JOSEPH

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HOMÉLIE SUR JOSEPH ET LA CONTINENCE.

 

AVERTISSEMENT.

 

On ignore si cette courte homélie, qui parait avoir été adressée à de récents prosélytes fut prononcée à Antioche ou à Constantinople. L'original en est perdu, sauf quelques lignes. Pour le reste, nous n'avons qu'une ancienne traduction latine.

 

En tout temps, c'est un sujet d'entretien très-utile et très-séant à des serviteurs du Christ que la chasteté : mais c'est aujourd'hui surtout qu'il est à propos de vous en parler, aujourd'hui que les enfants de l'Eglise, revêtus du Christ, doivent s'appliquer par-dessus toute chose à acquérir la chasteté. — Celui qui, en voyant des athlètes, désignés pour disputer la palme aux jeux olympiques, descendre tout frottés d'huile dans le stade, leur parlerait alors de luttes, de persévérance, de victoire, semblerait à tout le monde avoir bien choisi son moment. Ainsi quand nous voyons les athlètes du Sauveur, fortifiés par l'Esprit, grâce aux divins sacrements, il est naturel que nous leur parlions de la chasteté pour les préparer aux combats spirituels. Dans les combats du monde le couronnement suit la victoire : il la précède dans les combats du Christ. Pourquoi donc le Christ nous envoie-t-il couronnés au combat? C'est pour épouvanter nos adversaires, pour relever notre courage ; c'est afin qu'attentifs à l'honneur que Dieu nous confère, nous ne disions, nous ne fassions rien qui soit indigne du Seigneur. Qu'un roi vêtu de pourpre et ceint du diadème, vienne, dans l'emportement des passions, à compromettre en lui la majesté royale, il lui suffit de jeter les yeux sur son manteau royal pour rentrer en lui-même, et travailler à ne plus se laisser vaincre par les passions honteuses. Et vous aussi, vous qui êtes revêtus du Christ, fuyez la honteuse concupiscence, et jetez promptement les yeux sur votre divin vêtement : aussitôt vous deviendrez :teilleurs, et vous n'aurez plus rien à craindre des artifices du malin. Il est donc beau de vanter la continence, plus beau de la posséder. Et certes, ce n'est pas une médiocre excitation à la pratiquer que d'en parler souvent, d'en entendre souvent parler. Si Dieu a voulu que les vertus des saints fussent célébrées dans les divines Ecritures, c'est pour que tous les hommes soient animés à suivre leur exemple, à marcher sur leurs traces, à pratiquer la continence conformément à leurs leçons. Souvent, aux combats gymniques, des spectateurs, enflammés par la vue des couronnes décernées aux athlètes, se dépouillent à leur tour de leurs vêtements, et endurent sueurs et fatigues pour ceindre, eux aussi, l'olivier ou le laurier. Mais (509) nous, avec quel enthousiasme ne devons-nous pas tout endurer pour la continence, quand nous la voyons couronnée par les mains de Dieu, et lutter à notre tour afin d'obtenir ces couronnes célestes, prix des bonnes oeuvres, des couvres de salut. Les athlètes cèdent à l'attrait de quelques feuilles de laurier ou d'olivier, de cette gloire éphémère qui est celle du monde : comment, dès lors, ne pas s'indigner, si les présents du Christ ne savaient pas nous arracher aux plaisirs, et nous déterminer à donner la préférence à la crainte de Dieu sur la concupiscence?

D'ailleurs ce ne sont point seulement les hommes qui imitent leurs semblables, nous trouvons la même chose chez les brutes. Souvent des colombes, en voyant une d'elles s'envoler, prennent toutes leur essor aussitôt; un poulain généreux, qui bondit au milieu d'une troupe de chevaux, l'entraîne après lui. Ainsi parmi vous, qui êtes le troupeau du Christ, il est un noble poulain, le chaste Joseph, dont les transports célestes appellent l'imitation de tous ses compagnons de servitude. Formons donc avec ce vertueux jeune homme comme une danse spirituelle; célébrons sa continence, non-seulement par des paroles, mais encore en suivant son exemple. — Il sut, ce grand homme, il sut rester un exact et fidèle gardien de la chasteté, quand il ne tenait qu'à lui de s'assujettir la reine elle-même, et de vivre au milieu des richesses, du luxe et de la volupté. Et pourtant, malgré la perspective d'une telle fortune, songeant que les richesses, la puissance, la gloire, n'ont qu'une durée limitée parles bornes de la vie présente, et ne procurent aucun avantage qui ne soit temporel, tandis que la vertu a devant elle un horizon infini, il sut mettre à ses passions un frein, la crainte du Christ. Richesses, délices, promesses de sa maîtresse, il méprisa tout, et préféra la prison et l'infortune au séjour des palais; et pourtant combien il est difficile à la beauté de résister aux tentations du plaisir !  Mais après un tel exemple de continence, la beauté de son âme éclipse celle de son corps : la beauté de son corps en faisait un astre brillant; les grâces de son âme en firent un ange. Pour nous, ce qu'il nous faut admirer, ce n'est pas seulement la continence de ce jeune homme, ce sont encore les périls qu'il brava pour la conserver, jugeant l'esclavage des passions plus pesant et plus redoutable que la mort.

 Et cette admiration, on l'éprouvera si l'on considère attentivement sa vertu, et si l'on se rend bien compte des circonstances au milieu desquelles il sut garder la pureté de son âme. Avant qu'apparaît sur la terre le Maître et le Créateur de l'univers, il garda la liberté du coeur. Il vivait dans un séjour d'impies, il était entouré de dangereux conseillers, sans avoir auprès de lui un seul maître de continence. Ce n'étaient que voluptueux, gourmands, sans piété, sans vertu ; et cependant au milieu de cette multitude d'impies, voyant sa maîtresse s'abandonner à une passion effrénée, il ne délaissa point les célestes trésors, il préserva de toute atteinte le temple de l'Esprit, aimant mieux mourir que de tomber sous le joug des voluptés. II n'avait pas entendu Paul enseigner que nos corps sont les membres du Christ; il n'avait pas ouï la voix divine, et cela ne l'empêcha point de se montrer l'égal des hommes honorés des célestes promesses : exemple qui nous montre, à nous, enfants des églises, combien il est essentiel pour nous de lutter et de maintenir notre âme à l'abri de toute atteinte. Joseph, en effet, ne pourrait-il pas nous dire : Si moi qui ai vécu avant la naissance du Christ, moi qui n'ai pas entendu proclamer par le sublime apôtre Paul que nos corps sont les membres du Christ, j'ai jugé qu'il appartenait aux serviteurs de Dieu de maîtriser en eux la concupiscence; si je n'ai pas failli à la continence, en dépit de tous les dangers que je voyais suspendus sur ma tête, combien ne devez-vous pas davantage vivre dans la continence avec crainte et tremblement, afin de ne point paraître indignes d'un pareil honneur, afin que les membres du Christ ne deviennent point les membres d'une prostituée?

Voilà une parole capable d'armer de continence toutes les âmes, d'éteindre sans peine toutes les concupiscences. Une pluie qui tombe sur des flammes ne les éteint pas aussi facilement qu'un tel langage, en pénétrant dans l'âme, n'étouffe les mauvaises passions. Il pourrait encore nous tenir de pareils discours, ce grand Job, qui non -seulement pratiqua scrupuleusement la continence, mais qui encore imposa à ses regards la loi de ne pas s'arrêter sur un visage de jeune fille, de peur que l'attrait de la beauté ne séduisît son coeur. Qui ne resterait frappé d'étonnement et d'admiration en voyant ce vaillant ennemi du diable , ce vainqueur qui sut déjouer tous les (510) artifices du malin, interdire à ses yeux la vue d'une belle jeune fille? Le diable approche: il ne fuit pas, il tient bon, comme un lion confiant dans ses forces. Une jeune fille parait; il recule ; au lieu de s'arrêter à contempler sa beauté, il se hâte de battre en retraite. C'est qu'il savait que pour lutter avec succès contre les démons, les qualités requises sont l'audace et le courage: mais que, lorsqu'on se propose pour but la continence , la victoire n'est pas donnée à l'expérience, mais à la fuite. Vous tous qui faites profession de virginité, recevez donc les conseils de cet homme chaste entre tous qui demeura si fidèle à la continence même avant l'Incarnation. Ce n'est pas, en effet, une chose indigne d'attention, qu'il ait paru avant l'Incarnation des justes capables de si grandes marques de continence.

Moins de raisons plaidaient alors pour cette vertu : on ne faisait pas un crime, même aux vierges, de n'y pas être demeurées fidèles. Comment cela? C'est que si Dieu, si le sublime auteur de l'univers s'est revêtu de la forme humaine, c'était pour faire descendre du ciel la pureté des anges. Lorsque maintenant les hommes, après un tel honneur, se soumettent au joug de la volupté, on ne saurait représenter par des couleurs assez fortes une témérité qui assimile les membres du Christ à des membres de prostituée, qui attente à la miséricorde du Seigneur, et la rend stérile autant qu'il dépend de l'homme. Les démons savent, et ils eu sont effrayés, que Dieu, qui ne leur permet pas de s'unir à lui, nous accorde cette faveur. Et parmi les fidèles, on trouve des hommes qui osent se séparer du Christ, et s'unir à des prostituées ! Ce serait un moindre mal, de tomber du ciel dans la boue, que de déchoir, une fois membre du Christ, de ce divin honneur, et de devenir membre de prostituée.

Ainsi donc, quand la concupiscence s'allume dans votre âme, souvenez-vous aussitôt du Christ, figurez-vous que Paul est là qui vous exhorte et vous dit: « Ne savez-vous pas que  vos corps sont membres du Christ? Portant les membres du Christ, en ferez- vous des membres de prostituée ? » (I Corinth. VI, 15.) Rappelez-vous ces paroles : et aussitôt vous verrez fuir la volupté. Car si une maîtresse chaste et réservée rappelle au devoir par son seul aspect des servantes débauchées, faut-il s'étonner que le souvenir du Christ apaise incontinent les chatouillements de la volupté? Ayez toujours devant les yeux le rayonnement de la croix, et toujours vous resterez pur de péché. Ainsi qu'une colonne de nuées, figure de notre croix, protégeait la foule des Hébreux contre toutes les attaques des Egyptiens : de même l'aspect de la croix suffit pour chasser loin de nous toute volupté coupable, voilà la sauvegarde de l'âme, voilà l'antidote des passions honteuses. Car si les médecins savent guérir les infirmités du corps, une âme malade est guérie sur-le-champ par les paroles du Christ.

Nous prions donc et nous conjurons les pécheurs qui sont encore asservis aux voluptés de la chair, de se réveiller, de revenir à eux, de ne pas se laisser vaincre par les passions, ni emporter par leurs mouvements déréglés, de ne pas se soumettre volontairement à une odieuse servitude, mais de lutter vaillamment, d'affermir leur âme par la crainte du Christ, et de chasser leur tyran de la forteresse qu'il occupe : afin que, lavés de toute souillure, purifiés de nos innombrables péchés, nous puissions approcher avec une âme sans reproche et sans tache des divins et augustes sacrements du grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ: à qui gloire et puissance dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

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