I TIMOTHÉE IV

Précédente Accueil Remonter Suivante

Accueil
Remonter
PRÉFACE
I TIMOTHÉE I
I TIMOTHÉE II
I TIMOTHÉE III
I TIMOTHÉE IV
I TIMOTHÉE V
I TIMOTHÉE VI
I TIMOTHÉE VII
I TIMOTHÉE VIII
I TIMOTHÉE IX
I TIMOTHÉE X
I TIMOTHÉE XI
I TIMOTHÉE XII
I TIMOTHÉE XIII
I TIMOTHÉE XIV
I TIMOTHÉE XV
I TIMOTHÉE XVI
I TIMOTHÉE XVII
I TIMOTHÉE XVIII
II TIMOTHÉE I
II TIMOTHÉE II
II TIMOTHÉE III
II TIMOTHÉE IV
II TIMOTHÉE V
II TIMOTHÉE VI
II TIMOTHÉE VII
II TIMOTHÉE VIII
II TIMOTHÉE IX
II TIMOTHÉE X

HOMÉLIE IV. LA PAROLE EST FIDÈLE ET DIGNE D'ÊTRE REÇUE : LE CHRIST JÉSUS EST VENU DANS LE MONDE POUR SAUVER LES PÉCHEURS, ENTRE LESQUELS JE SUIS LE PREMIER. MAIS J'AI OBTENU MISÉRICORDE, POUR QU'EN MOI TOUT LE PREMIER JÉSUS-CHRIST FIT VOIR TOUTE SA PATIENCE, AFIN QUE JE SERVISSE D'EXEMPLE A CEUX QUI CROIRONT EN LUI POUR LA VIE ÉTERNELLE. (I, 15-16 JUSQU'A 17.)

 

Analyse

 

1. La justice légale n'est rien.

2. Humilité de saint Paul.

3. Comment nous pouvons glorifier Dieu.

 

1. Les bienfaits de Dieu sont si grands et dépassent de si loin toute attente et toute espérance humaine, qu'ils trouvent souvent des incrédules. Il nous a en effet accordé ce que jamais n'eût attendu ni pensé l'esprit d'un homme, en sorte que les apôtres ont eu grand'peine à établir la foi aux dons de Dieu. Car, de même qu'éprouvant quelque grand bonheur, on se dit : N'est-ce pas un songe? exprimant ainsi qu'on se défie de sa réalité; de même en est-il des dons de Dieu. Et quel est ce don auquel on ne croit pas? On se demande si les ennemis de Dieu, les pécheurs, ceux qui n'étaient justifiés ni dans la loi ni par les oeuvres, obtiendront réellement tout à coup et par la seule foi, la justification qui est le premier des biens. L'apôtre s'étend sur ce chapitre dans l’épître aux Romains, et il s'y étend ici encore. «La parole est fidèle », dit-il, « et digne d'être reçue : le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, entre lesquels je suis le premier ». Car, comme c'était là surtout la doctrine que les juifs avaient peine à suivre, il leur persuade de ne pas s'attacher à la loi, car par elle et sans la foi l'on ne peut être sauvé. Il combat donc sur ce point. Il pensait qu'on jugerait incroyable qu'un homme qui aurait étourdiment dissipé toute sa vie antérieure, et l'aurait salement employée à de mauvaises actions,dût être ensuite sauvé par la seule foi. C'est pour cela qu'il dit : La parole est fidèle. Mais quelques-uns ne se bornaient pas à n'y pas croire, ils s'en faisaient les calomniateurs, comme on le fait maintenant encore, lorsque l'on dit : « Faisons le mal, afin que le bien arrive ». (Rom. III, 8.) L'apôtre a dit : « Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » . (Ib. V, 20 .) Mais pourquoi disent-ils : « Faisons le mal afin que le bien arrive? ». Ce sont surtout les gentils qui le disent, tournant en dérision notre doctrine. Lors donc que nous leur parlons de l’enfer; comment, disent-ils, ce dogme est-il digne de Dieu? Si un homme trouve son serviteur coupable de plusieurs fautes, il lui fait grâce et le croit digne de pardon, et Dieu punirait de peines éternelles? Puis, quand nous leur parlons du (288) baptême et de la rémission des péchés conférée par lui, ils nous disent: Comment serait-il digne de Dieu de pardonner les péchés à celui qui a commis tant de fautes? Voyez-vous la perversion de leur pensée, qui cherche surtout à contester? Pourtant, si c'est un mal de pardonner, c'est un bien de punir; s'il n'est pas bien de punir, il est bien de pardonner. Je parle ainsi en me plaçant à leur point de vue ; mais, selon notre doctrine, il est bon de punir et il est bon de pardonner; comment cela ? C'est ce que nous ferons voir dans une autre occasion, car celle-ci n'est pas opportune. C'est une question profonde et digne d'être longuement développée; il faudra donc l'exposer aux yeux de votre charité.

Comment cette parole est-elle fidèle ? On le voit par ce qui précède et par ce qui suit. Considérez comment l'apôtre y prépare les esprits et s'arrête ensuite sur ce point. Quand il a dit que Dieu lui a fait miséricorde, à lui blasphémateur et persécuteur, il préparait l'esprit à cette parole. Non-seulement, dit-il, Dieu a eu pitié de moi, mais il m'a rendu fidèle; tant il est vrai qu'il a eu pitié de moi. Car nul, voyant un prisonnier devenu l'hôte du palais, ne doute qu'il ait obtenu sa grâce; et c'est ce qu'on voit en Paul. Mais encore, comment cette parole est-elle fidèle? Il en montre la preuve en lui-même, car il ne craint pas de s'appeler pécheur; mais il se glorifie d'autant plus d'avoir été l'objet d'une si grande bonté, parce que c'est par là surtout qu'il peut montrer la grandeur de la tendresse divine. Et comment ailleurs parle-t-il de lui-même? « Suivant la justice qui est dans la loi, j'étais sans reproche » (Phil. III, 6) ; et ici il proclame qu'il était pécheur et le premier des pécheurs. C'est que, suivant la justice qui est l'oeuvre de Dieu et qui est le vrai but de nos devoirs, ceux-mêmes qui sont dans la loi sont des pécheurs. « Car tous ont péché, et ne peuvent atteindre à la gloire de Dieu ». Il n'a pas dit simplement la justice, mais, la justice qui est dans la loi. Car de même que celui qui possède beaucoup d'argent paraît riche, à ne considérer que lui, mais est bien pauvre et le premier des pauvres, si l'on compare ses trésors à ceux de l'empereur; de même ici, les hommes, même justes, sont des pécheurs, si on les compare aux anges. Mais si Paul, ayant pratiqué la justice qui est dans la loi, est le premier des pécheurs, qui, parmi les autres, pourra être appelé juste? Car il ne parle pas ainsi en calomniant sa vie; il ne s'est dit ni impudent, ni débauché, ni avide du bien d'autrui, à Dieu ne plaise; mais, en comparant une justice avec l'autre, il montre que la justice légale n'est rien, et que ceux qui la possèdent sont des pécheurs. — «Mais j'ai obtenu miséricorde, pour qu'en moi tout le a premier, Jésus-Christ fît voir toute sa patience, afin que je servisse d'exemple à tous ceux qui croiront en lui pour la vie éternelle ».

2. Vous voyez comment ici encore l'apôtre s'humilie et s'abaisse, en présentant une autre cause plus humble de sa justification. Obtenir son pardon à cause de son ignorance, ne montre pas que l'on ait été fort coupable ni que l'on ait mérité des reproches bien accablants; mais l'obtenir pour que désormais nul pécheur ne désespère d'obtenir aussi miséricorde, voilà ce qui témoigne d'un grand, d'un extrême abaissement. Et bien qu'il ait dit : « Je suis le premier des pécheurs, blasphémateur, persécuteur et coupable d'outrages » ; et encore: « Je ne suis pas digne d'être nommé apôtre » (I Cor. XV, 9), rien de tout cela, ni de ce qu'il a dit ailleurs n'exprime autant d'humilité. C'est ce qu'une comparaison va éclaircir. Supposez une ville populeuse, dont tous les habitants soient criminels, les uns plus, les autres moins, mais qui tous sont condamnés; que l'un soit plus que tous les autres digne de châtiments et de supplices, qu'il se soit livré à tous les genres de crimes. Si quelqu'un annonce que l'empereur veut pardonner à tous, on ne le croira pas facilement jusqu'à ce qu'on ait vu la grâce accordée au plus coupable ; mais alors il n'y aura plus de doute. Voilà ce que dit Paul, que Dieu voulant remplir les hommes de la confiance qu'il leur pardonne tous leurs péchés, a choisi le plus coupable de tous. Car, dit-il, quand j'obtiens mon pardon, nul ne peut douter du pardon des autres; en sorte qu'on pourrait se servir de la formule : Si Dieu pardonne à celui-là, il ne punira personne. Il exprime par là qu'il n'était point digne de grâce, mais qu'il l'a obtenue en vue du salut des autres. Que personne donc ne doute, dit-il, puisque j'ai été sauvé. Voyez donc l'humilité de ce bienheureux. Il n'a pas dit : Pour que Dieu montre en moi sa patience, mais « toute sa patience » ; comme s'il eût dit : En nul autre, il n'en pouvait montrer davantage; (289) il ne peut trouver un si grand pécheur qui ait besoin de toute sa miséricorde, de toute sa patience et non d'une partie, comme ceux qui ne sont pécheurs qu'en partie. — « Afin que je servisse d'exemple à ceux qui croiront en lui pour la vie éternelle » ; c'est-à-dire pour leur consolation, pour leur encouragement. Et après avoir dit du Fils cette grande parole sur l'immense charité qu'il a montrée, afin que nul ne suppose qu'il ait voulu priver le Père de la gloire qui lui est due, il la lui rapporte en disant : « Et au roi des siècles, immortel, invisible, Dieu unique, honneur et gloire aux siècles des siècles. Ainsi soit-il ». (I Tim. I, 17.) De ces bienfaits, dit-il, nous glorifions non-seulement le Fils, mais le Père. Mais écoutons les hérétiques : Voyez, il a dit : Dieu unique; le, Fils n'est donc pas Dieu; il a dit: Seul immortel; le Fils n'est donc pas immortel. — Eh quoi ! Ce qu'il nous donne après cette vie, il ne le possède pas? Oui, dira l'hérétique, il est Dieu et immortel, mais non comme le Père. — Que voulez-vous dire par là ? — C'est qu'il est d'une moindre substance. — Ainsi il est d'une moindre immortalité? Qu'est-ce donc qu'une immortalité moindre ou plus grand£? Car l'immortalité, qu'est-ce autre chose que de ne pas mourir? La gloire peut être plus grande ou plus petite, mais non l'immortalité, non plus que la bonne santé : un être doit mourir, ou ne pas mourir. — Quoi donc, me répondra-t-on, en est-il de nous comme de Dieu? — Non certes; loin de nous une telle pensée. — Et comment l'entendez-vous? — C'est qu'il possède l'immortalité par nature, et que nous l'avons reçue. Mais en, est-il de même du Fils? Nullement, il la possède aussi par nature. — Quelle est donc 1a distinction? — C'est que le Père n'est point engendré d'une autre personne et que le Fils est engendré de,son Père. Nous en convenons; nous ne nions point que le Fils soit engendré immortel du Père. . Nous glorifions le Père de ce qu'il a engendré un tel Fils. Comprenez-vous que le Père est glorifié d'autant plus que le Fils est plus grand ? Car la gloire du Fils lui est rapportée. Ainsi Dieu ayant engendré un, Fils aussi puissant que lui-même, la, gloire en appartient-elle plus au Fils qu'au Père? Il en est de même, quand nous disons que le Fils est puissant par lui-même, qu'il se suffit à lui-même et qu'il possède la force. C'est en parlant du roi des siècles, et c'est de son Fils qu'il est dit « Par lequel il a fait aussi les siècles ». (Hébr. I, 2.) Voici ce qui se passe en ce monde. Chez nous, la fabrication et la création sont choses bien différentes. L'un se fatigue et s'épuise à effectuer une oeuvre ; un autre en jouit. Pourquoi ? Parce que l'ouvrier est moins puissant. Mais, dans les cieux, autre n'est pas le fabricateur et autre le maître. Ainsi je n'irai pas, à cause de ces mots : « Par lequel il a fait aussi les siècles», enlever au Père la puissance créatrice ; ni à cause de ceux-ci : « Le Père, roi des siècles », enlever au Fils sa souveraineté; l'une et l'autre sont communes à tous les deux. Le Père est l'auteur du monde, puisqu'il a engendré le Démiurge; le Fils est Roi, puisqu'il est maître des créatures. Ce n'est point un ouvrier mercenaire comme les nôtres; il n'est point comme eux un instrument passif; mais il agit par sa propre bonté et son amour pour les hommes. Et le Fils a-t-il été vu? Nul ne l'oserait dire (1). Cependant l'apôtre dit : « Au roi des siècles, immortel, invisible, Dieu unique ». Mais que sera-ce quand l'Ecriture dit aussi : « Il n'est point d'autre nom, dans lequel nous devions être sauvés », et : « Il n'est de salut en aucun autre ? » (Act. IV, 12. )

3. « Honneur et gloire dans tous les siècles, ainsi soit-il », continue l'apôtre. L'honneur et la gloire ne viennent pas des paroles, et ce n'est pas en paroles que Dieu lui-même nous a honorés, mais par des actes effectifs; nous aussi honorons-le donc par nos actions L'honneur qu'il nous fait nous touche, et celui que nous lui rendons ne l'atteint pas, car il n'a pas besoin de ce qui vient de nous, tandis que nous avons besoin de ses faveurs. En sorte que lui rendre gloire, c'est travailler à notre élévation. De même que celui qui ouvre les yeux pour voir la lumière du soleil, fait un acte utile à lui-même, et qu'en admirant la beauté de cet astre il-ne lui fait point une faveur, car il ne le rend pas plus brillant et le soleil demeure ce qu'il est; de même et bien plus encore en est-il par rapport à Dieu celui qui vénère Dieu et lui rend honneur, se sauve lui-même et se procure le plus grand des biens. Comment? Parce qu'il suit la voie de la vertu et est glorifié par Dieu même. « Ceux qui me glorifient, je les glorifierai » dit-il. (I Rois, II, 30.) Comment donc dit-il qu'il

 

1 En dehors de l'Incarnation.

 

290

 

est glorifié par nous, puisqu'il ne jouit pas de l'honneur que nous lui rendons? Eh ! De même qu'il dit. avoir faim et avoir soif, il s'approprie ce qui est de l'humanité, afin de nous attirer à lui; il s'approprie et les honneurs et les offenses, afin que nous craignions d'en commettre contre nos frères; et nous ne nous laissons pas gagner.

« Glorifions Dieu et exaltons-le dans notre corps » (I Cor. VI, 20) et dans notre esprit. Comment un homme peut-il le glorifier dans son corps? Et comment dans son esprit? L'esprit ici veut dire l'âme, par opposition au corps. Mais comment le glorifier dans son corps? Comment dans son âme? On le glorifie dans son corps en évitant l'impureté, l'ivrognerie, la gourmandise, la vaine parure, en ne prenant de son corps que le soin utile pour la santé; celui-là le glorifie qui ne commet point d'adultère; celle-là, qui ne se parfume point, qui ne farde point son visage, qui se contente de ce que Dieu a formé, sans y rien ajouter par l'art. Pourquoi, en effet, dites-moi, ajouter ce qui vient de vous-même à l'oeuvre que Dieu a parfaite? Vous ne vous êtes pas formée vous-même; et, comme si vous étiez une ouvrière d'un talent supérieur, vous essayez de rectifier l'ouvrage; en vous parant ainsi, vous insultez le Créateur pour vous attirer de nombreux amants. — Mais comment faire, me direz-vous? Je ne le voudrais pas; c'est mon mari qui m'y contraint. — Non, cela n'arrive qu'à celles qui veulent provoquer l'amour. Dieu vous a faite belle, pour être admiré dans son oeuvre et non pour être outragé; ne lui offrez point pour ses dons un tel retour, mais une conduite modeste et réglée. Dieu vous a faite. belle pour accroître le mérite de votre retenue ; car on ne peut mettre sur la même ligne la modestie d'une femme pleine d'attraits et celle d'une femme à qui nul ne songera. Ecoutez ce que dit l'Ecriture au sujet de Joseph, «qu'il était jeune et beau de visage ». (Gen. XXXIX, 6.) Que nous fait donc à nous qu'il fût beau ? L'Ecriture le dit pour que nous admirions à la fois sa beauté et sa chasteté. Dieu vous a faite belle ! Pourquoi donc vous défigurer? Celles qui se couvrent d'une couche de fard, ressemblent à l'homme qui barbouillerait de rouge une statue d'or; c'est une boue rouge et blanche que vous répandez sur vous-même.

Mais, dira-t-on, celles qui sont laides ont raison d'en agir ainsi. — Pourquoi donc, dites-moi ? Pour cacher leur laideur? Peine perdue. Quand donc la nature est-elle vaincue par l'artifice? Et après tout, en quoi la laideur vous afflige-t-elle ? Parce qu'on la repousse? Ecoutez cette parole d'un sage : « N'ayez point d'éloignement pour un homme à cause de son aspect, et ne louez point un homme pour sa beauté ». (Ecclésiast. XI, 2.) Admirez Dieu, le grand artiste, et non un homme qui n'est pas l'auteur de sa propre beauté. Quel avantage apporte la beauté? Aucun , mais plutôt des difficultés plus grandes, plus de malveillance, de dangers et de soupçons. Telle femme n'eût jamais été soupçonnée sans sa beauté; telle autre, si elle n'use d'une réserve consommée, d'une réserve extrême, aura bien vite une mauvaise renommée. Un mari soupçonne celle qui est sa compagne : Que peut-il y avoir de plus pénible? Il ne trouvera point tant de plaisir à la voir que de souffrances dans ses soupçons. Le plaisir s'émousse à la longue; la nonchalance et le laisser-aller pas. sent pour impudence, l'âme devient vulgaire et pleine d'arrogance ; et c'est la beauté surtout qui amène ces malheurs; sans elle, il ne se trouvera plus tant d'inconvénients; sans elle, on ne verra pas des chiens insulter l'agneau, mais il paîtra dans une paix profonde, sans que le loup le trouble et l'attaque, et le berger pourra demeurer assis auprès de lui. Ce qui est extraordinaire, ce n'est pas que l'une soit belle et que l'autre ne le soit pas; c'est qu'une femme ait- de mauvaises moeurs sans être belle, et que celle qui l'est soit vertueuse.

Dites-moi : Quelle est la qualité des yeux? Est-ce d'être humides, bien mobiles, bien arrondis, d'un beau bleu, ou bien d'être clairs et perçants ? C'est assurément d'être perçants, et en voici la preuve : Quelle est la qualité d'une lampe? Est-ce de jeter un vif éclat et d'éclairer toute la maison, ou d'être bien façonnée et bien arrondie? C'est d'éclairer, dirons-nous sans hésiter; c'est ce qu'on recherche en elle, le reste est indifférent. C'est pour cela que nous disons sans cesse à la servante qui en est chargée : Vous avez mal préparé la lampe. C'est que le fait d'une lampe est d'éclairer. L'oeil de- même; il n'importe pas qu'il soit de telle ou telle façon, dès lors qu'il remplit convenablement sa fonction; on le dira mauvais s'il a la vue faible, si son organisme laisse à désirer; nous disons de ceux qui n'y (291) voient pas, les yeux ouverts, qu'ils ont des yeux détestables. Nous appelons ainsi tout ce qui ne remplit pas la fonction à laquelle il est destiné, et ne pas bien voir est le défaut des yeux. Et le nez, quelle est sa qualité? Est-ce d'être bien droit, bien lisse des deux côtés? parfaitement symétrique? ou bien d'être bien disposé pour l'odorat, ou bien apte à percevoir promptement les odeurs, pour les transmettre au cerveau? Ceci sera clair pour tout le monde, grâce à cette comparaison : L'instrument appelé croc, quand est-il bien fait? Est-ce quand il peut accrocher fort et retenir, ou quand il est façonné avec élégance? Evidemment, c'est le premier qui est bon. Et les dents, quand dirons-nous qu'elles sont bien faites? quand elles sont bien tranchantes et mâchent facilement la nourriture, ou quand elles sont bien rangées ? Evidemment ce sont les premières. Il en est de même de tout le corps, si nous lui faisons subir la critique de la raison; nous trouverons que les hommes bien portants sont beaux, dès lors que chacun de leurs membres remplit avec exactitude sa fonction spéciale. Ainsi en est-il d'un instrument, d'un animal, d'une plante : ce n'est point d'après ses formes ou sa couleur, mais d'après son usage que nous en jugeons; de même encore nous appelons beau serviteur, celui qui est propre au service et non un jeune et gentil fainéant.

Voyez-vous maintenant ce que c'est qu'être belle ? Lorsque nous jouissons tous de la même façon des avantages les plus grands et les plus magnifiques, nous ne sommes frustrés en rien. Je m'explique : Tous de la même façon nous voyons le monde, le soleil, la lune, les étoiles; nous respirons l'air, nous avons part à l'eau et aux aliments , que nous soyons beaux ou laids. Et s'il faut dire quelque chose de surprenant, celles qui ne sont pas belles, ont une santé plus vigoureuse et jouissent mieux de ces dons. Les belles femmes, en effet, prennent garde aux saisons, ne s'exposent point à la fatigue, mais s'adonnent à l'oisiveté et vivent à l'ombre ; de là vient que leurs facultés physiques sont énervées. Les autres femmes, au contraire, débarrassées de ces soucis , usent simplement et largement de ces facultés.

Ainsi donc « glorifions Dieu et portons-le dans notre corps ». Ne nous parons point c'est là un soin frivole et inutile. N'enseignez point à vos maris à n'aimer que le plaisir des yeux, car s'ils vous voient ainsi parées, ils ne songent qu'à votre visage , ils se laisseront bientôt séduire ; mais si vous leur apprenez à aimer vos moeurs et votre modestie, ils ne seront pas facilement infidèles, car ce ne sont point ces qualités, mais les vices contraires qu'ils trouveront chez une femme sans pudeur. Ne leur enseignez point à se laisser gagner par un sourire, par un extérieur efféminé, de peur de préparer des poisons contre vous-mêmes; apprenez-leur à se plaire à la modestie, et vous leur plairez, si votre extérieur même est modeste; mais si vous êtes évaporées, effrontées, comment pourrez-vous tenir un langage respectable? Qui ne se rira pas de vous, qui ne vous raillera pas? Et qu'est-ce que porter Dieu dans son esprit? C'est pratiquer la vertu, parer son âme, car ceci n'est point défendu. Nous glorifions Dieu, quand nous sommes pleinement vertueux, et nous sommes nous-mêmes glorifiés en même temps, non comme des hommes qui se parent, mais bien autrement: « Car », dit l'apôtre, « j'estime qu'il n'y a point de proportions entre les souffrances du temps présent et la gloire future qui doit se révéler en nous » (Rom. VIII, 18), :gloire à laquelle je souhaite que nous ayons tous part en Jésus-Christ Notre-Seigneur, avec qui soient au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, et aux siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

 

Haut du document

 

 

 

Précédente Accueil Remonter Suivante