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CONDAMNATION

 

SENTENCE EXÉCUTOIRE

Observations de M. de Leibnitz

Rendue par les légats du concile de Bâle, au sujet du traité conclu avec les Bohémiens, et expédiée dans la forme qui suit, l'an 1636.

 

Au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui chérit la paix, et qui a offert ses prières à son Père pour l'union du peuple chrétien.

 

 

Nous Philibert par la grâce de Dieu et du Saint Siège apostolique, évêque de Coutances, de la province de Rouen; Jean de Polomar (a), archidiacre de Barcelone, auditeur de la chambre apostolique, docteur en droit canon; Martin Bernerius, doyen de Tours; Tilman, prévôt de Saint-Florin de Coblentz, docteur en droit canon; Gilles Charlier, doyen de Cambray; et Thomas Haselbach, professeur en théologie à Vienne, légats du saint concile général de Bâle, dans le royaume de Bohème elle marquisat de Moravie, acceptons et recevons, par l'autorité du saint concile, les articles d'union et de paix avec tout le peuple chrétien, tels qu'ils ont été dressés, acceptés et confirmés dans lesdits royaume et marquisat de Bohème et de Moravie, ainsi qu'il est constaté par les lettres écrites de part et d'autre. Nous abrogeons toutes les censures prononcées, et les abolissons pleinement; déclarant par l'autorité de Dieu tout-puissant, des bienheureux apôtres saint Pierre et saint Paul et du sacré concile, que lesdits royaume et marquisat jouiront désormais d'une paix véritable, perpétuelle, ferme, constante et chrétienne, avec les autres peuples chrétiens. Ordonnons par l'autorité ci-dessus, à tous les princes du monde chrétien et à tous autres fidèles de quelque état, condition et dignité qu'ils soient, de garder inviolablement et de bonne foi la paix chrétienne avec lesdits royaume et marquisat, et de ne les point attaquer, offenser, diffamer ou injurier sous prétexte des disputes ci-devant agitées au sujet de quelques difficultés sur des matières de foi et sur les quatre articles (lesquelles difficultés sont maintenant aplanies par la convention ci-devant stipulée), non plus que sous prétexte que les Bohémiens et les Moraviens ont communié par le passé, et continueront dans la suite conformément à ladite convention à communier sous les deux espèces. Voulons qu'on traite avec affection et fraternellement les Bohémiens et les Moraviens, et qu'on les regarde comme bons catholiques, et comme des enfants pleins de respect et d'obéissance pour

 

(a) Les noms paraissent estropiés, ou dans Goldast ou dans l'appendice au concile de Bâle du P. Labbe. Au lieu de Polomar, le P. Labbe lit Polemar, et

ensuite Berruier , au lieu de Bernerius, (Edit. de Leroi.)

 

 

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l'Eglise leur Mère. Déclarons expressément que si quelqu'un enfreint cette ordonnance, il sera puni comme sa faute le mérite, ejt l'on ne regardera pas cette infraction de quelques particuliers comme une rupture de la paix.

Au sujet de la communion sous les deux espèces, nous, ainsi qu'il est stipulé dans les articles, par l'autorité de Jésus-Christ Notre-Seigneur et de l'Eglise sa véritable Epouse, accordons aux Bohémiens et aux Moraviens de l'un et de l'autre sexe (lesquels prouvent par des effets qu'ils embrassent sincèrement la réunion et la paix avec l'Eglise, dont ils suivent la foi et les rits, excepté dans la manière de communier), la permission de communier sous les deux espèces conformément à leur usage ; réservant au saint concile la discussion finale de ce qui est de précepte à cet égard, lequel concile décidera ce que la vérité catholique oblige de croire, et ce qu'on doit observer pour l'utilité et le salut du peuple chrétien.

Après que toutes choses auront été mûrement et solidement discutées, si les peuples desdits royaume et marquisat persistent à désirer de communier sous les deux espèces, le saint concile avant égard à ce que diraiii, leurs ambassadeurs, permettra dans le Seigneur aux piètres de donner la communion sous les deux espèces, pour l'utilité et le salut de ces peuples, à ceux qui la demanderont avec respect et dévotion. Cependant les prêtres auront grand soin de dire à ceux auxquels ils donneront ainsi la communion, qu'ils doivent croire d'une foi ferme, que la chair n'est pas seule sous l'espèce du pain, ni le sang seul sous l'espèce du vin; mais que Jésus-Christ est tout entier sous chaque espèce.

Nous ordonnons, par l'autorité de Jésus-Christ Notre-Seigneur et de l'Eglise sa véritable Epouse, que, selon la teneur de la convention, les Bohémiens et les Moraviens de l'un et de l'autre sexe, lesquels prouvent par des effets qu'ils embrassent sincèrement la réunion et la paix avec l'Eglise, dont ils suivront la foi et les rits, excepté dans la manière de communier, puissent continuer à communier sous les deux espèces : déclarant expressément que par le mot foi, employé ci-dessus et dans la suite, on entend et l'on doit entendre la vérité première, laquelle est le fondement et

 

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la base des autres vérités manifestées dans l'Ecriture sainte, interprétée conformément à la doctrine de l'Eglise : qu'on entend aussi et qu'on doit entendre par ces mots : Rits de l'Eglise universelle, non les rits particuliers qui varient dans les différons lieux, mais ceux qui sont communément et généralement observés dans la célébration des saints mystères. Et après que cette déclaration aura été reçue en général au nom du royaume de Bohême et du marquisat de Moravie, s'il arrive que quelques particuliers ne suivent pas aussitôt, dans la célébration des saints mystères, certains rits universellement observés, cette contravention ne mettra pas obstacle à la paix et à la réunion.

C'est pourquoi nous ordonnons en vertu de la sainte obéissance, aux révérends Pères en Jésus-Christ, l'archevêque de Prague, et les évêques d'Olmutz et de Littomissel, présents et à venir, et à tous et chacun des pasteurs ayant charge d'ames, d'administrer sur la réquisition de ceux à qui il appartient ou appartiendra, le sacrement de l'Eucharistie sous les deux espèces, ainsi qu'il est dit dans la convention, c'est-à-dire à ceux qui sont dans cet usage, et de ne point négliger de le faire administrer de la sorte, partout où la nécessité des peuples le requerra : et qu'aucun ne soit assez téméraire pour agir autrement que le porte la présente ordonnance, ou pour s'opposer à son exécution.

Les étudiants (a) qui auront communié, et qui conformément à la convention voudront dans la suite communier sous les deux espèces, dans la résolution, lorsqu'ils seront parvenus au saint ministère, de donner aux autres la communion de cette sorte, ne pourront pour cette raison être éloignés des saints ordres; et nous voulons que leurs évêques les y élèvent, s'il n'y a point d'autre empêchement canonique. Si quelqu'mi a la témérité d'agir contre cette ordonnance, qu'il soit puni par son supérieur comme sa faute le mérite, afin qu'il connaisse par la sévérité du châtiment, quel crime commettent ceux qui méprisent l'autorité du saint concile gênerai. Nous ordonnons pareillement par ces présentes, à toute personne de quelque état, dignité et condition qu'elle soit, de ne

 

(a) Le mot scholares ne peut être traduit autrement. Il est clair qu'il s'agit ici de ceux qui étudiaient pour se disposer à l'état ecclésiastique. (Edit. de Leroi.)

 

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faire aucun reproche aux Bohémiens et aux Moraviens unis à l'Eglise, qui communient sous les deux espèces en la manière marquée ci-dessus, et de ne point attaquer leur honneur et leur réputation.

Nous voulons que les ambassadeurs desdits royaume et marquisat, qui, comme nous l'espérons de la bonté de Dieu, seront envoyés au saint concile, et tous autres de ce royaume et marquisat qui voudront y venir, aient une pleine liberté de proposer modestement leurs difficultés, tant sur les matières delà foi, des sacrement et des rits ecclésiastiques, que même sur la réformation de l'Eglise dans son Chef et dans ses membres, et l'on fera, sous la direction du Saint-Esprit, ce qui sera juste et raisonnable pour la gloire de Dieu et le règlement de la discipline ecclésiastique.

Nous reconnaissons que dans les Actes passés à Prague, dont l'un commence par ces mots : Hœc sunt responsa, et finit ainsi : Actum per Reverendum in Christo Patrem D. Philibertum; et les autres : Hanc responsionem scriptam, etc. Primo dixerunt, etc., le saint concile n'entend pas permettre la communion sous les deux espèces par simple tolérance, et de la manière que le divorce était permis aux Juifs. Car le saint concile, qui veut donner aux Bohémiens et. aux Moraviens des marques éclatantes de sa grande tendresse, n'a pas intention de leur permettre une chose qu'ils ne pourraient faire sans péché : il leur permet, par l'autorité de Jésus-Christ et de l'Eglise sa véritable Epouse, la communion sous les deux espèces; parce qu'elle est licite, utile et salutaire à ceux qui la reçoivent dignement.

Nous sommes convenus avec le gouverneur, les barons et autres, que les articles de la convention seraient exécutés selon la forme et teneur du présent décret, et d'un autre acte de même genre ; et nous nous en tenons de part et d'autre à ladite forme et teneur. Nous sommes pareillement convenus que, pour autoriser ces actes respectifs, on y apposera, sur la réquisition des parties, les sceaux du sérénissime Empereur et du très-illustre Albert, duc d'Autriche. Nous donnerons un sauf-conduit à ceux qui seront envoyés au saint concile en qualité d'ambassadeurs du royaume de Bohème, semblable à celui par nous ci-devant donné à Matthias, à Procope et à Martin. Nous remettrons aussi une bulle du

 

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saint concile, dans laquelle seront insérés et confirmés les articles de la convention. Nous y ajouterons mie autre bulle dans laquelle notre décret, touchant l'exécution desdits articles, sera inséré et confirmé. Lorsqu'on nous aura mis entre les mains l'acte par lequel le royaume promet obéissance, nous nous engagerons par écrit à faire toute la diligence possible pour obtenir au plus tôt du saint concile les deux bulles ci-dessus mentionnées; et notre écrit sera muni des sceaux du sérénissime Empereur et du très-illustre duc d'Autriche. Nous demandons pareillement un sauf-conduit pour ceux d'entre nous qui voudront aller en Bohême. Philibert, évêque de Coutances ; Jean de Polomar, auditeur de la chambre apostolique; Tilman, prévôt de Saint-Florin, avons donné les présentes pour faire foi de ce que dessus, tant en notre nom qu'au nom de nos collègues absents, dont nous n'avons pas les sceaux ; et nous avons fait apposer les nôtres (a) .

 

(a) Dans un autre exemplaire on lit : En foi de tout ce que dessus, nous avons fait apposer nos sceaux au présent Acte. Et pour plus grande certitude, force et autorité, on y a ajouté sur nos instantes prières, les sceaux du sérénissime Sigismond, Empereur romain, et du très-illustre Albert, duc d'Autriche et marquis de Moravie. Donné à Iglaw, diocèse d'Olmutz, le 5 du mois de juillet 136.


 

OBSERVATIONS DE M. DE LEIBNIZ,

SUR L'ACTE CI-DESSUS RAPPORTÉ.

 

Cette convention fut approuvée par le concile de Bâle, et même par le pape Eugène IV.

Il est surtout remarquable que la question touchant le précepte (savoir s'il est ordonné à tous les chrétiens de communier sous les deux espèces), resta indécise dans l'Acte de convention, et fut renvoyée à la définition du futur concile, quoiqu'on sût fort bien ce que le concile de Constance avait déjà prononcé; ce qu'on fit par ménagement pour les Bohémiens, qui ne reconnaissaient pas l'autorité de ce concile.

 

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Or le souverain Pontife a le même droit aujourd'hui, et peut par conséquent réunir les protestants à l'Eglise catholique romaine, en mettant à l'écart les décrets de Trente, et en renvoyant certains points de controverse au jugement irréfragable du futur concile général, sans avoir égard aux décisions et anathématismes du concile de Trente. Ce moyen paraît le seul propre à extirper le schisme sans violence et sans effusion de sang.

Si le désir de la paix et du salut des âmes d'un seul royaume, ou plutôt d'une partie d'un royaume, fut autrefois un motif assez puissant pour engager à une telle condescendance, combien est-il plus juste d'en user aujourd'hui de même avec les protestants, qui remplissent tant de royaumes et une partie considérable de l'Europe, qui peuvent opposer presque tout le Nord à la partie plus méridionale de l'Europe, et la plupart des nations germaniques aux peuples latins ? Il n'est, ce semble, ni juste ni utile de vouloir décider sans eux des points qui intéressent l'Eglise universelle. Si l'on veut parvenir à une paix solide, il serait beaucoup plus sage de prendre pour modèle la conduite d'Eugène IV, dont on vient de parler. Ce pape, loin de rejeter avec hauteur les Grecs tant de fois condamnés en Occident, et qui réduits à une extrême misère, venaient alors en qualité de suppliants chercher auprès de lui quelque ressource, n'exigea pas même qu'ils se soumissent aux décrets des conciles auxquels ils n'avaient point eu de part, mais les admit en qualité de juges dans le concile de Florence.

 

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