II Exorde Dim. Q. II
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SECOND EXORDE
POUR
LE SERMON PRÉCÉDENT.

 

Cogitavi vias meas, et converti pedes meos in testimonia tua.

 

J'ai étudié mes voies, et enfin j'ai  tourné mes pas du côté de vos témoignages. Psal. CXVIII. 19.

 

Si nos actions sont mal composées, s'il nous arrive presque tous les jours ou de nous tromper dans nos jugements, ou de nous égarer dans notre conduite, l'expérience nous fait connaître que la cause de ce malheur, c'est que nous ne délibérons pas assez posément de ce que nous avons à faire, c'est que nous nous laissons emporter aux objets qui se présentent. Une ardeur inconsidérée nous jette bien avant dans l'action, avant que nous en ayons assez remarqué et les suites et les circonstances; si bien qu'un conseil peu rassis produisant des résolutions trop précipitées, il arrive (a) ordinairement que nous errons deçà et delà, plutôt que de marcher dans la droite voie. Ce grand et victorieux monarque dont j'ai aujourd'hui emprunté mon texte, s'est bien éloigné de ces deux défauts, et il est aisé de le remarquer par les paroles que j'ai rapportées : « Il a, dit-il, étudié ses voies; » il a délivré son esprit de toutes préoccupations étrangères, il a médité sérieusement où il devait porter ses inclinations : Cogitavi vias meas. Voilà une délibération bien posée; après quoi je ne m'étonne pas s'il a pris le meilleur parti et s'il nous dit que le résultat de cette importante consultation a été de « tourner ses pas du côté de la loi de Dieu : » Et converti pedes meos in testimonia tua. Si tous les hommes délibéraient aussi soigneusement que David sur cette matière si nécessaire, je me persuade, mes sœurs, qu'ils prendraient fort facilement une résolution semblable ; et étant convaincu de ce sentiment, j'ai cru que cet entretien particulier que vous avez désiré de moi contenterait vos pieux désirs, si je

 

(a) Var.: Il se voit.

 

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recherchais les raisons sur lesquelles David a pu appuyer cette résolution si bien digérée.

Dans cette consultation importante où il s'agit de déterminer du point capital de la vie et de se résoudre pour jamais sur les devoirs essentiels de l'homme chrétien, je me représente que venu tout nouvellement d'une terre inconnue et déserte, ignorant des choses humaines, je découvre d'une même vue tous les emplois, tous les exercices, toutes les occupations différentes qui partagent en tant de soins les enfants d'Adam dans ce laborieux pèlerinage. O Dieu éternel, quel tracas ! quel mélange de choses! quelle étrange confusion! et qui pourrait ne s'étonner pas d'une diversité si prodigieuse ! La guerre, le cabinet, le gouvernement, la judicature et les lettres, le trafic et l'agriculture, en combien d'ouvrages divers ont-ils divisé les esprits? Mais si je descends au détail, si je regarde de près les secrets ressorts qui font mouvoir les inclinations, c'est là qu'il se présente à mes yeux une variété (a) bien plus étonnante. Celui-là est possédé de folles amours, celui-ci de haines cruelles et d'inimitiés implacables, et cet autre de jalousies furieuses. L'un amasse, et l'autre dépense. Quelques-uns sont ambitieux et recherchent avec ardeur les emplois publics, et les autres plus retenus se plaisent dans le repos de la vie privée; l'un aime les exercices durs et violents, l'autre les secrètes intrigues; et quand aurais-je fini ce discours, si j'entreprenais de vous raconter toutes ces mœurs différentes et ces humeurs incompatibles? Chacun veut être fou à sa fantaisie; les inclinations sont plus dissemblables que les visages; et la mer n'a pas plus de vagues, quand elle est agitée par les vents, qu'il ne naît de pensées différentes de cet abîme sans fond et de ce secret impénétrable du cœur de l'homme.

Dans cette infinie multiplicité de désirs et d'occupations, je reste interdit et confus, je me regarde, je me considère : que ferai-je? où me tournerai-je? Cogitavi vias meas. Certes, dis-je incontinent en moi-même, les autres animaux semblent ou se conduire ou être conduits d'une manière plus réglée et plus uniforme. D'où vient dans les choses humaines une telle inégalité,

 

(a) Var. : Diversité, — multiplicité,

 

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ou plutôt une telle bizarrerie? Est-ce là ce divin animal dont on dit de si grandes choses? Cette âme d'une vigueur immortelle n’est-elle pas capable de quelque opération plus sublime et qui ressente mieux le lieu d'où elle est sortie? Toutes les occupations que je vois me semblent ou serviles, ou vaines, ou folles, ou criminelles : « Tout y est vanité et affliction d'esprit (1) » disait le plus sage des hommes. Ne paraîtra-t-il rien à ma vue qui soit digne d'une créature faite à l'image de Dieu? Cogitavi vias meas: je cherche, je médite, j'étudie mes voies; et pendant que je suis dans le doute, Dieu me montre sa loi et ses témoignages, il m'invite à prendre parti dans le nombre de ses serviteurs. En effet leur conduite me paraît plus égale, et leur contenance plus sage, et leurs mœurs bien mieux ordonnées ; mais le nombre en est si petit, qu'à peine paraissent-ils dans le monde. Davantage (a), pour l'ordinaire je ne les vois pas dans les grandes places; souvent même ceux qui les oppriment vont dans le monde la tête levée au milieu des applaudissements de toutes les conditions et de tous les âges, et c'est ce qui me jette dans de nouvelles perplexités. Suivrai-je le grand ou le petit nombre? les sages ou les heureux? ceux qui ont la faveur publique ou ceux qui sont satisfaits du témoignage de leur conscience ? Cogitavi vias meas. Mais enfin après plusieurs doutes, voici ce qui décide en dernier ressort et tranche la difficulté jusqu'au fond : je suis né dans une profonde ignorance, j'ai été comme exposé en ce monde sans savoir ce qu'il y faut faire; et nonobstant cette incertitude, je suis engagé nécessairement à un long et pénible voyage ; c'est le voyage de cette vie, dont presque toutes les routes me sont inconnues. Aveugle que je suis, que ferai-je, si quelque bonne fortune ne me fait trouver un guide fidèle qui régisse mes pas errons et conduise mon âme mal assurée? C'est la première chose qui m'est nécessaire (b).

 

1 Eccle., I, 14.

(a) Pour : De plus. — (b) Mais je n'ai pas seulement..... (La fin comme  au sermon précédent, pag. 467 et suiv.)

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