QUASIMODO

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QUASIMODO
ANNONCIATION

LE  DIMANCHE DE QUASIMODO

OCTAVE DE PAQUES.

 

Nous avons vu nos néophytes clore hier leur Octave de la Résurrection. Ils avaient été mis avant nous en participation de l'admirable mystère du Dieu i; avant nous ils devaient achever leur solennité. Ce jour est donc le huitième pour nous qui avons fait la Pâque au Dimanche, et qui ne l'avons pas anticipée au soir du Samedi. Il nous retrace toutes les joies et toutes les grandeurs de cet unique et solennel Dimanche qui a associé toute la chrétienté dans un même sentiment de triomphe. C'est le jour de la Lumière, qui efface pour jamais l'antique Sabbat; désormais le premier jour de la semaine est le jour sacré ; c'est assez que deux fois le Fils de Dieu l'ait marqué du sceau de sa puissance. La Pâque est donc pour jamais fixée au Dimanche; et ainsi qu'il a été expliqué ci-dessus, dans la Mystique du Temps pascal, tout Dimanche est désormais une Pâque.

Notre divin ressuscité a voulu que son Eglise comprit ainsi le mystère ; car ayant l'intention de se montrer une seconde fois à ses disciples rassemblés, il a attendu, pour le faire, le retour du Dimanche. Durant tous les jours précédents, il a laissé Thomas en proie à ses doutes; ce n'est qu'aujourd'hui qu'il a voulu venir à son secours, se manifestant à cet Apôtre, en présence des autres,

 

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et l'obligeant à déposer son incrédulité devant la plus palpable évidence. Aujourd'hui donc le Dimanche reçoit de la part du Christ son dernier titre de gloire, en attendant que l'Esprit-Saint descende du ciel pour venir l'illuminer de ses feux, et faire de ce jour, déjà si favorisé, l'ère de la fondation de l'Eglise chrétienne.

L'apparition du Sauveur à la petite troupe des onze, et la victoire qu'il y remporta sur l'infidélité d'un disciple, est aujourd'hui l'objet spécial du culte de la sainte Eglise. Cette apparition, qui se lie à la précédente, est la septième; par elle. Jésus entre en possession complète de la foi de ses disciples. Sa dignité, sa patience, sa charité, dans cette scène, sont véritablement d'un Dieu. Là encore, nos pensées humaines sont renversées, à la vue de ce délai que Jésus accorde à l'incrédule, dont il semblerait devoir éclairer sans retard l'aveuglement malheureux, ou châtier l'insolence téméraire. Mais Jésus est la souveraine sagesse et la souveraine bonté; dans sa sagesse, il ménage, par cette lente confrontation du fait de sa Résurrection, un nouvel argument en faveur de la réalité de ce fait; dans sa bonté, il amène le cœur du disciple incrédule à rétracter de lui-même son doute par une protestation sublime de regret. d'humilité et d'amour. Nous ne décrirons point ici cette scène si admirablement retracée dans le récit de l'Evangile que la sainte Eglise va tout à l'heure mettre sous nos yeux. Nous nous attacherons, pour la doctrine de ce jour, à faire comprendre au lecteur la leçon pieuse que Jésus donne aujourd'hui à tous, en la personne de saint Thomas. C'est le grand enseignement du Dimanche de l'Octave de Pâques; il importe de ne le pas négliger ; car il nous révèle, plus que tout autre,

 

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le véritable sens du christianisme; il nous éclaire sur la cause de nos impuissances, sur le remède de nos langueurs.

Jésus dit à Thomas : « Tu as cru, parce que tu as vu; heureux ceux qui n'ont pas vu et qui néanmoins ont cru ! » Paroles remplies d'une divine autorité, conseil salutaire donné non seulement à Thomas, mais à tous les hommes qui veulent entrer en rapport avec Dieu et sauver leurs âmes 1 Que voulait donc Jésus de son disciple ? Ne venait-il pas de l'entendre confesser la foi dont il était désormais pénétré? Thomas, d'ailleurs, était-il si coupable d'avoir désiré l'expérience personnelle, avant de donner son adhésion au plus étonnant des prodiges? Etait-il tenu de s'en rapportera Pierre et aux autres, au point d'avoir à craindre de manquer à son Maître, en ne déférant pas à leur témoignage? Ne faisait-il pas preuve de prudence en suspendant sa conviction, jusqu'à ce que d'autres arguments lui eussent révélé à lui-même que le fait était tel que ses frères le lui racontaient ? Oui, Thomas était un homme sage, un homme prudent, qui ne se confiait pas outre mesure ; il était digne de servir de modèle à beaucoup de chrétiens qui jugent et raisonnent comme lui dans les choses de la foi. Cependant, combien est accablant, dans sa douceur si pénétrante, le reproche de Jésus ! Il a daigné se prêter, avec une condescendance inexplicable, à l'insolente vérification que Thomas avait osé demander ; maintenant que le disciple tremble devant le divin ressuscite, et qu'il s'écrie dans l'émotion la plus sincère: « Oh! vous êtes bien mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus ne lui fait pas grâce de la leçon qu'il avait méritée. Il faut un châtiment à cette hardiesse, à cette incrédulité; et ce châtiment consisterai s'entendre

 

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dire : « Tu as cru, Thomas, parce que tu as vu. »

Mais Thomas était-il donc obligé de croire avant d'avoir vu?— Et qui peut en douter ? Non seulement Thomas, mais tous les Apôtres étaient tenus de croire à la résurrection de leur maître, avant même qu'il se fût montré à eux. N'avaient-ils pas vécu trois années dans sa compagnie ? Ne l'avaient-ils pas vu confirmer par les plus divins prodiges sa qualité de Messie et de Fils de Dieu ? Ne leur avait-il pas annoncé sa résurrection pour le troisième jour après sa mort? lu quant aux humiliations et aux douleurs de sa Passion, ne leur avait-il pas dit, peu de temps auparavant, sur la route de Jérusalem, qu'il allait être saisi par les Juifs qui le livreraient aux gentils; qu'il serait flagellé, couvert de crachats et mis à mort ? (Luc, XVIII, 32, 33.)

Des cœurs droits et disposés à la foi n'auraient eu aucune peine à se rendre, dès le premier bruit de la disparition du corps. Jean ne lit qu'entrer dans le sépulcre, que voir les linceuls, et aussitôt il comprit tout et commença à croire. Mais l'homme est rarement aussi sincère; il s'arrête sur le chemin, comme s'il voulait obliger Dieu à faire de nouvelles avances. Ces avances, Jésus daigna les faire. Il se montra à Madeleine et à ses compagnes qui n'étaient pas incrédules, mais seulement distraites par l'exaltation d'un amour trop naturel. Au jugement des Apôtres, leur témoignage n'était que le langage de quelques femmes que l'imagination avait égarées. Il fallut que Jésus vînt en personne se montrer à ces hommes rebelles, à qui leur orgueil faisait perdre la mémoire de tout un passé qui eût suffi à lui seul pour les éclairer sur le présent. Nous disons leur orgueil;

 

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car la foi n'a pas d'autre obstacle que ce vice. Si l'homme était humble, il s'élèverait jusqu'à la foi qui transporte les montagnes.

Or Thomas a entendu Madeleine, et il a dédaigne son témoignage ; il a entendu Pierre, et il a décliné son autorité; il a entendu ses autres frères et les disciples d'Emmaüs, et rien de tout cela ne l'a dépris de sa raison personnelle. La parole d'autrui qui, lorsqu'elle est grave et désintéressée, produit la certitude dans un esprit sensé, n'a plus cette efficacité chez beaucoup de gens, dès qu'elle a pour objet d'attester le surnaturel. C'est là une profonde plaie de notre nature lésée par le péché. Trop souvent nous voudrions, comme Thomas, avoir expérimenté nous-mêmes;et il n'en faut pas davantage pour nous priver de la plénitude de la lumière. Nous nous consolons comme Thomas parce que nous sommes toujours du nombre des disciples ; car cet Apôtre n'avait pas rompu avec ses frères; seulement il n'entrait pas en part de leur bonheur. Ce bonheur, dont il était témoin, ne réveillait en lui que l'idée de faiblesse ; et il se savait un certain gré de ne le pas partager.

Tel est de nos jours encore le chrétien entaché de rationalisme. Il croit, mais c'est parce que sa raison lui fait comme une nécessité de croire; c'est de l'esprit et non du cœur qu'il croit. Sa loi est une conclusion scientifique, et non une aspiration vers Dieu et la vérité surnaturelle. Aussi cette toi. comme elle est froide et impuissante! comme elle est restreinte et embarrassée ! comme elle craint de s'avancer, en croyant trop ! A la voir se contenter si aisément de vérités diminuées (Ps. XI), pesées dans la balance de la raison, au lieu de voler à pleines ailes comme la foi des saints, on dirait qu'elle est honteuse d'elle-même. Elle parle bas, elle craint

 

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de se compromettre ; quand elle se montre, c'est sous le couvert d'idées humaines qui lui servent de passeport. Ce n'est pas elle qui s'exposera à un affront pour des miracles qu'elle juge inutiles, et qu'elle n'eût jamais conseillé à Dieu d'opérer. Dans le passé comme dans le présent, le merveilleux l'effraie ; n'a-t-elle pas eu déjà assez d'effort à faire pour admettre celui dont l'acceptation lui est strictement nécessaire? La vie des saints, leurs vertus héroïques, leurs sacrifices sublimes, tout cela l'inquiète. L'action du christianisme dans la société, dans la législation, lui semble léser les droits de ceux qui ne croient pas ; elle entend réserver la liberté de l'erreur et la liberté du mal; et elle ne s'aperçoit même pas que la marche du monde est entravée depuis que Jésus-Christ n'est plus Roi sur la terre.

Or c'est pour ceux dont la foi est si faible et si près du rationalisme, que Jésus ajoute aux. paroles de reproche qu'il adressa à Thomas, cette sentence qui ne le regardait pas seul, mais qui avait en vue tous les hommes et tous les siècles : « Heureux ceux qui n'ont pas vu, et qui ont cru ! » Thomas pécha, pour n'avoir pas eu la disposition à croire. Nous nous exposons à pécher comme lui, si nous n'entretenons pas dans notre foi cette expansion qui la mêlerait à tout, et lui ferait faire ce progrès que Dieu récompense par des flots de lumière et de joie au cœur. Une fois entrés dans l'Eglise, le devoir pour nous est de considérer désormais toute chose au point de vue surnaturel; et ne craignons pas que ce point de vue, réglé par les enseignements de l'autorité sacrée, nous entraîne trop loin. « Le juste vit de la foi » (Rom. I, 17) ; c'est sa nourriture continuelle. La vie naturelle est transformée en lui pour jamais, s'il demeure fidèle à son baptême.

 

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Croyons-nous donc que l'Eglise avait pris tant de soins dans l'instruction de ses néophytes. qu'elle les avait inities partant de rites qui ne respirent que les idées et les sentiments de la vie surnaturelle, pour les abandonner sans remords dès le lendemain à l'action de ce dangereux système qui place la foi dans un recoin de l'intelligence, du cœur et de la conduite, afin de laisser plus librement agir l'homme naturel? Non, il n'en est pas ainsi. Reconnaissons donc notre erreur avec Thomas; confessons avec lui que jusqu'ici nous n'avons pas cru encore d'une foi assez parfaite. Comme lui, disons à Jésus : « Vous êtes mon Seigneur et mon Dieu ; et j'ai souvent pensé et agi comme si vous n'étiez pas en tout mon Seigneur et mon Dieu. Désormais je croirai sans avoir vu ; car je veux être du nombre de ceux que vous avez appelés heureux. »

 

Ce Dimanche, appelé vulgairement le Dimanche de Quasimodo, porte dans la Liturgie le nom de Dimanche in albis, et plus explicitement in albis depositis, parce que c'était en ce jour que les néophytes paraissaient à l'Eglise sous les habits ordinaires. Au moyen âge, on l'appelait Pâque close : sans doute pour exprimer qu'en ce jour l'Octave de Pâques se terminait. La solennité de ce Dimanche est si grande dans l'Eglise, que non seulement il est du rite Double, mais qu'il ne cède jamais la place à aucune fête, de quelque degré supérieur qu'elle soit.

A Rome, la Station est dans la Basilique de Saint-Pancrace, sur la Voie Aurélia. Les anciens ne nous ont rien appris sur les motifs qui ont fait désigner cette Eglise pour la réunion des fidèles en ce jour. Peut-être l'âge du jeune martyr de quatorze ans auquel  elle  est dédiée  l'a-t-il fait

 

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choisir de préférence, par une sorte de rapport avec la jeunesse des néophytes qui sont encore aujourd'hui l'objet de la préoccupation maternelle de l'Eglise.

 

A  LA MESSE.

 

L'Introït rappelle les gracieuses paroles que saint Pierre adressait, dans l'Epître d'hier, aux nouveaux baptisés. Ce sont de tendres enfants remplis de simplesse, et aspirant aux mamelles de la sainte Eglise le lait spirituel de la foi, qui les rendra forts et sincères.

 

INTROÏT.

 

 

Quasi modo geniti infantes, alleluia : rationabile, sine dolo lac concupiscite. Alleluia, alleluia, alleluia.

Ps. Exsultate Deo adjutori nostro : jubilate Deo Jacob. Gloria Patri. Quasi  modo.

 

 

Comme des enfants nouveau-nés, alleluia : enfants spirituels, aspirez au lait pur et sincère. Alleluia, alleluia, alleluia.

Ps. Célébrez dans la joie le Dieu notre protecteur : louez avec allégresse le Dieu de Jacob. Gloire au Père. Comme des enfants.

 

 

 

En ce dernier jour d'une si grande Octave, l'Eglise fait, dans la Collecte, ses adieux aux pompes solennelles qui viennent de s'écouler, et demande à Dieu que leur divin objet demeure empreint dans la vie et la conduite de ses enfants.

 

COLLECTE.

 

Faites, s'il vous plaît, ô Dieu tout-puissant, qu'avant achevé la célébration des fêtes pascales, nous en retenions l'esprit dans nos habitudes et dans notre vie. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

ÉPÎTRE.

 

Lecture de l'Epître du bienheureux Jean, Apôtre. I, Chap. V.

 

Mes bien-aimés, quiconque est né de Dieu est victorieux du monde ; et la victoire qui soumet le monde, c'est notre foi. Quel est celui qui triomphe du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ? C'est ce même Jésus-Christ qui est venu avec l'eau et le sang ; non seulement avec l'eau, mais avec l'eau et avec le sang. Et c'est l'Esprit qui rend témoignage que le Christ est la vérité. Car il y en a trois qui rendent témoignage dans le ciel, le Père, le Verbe et le Saint-Esprit ; et ces trois sont une même chose. Et il y en a trois qui rendent témoignage sur la terre : l'Esprit, l'eau et le sang ; et ces trois sont une même chose. Si nous recevons le témoignage des hommes, celui de Dieu est plus grand. Or ce grand témoignage de Dieu, c'est celui qu'il a rendu au sujet de son Fils. Celui qui croit au Fils de Dieu, a en soi le témoignage de Dieu.

 

L'Apôtre saint Jean célèbre en ce passage le mérite et les avantages de la foi ; il nous la présente comme une victoire qui met le monde sous

 

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nos pieds, le monde qui nous entoure, et le monde qui est au dedans de nous. La raison qui a porte l'Eglise à faire choix pour aujourd'hui de ce texte de saint Jean se devine aisément, quand on voit le Christ lui-même recommander la foi dans l'Evangile de ce Dimanche. « Croire en Jésus-Christ, nous dit l'Apôtre, c'est vaincre le monde » ; celui-là n'a donc pas la foi véritable qui soumet sa foi au joug du monde. Croyons d'un cœur sincère, heureux de nous sentir enfants en présence de la vérité divine, toujours disposés à accueillir avec empressement le témoignage de Dieu. Ce divin témoignage retentira en nous, selon qu’il nous trouvera désireux de l'entendre toujours davantage. Jean, à la vue des linceuls qui avaient enveloppé le corps de son maître, se recueillit et il crut; Thomas avait de plus que Jean l'attestation des Apôtres qui avaient vu Jésus ressuscité, et il ne croyait pas. Il n'avait pas soumis le monde à sa raison, parce que la foi n'était pas en lui.

 

Les deux Versets alleluiatiques sont formés de passages du saint Evangile qui ont rapport à la Résurrection. Le second retrace la grande scène qui eut lieu aujourd'hui même dans le Cénacle.

 

Alleluia, alleluia.

V/. Au jour de ma résurrection, dit le Seigneur, je vous précéderai en Galilée.

Alleluia.

V/. Huit jours après, les portes étant fermées, Jésus parut au milieu de ses disciples, et il leur dit : La paix soit avec vous ! Alleluia.

 

 

ÉVANGILE.

 

La suite du saint Evangile selon saint Jean. Chap. XX.

 

En ce temps-là, sur le soir, le jour d'après le sabbat, les portes du lieu où les disciples étaient rassemblés étant fermées, de peur des Juifs, Jésus vint, et debout au milieu d'eux, il leur dit: La paix soit avec vous! Et ayant dit ces mots, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent dans la joie de voir le Seigneur. Il leur dit de nouveau : La paix soit avec vous! Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie. Cela dit, il souilla sur eux et leur dit : Recevez le Saint-Esprit. Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez. Or Thomas appelé Didyme, l'un des douze, n'était pas avec eux lorsque Jésus vint. Les autres disciples lui dirent donc: Nous avons vu le Seigneur. Mais il leur dit : Si je ne vois dans ses mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt là où étaient les clous, et ma main dans son côté, je ne croirai point. Huit jours après, les disciples étant encore dans le même lieu, et Thomas avec eux, Jésus vint, les portes fermées, et debout  au milieu  d'eux, il leur dit : La paix soit avec vous ! Puis il dit à Thomas : Mets ici ton doigt, et vois mes mains ; approche ta main et mets-la dans mon côte, et ne sois plus incrédule, mais fidèle. Thomas répondant lui dit : Mon Seigneur et mon Dieu ! Jésus lui dit : Parce que tu m'as vu, Thomas, tu as cru ; heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru. Jésus fit encore devant ses disciples beaucoup d'autres miracles qui ne sont point écrits en ce livre ; mais ceux-ci ont été écrits, afin que vous croyiez que Jésus est le Fils de Dieu, et qu'en le croyant vous ayez la vie en son nom.

 

 

Nous avons insisté suffisamment sur l'incrédulité de saint Thomas ; il est temps maintenant de glorifier la foi de cet Apôtre. Son infidélité nous a aidés à sonder notre peu de foi ; que son retour nous éclaire sur ce que nous avons à faire pour devenir de vrais croyants. Thomas a contraint le Sauveur, qui compte sur lui pour en faire une des colonnes de son Eglise, à descendre avec lui jusqu'à la familiarité; mais à peine a-t-il introduit son doigt téméraire dans les plaies de son maître que, tout aussitôt, il se sent subjugué. Le besoin de réparer, par un acte solennel de foi. l'imprudence qu'il a commise en se croyant saie et prudent, se fait sentir à lui: il jette un cri, et ce cri est la protestation de foi la plus ardente qu'un homme puisse faire entendre: « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Remarquez qu'il ne dit pas seulement ici que Jésus est son Seigneur, son Maître; qu'il est bien le même Jésus dont il a été le disciple; ce ne serait pas encore la foi. Il n'y a plus foi, quand on palpe l'objet. Thomas aurait eu la foi de la Résurrection, s'il avait cru sur le témoignage de ses frères ; maintenant, il ne croit plus simplement, il voit, il a l'expérience. Quel est donc le témoignage de sa foi? C'est qu'il atteste en ce moment que son Maître est Dieu. Il ne voit que l'humanité de Jésus, et il proclame tout d'un coup la divinité de ce Maître. D'un seul bond, son âme loyale et repentante s'est élancée jusqu'à l'intelligence des grandeurs de Jésus: « Vous êtes mon Dieu! » lui dit-il. 0 Thomas, d'abord incrédule, la sainte Eglise révère votre foi, et elle la propose pour modèle à ses enfants au jour de votre fête. La confession que vous avez faite aujourd'hui vient se placer d'elle-même à côté de celle que fit Pierre, lorsqu'il dit à Jésus: « Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant ! » Par cette profession que ni la chair, ni le sang n'avaient inspirée, Pierre mérita d'être choisi pour être le fondement de l'Eglise; la vôtre a fait plus que réparer votre faute ; elle vous rendit pour un moment supérieur à vos frères, que la joie de revoir leur Maître transportait, mais sur lesquels la gloire visible de son humanité avait fait jusqu'alors plus d'impression que le caractère invisible de sa divinité.

 

L'Offertoire est formé d'un passage historique de l'Evangile sur la résurrection du Sauveur.

 

OFFERTOIRE.

 

L 'Ange du Seigneur descendit du ciel,  et il dit aux femmes : Celui que vous cherchez est ressuscité, ainsi qu'il l'avait dit. Alleluia.

 

Dans la Secrète, la sainte Eglise exprime l'enthousiasme dont le mystère de la Pâque est en elle la source ; et elle demande que cette joie se transforme en celle que doit nous apporter la Pâque de l'éternité.

 

SECRÈTE.

 

Daignez recevoir, Seigneur, les dons que votre Eglise vous offre dans sa joie; et puisque vous lui avez donne le sujet d'une si vive allégresse, accordez-lui le fruit de l'éternelle félicité. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

En distribuant aux néophytes et au reste du peuple fidèle l'aliment divin, l'Eglise rappelle, dans l'Antienne de la Communion, les paroles de Jésus à Thomas. Cet Apôtre pénétra de son doigt les membres sacrés du Sauveur : Jésus, dans la divine Eucharistie, se révèle à nous d'une manière plus intime encore; mais pour profiter de la condescendance d'un maître si rempli de bonté, il nous faut avoir cette foi vive et courageuse qu'il recommanda à son Apôtre.

 

COMMUNION.

 

Porte ici ta main, et reconnais la place des clous, alleluia ; et ne sois plus incrédule, mais fidèle. Alleluia, alleluia.

 

 

L'Eglise conclut les prières du Sacrifice en demandant que le divin mystère institué pour soutenir notre faiblesse soit, dans le présent et dans l'avenir, le moyen efficace de notre persévérance.

 

POSTCOMMUNION.

 

Nous vous supplions, Seigneur notre Dieu, que ces saints et sacrés mystères dont vous avez fait le rempart de notre régénération, soient pour nous le remède présent et celui de l'avenir. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

A VEPRES.

 

Dans les années ou la fête de l'Annonciation de la Sainte Vierge est renvoyée au Lundi qui suit le Dimanche de Quasimodo, on chante aujourd'hui les premières Vêpres de cette grande solennité, et Ton fait seulement la commémoration du Dimanche, à la fin de l'Office. Dans les autres années, les Vêpres sont celles du Temps pascal, que l'on trouvera ci-dessus, page 113.

 

ANTIENNE DE Magnificat.

 

Ant. Huit jours après, le Seigneur entra, les portes fermées, et leur dit : La paix soit avec vous! Alleluia, alleluia.

 

COLLECTE.

 

Faites, s'il vous plait, ô Dieu tout-puissant, qu'ayant achevé la célébration des fêtes pascales, nous en retenions l'esprit dans nos habitudes et dans notre vie. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

 

Nous terminons la journée par cette belle prière dans laquelle l'Eglise gothique d'Espagne célèbre le mystère du huitième jour, octave de Pâques.

 

ORATIO.

 

FILS engendré du Père qui n'est engendré de personne, vous renouvelez aujourd'hui le culte de ce huitième jour, dans lequel vous vous offrîtes aux regards et à l'attouchement de vos disciples. Ce jour du Dimanche, bien qu'il ait précède les autres, devient le huitième après que les sept premiers sont écoulés. En ce jour vous vous levâtes du sépulcre, vous vous séparâtes des morts ; en ce jour aussi vous entrez, les portes fermées, et vous accordez aux disciples votre chère visite. C'est ainsi que vous marquez, chacun par son mystère, le commencement et la fin de la Pâque ; votre résurrection épouvante les gardiens de votre tombeau, et votre apparition vient confirmer les cœurs chancelants des disciples. Quant à nous qui possédons la science de tous ces mystères, daignez faire que la foi par laquelle nous croyons, nous préserve du mal pour le jour où, après cette vie, nous paraîtrons devant vous. Que cette foi ne connaisse ni le doute qu'engendre la paresse de l'esprit, ni l'erreur que mène à sa suite une téméraire curiosité. Gardez en votre nom ceux que vous avez rachetés de votre précieux sang. Laissez-vous contempler a notre âme ; daignez pénétrer aussi dans notre cœur. Soyez toujours au milieu de nous, vous qui, étant au milieu de vos disciples, leur avez aujourd'hui annoncé  la  paix. Vous avez soufflé sur eux l'Esprit de vie, répandez aussi sur nous  la  consolation du même Esprit.

 

Enfin nous inviterons encore le pieux et mélodieux Adam de Saint-Victor à nous prêter une de ses belles Séquences que nos Eglises du moyen-âge aimaient tant, et dans lesquelles ce prince des poètes de la Liturgie a chanté avec tant d'abondance, et souvent avec tant de bonheur, le triomphe du Rédempteur sur la mort.

 

SÉQUENCE.

 

 

Le renouvellement du monde a amené des joies nouvelles ; le Seigneur ressuscite, et tout ressuscite avec lui ; dociles à la voix de leur auteur, les éléments montrent par leur obéissance l'étendue de son pouvoir.

 

Le feu est devenu plus volatil, l'air a augmente de transparence; l’eau coule plus limpide, et la terre se tient plus ferme sur ses bases. La loi selon laquelle les corps légers s'élèvent, et les corps pesants tendent vers leur centre, est de nouveau déclarée : tout participe à la rénovation.

 

Le ciel est plus serein, la mer est plus tranquille, l'haleine du zéphyr plus douce. Notre vallée s'est couverte de fleurs ; la terre aride a retrouvé sa verdure ; le souffle du printemps a réchauffé sa surface engourdie.

 

Les glaces de la mort se sont fondues ; le prince du monde est renversé ; son empire sur nous est anéanti. En voulant retenir dans ses liens celui sur lequel ses droits étaient nuls, il a vu s'évanouir son pouvoir.

 

La vie a vaincu la mort ; l'homme recouvre les joies du Paradis qu'il avait perdues ; le Chérubin abaisse le glaive qu'il brandissait, et livre un passage facile.

 

Le Christ ouvre les cieux ; il délivre les captifs que le péché avait enchaînés sous les lois de la mort. Pour une si belle victoire, honneur au Père, honneur au Fils, honneur à l'Esprit-Saint ! Amen.

 

 

 

 

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