CHAPITRE VI

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CHAPITRE VI. PRATIQUE DE LA SAINTE COMMUNION AU TEMPS PASCAL.

 

Au temps de la Passion, le chrétien approchait de la divine Eucharistie, en se souvenant de cette parole de l'Apôtre : « Chaque fois que vous mangerez de ce pain et que vous boirez de ce calice, d'ici que le Seigneur vienne, vous renouvellerez la mémoire de sa mort (1).  » Il s'unissait à l'auguste victime immolée pour les péchés du monde, et mourait avec son Sauveur. Au Temps pascal, l'aliment céleste opère d'une autre manière dans le chrétien qui s'en nourrit. Sa présence en nous est destinée principalement à fortifier la vie de l'âme, et à donner au corps lui-même le germe de l'immortalité. Sans doute, en chaque raison de l'année liturgique, ce double effet de l'Eucharistie, Immolation et Résurrection, est produit en celui qui la reçoit dignement ; mais de même que, dans les jours consacrés à honorer la mémoire du  sacrifice sanglant de l'Agneau, l'application du mystère de mort est plus directe et correspond mieux au genre de préparation qu'y apportent les fidèles : de même aussi, dans le Temps pascal, le divin contact de la chair ressuscitée du Fils de Dieu fait sentir davantage à notre être tout entier que le principe de résurrection pour nos corps repose dans cette nourriture sacrée.

 

1. I Cor. XI, 26.

 

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Le Sauveur nous l'apprend lui-même, lorsqu'il dit : « Vos pères ont mangé la manne (dans le désert, et ils sont morts; mais voici le Pain descendu du ciel : si quelqu'un en mange, il ne mourra point. Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang possède la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour ». (Johan. VI, 49, 5o, 55. Nous serons tous appelés à reprendre nos corps au dernier jour, les uns pour la gloire, les autres pour le supplice ; mais celui qui s'unit dignement, par la sainte Eucharistie, à la chair glorieuse et ressuscitée de  l’Homme-Dieu, contracte avec lui un lien et une intimité qui obligent plus étroitement encore cet hôte divin a ne pas laisser dans la poussière des membres que le sublime mystère a rendus les siens.

Nous devons donc aller, en ces jours, à la table sainte avec une vive ardeur pour la résurrection, sachant que nous recevons alors dans notre corps mortel tin élément qui doit le conserver au sein même de la poussière, et qui lui confère un droit de plus aux qualités des corps glorieux, dont la splendeur et la félicité seront à l'image de celui que notre divin ressuscité montre, en ces jours même, aux regards éblouis de ses disciples.

Or, si notre Rédempteur agit jusque sur nos corps au moyen du céleste aliment, en déposant en eux les arrhes de l'immortalité, quel effet ne doit-il pas produire en nos âmes pour les fortifier et les faire avancer dans cette « vie nouvelle »,  vie ressuscitée, qui est le fruit de la Pâque, le terme de tous nos efforts, le prix de toutes nos victoires sur nous-mêmes dans le cours de la sainte Quarantaine ? Disons même que cette vie nouvelle, si elle n'était fréquemment ranimée en nous par le moyeu suprême de la sainte Communion,courrait le risque

 

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de s'attiédir, peut-être même de défaillir en nous. L'Apôtre nous enseigne « que le Christ ressuscité d'entre les morts ne meurt plus » ; d'où il suit que nous, qui sommes ressuscites avec lui, nous ne devons plus mourir. Pour qu'il en advienne ainsi. soyons empressés vers ce Pain descendu du ciel, dont le Sauveur nous dit : « Si quelqu'un mange de ce Pain, il ne mourra pas, mais il vivra à jamais (Johan. VI, 52.)

Nous formulerons ici, selon notre usage, les Actes de préparation à la Communion dans ce saint temps, pour les personnes qui sentiraient le besoin d'être aidées en cette manière : nous ajouterons comme complément les Actes pour l'Action de grâces.

 

AVANT LA COMMUNION

 

ACTE DE FOI.

 

L'éclat de vos œuvres, ô Sauveur des hommes. inonde vos fidèles d'une lumière si vive, qu'ils ne peuvent s'empêcher de vous rendre gloire, et de protester que vous êtes le Fils de Dieu. Nous crûmes en vous, lorsque vous apparûtes dans l'humilité de la crèche au milieu de la nuit; un aimant secret nous attirait vers vous, et sous les langes nous vous adorions déjà avec les Esprits célestes. Naguère nous vous vîmes attache à la croix, honni et blasphème de tout un peuple; mais nous n'avons pas cessé pour cela de vous reconnaître pour le Roi suprême. Avec le bon larron nous vous disions: « Seigneur, souvenez-vous de nous, quand vous serez dans votre royaume ». Mais aujourd'hui que tous avez triomphé de la mort, que le sépulcre vous a rendu vivant et victorieux; aujourd'hui que la terre entière retentit de vos louanges, et que le bruit de votre Résurrection, accomplie il y a tant de siècles, ébranle toutes les nations, qui pourrait ne pas rendre hommage à votre divinité, ne pas confesser vos mystères, ne pas dire avec le disciple qui fut incrédule un moment : « Vous êtes mon Seigneur et mon Dieu ? » Je n'ai pas l'avantage de voir de mes yeux mortels et de toucher de nies mains tremblantes vos plaies sacrées et rayonnantes ; mais je crois fermement que vous êtes aussi mon Seigneur et mon Dieu. Vous avez dit : « Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui néanmoins ont cru » ; je veux être du nombre de ces heureux croyants, ô Jésus ! Je confesse que vous êtes véritablement ressuscite, Fils de Dieu et Fils de l'homme. Je crois aussi que vous êtes le Pain vivant descendu du ciel pour donner la vie au monde, et que c'est vous-même que je vais recevoir en moi tout à l'heure. Augmentez encore celte loi, mon Seigneur et mon Dieu, afin que je vous rende tous les hommages que vous avez droit d'attendre de votre humble et heureuse créature.

 

ACTE D'HUMILITÉ.

 

Qui ne tremblerait à la seule pensée de vous voir dans l'éclat de votre majesté, o divin triomphateur de la mort? Avant votre Passion, vous laissâtes apparaître quelques rayons de votre gloire à trois de vos disciples sur le Thabor, et ils tombèrent comme morts ; nous voici dans les jours où les splendeurs de votre victoire éblouissent les regards même des Anges; et vous voulez taire plus que vous montrera moi. Vous daignez descendre jusque dans mon néant, m'incorporer à nous, moi faible et indigne créature, à vous qui n'êtes plus dans les langes de la crèche, ni sur le bois douloureux de la croix, à vous qui allez vous asseoir pour l'éternité dans la gloire de Notre Père. Auteur de la lumière, Lumière infinie et sans ombres, vous voulez vous mêler à mes ténèbres. Mon néant tressaille à cette pensée ; mais ma conscience pécheresse en est plus effrayée encore. Quel rapprochement peut-il exister entre votre souveraine sainteté et ma vie pleine d'infidélités ? « La lumière a lui dans les ténèbres, nous dit votre Evangéliste ; mais les ténèbres ne l'ont pas comprise. » Les ténèbres de l'orgueil ont cru être la lumière, et elles n'ont pas reconnu a vraie Lumière: qu'il n'en soit pas ainsi de moi, ô Jésus! J'humilie mon être tout entier devant vous; je reconnais ma misère : elle est immense ; daignez donc agir en moi, ô Lumière ineffable, selon toute l'étendue de votre miséricorde.

 

ACTE DE CONTRITION.

 

Vous venez en moi, ô libérateur des hommes, vainqueur de l'enfer, et je ne suis qu'un pécheur. Vous voulez donc me traiter comme vous traitâtes vos disciples, au jour de votre résurrection. Ils vous avaient lâchement abandonné dans votre Passion, et vous êtes revenu près d'eux ; afin de rassurer leurs inquiétudes, vous ne leur avez témoigné que de la bonté; aucun reproche sur leur conduite passée n'est sorti de votre bouche. Vous vouliez, ô Jésus, qu'ils comprissent, par cette indulgence de votre part, à quel point ils avaient été coupables de vous abandonner. J'accepte pour moi-même cette leçon du meilleur des maîtres; mais qu'il y a loin de la faute de ces hommes qui vous connaissaient à peine, âmes péchés qui sont ceux d'un chrétien tant de fois rebelle à la lumière de vos divins mystères ! L'ensemble de tant de vérités sublimes était ignoré encore de vos apôtres, lorsqu'ils se laissèrent effrayer par vos ennemis ; ils n'avaient pas reçu encore l'Esprit-Saint qui m'a été si abondamment communiqué. Je m'unis. Seigneur, aux regrets qu'ils éprouvèrent à la vue de votre générosité; je déteste mes fautes qui ont blesse si cruellement votre Cœur divin ; je sens que le péché est la mort, et qu'il n'a rien de commun avec la vie que vous renouvelez en nous par votre résurrection. Je veux être mort au pèche, et vivre à votre grâce. Daignez, par ce mystère de vie que vous allez communiquer à mon âme repentante, la préserver pour jamais du malheur de perdre votre grâce.

 

ACTE D'AMOUR.

 

Votre résurrection, ô Jésus, n'est pas seulement le trophée de votre victoire; elle est bien plus encore le suprême triomphe de votre amour. C'est par amour que vous avez pris notre humble chair; c'est par amour que vous avez enduré votre cruelle Passion; mais ces monuments de votre adorable bonté envers nous ne sont que la préparation du dernier effort de cet amour d'un Dieu pour sa créature coupable. En ces jours, vous sortez du tombeau, vous entrez en possession de l'immortalité; mais vous ne voulez pas jouir seul de ces avantages conquis par vos humiliations et vos souffrances, si vous triomphez, c'est pour nous. Qu'aviez-vous besoin de la crèche et de la croix, ô vous, Dieu éternel et souverainement heureux? Quelle nécessité de mourir et de ressusciter ensuite, de passer par le tombeau pour reprendre ensuite la vie? Je le comprends, ô mon Dieu ! vous nous avez aimés, nous qui avions mérité de mourir en punition de nos péchés. Dans votre amour incompréhensible, vous avez voulu partager notre mort, afin vie nous donner part à votre résurrection. Attaché à la croix, sortant de votre tombeau glorieux, toujours vous êtes à nous, vous êtes pour nous ; mais c'est par ce dernier acte de votre toute-puissante bonté que vous mettez le comble a vos bienfaits. Que pouvons-nous faire, ô Jésus, si ce n'est de vous offrir en retour l'humble et fervent hommage de notre amour ? Et à quel moment vous l’exprimerai-je avec plus d'effusion, si ce n'est a celui-là même où vous vous préparez à me communiquer ce Pain sacré qui est vous-même, et par lequel vous venez m'unir à votre divine chair ressuscitée, afin de m'incorporer à votre gloire et à votre immortalité ? O Jésus, mon libérateur, quiètes à moi dans votre mort et dans votre vie. je veux être tout a votre amour dans le temps et dans l'éternité.

 

 

Pour compléter cette Préparation, suivez, avec foi et avec une religieuse attention tous les mystères de la Messe a laquelle vous devez communier, produisant les actes que nous avons exposés au Chapitre v : et quand vous aurez reçu la visite du Seigneur, vous pourrez vous aider des prières suivantes, dans l'Action de grâces qui vous reste à faire.

 

APRÈS LA COMMUNION.

 

ACTE D'ADORATION.

 

Vous êtes en moi, et je suis en vous. Majesté infinie ! Au moment où vous vous élanciez du tombeau, la  terre  trembla  à l'aspect  de votre gloire;  à cette heure fortunée où je vous sens en moi-même, mon être tout entier tressaille d'émotion, car vous êtes le grand Dieu à qui il n'a fallu qu'un acte de sa volonté pour faire jaillir la lumière du sein du chaos, à qui il n'a fallu qu'un instant pour réunir son âme à son corps et s'échapper des liens du tombeau. Que puis-je faire, sinon adorer profondément cette puissance, cette grandeur qui m'est unie en ce moment? O Dieu a qui rien ne résiste, je m'anéantis devant vous, je confesse votre domaine sur moi; recevez mon hommage que vous êtes venu chercher du haut du ciel, en descendant jusqu'au fond de cet abîme de néant. Je succombe sous le poids de l'insigne honneur que vous daignez me faire. Vous êtes le souverain Etre, l'auteur et le conservateur de toutes choses: je vous adore comme mon maître absolu, je confesse avec bonheur ma dépendance, et je vous offre de tout mon cœur mon humble service.

 

ACTE DE REMERCIEMENT.

 

Qui me donnera de reconnaître, comme je le dois. Je bienfait de votre visite. Ô Jésus? C’est  pour me taire part de votre propre vie que vous êtes venu en moi. Faible comme je le suis, le souvenir de ce que vous avez opère en ma faveur ne suffirait pas à me soutenir dans la voie nouvelle que votre résurrection m'a ouverte: dans votre aimable condescendance pour mon infirmité, vous êtes venu dans mon âme sans bruit, mais avec toute votre puissance et toute votre gloire. Vous vous montrâtes ainsi aux Apôtres réunis dans le Cénacle, ô divin Ressuscite! « C'est moi, leur dites-vous; n'ayez pas de crainte. » J'entends au dedans de moi les mêmes paroles. Vous me dites de ne pas me troubler, quelles que soient votre grandeur et ma bassesse, votre souveraine sainteté et mon indignité. « La paix soit avec vous! » c'est le salut que vous donnâtes à vos disciples; en ce moment, c'est à moi-même que vous l'adressez. Je le reçois, ô Jésus, de votre bouche adorable, et j'y réponds par mes actions de grâces. Soyez béni pour cette divine prévenance, pour cette tendre sollicitude qui vous porte à vous unir ainsi à mon indignité, à abaisser toutes les barrières qui me captivaient sous l'empire de la mort, à m'associer intimement à votre triomphe, à me prémunir contre le retour de ia mort, en m'incorporant, parce Pain sacre, votre immortelle vie. Je dirai donc avec le Roi-Prophète : « Mon âme, et tout ce qui est en moi, bénis le Seigneur, et n'oublie jamais son bienfait; c'est lui qui ta rachetée de la mort, et qui a renouvelé ta jeunesse comme celle de l'aigle. »

 

ACTE D’AMOUR.

 

COMBLÉ de vos plus chères faveurs, que dois-je faire, ô Jésus, sinon répondre à votre amour par tout ! amour dont je suis capable: Madeleine, à votre Sépulcre, n'a entendu de vous qu'une seule parole, et son cœur se fond ; elle ne peut répondre que par cette exclamation : « Mon maître! mon cher maître!» Et moi, ô Jésus, qui n'entends pas seulement votre parole, mais qui vous sens en moi-même, qui suis tout pénétré de nous, quels termes emploierai-je pour exprimer mon amour ? Les disciples d'Emmaüs n'avaient eu avec vous qu'un simple entretien, et ils disaient : « Notre cœur n'était-il pas brûlant au dedans de nous, pendant qu'il nous parlait dans le chemin? » Que dirai-je ? que ressentirai-je en ce moment où vous reposez dans ma poitrine? J'oserai vous dire que moi aussi je vous aime, Ô mon Sauveur ressuscité! Vous daignâtes agréer l'amour de Madeleine et encourager par votre bonté celui de vos disciples; agréez aussi le mien. S'il est faible, vous pouvez l'accroître; je prends la résolution de ne le plus contrarier, de le développer en moi, avec l'aide de votre sainte grâce, et de recourir souvent, pour cet effet, à l'adorable Sacrement dans lequel vous avez déposé toutes les ressources et tous les secrets de ce saint amour.

 

 ACTE D'OFFRANDE.

 

J'étais à vous, ô Jésus, parce que vous m'aviez racheté; je suis maintenant à vous, parce que vous m'avez rendu la vie par votre Résurrection; et dans le divin mystère dont vous venez de me faire part, vous m'avez associé a tout ce que votre victoire sur la mort a de plus glorieux. Mon sort est donc désormais uni au votre ; comme vous, je suis mort au péché, et je vis a Dieu. Que dois-je donc faire, sinon m'offrir et me donner à vous pour ne m'en plus séparer jamais? Disposez de moi, ô Jésus! Je suis votre racheté et votre compagnon de gloire; tout mon présent, tout mon avenir est en vous jusque dans l'éternité. Je renonce donc à moi-même, pour être à toutes vos volontés; je renonce au monde et a ses maximes, qui sont l'opposé de la vie nouvelle que je veux mener désormais; mais je sens que, pour être fidèle, j'ai besoin d'un secours puissant qui m'assiste sans cesse. Le secours, ô Jésus, c'est la venue en moi de votre Esprit-Saint; c'est sa demeure en moi. Vous l’avez promis; il doit, par son arrivée, mettre le sceau à toutes les joies pascales. Envoyez-le-moi, o Fils du Père! Vous montez au ciel: ne me laissez pas orphelin. Votre divin Sacrement me reste ; mais je n'y puis participer à toute heure, et mes besoins sont de chaque instant. Daignez donc renouveler en moi la présence de ce divin Esprit, qui conservera et développera, pour votre gloire, les dons que vous venez de me communiquer en vous unissant à moi.

O Marie, je vous en supplie par la joie dont votre cœur maternel est inonde dans la résurrection de votre divin Fils, gardez en moi le fruit de l'heureuse visite qu'il a daigné me faire. Anges de Dieu, montrez-vous jaloux de conserver intacte la demeure de votre Maître. Saints et Saintes, priez, afin que je ne perde pas le souverain Bien dont l'immuable possession vous rend à jamais heureux.

 

 

 

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