Elév. Semaine XXIV
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XXIVe SEMAINE.
SUITE  DU   TÉMOIGNAGE 
DE  SAINT JEAN-BAPTISTE.

 

XXIVe SEMAINE.  SUITE  DU   TÉMOIGNAGE   DE  SAINT JEAN-BAPTISTE.

PREMIÈRE ÉLÉVATION.  Jean déclare qu'il n'était rien de ce qu'on pensait.

IIe ÉLÉVATION.  Saint Jean appelle Jésus l'Agneau de Dieu.

IIIe ÉLÉVATION.  Jean fait souvenir le peuple de la manière dont il avait annoncé et  connu Jésus - Christ.

IVe ÉLÉVATION.  Saint Jean appelle encore une fois Jésus-Christ l’ Agneau de Dieu : et ses disciples le quittent pour le Fils de Dieu.

Ve ÉLÉVATION.  Saint André amène saint Pierre à Jésus-Christ.

VIe ÉLÉVATION.  Vocation de saint Philippe : Nathanaël amené à Jésus-Christ.

VIIe ÉLÉVATION.  Jésus-Christ se fait connaître par lui-même aux noces de Cana en Galilée.

VIIIe ÉLÉVATION.  Jésus-Christ baptise en même temps que  saint Jean. Nouveau témoignage de saint Jean, à cette occasion, lorsqu'il appelle Jésus-Christ l’Epoux.

IXe ÉLÉVATION.  Suite du témoignage de saint Jean : sa diminution et l'exaltation de Jésus-Christ.

Xe ÉLÉVATION.  Autre caractère de Jésus-Christ découvert par saint Jean.

XIe ÉLÉVATION.  Saint Jean explique l'amour de Dieu pour son Fils.

XIIe ÉLÉVATION.  La récompense et  la peine  de ceux qui ne croient point   au Fils. Conformité du témoignage de saint Jean avec celui de Jésus-Christ.

 

 

PREMIÈRE ÉLÉVATION.
Jean déclare qu'il n'était rien de ce qu'on pensait.

 

Après les merveilles qui parurent au baptême de Jésus-Christ, il y a sujet de s'étonner qu'il disparaisse tout d'un coup pour s'enfoncer dans le désert durant quarante jours et autant de nuits. Après cela il revint et commença de prêcher. Pendant sa retraite dans le désert et après, Jean continuait à lui rendre témoignage. Et ce fut alors que Jérusalem étonnée de la prédication du saint Précurseur, lui députa pour ainsi dire dans les formes des prêtres et des lévites du nombre des pharisiens, qui l'interrogèrent juridiquement : «Qui êtes-vous, » lui dirent-ils? Car ils en avaient conçu une si haute opinion, qu'ils ne crurent rien moins de lui, sinon qu'il était le Christ; mais « il confessa, et ne le nia pas, et il confessa qu'il n'était point le Christ (1). » Cette façon de parler de l'évangéliste fait entendre qu'il prenait plaisir à le répéter. Moi le Christ! Je ne le suis pas : non, encore un coup je ne le suis pas. « Quoi donc ! Etes-vous Elie? Non, » dit-il. Qu'il aime à dire ce qu'il n'est pas et à se réduire dans le néant ! « Etes-vous prophète ? Non : » toujours non, et toujours non : ce n'est qu'un non partout ; et Jean n'est rien à ses yeux. Il est pourtant « prophète, et plus que prophète (2), » et le plus excellent de tous les prophètes : « il est Elie » en vertu : et quoiqu'il ne le soit pas en personne, il est plus qu'Elie, puisque par la sentence de Jésus-Christ, « il est plus grand que tous les prophètes. » Et quoiqu'il soit si excellent, il n'est rien : il n'a rien à dire de lui-même. Il prend le côté qui

 

1 Joan., I, 19, 20, 21. — 2 Matth., XI, 9, 10, 14.

 

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est contre lui : car en effet il n'est pas prophète comme les autres, pour prédire le Christ à venir, lui qui devait le montrer présent. « Oui êtes-vous donc (1) ? » Il faut parler : car ceux que l'on vous envoie doivent rendre compte au sénat de Jérusalem qui les avait députés à Jean : « Je suis la voix de celui qui crie. » Qu'est-ce qu'une voix? Un souffle qui se perd en l'air : je suis une voix, un cri, si vous le voulez : saint Jean s'exténue jusque-là. On en vient à tourner contre lui toutes ses réponses : « Pourquoi donc baptisez-vous, si vous n'êtes ni le Christ, ni Elie, ni prophète (2)? Je baptise, » il est vrai, « mais dans l'eau : » je ne fais que jeter sur les têtes pénitentes une eau stérile, et plonger les corps dans une rivière : « Mais il y en a un au milieu de vous que vous ne connaissez pas. » Le voilà donc encore une fois au-dessous des pieds de Jésus, « indigne de lui dénouer le cordon de ses souliers (3). » Comme il se baigne dans l'humilité et dans le néant! Non, non, non, dit-il toujours. Faut-il dire quelque chose, ce n'est qu'une voix sans corps et sans consistance. Quelque grand qu'on soit, l'humilité qui ne peut mentir, ne laisse pas de trouver moyen d'anéantir tous ses avantages. Apprenons à dire : Non, mais sincèrement, lorsqu'on nous loue, sans exagération, sans emphase, sans trop d'effort. Car souvent tout cet effort est un artifice pour nous attirer des louanges, ou du moins de l'attention du côté des hommes. L'humilité ne songe point à s'étaler. Un simple non, sec et court, qui détruit tout, lui suffit, parce que ce non dans sa sécheresse et dans sa brièveté cache tout, fait tout disparaître, jusqu'à l'humilité même.

 

IIe ÉLÉVATION.
Saint Jean appelle Jésus l'Agneau de Dieu.

 

«Ceci,» ce qu'on vient d'entendre, a se passa en Béthanie, au delà du Jourdain, où Jean donnait le baptême. Le lendemain Jean vit Jésus qui venait à lui et il dit : Voilà l'Agneau de Dieu, voilà

 

1 Joan., I, 22, 23.— 2 Ibid., 21, 28, — 3 Ibid., 27.

 

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celui qui ôte les péchés du monde (1). » Il faut bien entendre ce témoignage de saint Jean-Baptiste, où il découvre un grand secret de Jésus-Christ. Il le vit donc venir à lui : car il continua l'acte d'humilité qu'il avait fait, lorsque Jean étonné de son abaissement, s'écria : « Je dois être baptisé par vous, et vous venez à moi ! » Mais il fallait que Jésus honorât Jean, qui lui rendait témoignage , et qu'il confirmât sa mission en allant à lui. Car si Jean devait faire connaître Jésus, Jésus aussi le devait faire connaître en son temps, d'une manière bien plus haute; et c'est un des mystères compris sous cette parole : « Laissez-moi faire ; car c'est ainsi que nous devons accomplir toute justice (2), » c'est-à-dire nous rendre l'un à l'autre le témoignage mutuel que nous nous devons. Jean donc voyant Jésus venir à lui encore une fois, le montra à tout le peuple en disant : « Voilà l'Agneau de Dieu : voilà celui qui ôte le péché du monde (3). » Tous les jours, soir et matin, on immolait dans le temple un agneau, et c'était là ce qu'on appelait le «sacrifice continu (4) » ou perpétuel. Ce fut ce qui donna occasion à Jean de prononcer les paroles qu'on vient d'entendre : peut-être même que Jésus s'approcha de lui à l'heure où tout le peuple savait qu'on offrait ce sacrifice. Quoi qu'il en soit, dans ce témoignage qu'il rend au Sauveur, lui qui l'avait fait connaître comme « le Fils unique dans le sein du Père (5) » dont il venait déclarer les profondeurs, le fait connaître aujourd'hui comme la victime du monde. Ne croyez pas que cet agneau qu'on offre soir et matin en sacrifice perpétuel, soit le vrai agneau, la vraie victime de Dieu : voilà celui qui s'est mis « en entrant au monde à la place de toutes les victimes (6) : » c'est aussi celui qui esl la victime publique du genre humain, et qui seul peut expier et ôter ce grand péché qui est la source de tous les autres, et qui pour cela peut être appelé « le péché «lu monde, » c'est-à-dire le péché d'Adam, qui est celui de tout l'univers. Mais en ôtant ce péché , il ôte aussi tous les autres. Venez à lui, petits et grands, comme è celui qui vous purifie de tous vos péchés. «Car nous

 

1 Joan., I, 28, 29. — 2 Matth., III, 15. — 3 Joan., I, 29. — 4 Exod., XXIX, 38, 39 et seq. ;  Numer., XXVIII, 3, 4 et seq. — 5 Joan., I, 14, 18. — 6 Psal., XXXIX, 7, 8 ; Hebr., X, 5-7

 

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n'avons point été rachetés de nos erreurs par or ni par argent ; mais par le sang innocent de Jésus-Christ comme d'un agneau sans tache, prévu et prédestiné devant tous les temps et déclaré dans nos jours (1). » Baptisons-nous donc dans ce sang : je m'y suis baptisé moi-même, et dès le sein de ma mère j'en ai senti la vertu : je le montre donc aux autres, moi qui l'ai connu le premier : regardez-le cet Agneau de Dieu, qu'Isaïe a vu en esprit, lorsqu'il le représenta comme « l'agneau qui se laissera non-seulement tondre, mais » écorcher, pour ainsi parler, « et immoler sans se plaindre (2) : » que Jérémie voyait et représentait en sa personne , lorsqu'il dit : « Je suis comme un agneau innocent qu'on porte au sacrifice (3). » Le voilà cet Agneau si doux, si simple, si patient, sans artifice, sans tromperie, qui sera immolé pour tous les pécheurs. Il a déjà été immolé en figure, et on peut dire en vérité qu'il « a été tué et mis à mort dès l'origine du monde (4). » Il a été massacré en Abel le juste : quand Abraham voulut sacrifier son fils, il commença en figure ce qui devait être achevé en Jésus-Christ. On voit aussi s'accomplir en lui ce que commencèrent les frères de Joseph : Jésus a été haï, persécuté, poursuivi à mort par ses frères : il a été vendu en la personne de Joseph, jeté dans une citerne, c'est-à-dire livré à la mort : il a été avec Jérémie dans le lac profond, avec les enfants dans la fournaise, avec Daniel dans la fosse aux lions. C'était lui qu'on immolait en esprit dans tous les sacrifices. Il était dans le sacrifice que Noé offrit en sortant de l'arche, lorsqu'il vit dans l'arc-en-ciel le sacrement de la paix ; dans ceux que les patriarches offrirent sur les montagnes, dans ceux que Moïse et toute la loi offrait dans le tabernacle et ensuite dans le temple : et n'ayant jamais cessé d'être immolé en figure, il vient maintenant l'être en vérité.

En le voyant donc comme «l'agneau de Dieu, » saint Jean le voyait déjà comme nageant dans son sang. Nous l'avons en cet état dans l'Eucharistie : et encore que son sang n'y soit plus répandu avec violence, il y ruisselle dans le calice, il y coule dans nos corps et dans nos cœurs. Plongeons-nous dans le sang de cet

 

1 I Petr., I, 18, 19, 20. — 2 Isa., LIII, 7. — 3 Jerem., XI, 19.— 4 Apocal., XIII, 8.

 

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agneau : « portons ses plaies et sa mortification en nos corps (1) : » toujours tué, toujours immolé, il veut encore l'être en nous comme dans ses membres.

 

IIIe ÉLÉVATION.
Jean fait souvenir le peuple de la manière dont il avait annoncé et  connu Jésus - Christ.

 

Saint Jean avait toujours dit, avant même que Jésus-Christ parût au monde, « qu'il y avait quelqu'un dans le monde dont il n'était pas digne de toucher les pieds (2) ; » à qui son baptême « pré-paraît la voie , » et n'était qu'un préparatoire ; si l'on veut, un préliminaire d'un meilleur baptême que Jésus-Christ devait donner. Saint Jean répète ce témoignage, et fait ressouvenir le peuple de la marque miraculeuse de la colombe mystique à laquelle il l'avait connu (3). Souvenons-nous donc de cette marque et de tout ce qui parut ensuite dans le baptême de Jésus-Christ. Car c'est là primitivement que fut accomplie cette parole de Jésus-Christ : « Travaillez à la nourriture que le Fils de l'homme vous doit donner : car son Père l'a marqué de son sceau (4), » l'a désigné, caractérisé, en sorte qu'on ne puisse plus le méconnaître. Souvenons-nous donc du caractère sacré de Jésus-Christ, des cieux ouverts, de la colombe descendue et de la voix qui fut ouïe sur le Jourdain : « Portons nous-mêmes le caractère de Jésus-Christ (5) : » qu'il soit l'objet de nos complaisances, comme il l'est de celles de son Père : « Entrons avec lui dans l'eau du baptême (6) : » renouvelons les promesses du nôtre; et demeurons éternellement dévoués à la pénitence.

 

1 II Cor., VI, 9, 10. — 2 Matth., III, 11 ; Marc., I, 7; Joan., I, 23, 31. — 3 Ibid., VI, 27. — 4 I Cor., XV, 49. — 5 Galat., III, 27; Rom., VI, 4-6

 

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IVe ÉLÉVATION.
Saint Jean appelle encore une fois Jésus-Christ l’ Agneau de Dieu : et ses disciples le quittent pour le Fils de Dieu.

 

« Le lendemain Jean était avec deux de ses disciples ; et regardant marcher Jésus » apparemment encore pour venir à lui : « Voilà l'Agneau de Dieu ; et ces deux disciples l'entendirent comme il parlait ainsi, et ils suivirent Jésus (1).» Le temps que Jean devait demeurer en liberté était court et il multiplie, comme on voit, coup sur coup son témoignage. «Voici, dit-il encore une fois, l'Agneau de Dieu : » et à l'instant deux de ses disciples se détachèrent de lui pour s'attacher à Jésus. Voilà donc Jésus devenu le maître des disciples de saint Jean : et on voit comment il lui préparait  la voie.

« Pendant qu'ils le suivaient, Jésus leur dit : Que cherchez-vous? Et ils répondirent : Maître, où demeurez-vous (2)?» Car ils voulaient tout à fait se donner à lui. « Et Jésus leur dit : Venez et voyez : » n'en croyez plus personne : venez et voyez vous-mêmes : car quand on vient et qu'on veut voir de bonne foi, on connaît bientôt. « Ils suivirent donc Jésus : ils virent où il demeurait, et ils passèrent avec lui le reste du jour : et il était environ la dixième heure du jour. » On conjecture de là que c'était à la fin de la journée, et à peu près le temps qu'on offrait le sacrifice du soir : ce qui donna une nouvelle occasion à Jean de répéter : « Voilà l'Agneau de Dieu (3). »

Allons donc à Jésus avec ces disciples à l'heure de l'immolation : voyons nous-mêmes où Jésus habite : et non contents de le voir par une stérile spéculation, achevons avec lui la journée. Heureuse journée, heureuse nuit, que l'on passe avec Jésus-Christ dans sa maison! Seigneur, où habitez-vous? « Dites-moi, céleste Epoux, où vous habitez, afin que j'y (4)» aille aussi fixer ma demeure, et que mon âme errante et vagabonde «n'aille pas courir deçà et delà » avec d'autres que vous : car je ne veux point m'y

 

1 Joan., I, 35-37. — 2 Ibid., 38, 39. — 3 Ibid., 29. — 4 Cant., I, 6.

 

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arrêter, quoique peut-être ils se disent ou qu'ils soient «vos compagnons : » je ne veux m'attacher qu'à vous; et vos compagnons, même ceux qui marchent avec vous, me détourneraient de ma voie, si j'avais de l'attache pour eux. « O venez ! ô voyez! ô demeurez! » Que ces paroles sont douces, et qu'il est doux de savoir où Jésus habite !

 

Ve ÉLÉVATION.
Saint André amène saint Pierre à Jésus-Christ.

 

« Un des deux disciples qui avaient ouï ce témoignage de Jean et qui avaient suivi Jésus, était André, frère de Simon Pierre. Il rencontra premièrement son frère, et il lui dit : Nous avons trouvé le Messie, c'est-à-dire l'Oint et le Christ : et il l’amena à Jésus. Et Jésus » qui le connut au premier abord et savait à quoi il le destinait, « lui dit en le regardant : Vous êtes Simon, fils de Jonas : vous serez appelé Céphas, c'est-à-dire Pierre (1). » Il commence à former son Eglise et il en désigne le fondement : « vous vous appellerez Pierre : » vous serez cet immuable rocher sur lequel je bâtirai mon Eglise. Quand un Dieu nomme, l'effet suit le nom : il se fit sans doute quelque chose dans saint Pierre à ce moment , mais qui n'est pas encore déclaré et qui se découvrira dans la suite. Car tout ceci n'était encore qu'un commencement : ni saint Pierre ne suivit entièrement Jésus-Christ, ni saint André ne demeura alors avec lui qu'un jour. Il suffit que nous entendions que les préparations s'achèvent, et que le grand ouvrage se commence, puisque les disciples de Jean profitent de son témoignage pour reconnaître Jésus, et lui amener d'autres disciples.

Quand nous trouvons la vérité , ne la trouvons pas pour nous-mêmes : montrons-la aux autres, en commençant par nos plus proches, comme saint André par son frère : soyons fidèles: nous ne savons pas qui nous amenons à Jésus : nous croyons lui amener un simple Adèle : mais celui que nous lui amenons est un Pierre : c'est le chef, c'est le fondement de son Eglise.

 

1 Joan., I, 40-42.

 

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VIe ÉLÉVATION.
Vocation de saint Philippe : Nathanaël amené à Jésus-Christ.

 

« Le lendemain (1) : » ce n'est pas inutilement que la suite des jours est si bien marquée : l'évangéliste veut que l'on entende le prompt et manifeste progrès de l'œuvre de Dieu, et le fruit des préparations de saint Jean-Baptiste. « Le lendemain donc Jésus voulut aller en Galilée, et il rencontra Philippe, et lui dit : Suivez-moi (2). » Il n'attend pas que celui-ci le cherche : il le prévient. L'évangéliste remarque que «Philippe était de Béthsaïda, d'où étaient aussi André et Pierre, » pour nous faire entendre qu'ils se connaissaient les uns les autres et s'entrecommuniquaient leur honneur. Car Philippe fit part du sien à Nathanaël qu'il trouva: « et lui dit : Nous avons trouvé celui que Moïse et la loi et les prophètes nous ont annoncé, Jésus de Nazareth, fils de Joseph (3). Et Nathanaël, « qu'on croit être saint Barthélemi, » lui répondit : Peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ? Philippe lui dit: Venez et voyez (4). » Ils s'amènent les uns les autres, mais à condition qu'ils s'instruiraient par eux-mêmes. Soyons comme eux attentifs à l'œuvre de Dieu : allons et voyons : ne nous en tenons pas si absolument à nos conducteurs, que nous n'éprouvions par nous-mêmes et ne goûtions Jésus-Christ, afin de lui pouvoir dire comme faisaient les Samaritains à cette femme : « Nous ne croyons plus maintenant sur votre récit, et nous avons connu par nous-mêmes que celui-ci est vraiment le Sauveur du monde (5). » Aussi cette femme leur avait-elle dit comme les autres : « Venez et voyez : et ils étaient venus, et ils avaient vu, et ils avaient invité le Sauveur de demeurer dans leur ville, et il y demeura deux jours (6), » et ils reconnurent le Sauveur du monde. Jean avait tout mis en mouvement, et il avait réveillé le monde sur le sujet de son Sauveur : le bruit s'en était répandu de tous côtés; et la femme

 

1 Joan., I, 43. — 2 Ibid., 44. — 3 Ibid., 45. — 4 Ibid., 46. — 5 Ibid., IV, 42. —  6 Ibid., 29, 42.

 

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samaritaine elle-même avait dit : « Je sais que le Christ vient : » il va paraître, « et nous apprendra toutes choses (1) : » tant on était attentif à sa venue.

 

VIIe ÉLÉVATION.
Jésus-Christ se fait connaître par lui-même aux noces de Cana en Galilée.

 

« Trois jours après on faisait des noces à Cana en Galilée, et la mère de Jésus y était, et Jésus y fut aussi convié (2). » Ce passage ne regarde point saint Jean-Baptiste, et appartient aux mystères de Jésus-Christ même : ainsi nous en traiterons ailleurs, et ici nous voulons seulement montrer combien saint Jean est attentif à marquer la suite des jours. On voit qu'il voulait lier la manifestation de Jésus à ces noces avec les témoignages de saint Jean. « Ceci, » dit-il, la députation à saint Jean et sa réponse, a était arrivé en Béthanie (3). Et le lendemain (4).... Et le lendemain (5).... Et le lendemain (6)... Et encore le lendemain (7). Et trois jours après il se fit des noces (8). » Tout cela est lié ensemble dans l'ordre des jours : et on voit que l'évangéliste saint Jean nous veut faire suivre la manifestation de Jésus-Christ, premièrement par saint Jean-Baptiste, et ensuite par Jésus-Christ lui-même. C'est pourquoi il est écrit à la fin : « Ce fut ici le commencement des miracles de Jésus; et il manifesta sa gloire (par lui-même); et ses disciples crurent en lui (9), » non plus seulement par le témoignage de saint Jean-Baptiste, mais par lui-même et par les effets de sa puissance. Aussi ne voyons-nous pas que l'évangéliste s'attache depuis à marquer les jours; et il continue son histoire sans l'observer davantage. « Après cela, dit-il, il vint à Capharnaüm, où il demeura peu de jours (10). Et après cela Jésus et ses disciples vinrent en Judée (11), » etc. Méditons tout : dans l'Ecriture tout a son dessein et son mystère; et s'il n'est pas toujours entièrement expliqué, c'est que Dieu veut qu'on le cherche.

 

1 Joan., IV, 25 — 2 Ibid., II, 1. — 3 Ibid., I, 28. — 4 Ibid., 29. — 5 Ibid., 35. — 6 Ibid., 41. — 7 Ibid., 43. — 8 Ibid., II, 1.— 9 Ibid., 11.— 10 Ibid., 12.— 11 Ibid., III, 22.

 

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VIIIe ÉLÉVATION.
Jésus-Christ baptise en même temps que  saint Jean. Nouveau témoignage de saint Jean, à cette occasion, lorsqu'il appelle Jésus-Christ l’Epoux.

 

Voici une autre sorte de témoignage de Jean. Pendant que Jésus et lui baptisent tous deux ensemble dans la Judée, et qu'on allait à l'un et à l'autre, « il s'éleva une question entre les disciples de Jean et les Juifs sur la purification, » c'est-à-dire sur le baptême. « Et les disciples de Jean lui vinrent dire : Maître, celui qui était avec vous au delà du Jourdain et à qui vous avez rendu témoignage, baptise et tout le monde va à lui (1). » Ils croyaient qu'étant venu lui-même à Jean pour s'en faire baptiser, on ne devait pas quitter Jean pour lui. Dieu permit cette dispute et cette espèce de jalousie des disciples de saint Jean-Baptiste, pour donner lieu à cette instruction admirable du saint précurseur : « L'homme ne peut rien avoir qui ne lui soit donné du Ciel (2). » Dans cette règle admirable, qu'il pose pour fondement, est la mort de l'amour-propre et de la propre élévation. L'amour-propre, à quelque prix que ce soit et indépendamment de toute autre chose, ne songe qu'à s'élever ; mais l'amour de Dieu toujours humble, mesure son élévation à la volonté de Dieu, et ne voudrait pas même s'élever si Dieu ne le voulait : toute autre élévation lui deviendrait non-seulement suspecte, mais encore odieuse. Sur ce fondement saint Jean continue : « Vous me rendez vous-mêmes témoignage que j'ai dit : Je ne suis pas le Christ, mais je suis envoyé devant lui : celui qui a l'épouse est l'époux : mais l'ami de l'Epoux qui est présent et qui l'écoute, est transporté de joie par la voix de l'Epoux, et c'est par là que ma joie s'accomplit (5). »

Qui pourrait entendre la suavité de ces dernières paroles? Saint Jean nous y découvre un nouveau caractère de Jésus-Christ, le plus tendre et le plus doux de tous : c'est qu'il est l'Epoux : il a épousé la nature humaine qui lui était étrangère ; il en a fait un

 

1 Joan., III, 22-26 et seq. — 2 Ibid, III, 27. — 3 Ibid., 28, 29.

 

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même tout avec lui : en elle il a épousé sa sainte Eglise, épouse immortelle qui n'a ni tache ni ride : il a épousé les âmes saintes qu'il appelle à la société, non-seulement de son royaume, mais de sa royale couche, les comblant de dons, de chastes délices ; jouissant d'elles, se donnant à elles; leur donnant non-seulement tout ce qu'il a, mais encore tout ce qu'il est, son corps, son âme, sa divinité ; et leur préparant dans la vie future une union incomparablement plus grande. Voilà donc comme « il est l'époux, » comme « il a l'épouse : je vous ai, dit-il, épousée en foi (1) : » donnez-moi votre foi : recevez la mienne : je ne vous répudierai jamais, Eglise sainte, ni vous, âme que j'ai choisie de toute éternité : jamais je ne vous répudierai : « Je vous ai trouvée, » dit le Seigneur, « dans votre impureté, je vous ai lavée, je vous ai parée, je vous ai ornée, j'ai étendu mon manteau, ma couverture sur vous, et vous êtes devenue mienne : » et facta es mihi (2). Epouse, prenez garde à sa sainte et inexorable jalousie : ne partagez point votre cœur : ne soyez point infidèle : autrement si vous rompez le sacré contrat que vous avez fait avec lui dans votre baptême, quelle sera contre vous sa juste fureur !

Voilà donc le caractère de Jésus : c'est un époux tendre, passionné, transporté, dont l'amour se montre par des effets inouïs. Et quel est le caractère de Jean ? Il est a l'ami de l'Epoux qui entend sa voix : » c'est ce qui ne lui était pas encore arrivé. Jusqu'ici il l'avait annoncé, ou sans le connaître, ou sans entendre sa parole : maintenant, qu'après s'être fait baptiser par saint Jean, il a commencé sa prédication, saint Jean ravi de l'entendre, et qu'ainsi qu'il l'avait toujours désiré, le bruit de sa parole retentisse jusqu'à lui, il ne sait comment expliquer sa «joie. »

Telle doit être la joie du chrétien à la voix de Jésus-Christ, à cette voix qui retentit encore dans son évangile ; à cette voix secrète et intérieure qui se fait entendre au fond du cœur, et qui se répand dans toutes les puissances de l’âme.

 

1 Osée, II, 19, 20. — 2 Ezech., XVI, 8, 9.

 

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IXe ÉLÉVATION.
Suite du témoignage de saint Jean : sa diminution et l'exaltation de Jésus-Christ.

 

Ecoutons. Saint Jean continue : « Il faut qu'il croisse, et moi que je diminue (1). » Nous voulons bien peut-être que la gloire de Jésus-Christ s'augmente ; mais que ce soit à notre préjudice et avec la diminution de la nôtre, le voulons-nous de bonne foi? cependant c'est ce qu'il faut faire avec saint Jean, et il nous en donne les véritables raisons : c'est que Jésus-Christ « vient d'en haut : » c'est qu'il est par conséquent « au-dessus de tout : » c'est que « l'homme n'est que terre et de lui-même ne parle que terre : » c'est que « Jésus-Christ est venu du ciel (2) : » et ainsi que notre gloire, si nous en avons, se doit aller perdre dans la sienne.

C'est ce que ne font point les maîtres de l'erreur, qui veulent se faire un nom et une secte parmi les hommes : c'est ce que ne font point les prédicateurs, lorsque voyant que Dieu en suscite d'autres avec plus de grâce et de succès, au lieu de se réjouir à la voix de l'Epoux qui se fait entendre par qui il lui plait, entrent dans de basses jalousies. Mais saint Paul disait : « Que m'importe, pourvu que Jésus-Christ soit annoncé, soit par occasion et soit en vérité (3)? » Pourvu donc qu'il entendit la voix de l'Epoux, de quelque bouche que ce fut, il était content. Décroissez donc sans peine : voyez croître sans jalousie celui que vous voyez s'élever peut-être sur vos ruines : trop heureux d'avoir à vous perdre dans une lumière que l'Epoux allume. Et vous, grands de la terre, qui voulez accroître votre nom, l'étendre à la postérité, faire tant de bruit dans le monde qu'il offusque le nom des autres, et même qu'on parle de vous plus que de Dieu, dites plutôt avec le prophète et avec saint Jean : « Qu'est-ce que l'homme, » sinon « de la terre ? » ou « qu'est-ce que le fils de l'homme, » si ce n'est « du fumier et de la boue (4)? » Et il veut avoir de la gloire! Terre et poussière, pourquoi

 

1 Joan., III, 30. — 2 Ibid., 31. — 3 Philip., I, 18. — 4 Psal. VIII, 5; CII, 14, 15; Joan., III, 31.

 

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quoi vous glorifiez-vous ? Mais de quoi vous glorifiez-vous ? Que toute gloire humaine se taise, et « que la gloire soit donnée à Dieu seul (1). »

Parce que Jean a aimé cette gloire, et qu'il a sacrifié la sienne à Dieu et à Jésus-Christ, quelle gloire égale la sienne? Le Fils de Dieu lui rend ce qu'il veut perdre; et au lieu du témoignage des hommes qu'il a méprisé, il lui rend ce témoignage « qu'il est le plus grand de tous les enfants des femmes (2), » parce qu'il a plus que tous les autres mortels sacrifié sa gloire au Fils unique de Dieu.

Pour nous donner part à cette gloire, Dieu mêle aux actions les plus éclatantes mille publiques contradictions ; et ce qui est encore plus humiliant, mille secrètes faiblesses que chacun ne sent que trop en soi-même, afin que laissant échapper la gloire humaine, nous n'ayons de joie ni de soutien qu'à voir croître celle de Dieu.

 

Xe ÉLÉVATION.
Autre caractère de Jésus-Christ découvert par saint Jean.

 

« Il témoigne ce qu'il a vu et ce qu'il a ouï ; et personne ne reçoit son témoignages. » Autre caractère de Jésus-Christ : plus son témoignage est authentique et original, moins on le reçoit : la trop grande lumière éblouit les faibles yeux : et ils sont faibles, parce qu'ils sont superbes : les yeux humbles, les yeux abaissés sont éclairés; et si Jésus n'est écoulé de personne, c'est que personne aussi ne veut être humble.

Personne donc ne reçoit son témoignage : tout le monde par soi-même le rejette : et il y a tout un monde qui ne veut pas le recevoir : mais à travers cette opposition du monde opposé au témoignage de Jésus-Christ, ce témoignage se fait jour, et pénètre les humbles cœurs que Jésus prépare lui-même à l'écouter.

Un prédicateur zélé, comme saint Jean-Baptiste, verra le témoignage de Jésus-Christ méprisé et sa parole rejetée. Qu'il gémisse avec saint Jean et qu'il dise : « Il témoigne ce qu'il a vu et ce qu'il

 

1 I Timoth., I, 17. — 2 Matth., XI, 11. — 3 Joan., III, 32.

 

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a ouï : » il a vu tout ce qu'il annonce dans le sein du Père, où il est vie et lumière ; s'il déclare aux hommes les règles de la justice et les implacables jugements de Dieu, il les a ouïs dans le sein du Père où ils sont conçus et formés : « et personne ne reçoit son témoignage. »

Je ne vois point de fruit de sa parole que j'annonce ; quoiqu'elle ne soit autre chose que le témoignage de Jésus-Christ répété puises ministres : personne ne nous écoute et nous ne voyons aucun fruit de notre Evangile.

Pleurons donc sur le malheur et l'aveuglement des hommes : pleurons sur le témoignage si certain de Jésus-Christ, mais que personne ne veut. Mais consolons-nous en même temps : car Dieu sait à qui il veut faire recevoir en particulier ce témoignage, qui paraît si rejeté et si méprisé par le public. Et pour preuve que ce témoignage que personne ne reçoit, est néanmoins reçu de quelques-uns à qui Dieu prépare le cœur, saint Jean ajoute : « Celui qui reçoit son témoignage atteste que Dieu est véritable, car celui que Dieu a envoyé ne dit que des paroles de Dieu, parce que Dieu ne lui donne pas son esprit avec mesure (1). » Il est vrai en tout, et son témoignage ne se doit pas diviser : s'il est vrai, en annonçant les miséricordes, les condescendances, les facilités, il est vrai en annonçant les rigueurs. « Personne ne reçoit son témoignage : » les Athéniens en général méprisent en la bouche de saint Paul le témoignage de Jésus-Christ : mais Dieu parle en secret à Denis aréopagite et à une femme nommée Damaris (2). En une autre occasion, « il ouvre le cœur de Lydie, une teinturière en pourpre, pour écouter ce que disait saint Paul (3). » Dieu sait le nom de ceux à qui il veut se faire sentir. Ne vous découragez point, ô prédicateur ! une seule âme, que dis-je, une seule bonne pensée dans une seule âme vous récompense de tous vos travaux.

Et vous, peuples, écoutez vos pasteurs, vos prédicateurs : attestez en les croyant que Dieu est véritable en tout, et qu'il ne donne point son esprit avec mesure à Jésus-Christ dans son Eglise puisque tout vice y est repris et que toute vérité y est enseignée.

 

1 Joan., III, 33, 31. — 2 Act., XVII, 18 et seq. — 3 Ibid., XVI, 14.

 

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XIe ÉLÉVATION.
Saint Jean explique l'amour de Dieu pour son Fils.

 

« Le Père aime son Fils, et lui met tout entre les mains (1). » Heureux ceux que Dieu met entre les mains de son Fils, qu'il aime si parfaitement ! Ceux qu'il met entre ses mains, ce sont ses fidèles, ses élus.

Qu'il les aime, puisqu'il les donne à son Fils ! O amour du Père et du Fils, vous êtes ineffable, incompréhensible, et je me perds dans cet abîme. Je le comtois un peu par ses effets, que Dieu aime son Fils, qui est un autre lui-même, une autre personne, afin que son amour trouve où s'épancher, qui est le plaisir de l'amour; mais un en substance, de peur que l'amour ne s'écarte trop de sa source, et ne perde la perfection et l'agrément de l'unité. « Tout m'est donné par mon Père, et nul ne connaît le Fils si ce n'est le Père, et nul ne connaît le Père si ce n'est le Fils, et celui à qui le Fils l'aura révélé (2). »

O  Jésus, faites-le-moi connaître. Mais je ne sais quoi me dit dans le cœur que vous avez commencé de me faire cette grâce : je commence à sentir par une douce confiance que je lui suis donné de votre main. Heureux de lui être donné d'une main si chère! Le Père nous aime encore davantage, en nous trouvant dans les mains de son Fils et unis à lui. Aimons le Père qui nous donne au Fils : aimons le Fils qui nous reçoit de la main de son Père. « Si vous m'aimez, gardez mes commandements (3). » Gardons-les donc par amour, et gardons avant toutes choses le commandement de l'amour, qui fait garder tous les autres.

 

XIIe ÉLÉVATION.
La récompense et  la peine  de ceux qui ne croient point   au Fils. Conformité du témoignage de saint Jean avec celui de Jésus-Christ.

 

« Qui croit au Fils a la vie éternelle (4). » Le Fils est lui-même la

 

1  Joan., III, 33. — 2 Luc., X, 22. — 3 Joan., XIV, 15. — 4 Ibid., III, 36.

 

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vie éternelle : la foi est une nouvelle vertu qui renferme toutes les autres. Dieu donne un aimable objet à cette foi : c'est Jésus-Christ. En lui on aime toute vérité et toute vertu, comme dans la source et dans le modèle. « Qui ne croit point au Fils, n'a » ni grâce, ni vérité, ni vertu : il ne voit « point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui. » Elle y était déjà et l'homme « naît enfant de colère (1) : » elle n'y tombe donc pas, elle y demeure, et Jésus-Christ l'en pouvait ôter. Affreuse parole : « la colère de Dieu demeure sur lui. » Qui en pourrait porter le poids? Elle y demeure ; elle en fait son trône ; elle y règne ; et l'empire qu'elle y exerce est aussi terrible que juste. Car sans jamais lâcher prise, elle accable un malheureux criminel.

 

Ce témoignage est semblable à celui de Jésus-Christ : « Qui croit au Fils n'est point jugé : » car il a un moyen certain d'être justifié : « qui ne croit point au Fils est déjà jugé (2). » Ce n'est pas par un nouveau jugement qu'il est jugé : le jugement qui était déjà se confirme et se déclare, et on périt dans son péché.

Nous avons ouï la prédication de saint Jean-Baptiste : un autre Jean, qui est l'apôtre et l'évangéliste, nous l'a racontée. Saint Jean-Baptiste sera bientôt arrêté : il le fut par Hérode, dont il reprenait l'inceste, un peu après le baptême et le jeune de Jésus-Christ. Saint Matthieu marque expressément en ce temps l'avis que reçut Jésus-Christ de la prison de son précurseur (3). Saint Luc parle aussi de cette prison aux environs du baptême de Notre-Seigneur (4). Il est marqué dans l'évangile de saint Jean, « qu'au commencement du ministère» de Jésus-Christ, le saint précurseur «n'avait point encore été arrêté (5) : » pour insinuer, qu'il le fut bientôt après : il va donc devenir précurseur d'une nouvelle manière , c'est-à-dire par sa prison et par sa mort, qui devance celle de Jésus et nous y prépare. Ainsi nous n'entendrons plus parler saint Jean-Baptiste : il annoncera le Sauveur d'une autre sorte.

 

1 Ephes., II, 3. — 5 Joan., III, 18. — 3 Matth., XIV, 12. — 4 Luc., III, 19. — 6 Joan., III, 24.

 

 

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