FRANÇOIS CARACCIOLO

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LE IV JUIN. SAINT FRANÇOIS CARACCIOLO, CONFESSEUR.

 

Les biens apportés au monde par l'Esprit divin continuent de se révéler dans la sainte Liturgie. François Caracciolo nous apparaît comme un type nouveau de cette fécondité sublime que le christianisme a donnée à la terre, et dont Clotilde et Blandine nous ont fourni des exemples si merveilleux. La foi des saints est en eux le principe de la fécondité surnaturelle, comme elle le fut dans le père des croyants ; elle engendre à l'Eglise des membres isolés ou des nations entières ; d'elle procèdent également les multiples familles des Ordres religieux, qui, dans leur fidélité à suivre les voies diverses où les ont mises leurs fondateurs, sont le principal élément de la parure royale et variée dont resplendit l'Epouse à la droite de l'Epoux. C'est la pensée qu'exprimait le Souverain Pontife Pie VII, au jour de la canonisation de notre saint, voulant, disait-il, « redresser ainsi le jugement de ceux qui auraient apprécié la vie religieuse selon la vaine tromperie des points de vue de ce monde, et non selon la science de Jésus-Christ  (1).  »

Le siècle de ruine où la voix du vicaire de l'Homme-Dieu s'adressait à la terre en cette circonstance solennelle, rappelait, sous des couleurs

 

1. Homil. in canoniz.

 

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plus sombres encore, les temps calamiteux de la prétendue Réforme où François, comme  tant d'autres, avait prouvé par ses œuvres et sa vie l'indéfectible sainteté  de  l'Eglise. «  L'Epouse de Jésus-Christ, disait l'auguste Pontife, l'Eglise est habituée maintenant à poursuivre la carrière de son pèlerinage, au milieu des persécutions du monde et des consolations du Seigneur. Par les saints que sa toute-puissance ne cesse de susciter dans tous les temps.  Dieu,  comme il l'a promis, fait d'elle jusqu'à la fin la ville placée sur la montagne, le flambeau dont l'éclatante lumière frappe tous les yeux qui ne se  ferment pas de parti-pris pour ne point  voir.  Pendant que ses  ennemis s'unissent, formant pour la détruire de vains complots, pendant qu'ils disent : Quand donc mourra-t-elle ? quand périra son nom ? couronnée d'un éclat nouveau par les triomphes récents des soldats qu'elle envoie aux cieux, elle demeure glorieuse, annonçant pour toutes les générations à venir la puissance du bras du Seigneur (1).  »

Le seizième siècle avait entendu à son début le plus effroyable blasphème qu'on eût proféré contre l'Epouse du Fils de Dieu. Celle qu'on appelait la prostituée de Babylone prouva sa légitimité, en face de l'hérésie impuissante à faire germer une vertu dans le monde, par l'admirable efflorescence des Ordres nouveaux sortis de son sein en quelques années, pour répondre aux exigences de la situation nouvelle qu'avait créée la révolte de Luther. Le retour des anciens Ordres à leur première ferveur, l'établissement de la Compagnie de Jésus, des Théatins, des Barnabites, des Frères de saint Jean de Dieu, de l'Oratoire de saint Philippe

 

1. Homil. in canoniz.

 

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Néri, des Clercs réguliers de saint Jérôme Emilien et de saint Camille de Lellis, ne suffisent pas au divin Esprit ; comme pour marquer la surabondance de l'Epouse, il suscite à la fin du même siècle une autre famille, dont le trait spécial sera l'organisation parmi ses membres de la mortification et de la prière continues, par l'usage incessant des moyens de la pénitence chrétienne et l'adoration perpétuelle du Très-Saint-Sacrement. Sixte-Quint reçoit avec joie ces nouveaux combattants de la grande lutte ; pour les distinguer des autres Ordres déjà nombreux de clercs joignant aux obligations de leur saint état la pratique des conseils, et en preuve de son affection spécialement paternelle, l'illustre Pontife donné au monde par la famille franciscaine assigne à ces derniers venus le nom de Clercs réguliers Mineurs. Dans la même pensée de rapprochement avec l'Ordre séraphique, le saint que nous fêtons aujourd'hui, et qui doit être le premier Général du nouvel Institut, change le nom d'Ascagne qu'il portait jusque-là en celui de François.

Le ciel, de son côté, sembla vouloir lui-même unir François Caracciolo et le patriarche d'Assise, en donnant à leurs vies une même durée de quarante-quatre ans. Comme son glorieux prédécesseur et patron, le fondateur des Clercs réguliers Mineurs fut de ces hommes dont l'Ecriture dit qu'ayant peu vécu ils ont parcouru une longue carrière (1). Des prodiges nombreux révélèrent pendant sa vie les vertus que son humilité eût voulu cacher au monde. A peine son âme eut-elle quitté la terre et son corps fut-il enseveli, que les foules accoururent à une tombe qui continuait d'attester

 

1. Sap. IV, 13.

 

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chaque jour, par la voix du miracle, la faveur dont jouissait auprès de Dieu celui dont elle renfermait la dépouille mortelle.

Mais c'est à la souveraine autorité constituée par Jésus-Christ dans son Eglise, qu'il est réservé de prononcer authentiquement sur la sainteté du plus illustre personnage. Tant que le jugement du Pontife suprême n'a point été rendu, la piété privée reste libre de témoigner à qui la mérite, dans l'autre vie, sa gratitude ou sa confiance ; mais toute démonstration qui, de près ou de loin, ressemblerait aux honneurs d'un culte public, est prohibée par une loi de l'Eglise aussi rigoureuse que sage dans ses prescriptions. Des imprudences contraires à celte loi, formulée dans les célèbres décrets d'Urbain VIII, attirèrent, vingt ans après la mort de François Caracciolo, les rigueurs de l'Inquisition sur quelques-uns de ses enfants spirituels, et retardèrent de près d'un siècle l'introduction de sa cause au tribunal de la Congrégation des Rites sacrés. Il avait fallu que les témoins des abus qui avaient attiré ces sévérités disparussent de la scène ; et comme, par suite, les témoins de la vie de François ayant disparu eux-mêmes, on dut alors s'en rapporter aux témoignages auriculaires sur le chapitre des vertus héroïques qu'il avait pratiquées, Rome exigea la preuve, par témoins oculaires, de quatre miracles au lieu de deux qu'elle réclame autrement pour procéder à la béatification des serviteurs de Dieu.

Il serait inutile de nous arrêtera montrer que ces précautions et ces délais, qui prouvent si bien la prudence de l'Eglise en ces matières, n'aboutissent qu'à faire ressortir d'autant mieux l'évidente sainteté de François. Lisons donc maintenant le récit de sa vie.

 

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François, appelé d'abord Aséagne, naquit de la noble famille de Caracciolo à Villa Santa-Maria dans l'Abruzze. Dès ses premières années il brilla par sa piété ; il était encore dans son adolescence , lorsque pendant une grave maladie il prit la résolution de s'attacher entièrement au service de Dieu et du prochain. Il se rendit à Naples, y fut ordonné prêtre, et ayant donné son nom à une pieuse confrérie, il se livra tout entier à la contemplation et au salut des pécheurs ; il s'adonnait assidûment à la fonction d'exhorter les criminels condamnés au dernier supplice. Il arriva un jour qu'une lettre destinée à un autre lui fut remise par erreur de nom ; on y invitait le destinataire à prendre part à la fondation d'un nouvel institut religieux, et l'invitation venait de deux pieux personnages, Jean Augustin Adorno et Fabrice Caracciolo. Frappé de la nouveauté du fait et admirant les conseils de la volonté divine, François se joignit à eux avec allégresse. Ils se retirèrent dans une solitude des Camaldules pour y arrêter les règles du nouvel Ordre, et se rendirent ensuite à Rome où ils en obtinrent la confirmation de Sixte-Quint. Celui-ci voulut qu'on les appelât Clercs Réguliers Mineurs. Ils  ajoutèrent aux trois vœux ordinaires celui  de ne point  rechercher les dignités.

 

A la suite de sa profession solennelle, notre saint prit le nom de François à cause de sa dévotion particulière envers saint François d'Assise. Adorno étant venu à mourir deux ans après, il fut mis, malgré lui, à la tète de tout l'Ordre, et, dans cet emploi, il donna les plus beaux exemples de toutes les vertus. Zélé pour le développement de son institut, il demandait à Dieu cette grâce par des prières continuelles, des larmes et de nombreuses mortifications. Il fit trois fois dans ce but le voyage d'Espagne, couvert d'un habit de pèlerin et mendiant sa nouriture de porte en porte. Il eut dans la route grandement à souffrir, mais éprouva aussi d'une façon merveilleuse l'appui du Tout-Puissant. Par le secours de sa prière, il arracha au danger imminent du naufrage le navire sur lequel il était monté. Pour arriver aux fins qu'il s'était proposées dans ce royaume, il dut peiner longtemps ; mais la renommée de sa sainteté et la très large munificence dont il fut favorisé par les rois Catholiques Philippe II et Philippe III, l'aidèrent à surmonter avec une force d'âme singulière l'opposition de  ses ennemis, et il fonda plusieurs maisons de son Ordre ; ce qu'il fit également en Italie avec le même succès.

 

Son humilité était si profonde, que lorsqu'il vint à Rome, il fut reçu dans un hospice de pauvres où il choisit la compagnie d'un lépreux, et qu'il refusa constamment les dignités ecclésiastiques que lui offrait Paul V. Il conserva toujours sans tache sa virginité, et gagna à Jésus-Christ des femmes dont l'impudence avait osé lui tendre des pièges. Enflammé du plus ardent amour envers le divin mystère de l'Eucharistie, il passait les nuits presque entières en adoration devant lui; et il voulut que ce pieux exercice, qu'il établit comme devant être pratiqué à jamais dans son Ordre, en fût le lien principal. Il fut un propagateur zélé de la dévotion envers la très sainte Vierge Mère de Dieu. Sa charité envers le prochain fut aussi ardente que généreuse. Il fut doué du don de prophétie et connut le secret des cœurs. Etant âge de quarante-quatre ans, un jour qu'il priait dans la sainte maison de Lorette, il eut connaissance que la fin de sa vie approchait. Aussitôt il se dirigea vers l'Abruzze, et étant arrivé dans la petite ville d'Agnoni, il fut atteint d'une fièvre mortelle dans la maison de l'Oratoire de saint Philippe  Néri. Ayant reçu les sacrements de l'Eglise avec la plus tendre dévotion, il s'endormit paisiblement dans le Seigneur la veille des nones de juin de l'an mil six cent huit, le jour d'avant la fête du Saint-Sacrement. Son saint corps fut porté à Naples et enseveli avec honneur dans l'église de Sainte-Marie-Majeure, où il avait jeté les premiers fondements de son Ordre. L'éclat de ses miracles détermina le Souverain Pontife Clément XIV à l'inscrire solennellement au nombre des bienheureux ; et de nouveaux prodiges ayant déclaré de plus en plus sa sainteté, Pie VII le mit au nombre des Saints l'an mil huit cent sept.

 

Votre amour pour le divin Sacrement de nos autels fut bien récompensé, ô François ; vous eûtes la gloire d'être appelé au banquet de l'éternelle patrie à l'heure même où l'Eglise de la terre entonnait la louange de l'Hostie sainte, aux premières Vêpres de la grande fête qu'elle lui consacre chaque année. Toujours voisine de la solennité du Corps du Seigneur, votre fête à vous-même continue d'inviter les hommes, comme vous le faisiez durant votre vie, à scruter dans l'adoration les profondeurs du mystère d'amour. C'est la divine Sagesse qui dispose mystérieusement l'harmonie du Cycle, en couronnant les Saints dans les saisons fixées par sa Providence ; vous méritiez le poste d'honneur qu'elle vous assigne dans le sanctuaire, près de l'Hostie.

Sans cesse, sur la terre, vous vous écriiez  au Seigneur avec le Psalmiste : Le zèle de votre maison m'a dévoré (1). Ces paroles, qui étaient moins encore les paroles de David que celles de l'Homme-Dieu dont il était la figure  (2), remplissaient bien réellement votre cœur; après la mort, on les trouva gravées dans la chair même de ce cœur inanimé, comme ayant été la règle unique de ses battements et de vos aspirations. De là ce besoin de la prière continuelle, avec cette ardeur toujours égale pour la pénitence, dont vous fîtes le trait particulier de votre famille religieuse, et que vous eussiez voulu faire partager à tous. Prière et pénitence ; elles seules établissent l'homme dans la vraie situation qui lui convient devant Dieu. Conservez-en le dépôt précieux dans vos fils spirituels, ô François; que par leur zèle à propager l'esprit de leur père, ils fassent, s'il se peut, de ce dépôt sacré le trésor de la terre entière.

 

1. Psalm. LXVIII, 10. — 2. JOHAN. II, 17.

 

 

 

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