PANÉGYRIQUES

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PANÉGYRIQUES.

AVERTISSEMENT.

 

Ce n'est pas seulement pour l'honneur des saints, que leurs fêtes ont été instituées, mais pour noire utilité particulière, et notre propre sanctification. L'Eglise, en célébrant leurs grandeurs, nous propose leurs exemples ; et comme leurs grandeurs nous portent à les honorer, leurs exemples nous invitent à les imiter.

Ce sont aussi les deux vues que doit avoir un prédicateur dans les panégyriques de ces glorieux prédestinés. Si, d'une part, en les exaltant, il n'est attentif qu'à la gloire du saint dont il fait l'éloge, il éblouira par un magnifique récit d'actions et de vertus héroïques : mais ceux qui l'écoutent en feront peu de fruit, et souvent n'en remporteront qu'un secret désespoir d'atteindre à une sainteté qui leur paraîtra plus admirable qu'imitable. Ou s'il donne dans un excès tout contraire, et qu'il l'ail égard qu'à l'instruction des auditeurs et qu'à leur édification , il ne fera connaître qu'imparfaitement les mérites des saints , et ne leur rendra pas tout le tribut de louanges qui leur est dû. C'est donc en recueillant d'abord de leur histoire ce qu'il y a de plus mémorable et de plus grand pour l'exposer avec les ornements de l'éloquence chrétienne, et puis, en l'appliquant aux mœurs du siècle, pour les réformer et les régler, qu'il remplira son ministère, et qu'il entrera dans l'esprit et l'intention de l'Eglise, dont il est l'organe.

Voilà ce qu'a fait le Père Bourdaloue. On peut dire que, dans ce genre de sermons, il n'a pas munis excellé que dans les autres. Sans aller jusqu'à ces exagérations, où se laissent quelquefois emporter les prédicateurs en louant les saints, il en donne les hautes et les vraies idées qu'on en doit concevoir. Et, du reste, opposant la conduite des fidèles aux exemples qu'il leur a mis devant les yeux, il trouve dans cette comparaison un fonds de moralités les plus naturelles et les plus solides. De sorte qu'il n'ôte rien au panégyrique, ni de sa sublimité, ni de la juste mesure qui lui convient, et qu'en même temps il conserve à la morale toute l'étendue et toute la force qu'elle demande.

Cependant, comme l'unité est une des premières perfections du discours, parce qu'elle en rassemble les parties et qu'elle en fait un corps mieux pro-|m n in m ne et mieux soutenu, le l'ère Bourdaloue a plis tout le soin possible de la garder, soit dans la morale, soit dans l'éloge. C'est pour cela qu'au lieu d'embrasser toutes les vertus et toute la vie d'un saint, il s'est attaché au caractère particulier qui le distinguait : car, de même qu'il y a dans les pécheurs des vices prédominants, qui sont les principes de tous les autres, il y a dans les saints, pour ainsi parler, des vertus souveraines, où tendent toutes les réflexions de leur esprit et tous les sentiments de leur cœur. Si bien que de représenter chaque saint dans ce point de vue, c'est en quelque façon le mettre dans son jour, et le faire voir dans son plus beau lustre.

Le Père Bourdaloue va même plus loin, ou plutôt il se resserre encore dans des bornes plus étroites, afin de mieux caractériser son sujet. Si par exemple il parle d'un apôtre et de son zèle, il prend ce que ce zèle apostolique a eu de plus singulier et de plus marqué : d'où il arrive qu'il n'y a rien dans tout le panégyrique qui ne conduise à une même fin, et qui ne soit personnel au saint que regarde la cérémonie présente.

La même unité règne dans la morale. On voit des panégyriques, bien écrits d'ailleurs et dignes de l'estime du public, où l'auteur, presque à chaque fait qu'il rapporte d'un saint, joint une courte moralité : et, selon que ces faits sont différents les uns des autres, autant diffèrent entre eux les points de morale qu'il touche, et sur lesquels il est obligé de passer très-légèrement. Cette méthode donne lieu à quelques traits vifs et ingénieux; l'esprit y trouve toujours un nouveau champ où s'exercer, et de nouvelles lumières à répandre. Mais ce ne sont, après tout, que des lueurs; et il est difficile que l'auditeur soit bien ému de cette diversité d'objets qui disparaissent au même moment qu'on les lui présente, et dont on ne lui laisse entrevoir qu'une certaine superficie.

Le Père Bourdaloue, accoutumé à creuser toutes les matières qu'il traite, s'en lient à un seul point de morale dont il fait la conclusion, ou de tout son discoure, ou de chaque partie; et insistant sur cette seule conséquence, il s'ouvre une libre et ample carrière, soit pour instruire par de solides raisonnements, soit pour toucher par des mouvements pathétiques. En quoi il eut cet avantage très-remarquable, que toute la suite de ses pensées et tout le plan de son discours s'imprimaient plus distinctement dans les esprits, et y demeuraient plus profondément gravés. Au lieu qu'une trop grande variété de moralités et d'instructions, qui se succèdent incessamment et souvent sans ordre, cause une telle confusion dans les idées, que l'une efface l'autre, et qu'après une attention

 

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assez favorable, l'auditeur néanmoins, en se retirant, ne retient rien, ou presque rien de tout ce qu'il vient d'entendre.

Si la variété est nécessaire, c'est dans la narration : il y faut des figures et des tours, pour la rendre propre du panégyrique, et pour la distinguer de l'histoire : car de suivre trop exactement les traces des saints depuis leur naissance jusqu'à leur mort; de s'étendre dans un long détail de tous leurs sentiments et de toutes leurs actions ; de n'en vouloir omettre nulle circonstance, et de ne s'élever jamais au-dessus d'un simple récit, c'est plutôt faire l'abrégé de leurs vies que leurs éloges; aussi est-ce par là que tant de panégyriques deviennent languissants et ennuyeux. L'orateur qui manque de forces pour soutenir sa matière, tâche à se soutenir lui-même par une multitude de faits qu'il étale sans art et sans autre éloquence que quelques exclamations froides et puériles.

Il n'y a qu'une imagination vive, noble et riche, telle que l'eut le Père Bourdaloue, qui puisse animer ces sortes d'expositions. En vain voudrait-on sur cela prescrire des règles ; les plus beaux préceptes ne suppléeront point au défaut de ce feu naturel ; et ce feu seul peut suppléer à tous les préceptes. C'est un don que tous n'ont pas reçu; et de là vient, en partie, qu'il est si rare de réussir dans les panégyriques et dans les oraisons funèbres.

A cette raison on en peut ajouter une autre, qui concerne l'expression et le style du panégyrique. Bien des prédicateurs se sont laissé prévenir là-dessus d'un principe, pour ne pas dire d'une erreur qui les a portés trop loin. Ils se persuadent que tout doit être semé de fleurs dans un éloge, et qu'on n'y doit rien ménager de tous les agréments de la diction; parce qu'un célèbre orateur, dans les panégyriques qu'il a prononcés, s'est distingué par son style concis et sententieux, brillant et poli, ils veulent se former sur ce modèle comme si c'était l'unique qu'ils eussent à se proposer : mais ils ne prennent point, ce semble, assez garde que ce qui plaît dans l'un, lequel suit son talent et dit les choses de génie, n'a plus de grâce dans un mauvais imitateur qui force son naturel, et sort en quelque manière hors de lui-même. Qu'une certaine élévation et que certains traits soient plus convenables au panégyrique qu'au discours moral, c'est une règle établie et très-bien fondée ; mais dans cette élévation et dans ces traits, il faut que tout soit conforme au caractère du prédicateur. Car, pour peu qu'il s'en écarte, à force de s'élever, il se perdra en de vaines conceptions, et par trop d'ornements il se défigurera. Le Père Bourdaloue a su se garantir de cet écueil. Dans ses panégyriques il n'a point quitté son style ordinaire : il y est grand, mais d'une grandeur aisée qui lui était propre, et où il ne paraissait rien d'affecté.

C'est ce qu'on a pu surtout observer dans les deux oraisons funèbres que le public a déjà vues, cl qu'il était à propos d'insérer parmi les sermons de cet excellent prédicateur. Ce sont les éloges d« deux premiers princes du sang royal, non moins recommandables par l'éclat de leurs vertus, que par celui de leur naissance et par la grandeur de leur nom. Quelque difficulté qu'il y eût à représenter tant de glorieuses et éminentes qualités, le Père Bourdaloue, sans s'éloigner de sa manière de prêcher, et sans emprunter des secours étrangers, en a fait deux portraits des plus accomplis. On a cru devoir les joindre au second volume de ses panégyriques, afin de les défendre du suit des feuilles volantes; et l'on s'est d'autant plus intéressé à les conserver, que l'auteur, parlant un nom de sa compagnie, y a plus éloquemment exprimé les sentiments très-respectueux et très-sincères de notre vénération et de notre reconnaissance envers la maison de Condé.

Le petit éloge de M. le premier président de Lamoignon, n'est qu'un léger essai de ce que le l'ère Bourdaloue eût eu à dire, s'il eût entrepris un éloge complet de ce célèbre magistrat. Connue il en avait été connu, et qu'il avait eu lui-même l'honneur de le connaître particulièrement, il voulut au moins lui donner ce témoignage publie de son respect, aussi bien que de sa gratitude et de son zèle.

Les sermons sur l'état religieux, qui suivent les panégyriques, auraient encore de quoi fournira bien des réflexions. Bien n'est plus capable d'animer et de consoler les personnes religieuses; elles apprendront, en les lisant, à connaître l'esprit de leur vocation, à en estimer les avantages par rapport au salut, et à en remplir avec fidélité les devoirs; car ce sont là les points importants où le Père Bourdaloue s'est arrêté. Pour relever le bonheur de la profession religieuse, il n'en a point fait de ces peintures outrées qu'on voit en quelques livres spirituels. Il n'a point caché aux âmes qui se dévouent à Dieu dans ce saint état, les peines et les croix qui en sont inséparables. Il pèse tout au poids du sanctuaire et selon l'esprit de l'Evangile ; et reconnaissant de bonne foi ce qu'il y a dans leur vie d'onéreux et de pénible, il leur propose d'ailleurs les motifs les plus puissants pour les attacher à Jésus-Christ et pour leur adoucir sou joug. Il n'oublie pas même les gens du monde; et par un retour salutaire sur leur condition, il leur enseigne à profiter de ces cérémonies, auxquelles ils n'assistent communément que par bienséance, ou que par curiosité. On ne doit point, au reste, s'étonner que dans un si grand nombre de discours touchant le même sujet, il ait quelquefois employé les mêmes preuves et repris les mêmes idées. On aura plutôt lieu d'admirer sa fécondité dans les divers usages qu'il a su faire du même fonds.

 

 

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