit unquam; Unigenitus Filius, qui est in sinu Patris, ipse enarravit (3). O hommes, nul de vous n'a encore vu Dieu; vous ne savez ce qu'il en faut croire, ni la voie qu'il faut tenir pour aller à lui. Le Fils unique qui est en son sein, qui pénètre tous ses secrets, lui-même est venu vous les raconter : Ipse, ipso enarravit. Que recherchez-vous, ô mortels, après le témoignage de ce divin Maître? Osez-vous lui demander des raisons ou vous plaindre de ce qu'il vous oblige de croire ce que vous n'entendez pas? — Je voudrais entendre, je voudrais savoir.—Saint Augustin vous va satisfaire : « C'est être savant, nous dit-il, que d'être uni à celui qui sait : » Non parra scientia est scienti conjungi (4). C'est être assez savant que d'être uni à celui qui sait; ajoutons pour expliquer sa pensée, à celui qui sait d'original, si l'on peut parler de la sorte, qui sait pour avoir vu et pour avoir vu jusqu'au fond, et qui nous dit avec vérité : Quod vidimus, testamur (5) : « Nous témoignons ce que nous avons vu. » — « Celui-là, dit saint Augustin, a les yeux de l'intelligence ; nous avons les yeux de la foi : » Ille habet oculos agnitionis, tu credulitatis (6). Je ne prétends rien davantage, je ne me plains pas de l'obscurité des maximes de l'Evangile. Si je n'ai pas de lumières propres, j'ai celles de Jésus-Christ qui me dirigent : je n'ai pas la science en moi-même, mais j'ai celle du

 

1 Luc., IX, 34. — 2 Matth., XVII, 5. — 3 Joan., I, 18.— 4 Serm. II in Psal. XXXVI, n. 2. — 5 Joan., III, 11. — 6 S. August., ubi suprà.

 

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Fils de Dieu qui m'assure; et je crois hardiment où je ne vois rien, parce que j'en crois celui qui voit tout (a).

Il me semble, chrétiens auditeurs, que l'autorité de ce divin Maître est suffisamment établie, et que nous devons être très-persuadés que c'est assez d'écouter sa voix pour connaître la vérité avec certitude. Mais tirons de cette doctrine importante quelque instruction pour notre conduite. Il faudrait commencer un nouveau discours pour vous dire tout le fruit qu'elle doit produire ; mais parmi une infinité de grandes choses qui se présentent de toutes parts, voici une vérité que je vous choisis, et je me tiendrai bienheureux si je la puis aujourd'hui graver dans vos cœurs. Puisqu'il est ainsi, chrétiens, que nous sommes obligés de nous rapporter à ce que nous dit le Sauveur Jésus, résolvons, et résolvons immuablement de former tous nos jugements, non sur les apparences des sens, ni sur les opinions anticipées dont la raison humaine nous préoccupe, mais sur la parole de Jésus-Christ, sur la doctrine de son Evangile. M'entendez-vous, mes frères; comprenez-vous ce que je veux dire? Quis est vir sapiens qui intelligat hoc (1) ? Qui de nous juge selon Jésus-Christ et selon les règles qu'il nous a données? Ah ! si nous jugions des choses selon ses maximes, que d'illusions seraient dissipées ! que de folles pensées s'évanouiraient! que de vaines opinions tomberaient par terre! Quand on voit les fortunés de ce monde au milieu de la troupe qui leur applaudit, tous les sens disent : Voilà les heureux; Jésus-Christ nous dit au contraire : Ce ne sont pas là les heureux ; « heureux ceux dont le Seigneur est le Dieu! » Beatus populus cujus Dominus Deus ejus (2) !  C'est ce que vous dites, ô Maître céleste; mais que cette parole est peu écoutée! Nous nous laissons étourdir par le bruit de ceux qui nous crient perpétuellement qu'ils sont heureux, qu'ils sont fortunés dans leur vie molle et délicieuse ; et parmi ce bruit importun, la voix du Sauveur demeure étouffée (b) et n'arrive pas jusqu'à nos oreilles.

Chrétiens, venez au Thabor, apprenez du Père céleste à écouter

 

1 Jerem., IX, 12.— 2 Psal. CXLIII, 15.

 

(a) Var. : Je crois avec joie ce que je ne vois pas, parce que je crois celui qui voit tout. — (b) Votre voix demeure.....

 

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humblement son Fils : Ipsum audite. Qui pourrait vous faire comprendre toute la force de cette parole ? Cette parole du Père céleste sacrifie tous vos sentiments et abat toutes vos raisons aux pieds de son Fils. Mais qu'il a raison de nous reprocher que nous ne recevons pas son témoignage! Testimonium nostrum non accipitis (1). Si vous le recevez, vous êtes obligés de désavouer tout ce qui s'oppose à ce qu'il témoigne. Par exemple, pour vous en convaincre, regardez ce que vous faites dans l'Eucharistie; tout est mort, il n'y a que l'ouïe qui vive, et elle ne vit que pour Jésus-Christ et ne connaît plus que sa voix. Dans cet adorable mystère tous vos sens vous trompent, excepté l'ouïe. La vue et le goût disent : C'est du pain ; le toucher et l'odorat se joignent à eux ; il n'y a que l'ouïe qui rapporte bien, parce qu'elle vous annonce en simplicité le témoignage de Jésus-Christ. Et pour bien recevoir ce grand témoignage, vous démentez votre propre vue, vous désavouez votre goût, vous résistez à votre raison pour abandonner tous vos sentiments à Jésus qui vous instruit par la seule ouïe. Eveillez-vous, mes frères, et rendez partout le même respect à celui qui est toujours infaillible. Que ce mystère que vous fréquentez tous les jours vous accoutume à juger des choses, non selon la prudence humaine, mais selon le témoignage qu'en rend le Sauveur (a). Imaginez-vous, chrétiens, mais que dis-je imaginez-vous? croyez que vous avez toujours Jésus près de vous, qui vous dit à l'oreille tout ce qu'il faut croire de ce qui se présente à vos yeux. C'est l'Ecriture qui vous l'enseigne, qu'il marche après vous comme un précepteur qui suit et qui conduit ses disciples, et qui ne cesse de les avertir de la voie qu'ils doivent suivre : Et aures tuœ audient verbum post tergum monentis : Hœc est via (2). Soyez donc attentifs, mes frères, à ce précepteur qui vous parle, et réglez vos jugements sur les siens. Vos sens vous disent : Ce plaisir est doux ; écoutez, Jésus dit qu'il est très-amer : Amarum est reliquisse te Dominum Deum tuum (3). Vos sens disent : Courons aux délices ; et Jésus : « Malheur à vous qui riez, parce que vos ris produiront des pleurs (4)! » Vos sens disent : Ah! qu'il est

 

1 Joan., III, 11. — 2 Isa., XXX, 21. — 3 Jerem., II, 19. — 4 Luc., VI, 25. (a) Var. — Que Jésus en rend.

 

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pénible de marcher dans la voie de Dieu! et Jésus au contraire, que « son joug est doux et que son fardeau est léger : » Jugum meum suave est et onus meum leve (1). Croyez ces témoignages, fidèles; et persuadés de leur vérité, formez-vous des maximes invariables qui fixant à jamais (a) votre esprit sur des jugements arrêtés, puissent aussi diriger vos mœurs par une conduite certaine. C'est ma seconde partie.

 

SECOND  POINT.

 

Ipsum audite : « Ecoutez Jésus; » écoutez ses commandements. Je vous ai dit, Messieurs, écoutez et croyez tout ce qu'il enseigne; je vous parle maintenant d'une autre manière et je vous dis : Ecoutez et faites. Mais pour vous le dire avec fruit, il faut tâcher de vous faire entendre la liaison qu'il doit y avoir entre la foi et les œuvres ; et pour cela remarquez avant toutes choses que toute la vie chrétienne nous étant représentée dans les Ecritures comme un édifice spirituel, les mêmes Ecritures nous disent aussi que la foi en est le fondement, (b) C'est pourquoi saint Paul nous enseigne que « nous sommes fondés en la foi : » In fide fundati (2). Or vous savez que le fondement a deux qualités principales : il est en premier lieu le commencement, et secondement il est le soutien de l'édifice qui se prépare. Donc pour bien connaître la foi, nous

 

1 Matth., XI, 30. — 2 Coloss., I, 23.

(a) Var.: Fortement. — (b) Note marg. : Ipsum audite : « Ecoutez Jésus,» et écoutez ses commandements; si vous avez créance à sa doctrine, venez à l'épreuve des œuvres, et montrez votre foi par vos actions : Ostende ex operibus fidem tuam (Jacob., II, 18). Et certainement, chrétiens, ai nous en croyons sa parole, de quelque science que soit éclairé celui qui ne garde point ses préceptes, il ne doit pas se vanter de le connaître. Le disciple bien-aimé le dit nettement en sa Ire Epître: Qui dicit se nosse eum, et mandata ejus non custodit, mendax est et in hoc veritas non est ( 1 Joan., II, 4): « Celui qui dit qu'il le connaît, et ne garde pas ses commandements, c'est un menteur, et la vérité n'est pas en lui. » Non, il ne connaît pas Jésus-Christ, parce qu'il ne le connaît pas comme il le veut être. Il le connaît comme un curieux qui se divertit de sa doctrine et ne songe pas à la pratique , ou qui en fait un sujet de spéculations agréables. Chrétiens, ce n'est pas ainsi que Jésus-Christ veut être connu ; au contraire , il nous assure qu'il ne connaît pas ceux qui le connaissent de la sorte. Il veut des ouvriers fidèles, et non pas des contemplateurs oisifs; et ce n'est rien de la foi, si elle ne fructifie en bonnes mœurs. Mais afin de vous en convaincre, remarquez, s'il vous plait. Messieurs, que toute la vérité chrétienne nous étant représentée dans les Ecritures comme un édifice spirituel, les mêmes Ecritures nous disent aussi que la foi en est le fondement.

 

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vous juger en premier lieu qu'elle n'est qu'un commencement, et secondement qu'elle est destinée pour être le soutien de quelque chose. L'une et l'autre de ces qualités exige nécessairement la suite des œuvres, parce qu'en qualité de commencement elle nous oblige à continuer, et en qualité de soutien elle nous invite à bâtir dessus, et l'un et l'autre se fait par les œuvres.

Mais découvrons dans un plus grand jour ces deux importantes raisons. Croire, disons-nous, c'est commencer; et il est aisé de l'entendre. Car tout le dessein du christianisme n'étant que de soumettre notre esprit à Dieu, la foi, dit saint Augustin, commence cette œuvre : Fides est prima quœ subjugat animam Deo (1) : « La foi est la première qui soumet l'âme à Dieu ; » et le concile de Trente a défini que « la foi est le commencement du salut de l'homme : » Fides est humanœ salutis initium (1). La foi est donc un commencement, c'est la première de ses qualités (a). Et plût à Dieu, Messieurs, que tous les chrétiens l'eussent bien compris! car par là ils pourraient connaître que de s'en tenir à la foi sans s'avancer dans les bonnes œuvres , c'est s'arrêter dès le premier pas ; c'est abandonner tout l'ouvrage dès le commencement de l'entreprise et s'attirer justement ce reproche de l'Evangile : Hic homo cœpit œdificare, et non potuit consummare (2) : « Voilà ce fol et cet insensé qui avait commencé un beau bâtiment, et qui ne l'a pas achevé ; » il a fait grand amas de matériaux, il a posé tous les fondements d'un grand et superbe édifice ; et le fondement étant mis, tout d'un coup il quitte l'ouvrage. O le fol! ô l'extravagant ! Hic homo cœpit œdificare.

Mais éveillez-vous, chrétien: c'est vous-même qui êtes cet homme insensé. Vous avez commencé un grand bâtiment ; vous avez déjà établi la foi qui en est le fondement immuable : pour poser ce fondement de la foi, quels efforts a-t-il fallu faire? La place destinée pour le bâtiment était plus mouvante que le sable : chrétiens, c'est l'esprit humain, toujours chancelant dans ses

 

1 De Agon. christ., n. 14. — 2 Sess. XI, cap. VIII. — 3 Luc., XIV, 30.

 

(a) Var. : Mais découvrons dans un plus grand jour ces deux importantes raisons: je conclus la première en peu de paroles, et la seconde qui sera plus de notre sujet, aura une plus grande étendue. La foi est donc un commencement, c’est la première de ses qualités.

 

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pensées ; il a fallu l'affermir. Que de miracles, que de prophéties, que d'écritures, que d'enseignements ont été nécessaires pour servir d'appui ! Il y avait d'un côté des précipices, précipices terribles et dangereux de l'erreur et de l'ignorance, il a fallu les combler ; et de l'autre, « des hauteurs superbes qui s'élevaient, dit le saint Apôtre !, contre la science de Dieu ; » il a fallu les abattre et les aplanir. Parlons en termes plus intelligibles : il a fallu s'aveugler soi-même, démentir et désavouer tous ses sens, renoncer à son jugement, se soumettre et se captiver dans la partie la plus libre , qui est la raison ; enfin que n'a-1-il pas fallu entreprendre pour poser ce fondement de la foi ? Et après de si grands efforts et tant de préparatifs extraordinaires, on laisse l'entreprise imparfaite et l'on met de beaux fondements sur lesquels on ne bâtit rien : peut-on voir une pareille folie? Et ne vois-tu pas, insensé, que ce fondement attend l'édifice, que ce commencement de la foi demande sa perfection par la bonne vie ; et que ces murailles à demi élevées, qui se ruinent parce qu'on néglige de les achever, rendent hautement témoignage contre ta folle et téméraire conduite ? Mais cela paraîtra bien mieux, si après avoir regardé la foi comme le commencement de l'édifice, nous considérons maintenant qu'elle n'est pas établie pour demeurer seule, mais pour servir de soutien à quelque autre chose. Car s'il est ainsi, chrétiens, qu'elle ne soit pas établie pour demeurer seule, mais pour servir d'appui à quelque autre chose, je vous laisse à juger en vos consciences quelle injure vous faites au divin Sauveur, si ayant mis en vos âmes un fondement si inébranlable, vous craignez encore de bâtir dessus : n'est-ce pas lui dire manifestement que vous vous défiez du soutien qu'il vous présente et que vous n'osez vous appuyer sur sa parole ; c'est-à-dire que sa foi vous paraît douteuse, sa doctrine mal soutenue, ses maximes peu assurées ?

Mais laissons ces justes reproches, pour prouver solidement par les Ecritures que la foi ne nous est donnée que pour être le soutien des œuvres; et vous en serez convaincus, si vous méditez attentivement le conduite de notre Sauveur tant qu'il a été en ce

 

1 II Cor., X, 5.

 

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monde. Il y a accompli de grands mystères, il nous y a donné de grands préceptes. Mais afin que ce qu'il faut croire nous apprît comme il faut agir, il a tellement ménagé les choses, que les mystères qu'il a accomplis fussent le soutien et le fondement des préceptes qu'il a donnés. Saint Augustin, Messieurs, vous fera entendre cette vérité, et il nous l'explique admirablement dans le livre qu'il a écrit de Agone christiano, où, suivant le divin Apôtre, il appuie toute la vie chrétienne et la liaison des préceptes avec les mystères sur Jésus-Christ humilié et sur le mystère de sa croix. O hommes, dit-il, n'aimez pas le monde, voilà le précepte, parce que s'il était aimable, le Fils de Dieu l'aurait aimé, voilà le mystère : Nolite amare temporalia, quia si bene amarentur, amaret ea homo quem suscepit Filius Dei (1) Ne vous attachez pas aux richesses, parce que si elles étaient nécessaires, le Fils de Dieu ne serait pas pauvre ; ne craignez ni les souffrances ni l'ignominie , parce que si elles nuisaient à notre bonheur, un Dieu n'y serait pas exposé. Ainsi vous voyez manifestement que toutes les choses que Jésus commande ont leur fondement immuable sur celles qu'il a accomplies, et que s'il nous prescrit dans son Evangile une vie pénitente et mortifiée, c'est à cause qu'il nous y paraît comme un Dieu anéanti et crucifié (a). C'est pour cela que sur le Thabor, où l'on nous ordonne d'écouter sa voix, de quoi est-ce qu'il s'entretient avec Moïse et Elie ? De sa croix, dit l'Evangéliste, et de la mort qu'il devait souffrir à Jérusalem : Dicebant excessum ejus quem completurus erat in Jerusalem (2). Pour quelle raison, mon divin Sauveur, et qu'a de commun ce discours avec la gloire qui vous environne? C'est, mes frères, que ce qu'il commande étant fondé sur ce qu'il a fait, il nous propose ce qu'il a fait pour disposer nos esprits à suivre humblement ce qu'il commande : Ipsum audite : « Ecoutez Jésus ; » écoutez-le, croyez ce qu'il fait ; mais écoutez-le, faites ce qu'il dit.

Mais permettez-moi, chrétiens, d'étendre davantage cette vérité si solide et si importante, et de vous expliquer le dessein pour lequel le Sauveur Jésus, dans cet état auguste et majestueux où

 

1 S. August., De Agon. christ., cap. XI, n. 12. — 2 Luc, IX, 31.

 

(a) Var. : C'est à cause qu'il nous y propose un Dieu anéanti et crucifié.

 

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il nous paraît au Thabor, ne parle que de sa croix et de ses souffrances. Chrétien, ne le vois-tu pas et ne l'as-tu pas encore entendu? C'est qu'il a dessein de te préparer à écouter ses préceptes; il veut lever les difficultés que tu trouves à suivre ses commandements et à marcher dans ses voies. En effet, pour ôter ces difficultés, il faut nous inspirer du courage et nous donner de la force. Pour nous inspirer du courage, que peut-il faire de plus efficace que de marcher le premier (a) dans la carrière qu'il nous a ouverte tout couvert de sueur et de sang, poursuivant tout ce que les hommes fuient, méprisant tout ce qu'ils désirent, souffrant volontairement tout ce qu'ils redoutent : Onmia contemnendo quœ pravi homines cupiunt, et onmia patiendo quœ horrescunt (1) ; et dans cet état de souffrances, nous disant d'un ton ferme et vigoureux : In mundo pressuram habebitis; sed confia ite, ego vici mundum (2) ; Mes disciples, je le confesse, « vous aurez à souffrir an monde ; mais prenez courage, j'ai vaincu le monde? » Se peut-il trouver des âmes si basses, qui ne soient encouragées par cet exemple (b) ? Que si vous vous plaignez, chrétiens, que vos forces ne suffisent pas pour suivre ce Dieu qui vous appelle (vous me faites tous cette objection, je lis dans vos cœurs), regardez que non-seulement il marche devant, mais encore qu'il se tourne à vous pour vous tendre sa main charitable. Quelle preuve en avons-nous? Ses souffrances mêmes. Saint Paul dans l’Épître aux Hébreux : In eo enim in quo passus est, ipse et tentatus, potens est et iis qui tentantur auxiliuri (3) : « Par les choses qu'il a souffertes, il nous montre qu'il est puissant pour prêter secours à ceux qui souffrent. » Mystère admirable! Messieurs, il prouve sa puissance par sa faiblesse, et avec beaucoup de raison. Car il est juste que celui qui s'est fait infirme par sa bonté, devienne l'appui des autres par sa puissance, et que pour honorer la faiblesse qu'il a prise volontairement (c), il soit le support de ceux qui sont faibles par nécessité. Ne craignons donc pas, chrétiens, de suivre

 

1 S. August., De Verà relig., n. 31. — 2 Joan., XV(, 33. — 3 Hebr., II, 18.

(a) Var. : Pour nous inspirer du courage, qu'y a-t-il de plus efficace que de le voir marcher le premier dans la carrière... ?— (b) Que cet exemple n'encourage pas? — (c) Et qu'en échange de la faiblesse qu'il a prise volontairement.....

 

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Jésus-Christ dans la voie étroite, et d'écouter un Dieu marchant devant, nous donnant l'exemple, se retournant, nous tendant la main (a).

Par conséquent écoutons (b) la voix de ce Maître si charitable : Ipsum audite : « Ecoutons Jésus ; » mais écoutons-le comme il parle, prenons ses sentiments comme il nous les donne. Car combien en voyons-nous tous les jours qui s'approchent du Fils de Dieu, non pour recevoir la loi, mais pour la donner, pour le faire parler à leur mode, selon les préjugés de leurs passions et au gré de leurs convoitises? Tels sont ceux dont parle Isaïe : « Voici, dit-il, un peuple rebelle qui irrite la fureur de Dieu ; ce sont des enfants menteurs, enfants rebelles et opiniâtres qui ne veulent pas écouter la loi de Dieu (c) : » Populus ad iracundiam provocans est, et filii mendaces (1). De tels hommes disent aux voyants : « Ne voyez pas; aveuglez-vous pour nous plaire; ne nous montrez pas la droite voie : » Nolite aspicere nobis quœ recta sunt (2) : ce n'est pas ce que nous cherchons, nous voulons des détours commodes ; nous demandons des expédients pour assouvir nos vengeances, pour pallier nos usures, pour continuer nos rapines, pour contenter nos mauvais désirs : Loquimini nobis placentia, videte nobis errores (3) : « Dites-nous des choses qui nous plaisent, débitez nous des erreurs agréables (d). » Que si quelque docteur véritable, de ceux dont parle l'apôtre saint Paul, « qui traitent droitement et fidèlement la parole de vérité (4), » au lieu de cette voie large et spacieuse qui nous mène à perdition , leur montre le chemin du salut dans une vie mortifiée (e) : « Otez-nous, disent-ils, cette voie : » Auferte à me viam, declinate à me semitam (5) : ôtez-nous cette voie, elle est trop incommode ; « tirez-nous de ce sentier, » il est trop étroit. S'il les presse par l'Evangile et qu'il leur dise : C'est Jésus qui parle : — Ah! nous ne voulons point entendre sa voix, elle nous fâche

 

1 Isa., XXX, 9. — 2 Ibid., 10.— 3 Ibid. — 4 II Timoth., II, 15. — 5 Isa., XXX, 11.

 

(a) Var.: Ne craignons donc pas, chrétiens, de suivre Jésus-Christ dans la  voie étroite et d'écouter sa parole qui nous y appelle. Il ne nous appelle pas seulement, mais il marche devant pour nous enflammer; il ne marche pas seulement devant, mais il nous tend la main pour nous soutenir. — (b) Quoi ! refuserez-vous d'écouter...?—(c) Tels sont ceux qui consultent pour être trompés, qui ne trouvent de bons conseils que ceux qui les flattent, qui cherchent à se damner en conscience. — (d) Trompez-nous par des erreurs agréables. — (e) Pénitente.

 

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et nous importune : Cesset à facie nostrâ Sanctus Israël (1) : qu'il n'y ait aucune partie de nous-mêmes qui fléchisse.

Ainsi, mes frères, l'arrogance humaine emportée par ses passions ne veut point écouter le Sauveur Jésus, s'il ne parle à sa fantaisie. Et jugeons-en par nous-mêmes, mettons la main sur nos consciences. Qui de nous, s'il en était cru, n'entreprendrait pas de changer et de réformer l'Evangile en faveur de ses convoitises? Il y a des vices que nous haïssons par une aversion naturelle ; et il n'y a point d'homme si corrompu, qu'il n'y ait quelque péché qui lui déplaise. Ah ! que nous aimons l'Evangile lorsqu'il condamne ces vices que nous détestons ! Celui-là sera d'un naturel doux, ennemi du trouble et de l'injustice : tonnez tant qu'il vous plaira, ô divin Sauveur, contre les rapines et les violences, il applaudira à votre doctrine; mais si vous lui ôtez ces plaisirs si chers, que votre parole lui paraîtra rude! il ne pourra plus l'écouter. Un autre, naturellement libéral, entendra toujours avec joie ce qui se dira contre l'avarice; mais qu'on ne lui défende pas la médisance; qu'on lui permette de venger cette injure, qu'on lui laisse envelopper ses ennemis ou ses concurrents dans une intrigue malicieuse (a). O folie! ô témérité (b)! « Sauvez-nous, sauvez-nous, Seigneur, disait autrefois le Prophète, parce qu'il n'y a plus de saint sur la terre, et que les vérités sont diminuées par la malice des hommes : » Diminutœ sunt veritates (2). Elles ne sont pas tout à fait éteintes, il y en a qui plaisent à quelques-uns; mais par une audace effroyable, chacun les diminue à sa mode, chacun retranche ce qui lui déplaît. Les hommes se sont mêlés de mettre une distinction entre les vices : il y en a qu'on laisse dans l'exécration, comme la cruauté et la perfidie; il y en a qu'on veut rendre honnêtes, par exemple ces passions douces, comme l'ambition, et ainsi des autres. Malheureux, qu'entreprenez-vous? «Jésus-Christ est-il divisé? » Divisus est Christus (3)? Celui qui commande la fidélité, n'a-t-il pas commandé la tempérance (c) ? Celui qui défend la cruauté, n'a-t-il pas aussi défendu toutes ces douceurs criminelles ?

 

1 Isa., XXX, 11. — 2 Psal. XI, 2. — 3 1 Cor., I, 13.

 

(a) Var. : Qu'on lui laisse embarrasser cette affaire dans une intrigue malicieuse. — (b) Mon Sauveur, que vous êtes rude! on ne peut s'accommoder avec vous. —  (c) La modération.

 

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Pourquoi partagez-vous Jésus-Christ? Pourquoi défigurez-vous sa doctrine par cette distinction injurieuse ? Que vous a fait l'Evangile pour le déchirer de la sorte? Quid dimidias mendacio Christum ? totus veritas fuit (1). Est-ce donc que l'Evangile de Jésus-Christ n'est qu'un assemblage monstrueux de vrai et de faux, et qu'il en faut prendre une partie et rejeter l'autre? Totus veritas : Il est tout sagesse, tout lumière et tout vérité.

Mais, chrétiens, que faut-il donc faire pour écouter fidèlement ce Maître céleste? Le voici en un mot de saint Augustin dans le livre de ses Confessions : Optimus minister tuus est, qui non magis intuetur hoc à te audire quod ipse voluerit, sed potiùs hoc velle quod à te audierit (2) :  « Celui-là est votre serviteur véritable, qui s'approche de vous, ô Sauveur, non pas pour entendre ce qu'il veut, mais plutôt pour vouloir ce qu'il entend. » Parole vraiment sainte, vraiment chrétienne et digne certainement d'être toujours présente à notre mémoire. C'est ainsi que vous devez écouter Jésus comme un maître dont vous venez recevoir la loi, en désavouant humblement tout ce qui se trouve contraire à ses volontés; et si vous le faites, Messieurs, ô Dieu ! quelle sera votre récompense! Il fera un jour ce que vous voudrez, après que vous aurez tait ce qu'il veut; et si vous accomplissez ses préceptes, il accomplira ses promesses. C'est ce qui me reste à vous dire et que je conclurai en peu de paroles.

 

TROISIÈME POINT.

 

Saint Thomas en sa Seconde delà Seconde, question LXXXVIII, où il traite de la nature du vœu (3), établit cette différence entre le commandement et la promesse, que le commandement règle et détermine ce que les autres doivent faire à notre égard, et la promesse au contraire ce que nous devons faire à l'égard des autres. Ainsi, Messieurs , après avoir ouï à quoi la parole de Jésus-Christ nous oblige envers lui par les préceptes, il est juste que vous entendiez à quoi il s'oblige envers vous par ses promesses. Ipsum audite; écoutez Jésus dans les promesses de son Evangile ; et afin que

 

1 Tertull., De Carn. Christ., n. 5. — 2 Lib. X, cap. XXVI. — 3 IIa IIae, Quaest. LXXXVIII, art. 1.

 

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vous entendiez quelle estime vous devez faire de cette promesse, concevez s'il vous plait avec attention, Messieurs, dans quel ordre et par quelle suite Dieu s'engage à vous. Premièrement, il vous promet; secondement pour vous rassurer, il confirme par serment toutes ses promesses : non content d'avoir engagé sa fidélité, il nous envoie son Fils du ciel en la terre, pour nous réitérer la même parole et nous persuader de sa bienveillance ; et enfin pour nous ôter tout scrupule, il nous donne comme un avant-goût de la félicité qu'il nous a promise, dans la glorieuse transfiguration de notre Seigneur Jésus-Christ. C'est cette dernière circonstance qu'il nous faut examiner en peu de paroles. C'était déjà une grande grâce qu'il eût plu à notre grand Dieu de s'engagera nous par des promesses. Car, comme remarque très-bien le grand saint Thomas, « celui qui promet quelque chose le donne déjà en quelque façon, en tant qu'il s'oblige à le donner : » Qui promittit, in quantùm se obligat ad dandum, jam quodammodo dat (1). Il veut dire que celui qui nous a promis, encore qu'il ne nous mette pas par cette promesse dans une possession actuelle, néanmoins il s'est en quelque sorte dessaisi lui-même en s'ôtant la liberté d'en disposer d'une autre manière. C'est pourquoi, dit le même saint Thomas, il paraît par l'usage des choses humaines qu'on rend grâces non-seulement à celui qui donne, mais encore à celui qui promet, quand il paraît agir de bonne foi, parce qu'encore que le bien que l'on nous promet ne soit pas encore à nous par une possession actuelle, il est déjà à nous par engagement, et que celui qui promet quelque chose, s'est déjà en quelque sorte dessaisi lui-même en s'ôtant la liberté d'en disposer d'une autre manière. Par conséquent il faut avouer que Dieu se liant à nous par ses promesses, nous donnait un merveilleux avantage.

Mais il fait en notre faveur quelque chose de bien plus grand dans la glorieuse transfiguration de notre Seigneur Jésus-Christ. Il connaît notre dureté et notre cœur incrédule : il sait que la vie future ne nous touche pas ; elle nous paraît éloignée, et cependant nos esprits grossiers, amusés ou emportés par les biens

 

1 IIa IIae, Quaest. LXXXVIII, art. 5 ad. 2.

 

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présents, ne connaissent pas les délices de ce bienheureux avenir. Que fera ce divin Sauveur? Ecoutez un conseil de miséricorde . «En vérité, en vérité, je vous dis, il y en aura parmi vous, dit-il, qui ne goûteront point la mort qu'ils n'aient vu le Fils de Dieu dans sa gloire et dans son royaume : » Sunt de hic stantibus qui non gustabunt mortem, donec rideant Filium hominis venientem in regno suo (1). Je veux aider vos sens, je veux soulager votre infirmité. Si cette félicité que je vous promets vous semble trop éloignée pour vous attirer, je veux vous la rendre présente ; je la ferai voir à quelques-uns de vous qui pourront en rendre témoignage aux autres. Peu de jours après avoir dit ces mots, il mène au Thabor trois de ses disciples (2), et comme il était en prière (car, mes frères, c'est dans l'oraison que la gloire de Dieu éclate sur nous), comme donc il était en prière, cette lumière infinie (a) qui était cachée sous l'infirmité de sa chair, perçant tout à coup ce nuage épais avec une force incomparable, «sa face éclata comme le soleil, et une blancheur admirable se répandit sur ses vêtements (3). »

Voilà , mes frères, une belle idée de la gloire qui nous est promise. Car combien a-t-elle d'éclat, puisqu'elle efface le soleil, même ! Et combien est-elle abondante, puisqu'ayant rempli tout le corps, elle passe jusqu'aux vêtements ! Aussi Pierre, ravi d'un si beau spectacle, s'écrie transporté et tout hors de soi : « O Seigneur, qu'il fait bon ici, » et que je serai bienheureux si je ne perds jamais cette belle vue ! Bonum est nos hic esse (4). Que s'il est si fort transporté de joie en voyant seulement la gloire du corps, que serait-ce donc, chrétiens, si Jésus lui découvrait celle de son âme? Mais s'il voyait la beauté incompréhensible de son essence divine sans nuage, sans mélange, sans obscurité et telle qu'elle est en elle-même, ô Dieu, quelle serait son extase! Mais puisqu'il se croit si heureux de voir son Maître en sa majesté, quoiqu'il n'ait point encore de part à sa gloire (b), quel serait son ravissement s'il s'en voyait revêtu lui-même ! O mes frères, écoutons Jésus et laissons-nous toucher à ses promesses qu'il nous

 

1 Matth., XVI, 28. — 2 Ibid., XVII, 1. — 3 Ibid., 2. — 4 Ibid., 4,

 

(a) Var.: Cette gloire infinie. — (b) Sans participer encore à sa gloire.

 

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rend déjà si sensibles. Ipsum audite : « Ecoutez-le. » Ecoutez la parole de sa promesse. Quelle est-elle? La voici, Messieurs, telle qu'il l'a prononcée lui-même : Qui perseveraverit usque in finem , hic salvus erit (1) : « Celui qui persévérera jusqu'à la fin , c'est celui-là qui sera sauvé. » Que veut dire cette parole ? Croyez sa promesse avec certitude, attendez l'effet avec patience.

Mais, hélas ! qui le fait, Messieurs? qui se rend attentif à cette parole ? L'entendez-vous, ô hommes du monde, qui enivrés par les biens présents, faites une raillerie de la vie future ? Oserai-je (a) répéter dans cette chaire les discours que vous en tenez ? Ah ! plutôt que Dieu qui sonde les cœurs vous mette devant les yeux vos sentiments! N'êtes-vous pas de ceux qui parlent ainsi dans le prophète Isaïe : « Ah ! que le Seigneur se dépêche ; qu'il nous fasse voir bientôt son ouvrage, s'il veut que nous le croyions; qu'il nous fasse expérimenter quelque chose de ses desseins, et nous n'en douterons pas ? » Festinet, et citò veniat opus ejus, ut videamus, et appropiet et veniat consilium sancti Israël, et sciemus illudi. Reconnaissez aujourd'hui vos sentiments dans la bouche de ces impies. Ne pensez-vous pas tous les jours : Ah ! qui nous dira des nouvelles de cet avenir qu'on nous promet ? Toujours attendre, toujours espérer ! Et cependant tout le présent nous échappe : Festinet, et citò veniat opus ejus. Le monde nous donne des plaisirs présents, et Dieu nous remet à une autre vie. Festinet; ah! qu'il se dépêche, qu'il ne nous rejette pas à un si long terme ! Nous ne pouvons pas attendre si loin : Citò veniat opus ejus. — Ah ! loin de nous ces discours profanes, loin de nous ce langage impie ! Ipsum audite : Ecoutez Jésus dans la parole de sa promesse ; ne doutez pas, ne vous lassez pas : ah ! ne doutez pas, chrétiens, Dieu l'a dit, vous serez sauvés : Hic salvus erit. Mais, chrétiens, ne vous lassez pas ; il faut persévérer jusqu'à la fin : Qui perseveraverit usque in finem. O justes, ô fidèles, ô enfants de Dieu, c'est ici la voix qu'il vous faut entendre. Où êtes-vous dans cette assemblée? Il y en a, je n'en doute pas ; ah ! que nous ne soyons pas assez malheureux

 

1 Matth., X, 22.— 2 Isa., V, 19.

(a) Var. : Puis-je.

 

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qu'il n'y ait point de justes dans un si grand peuple! O justes, c'est à vous que je parle ; je vous parle sans vous connaître; mais Dieu que vous connaissez et qui vous connaît, saura bien porter ma voix dans vos coeurs : Qui perseveraverit, hic salvus erit. Oui, c'est la parole qu'il vous faut entendre : Vox exultationis et salutis in tabernaculis justorum (1). C'est cette parole dont il est écrit : « Mes brebis entendent ma voix (2). » — a C'est cette parole, dit saint Augustin, que nul des étrangers n'écoute, que nul des enfants ne rejette : » Hanc vocem non negligit proprius, non audit alienus (3). Plusieurs écoutent Jésus-Christ dans d'autres paroles ; mais que celle-ci est entendue de peu de personnes ! Celui-là est maintenant chaste, peut-être sera-t-il bientôt impudique ; celui-là lassé de ses crimes, les va expier par la pénitence. Il écoute parler Jésus-Christ ; mais, ô voix sacrée, ô parole de persévérance, il ne t'entend pas ! la tentation s'élève, il succombe ; l'occasion se présente, il s'y laisse aller. O parole de persévérance, il ne t'entend pas ! néanmoins c'est le sceau de l'obéissance. Ecoutez-la, ô enfants de Dieu, et ne perdez pas votre couronne. La tentation vous presse, ah ! « persévérez jusqu'à la fin, parce que la tentation ne durera pas jusqu'à la fin : » Persevera usque in finem, quia tentatio non perseverat usque in finem (4). — Mais cet homme m'opprime par ses violences : — Et adhuc pusillùm, et non erit peccator (5). Mais que ce délai est ennuyeux ! Infirmitas facit diu videri quod citò est (6). « Il nous semble long quand il se passe ; » mais hoc modicum longum nobis videtur, quoniam adhuc agitur; cùm finitum fuerit, tunc sentiemus quàm modicum fuerit (7).

Que si les promesses ne vous touchent pas, écoutez la parole de ses menaces. Je n'en ai point parlé, parce que l'intention de Notre-Seigneur n'est pas de nous montrer aujourd'hui rien qui soit terrible. Il n'est venu apporter que le salut : Non enim veni ut judicem mundum (8). Mais enfin contraint par nos crimes...., fugere à venturâ ira (2), la colère qui nous poursuit; jam enim securis ad

 

1 Psal. CXVII, 15. — 2 Joan., X, 27. — 3 Tract. XLV in Joan., n. 13. — 4 Ibid. — 5 Psal. XXXVI, 10. — 6 S. August., serm. I in Psal. XXXVI, n. 10. — 7 Tract. CI in Joan., n. 6. — 8 Joan., XII, 47. — 9 Matth., III, 7.

 

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radicem arborum posita est (1). Inutilem servum ejicite in tenebras exteriores (2). O paroles terribles ! Irritam quis faciens legem Moysi, sine ullà miseratione duobus vel tribus testibus moritur : quanta magis putatis deteriora mereri supplicia, qui Filium Dei conculcaverit, et sanguinem Testamenti pollution duxerit, in quo sanctifiratus est, et Spiritui gratiœ contumeliam fecerit (3). Pour éviter toutes ces menaces, mes frères, écoutons le Sauveur Jésus, croyons humblement ce qu'il enseigne, suivons fidèlement ce qu'il commande, et nous aurons infailliblement ce qu'il promet, la félicité éternelle. Amen.

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