DÉNOMBREMENT
DE QUELQUES HÉRÉSIES.
Plusieurs qui se sont trouvés
embarrassés des hérésies tant de fois nommées dans l'Histoire des Variations,
et dans les Avertissements, comme dans les autres livres de controverses,
m'en ont demandé l'explication; et c'est pour les satisfaire que j'en fais cette
description grossière, mais suffisante pour leur instruction.
Les marcionites et les
manichéens croient deux premiers principes indépendants, l'un du bien et l'autre
du mal; l'un créateur du monde corporel, l'autre des esprits ; l'un du corps,
l'autre de l’âme; l'un auteur de l'Ancien Testament, l'autre du Nouveau; le
corps de Jésus-Christ fantastique, et le mariage mauvais; le vin et beaucoup de
viandes mauvaises par leur nature, etc.
Les paulianistes et photiniens
croient Jésus-Christ un homme pur, et nient sa préexistence avant sa conception
dans le sein de la Vierge : Paul de Samosate, patriarche d'Antioche, et Photin,
évêque de Sirmich, sont en divers temps les chefs de cette hérésie. Cérinthus,
Ebion et d'autres avaient enseigné la même doctrine.
Novatien refusait à l'Eglise le
pouvoir de remettre les péchés.
Les donatistes
rejetaient le baptême donné par les hérétiques même dans la forme légitime, et
croyaient que l'Eglise périssait par les vices de ses ministres.
Arius, prêtre d'Alexandrie, et
les ariens niaient la divinité de Jésus-Christ.
Macédonius, patriarche de
Constantinople, niait celle du Saint-Esprit.
Le premier est condamné au
concile de Nicée, et le second dans le concile de Constantinople.
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Nestorius, patriarche de
Constantinople, divisait la personne de Jésus-Christ, et niait que Dieu et
l'homme fussent en lui une seule et même personne, ce qui l'obligeait à nier que
la sainte Vierge fût mère de Dieu. Il est condamné dans le concile d'Ephèse,
troisième général ou œcuménique.
Eutychès, abbé de
Constantinople, confondait les deux natures de Jésus-Christ, et disait qu'il ne
s'était fait qu'une seule et même nature de sa nature divine et de l'humaine :
lui et Dioscore, patriarche d'Alexandrie, qui le soutenait, furent condamnés au
concile de Chalcédoine, quatrième général.
Aërius, prêtre arien, rejetait
l'épiscopat, la prière pour les morts, et les jeûnes réglés, et quelques autres
observances de l'Eglise, et il ajoutait ces erreurs à l'arianisme.
Pélage et les pélagiens niaient
le péché originel et ne reconnaissaient pas la nécessité de la grâce intérieure.
Les demi-pélagiens, sans auteur certain, confessaient le péché originel, et ne
niaient pas la nécessité de la grâce pour accomplir l'œuvre de notre salut ;
mais ils disaient qu'elle se donnait selon les mérites précédents, et que
l'homme commençait son salut de lui-même, sans la grâce. Les pélagiens et
demi-pélagiens sont condamnés par divers conciles particuliers, tenus à Milévi,
à Carthage, à Orange, etc., approuvés par les papes saint Innocent, saint Zozime,
saint Célestin et saint Léon.
Vigilance, réfuté par saint
Jérôme, rejetait l'invocation des Saints et le culte de leurs reliques. Son
hérésie s'est dissipée d'elle-même.
Les iconoclastes
ou briseurs d'images ôtaient aux images de Jésus-Christ, de sa Sainte Mère et
des Saints, le culte relatif et les brisaient, selon leur nom. Ils furent
condamnés au concile de Nicée II, septième général.
Bérenger niait
la présence réelle et la transsubstantiation. Il est condamne par divers
conciles, et par les papes Nicolas II et Grégoire VII.
Les albigeois
renouvelaient les erreurs des manichéens, et les vaudois celles de Vigilance et
d'Aërius, que les albigeois suivaient aussi. Tous niaient la primauté de
l'Eglise romaine, qu'ils tenaient
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pour le siège de l'Antéchrist. Ils sont condamnés par
divers conciles provinciaux et généraux, surtout par ceux de Latran II et IV.
Jean Wiclef enseignait la même
erreur, et niait la transsubstantiation. Ses erreurs, au nombre de
quarante-cinq, ont été condamnées au concile de Constance.
Jean Hus, condamné au même
concile, blâmait la soustraction de la coupe, Wiclef et lui soutenaient qu'on
perdait toute dignité ecclésiastique et temporelle en perdant la grâce, et que
les sacrements perdaient leur vertu entre les mains des pécheurs; ce que les
albigeois et les vaudois croyaient aussi.
Les bohémiens étaient disciples
de Jean Hus, et se partageaient en diverses sectes.
Luther, entre autres erreurs,
niait le changement du pain au corps.
Calvin niait la présence réelle
; et l'un et l'autre renouvelaient les erreurs de Vigilance, d'Aérius, des
iconoclastes, avec beaucoup d'autres.
Les ubiquitaires croient
Jésus-Christ présent partout, selon la nature humaine : ils font le gros des
luthériens.
Lelio et Fauste Socin, italiens,
sont chefs des sociniens, qui ont ramassé toutes les erreurs : celles de Paul de
Samosate, celles de Pelage, celles d'Aérius et de Vigilance ; celles de
Bérenger, avec une infinité d'autres. Ils nient l'éternité des peines d'enfer,
etc.
Arminius et les arminiens ont
été séparés des calvinistes, et sont condamnés au synode de Dordrecth,
principalement pour avoir nié la certitude du salut et l'inamissibilité de la
justice. Ils sont fort suspects de socinianisme, et comme les sociniens, ils
penchent à l'indifférence des religions.
Les tolérants répandus dans tout
le parti protestant, sont de même avis, et soutiennent que le magistrat n'a pas
pouvoir de punir les hérétiques.
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